R...,
V. de. : Bulletin des modes et
de l'industrie.-
La Mode, revue politique et littéraire, 20eme
année, 15
janvier 1849.
Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (04.I.2005) Texte relu par : A. Guézou Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex -Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01 Mél : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] obogros@ville-lisieux.fr http://www.bmlisieux.com/ Diffusion libre et gratuite (freeware) Orthographe et graphie conservées. Texte établi sur l'exemplaire de la Médiathèque André Malraux (BmLx : nc). Bulletin
des modes et de l'industrie
15
janvier 1849
V.
de R....
~*~Nous voici réellement
dans la saison des plaisirs. Les
salons s’illuminent de mille bougies éclatantes ;
les réceptions commencent, et Paris reprend peu à
peu de cette animation qui le rendait naguère la ville la
plus attrayante et la plus recherchée. Les Italiens vont
également rouvrir leurs portes. Pauvres Italiens ! nous
désirons sincèrement du fond de notre
âme que la présidence leur porte bonheur !
Verront-ils revenir à eux ces belles et gracieuses jeunes
filles, aux blanches épaules, aux boucles soyeuses, au
sourire doux et charmant ?... Il faut oser
l’espérer, car les grandes dames ont
abandonné leurs châteaux, et elles viendront bien
certainement applaudir le talent grandiose de madame Alboni.
D’ailleurs, la mode prépare pour cette solennité de véritables merveilles, et dans sa fantaisie capricieuse et inconstante, elle fera éclore des nouveautés adorables. Mesdames Euphrosine et Hautcoeur, 10, rue Neuve-Saint-Augustin, ont donné essor à leur imagination jeune et artistique, et les plus jolies coiffures qu’on remarquera aux Italiens auront bien certainement été choisies dans leurs salons. Nous savons que la duchesse de Guiche portera une couronne Chambord en velours vert, avec un beau lys blanc épanoui du côté gauche, tandis que de l’autre côté deux plumes d’autruche blanches, tordues en spirale, effleureront doucement les contours de son cou charmant ; que la belle comtesse de R…. aura un petit bord en dentelle, avec des touffes de roses royales ; que la marquise de L…. sera mille fois plus jolie, avec une coiffure de blonde d’or et de velours ponceau, retombant d’un côté en une pluie d’or et de marabouts, et qu’enfin les couronnes de plumes d’oiseau et de velours des célèbres modistes seront portées par plus d’une noble dame qui aime à ne pas paraître coiffée comme tout le monde. Quant aux toilettes, il y a une grande nouveauté. Ce sont les robes de tulle ou de crêpe, brodées avec des pois ou des fleurs en velours de toutes nuances. Sans la variété, la mode deviendrait une forme ; mais nous trouvons plus de distinction et plus de poésie dans des parures complètement blanches, roses, bleues ou vertes. Cependant, une femme riche, et surtout jeune et jolie, peut se permettre de porter ces actualités de la mode, qui ne brillent qu’un instant et qui s’éteignent comme des météores. Il y a donc une certaine originalité dans une robe de taffetas rose, recouverte de deux jupes de tulle rose étagées, brodées avec des pois de velours noir, et festonnées avec du velours noir ; de même que dans une robe de satin blanc, recouverte de deux jupes de tulle blanc, brodées et festonnées avec du velours vert. Cette disposition nous paraîtrait beaucoup plus luxueuse en broderie d’or et d’argent, et nous ramènerait aux fêtes royales de Madame la duchesse de Berry, où les étoffes de brocart, et les tissus vaporeux, brodés d’or et d’argent filé, proclamaient la cour de France, comme la plus magnifique et la plus éblouissante. Aujourd’hui, quelques modes de l’empire reparaissent à l’horizon. La flatterie salue toujours les aurores naissantes, sans s’inquiéter si elles ne seront que des aurores boréales. On veut raviver les coiffures à l’impératrice… et pourtant le style grec, pour disposer les cheveux, est infiniment plus gracieux et plus avantageux à la figure… Quelques femmes parlent de porter des robes à la Marie-Louise… mais aucune couturière en renom ne voudra, bien certainement, abandonner les robes à la Louis XV, pour ces affreux sarraux, où les grâces d’une jeune femme, étaient complètement enfouies… La seule mode impériale qui nous semble jolie, c’est le corail, car il donne à la peau, un lustre et un éclat enchanteurs. Aussi, Palmyre dispose-t-elle, pour aller sur les coraux, des robes de crêpe blanc, entièrement brodées de petits grains de corail. Ce qui manquait à l’empire, c’étaient les cachemires de l’Inde de Fichel, 2, boulevard Montmartre, car les cachemires indiens coûtaient autrefois des prix fabuleux. Aujourd’hui, grâce à l’intelligence de Fichel, les châles de l’Inde sont à portée de toutes les bourses et de toutes les classes de la société, et, depuis la grande dame jusqu’à la jolie bourgeoise, on voit les produits de la vallée de Cachemire se draper en plis onduleux sur nos boulevards et dans nos promenades. Les nuances les plus à la mode sont le vert Chambord, d’un vert aussi tendre que le premier bourgeon qui s’entr’ouvre ; le rouge d’Asie, le jaune turc, et le bleu de Syrie. Quant à la lingerie, jamais, à aucune époque, elle n’a eu ce charme et cette grâce qu’elle possède actuellement ; jamais les petits bonnets n’ont été si coquets de forme, ni si délicieusement ornés ; jamais les chemises n’ont eu une coupe si élégante ; les jupons, des broderies plus aériennes : c’est qu’alors n’existait pas la Couronne de France, 43, rue du Bac, et que madame Daniel Deray n’apportait pas à la mode son talent et son bon goût. Si le genre était encore de recevoir au lit, comme sous le règne de Louis XV, nos jeunes marquises et nos jeunes duchesses apparaîtraient dans de frais surtouts de nuit en batiste brodée, doublée de florence rose… Quant au lit, les draps, en fine toile, prouveraient que madame Daniel Deray a une spécialité absolue pour le linge de ménage ; de même qu’en apercevant le saut du lit, en nansouth, doublé de florence verte, on reconnaîtrait qu’en articles de nouveautés et de fantaisie, la Couronne de France est une couronne vraiment royale. Presque tout le faubourg Saint-Germain est de retour à Paris…. C’est une bonne nouvelle à apprendre, car le noble faubourg a de tout temps apprécié les arts et l’industrie. Aussi voit-on de beaux et brillans équipages parcourir tous les magasins dont nous mentionnons les chefs-d’oeuvre dans nos bulletins de modes. Chez Delabrière-Vincent, 45, rue du Bac, les grandes dames vont chercher la crème de lys, préservateur infaillible contre les rides et le hâle ; le savon de crème de lys, pour blanchir et adoucir les mains ; l’eau d’or, pour parfumer et nettoyer les cheveux, et le bouquet de Marie, et l’extrait de lys, pour embaumer leurs mouchoirs. Puis elles demandent encore au célèbre parfumeur une poudre fine et savamment préparée, qui donne au regard un charme qu’on ne peut définir, et qui a une très grande faveur en Turquie. Cette poudre se place délicatement sous la paupière, et les Parisiennes arrivent à avoir des yeux d’Andalouses et de Madrilènes. Avant de quitter la rue du Bac, elles entrent au 34 bis, car la Syrène les attire par l’attrait de ses coquettes petites chaussures. Là sont des cendrillons destinées au coin du feu ; mais sans doute que la bonne petite fée de Perrault les a frappées de sa baguette magique, car ces cendrillons sont en velours doublé de satin, et ruchées de dentelles et de rubans. Plus loin sont des nonchalantes, espèces de petites mules pour sortir du lit ; puis des souliers de satin blanc à bouffettes fontanges ; puis des souliers vernis, des souliers de satin noir… Puis des bottines à petits talons cambrés… Enfin, à la Syrène, on n’a que l’embarras de choisir, car le regard glisse de merveille en merveille. Comme nous l’avons déjà dit, les étrennes ont commencé tard. La grave question politique de la présidence, tous les bruits alarmans qu’on répandait, jetaient partout une espèce de terreur… Mais si Alphonse Giroux, 7, rue du Coq-Saint-Honoré, n’a pas vu le monde élégant visiter ses immenses galeries d’aussi bonne heure que les autres années, il aura tout un long mois d’abondantes récoltes. Louis Bonaparte a rendu une justice éclatante aux merveilles de la rue du Coq, en allant y faire un choix infini et varié d’articles d’art et de goût. Le nouveau président aura dû réfléchir profondément sur la destinée humaine, en voyant bon nombre de sommités républicaines transformées en gloires de carton. Pauvre M. Proudhon ! avoir rêvé la destruction de la famille, et de la propriété pour une semblable apothéose !... Chez Giroux, toutes ces célébrités évanouies sont classées avec les grotesques et les arlequinades… Elles sont destinées à faire rire les enfants et à leur apprendre l’histoire des socialistes. Quant aux grandes dames, elles s’arrêtent émerveillées devant des coffrets d’émaux et d’émail ; devant des jardinières en porcelaine de Chine, montées sur or pur et ciselé, ayant la forme de beaux lys entr’ouvrant leur calice. Puis, ce sont des orgues qui jouent d’elles-mêmes ; des tableaux qui se peuplent et s’animent, comme un véritable diorama ; des poupées si bien élevées qu’elles pourraient aller aux fêtes de l’Elysée-Bourbon, et une quantité de jouets dont les mécanismes sont si habilement combinés, que tout se meut dans un ensemble parfait, et avec une précision remarquable. Audot, le célèbre orfèvre de la rue de Richelieu, 91, voit également le monde élégant affluer dans ses magasins. C’est qu’Audot est le Benvenuto de notre siècle. Sa réputation artistique s’est étendue jusqu’en Russie, et l’empereur, qui aime ce qui est beau et grandiose, commande à l’orfèvre de l’aristocratie parisienne tous ses plus beaux services d’argenterie. Les jolies femmes raffolent des petites glaces à cadre d’argent, qu’elles placent sur la table en bois de rose de leur boudoir, à côté de leur cave à odeurs en argent niellé, ciselé, et fleurdelisé de beaux lys. Cette prédilection du faubourg Saint-Germain pour le lys, ou plutôt ce religieux souvenir que lui portent toutes les âmes nobles et loyales, a donné l’heureuse inspiration à Gouache, confiseur, 13, cité Vindé, boulevard de la Madeleine, de monter de beaux paniers de lys, si frais et si purs, qu’on dirait qu’ils viennent d’être cueillis dans les jardins de Versailles. Ces lys dérobent au regard des fruits confits excellens et des marrons glacés, parfumés à la vanille. Quant aux pralines Chambord, véritables pralines à la rose, ce sont les bonbons favoris de toutes les jolies femmes, de même que les pastilles Dieudonné, qui ont la saveur des fruits naturels. Gouache peut être convaincu que, pour lui, les étrennes dureront toute l’année, et que l’aristocratie ne donnera pas une fête ni une réunion sans lui demander ses sirops et ses bonbons. Couderc, 16, boulevard Montmartre, prépare aussi des services de porcelaine, qui sont de véritables chefs-d’oeuvre, et qui peuvent rivaliser avec la manufacture de Sèvres. Ce qui fait surtout la gloire de Couderc, c’est le procédé qu’il a pour peindre les fleurs, et leur donner la fraîcheur et l’éclat de la vérité. La semaine dernière, Couderc a expédié à Nantes un service complet pour le marquis de T…. Les assiettes de dessert étaient encadrées d’une guipure d’or, et dans le centre de l’assiette, brillait un bouquet de fleurs si agréablement reproduites, qu’on eût dit qu’elles se détachaient en bas relief. A côté de ces porcelaines si luxueuses, de ces cristaux si transparents, de ces vases-candélabres d’une magnificence royale, se trouve la porcelaine blanche et unie, de même que le liseron des champs s’enlace et grimpe à l’entour de la rose mousseuse. Dans leurs visites aux premières maisons industrielles, les grandes dames n’ont pas oublié Sangnier, 8, rue de l’Échelle, car c’est le seul miroitier de luxe qui ait un goût aussi parfait. Elles ont été choisir pour leurs boudoirs la glace Marie-Antoinette, à forme ovale, et à cadre de beaux lys d’or, formant une ravissante guirlande. Rien de plus coquet, ni de plus gracieux, ne s’est encore fait en ce genre ; aussi le succès qu’obtient Sangnier pour ce genre de glaces est un succès consciencieux et mérité. Il en est de même pour Gavet, 138, rue Saint-Honoré*, qui a porté la coutellerie à un degré de perfection si remarquable, qu’aujourd’hui les couteaux qu’on sert dans les grandes maisons sont de vrais bijoux d’élégance. Gavet vient de faire pour le prince de L... plusieurs douzaines de couteaux à dessert, à lame d’or, avec manches d’or, incrustés d’émeraude… La disposition des émeraudes formait une petite fleur de lys. Les socialistes seraient capables à la fin d’un dessert, si on leur servait jamais de semblables couteaux, de les mettre dans leurs poches, et de les confisquer pour délit de propriété. Jamais le luxe des appartements n’a été aussi recherché, qu’il l’est aujourd’hui. Une harmonie gracieuse règne dans les tentures, les portières, les tapis et le tissu des meubles. Les papiers eux-mêmes arrivent à simuler le damas, le velours, et la moire antique, et jouent l’étoffe à s’y méprendre. Cette amélioration importante est due à MM. *Massias et Delarbre, boulevard Montmartre, et ces intelligents manufacturiers ont poussé si loin le talent de perfection, que nous avons vu dernièrement le boudoir de madame de P…, dont le meuble était en pékin Watteau, à fleurettes courant en guirlandes, avec un papier imitant si bien le pékin, et ayant des fleurettes si fraîches, que nous ne pouvions croire que ce n’était pas un tissu de soie. La perfection de l’industrie tient presque du miracle. On se demande en voyant les bahuts de Ribaillier, 71, boulevard Beaumarchais, comment avec du vieux chênes, il a pu animer ainsi tous ses sujets. Ce n’est plus du bois, c’est de la sculpture ; ce n’est plus de la sculpture, c’est de la peinture… Tout parle, tout vit, sous le ciseau créateur de Ribaillier. Les fleurs s’épanouissent et s’entr’ouvrent ; les branchages semblent balancer leurs feuilles flexibles, et les arabesques sont si élégantes et si habilement contournées, qu’on dirait une guipure aérienne. Luet, 8, passage des Petites-Ecuries, a le même talent pour les meubles de salon, et pour ses fauteuils à renvers mobiles… Il soumet le palissandre et l’ébène à son génie créateur, et ses formes, ses dessins et ses modèles sont d’un goût si pur et si noble, que le comte de J… lui a commandé un ameublement complet de salon, avec écusson pour contenir les chiffres, et la couronne de comte au-dessus de l’écusson. Il a choisi également un fauteuil Luet à renvers mobiles, car ce meuble est devenu complètement indispensable, dans une chambre à coucher. Chez madame la duchesse de G…, il y a eu, à l’occasion de la fête des Rois, une soirée d’enfants. C’était d’un délicieux coup d’oeil que toutes ces petites filles, et ces charmants petits garçons, copiant en miniature leurs papas et leurs mamans. Les petites filles faisaient les coquettes et choisissaient d’avance leurs cavaliers…. Elles étaient si mignonnes et si ravissantes, qu’elles pouvaient tout se permettre, même une infidélité à leur cavalier. Madame H. Leclerc, 2, passage de l’Opéra, avait présidé à leur toilette ; c’était elle qui avait créé leurs petites robes de taffetas roses, faites à la Louis XV ; leurs robes blanches brodées en éventail, avec des revers également brodés ; leurs robes de cachemire vert Chambord, avec des garnitures de petits velours plus foncés, et tous ces élégants casawecks en velours de toutes nuances, qui dessinaient déjà une taille cambrée bien prise. Quant aux petits garçons, ils avaient été habillés à la Belle-Jardinière… c’est-à-dire qu’ils étaient bien séduisants, et qu’ils avaient des vestes à la Raphaël, et des coachmen d’une coupe tout à fait élégante. Le comte de J..., qu’accompagnait son fils, charmant espiègle de cinq ans, avait un habit Becker, bleu Chambord, qui attestait le talent du célèbre tailleur. Cet habit qui prend le nom de Becker, parce qu’il a le type du grand seigneur, sera porté cet hiver dans toutes les réunions les plus aristocratiques, Il ne ressemble en rien aux habits ordinaires, et Becker jeune, 4, rue Neuve-Saint-Augustin, est sûr avec cet habit modèle, d’agrandir encore sa réputation, qui est déjà immense. Cet habit aura besoin d’un gilet Blanc. A ce sujet nous raconterons une petite anecdote. Un jeune provincial, arrivant du Limousin, demande au comte de J…, son ami, quels étaient les gilets les plus à la mode. - Un gilet Blanc répondit celui-ci. - Mais pour aller à la chasse, pour faire des courses matinales ?... - Un gilet Blanc, répétait toujours le comte… Le pauvre provincial acheta au moins une douzaine de gilets blancs, et comme c’était dans la dernière quinzaine de décembre, il se présenta chez son ami en gilet blanc, soit pour monter à cheval, soit pour aller à la chasse à courre de Saint-Germain. Le comte de J… s’apercevant de l’erreur du jeune Limousin, le conduit enfin chez Blanc, galerie de Valois, palais Royal*, et le provincial a compris la différence qu’il y avait entre un gilet blanc et un gilet de notre plus célèbre faiseur. Les ménomètres de Théophile Sibon, 46, passage Choiseul, obtiennent chaque jour un succès plus immense. Il est vrai que ces montres ne sont pas des montres ordinaires, et que la spécialité que le célèbre horloger s’est acquise, dans ce nouveau genre, prouve en faveur de sa science et de son talent. Mais, qu’est-ce qu’un ménomètre ? nous demandera-t-on. Pour bien le faire comprendre, nous raconterons une histoire vraie, qui est arrivée à propos des ménomètres de Th. Sibon. De bien jolis yeux ont pleuré et pleurent peut-être encore… Une charmante jeune veuve avait écouté les doux propos d’un galant chevalier, et, comme leurs deux coeurs s’entendaient à merveille, ils devaient se marier après les fêtes de Noël. Un soir, le chevalier de B*** arrive chez la belle dame, et lui offre une montre de Th. Sibon, en lui annonçant un voyage imprévu sur lequel il ne comptait pas. - Mais, quand reviendrez-vous, demanda la jeune femme, ne pouvant maîtriser son émotion ? - Avant que vous n’ayez eu besoin de remonter votre montre, répondit le chevalier en lui baisant la main. La veuve se rassura, et lui donna le plus gracieux sourire… Le chevalier partit ; deux jours s’écoulèrent, la montre marchait toujours… Au bout de quinze jours, la montre n’était pas encore arrêtée, et le chevalier n’était pas revenu… Au bout d’un mois, elle remonta son manomètre… Le chevalier de B*** revint tout triomphant du mauvais tour qu’il avait joué à la jolie veuve, qui n’a pas encore voulu lui accorder son pardon ; car si une femme oublie facilement les heures de bonheur et de joie, elle se souvient toujours des pleurs qu’elle a versés. Ainsi que nous l’avons annoncé dans notre dernier numéro, nous donnons à nos lecteurs le détail d’une élégante corbeille de mariage partie la semaine dernière des ateliers de la MAISON LASSALLE ET COMPAGNIE. Un cachemire des Indes fond noir très couvert, à teintes excessivement fondues ; un second châle français à quatre couleurs ; et un crêpe de Chine de l’Inde blanc brodé. Une très élégante broche en diamant, accompagnée des boutons d’oreilles ; une seconde broche camée dur entourée de perles fines ; un bracelet en or avec brillans et pierres fines, puis un second bracelet plus simple en or ciselé. Une garniture complète en application d’Angleterre ; une autre en dentelle noire ; deux mouchoirs brodés aux armes des jeunes fiancés ; une voilette en application d’Angleterre ; une en dentelle noire. La robe de mariage pour le matin était en velours épinglé blanc, faite en redingote et fermée par devant par des boutons grelots en perles blanches ; celle du soir, en très beau satin uni, était garnie de volants de dentelle. La robe de lendemain en très riche damas antique bleu et ciel avec fleurs blanches, était ornée de blonde antique ; celle de visite en satin bleu Louise avait des volants de dentelle noire. Il y avait de plus une robe de velours noir à double corsage, une robe de taffetas d’Italie glacée, ornée de volans découpés ; une redingote d’Écosse écru garnie de noeuds de passementerie. Nous citerons encore le paroissien en chagrin noir avec entourage, coins et fermoir en vermeil formé par les initiales et la couronne en vermeil, un petit nécessaire de travail avec pièces en or, renfermées dans une boîte en ivoire incrustée à pans coupés, sur laquelle les armes en or étaient découpées et incrustées. Nous parlerons aussi d’une délicieuse table de corbeille en bois de rose accompagnée de sa boîte à gants. Tout ces objets étaient choisis avec un goût et une distinction dont la MAISON LASSALLE possède seule le cachet, et qui lui ont valu l’immense réputation dont elle jouit à si juste titre. On sait que tout ce qui concerne les toilettes de bals et de soirées, commandé à la MAISON LASSALLE, est exécuté en vingt-quatre heures, RUE LOUIS LE-GRAND, 35. V. de R.... |