J’
ÉCOUTAIS, l’autre jour, deux académiciens des plus
célèbres dire, en parlant des futures élections à l’Académie :
- Celui qui aura à prononcer l’éloge de Sandeau sera bien heureux ! Il
n’y a pas de portrait littéraire plus aimable à faire et plus touchant.
Et Victorien Sardou avait bien raison. Aimable, voilà le mot qui peint
le mieux Jules Sandeau. Il fut aimable, c’est-à-dire accueillant, d’un
commerce sûr, d’une amitié dévouée, d’une philosophie souriante et
résignée que, seule, la mort d’un fils put assombrir. Il fut aimable et
aimé, on l’a bien vu au lendemain de sa mort. Jamais cercueil ne
descendit dans une tombe accompagné de plus de regrets sincères et de
plus d’émotion vraie. Il n’y eut qu’une voix dans cette presse si
divisée pour louer ce romancier de grand talent qui fut un homme de
bien. Je dis une voix, car je ne compte pas les articles de jeunes gens
qui, n’ayant rien lu, trouvent plus commode de nier ce qu’ils ne
connaissent point et prétendent faire dater la littérature des essais
de leurs camarades de la veille et des élucubrations des
pseudo-naturalistes nouveaux.
Jules Sandeau est mort à l’âge de soixante-douze ans, après une vie
bien remplie, honorée et digne d’être offerte en exemple aux purs
hommes de lettres. Il les aima par-dessus tout, ces Lettres, qui
consoleraient de toutes les douleurs s’il y avait une consolation pour
certaines blessures. Il ne s’appelait pas Jules en réalité, mais Julien
: Léonard-Silvain-Julien Sandeau, dit son acte de naissance. Son père
était contrôleur ambulant de l’administration des droits réunis de
l’arrondissement d’Aubusson ; son parrain, Julien Parricaud, contrôleur
principal des droits réunis. On sait comment chez le jeune Limousin
naquit le goût des lettres. Il rencontra sur sa route une femme de
génie, qui était une séduisante femme, et ils unirent à la fois leurs
rêves d’amour et leurs songes de littérature et d’art. Plus tard, en
ses
Lettres d’un voyageur, George Sand aura une page éloquente, quasi
déchirante, pour regretter les années de cette collaboration sous les
toits, et dans
la Croix de Berny, Jules Sandeau, sous un pseudonyme,
parlera avec émotion de ces heures passées, là-haut, autour de la
petite lampe commune.
Sandeau, né le 11 février 1811 et mort le 23 avril 1883, avait fait ses
études à Bourges, puis était venu à Paris, à dix-sept ans. Une fois son
droit achevé, il débutait en 1831, à dix-neuf ans, dans le
Figaro,
que dirigeait l’auteur de
Fragoletta et de
la Vallée aux Loups, le
Berrichon Henri de Latouche. On retrouvera sur de Latouche, qui fut un
initiateur, un esprit ardent, un écrivain épris des néologismes, et qui
inventa plus d’un mot devenu courant :
principicule,
camaraderie, des
détails très vivants dans
l’Histoire de ma vie de George Sand, et
surtout dans sa Correspondance. Henri de Latouche protégea Sandeau et
devina Mme Sand.
En cette même année 1831, Jules Sandeau et George Sand publiaient un
roman écrit en collaboration et intitulé
Rose et Blanche.
« Est-ce que la vie vous a beaucoup amusé, monsieur ?
- C’est un méchant livre que je ne voudrais pas relire, répondit le
vieillard ; je vous souhaite le bonsoir. »
Ainsi finissait le roman de
Rose et Blanche, ou la Comédienne et la
Religieuse, par J. Sand, que publiait en 1831 l’éditeur B. Renault,
avec une vignette de Lorentz, - le vieux Lorentz qui vit toujours, -
représentant une nonne en ses voiles blancs, assise sur un banc de
pierre, causant avec une actrice en manches à gigot, sous la niche
d’une madone creusée dans une chapelle gothique. Toute une époque dans
quatre coups de crayon !
Ils avaient, les deux auteurs de
Rose et Blanche (car ils étaient
deux), l’un un peu moins de vingt ans, c’était Sandeau ; l’autre, un
peu plus de vingt-cinq ans, c’était George Sand, quand ils signaient
ensemble, du pseudonyme de
J. Sand, cette profession de foi
pessimiste : « La vie ? Un méchant livre que je ne voudrais pas relire.
»
On a de ces cris amers aux premières déceptions rencontrées, à la
première larme bue, puis on s’apaise, on se résigne, on prend la vie
pour ce qu’elle est, - une maladie dont on est bien certain de guérir
tôt ou tard, - et, quand on a le calme génie d’une George Sand, on
devient une aïeule admirable après avoir été une femme inquiète,
troublée, désolée parfois ; ou, quand on a l’âme et la bonté d’un
Sandeau, on fait de l’existence non pas un livre de révolte et de
souffrance, mais un traité de douceur vraie, de résignation souriante
et de dévouement aux justes causes.
Ce fut un honnête homme que ce poète du devoir. Toujours il eut
je ne sais quoi de juvénile et de bon, une tendresse et une candeur
d’âme sous une apparence de troupier souriant et moustachu.
George Sand ne lui prit point sa vie, comme à Rolla, mais elle lui prit
la première partie de son nom. Elle-même a conté l’histoire. « Un
premier ouvrage fut
ébauché par moi, refait
en entier ensuite par
Jules Sandeau, à qui de Latouche fit le nom de
Jules Sand. Cet
ouvrage amena un autre éditeur, qui amena un autre roman sous le même
pseudonyme. J’avais écrit
Indiana à Nohant, je voulais le donner sous
le pseudonyme demandé ; mais Jules Sandeau par modestie, ne voulut pas
accepter la paternité d’un livre auquel il était complètement étranger
». Cela ne faisait pas le compte de l’éditeur, ajoute G. Sand. Le «
premier ouvrage » s’était bien vendu ; le marchand tenait à en
écouler un autre. Henri de Latouche trancha la question.
Sand
resterait « indivis ». Mme Dudevant prendrait un autre prénom, George,
Sandeau signerait comme il voudrait : Jules, de son nom,
Jules Sand,
et Jules et George passeraient pour cousins ou pour frères.
Julien Sandeau voulut bien signer « Jules Sandeau », mais par modestie
(c’est ce que raconte George Sand) il ne consentit pas à se parer « des
plumes » de l’auteur d’
Indiana.
« A cette époque, dit l’auteur du
Marquis de Villermer dans
l’
Histoire de ma vie, Jules Sandeau était fort jeune et avait bonne
grâce à se montrer si modeste.
Depuis, il a fait preuve de beaucoup de
talent pour son compte, et il s’est fait un nom sous son véritable
nom. »
Quel livre étrange que ce livre en cinq petits volumes de
Rose et
Blanche !
C’est, dans le brouhaha violent d’un drame, les angoisses amoureuses
d’une religieuse et d’une comédienne, l’amour donnant la raison à une
malheureuse idiote, et de la raison la faisant monter, ou tomber, à la
folie ; un livre amer, désenchanté, byronien, un de ces livres de
désespérance comme on en conçoit à vingt ans, quand on a toutes les
appréhensions et comme les affres de la vie, et, - chose singulière, -
avec cela, un livre audacieux de réalisme, comme nous disions hier, ou
de naturalisme, pour parler comme ceux d’aujourd’hui, - un livre rêvé
et observé, pleine de blasphèmes à la Manfred et de gros jurons à la
Henri Monnier, un livre dont le début fait songer à quelque folie saine
et heureuse de Pigault-Lebrun et le dénouement annonce déjà
Lélia ; -
un livre où il y a de la belle humeur un peu militaire de Sandeau jeune
et beaucoup des colères de la baronne Dudevant révoltée.
Quand la première édition du roman fut publiée, les deux auteurs
partageaient ensemble, dans la même mansarde, la chère joie du premier
succès.
Lorsque parut la seconde édition de
Rose et Blanche, George Sand et
Sandeau s’étaient déjà séparés, et
Jules Sand, cet auteur d’un seul
livre, ce Séraphita-Séraphitus d’un seul rêve, n’existait plus. Jules
continuait sa vie dans une solitude où l’amertume se voilait d’un
sourire, et
Sand emportant, comme je le disais tout à l’heure, la
moitié du nom et peut-être la moitié du coeur du jeune homme,
entreprenait, un bâton à la main et le sac sur le dos, ce voyage en
Italie que Musset devait
illustrer de ses croquis à la plume et payer
de son éternel repos.
« Le but de ce
pèlerinage, disait alors à George Sand Henri de
Latouche, est le plus noble que se puisse proposer un
généreux
athlète. Briser sa chaîne est la plus belle fin des entreprises
humaines. Plus intéressant que le voyageur qui va demander aux Alpes
les trésors de leurs entrailles, des richesses aux cours ou des
indulgences à la religion de saint Pierre, le
but de cette course est
la liberté. »
Et Henri de Latouche bénissait presque le
pèlerinage de George Sand :
« Poursuis ta course, ami ; secoue de tes pieds jusqu’au dernier grain
de la poussière de France ; purifie-les dans la rosée des fleurs de
l’Abruzze ou dans le docte cristal de l’Arno ! »
George secoua si bien « la poussière de ses pieds » qu’elle en secoua
non seulement sur Sandeau qu’elle délaissait, mais sur Musset qu’elle
emportait à ses semelles.
Jules Sandeau, même marié, même vieilli, n’oublia jamais complètement
cette souffrance. Il n’avait pas revu George Sand depuis des années, de
ces longues années où chacun, la chaîne dénouée, se refait à part soi
une vie nouvelle, au hasard des destinées, lorsqu’un soir, dans les
bureaux de la
Revue des Deux Mondes, un petit homme chauve, à
tournure militaire et pensive, heurta en entrant une femme grasse, au
teint de tzigane, qu’il salua poliment :
- Pardon, madame !
- Pardon, monsieur !
Et quand Sandeau se fut assis :
- Quelle est donc cette dame ? demanda-t-il.
- Comment ! C’est vous qui demandez cela ?... C’est George Sand !
Le romancier tourna involontairement la tête vers cette porte par où
venait de sortir encore vivant son passé ! Ironie de la vie humaine et
vanité des passions qu’on croit éternelles ! Les auteurs de
Rose et
Blanche venaient de se retrouver face à face et ils ne s’étaient pas
même reconnus !
Mais il ne nous appartient pas et il ne nous plairait guère de nous
appesantir plus longtemps sur ce roman
vécu qui fut et restera un des
problèmes littéraires et psychologiques du XIXe siècle. L’avenir
cherchera la vérité dans les lettres de George Sand, de Musset, de
Sandeau, comme il a cherché le secret de Mlle de Lespinasse, de Mora,
de Guibert et de d’Alembert et celui de Rousseau et de Mme d’Houdetot
dans leurs confidences. Pour nous, nous ne voulons voir et ne voyons
dans George Sand que l’admirable femme que nous avons eu l’honneur de
connaître, la vénérable et bonne grand’mère, la simplicité, le
dévouement même, adorant son fils, dont le talent est profond, faisant
le bien, donnant à tous : - une grande âme et une âme de génie. Et dans
Musset nous n’apercevons plus que le poète déchirant des
Nuits, comme
en Sandeau nous ne voyons que l’auteur exquis de Mlle
de la Seiglière
et de
la Maison de Penarvan.
Un critique très pénétrant, d’un talent de premier ordre, M. Gustave
Frédéric, a tout justement écrit au lendemain de la mort de Sandeau,
dans l’
Indépendance belge, à propos de ce passé que nous laissons
enseveli en un respectueux silence :
« La correspondance de George Sand avec Sainte-Beuve n’a pas été
détruite, et elle appartient à M. de Spoelberch de Lovenjoul. Elle doit
être du plus haut intérêt et nous faire pénétrer au fond de ces
premières années orageuses de l’auteur de
Lélia. Nous ne savons si
Jules Sandeau apparaît dans ces lettres de George Sand. C’est douteux.
Ce qui reste de l’union de ces deux années, 1830 à 1832, ce sont deux
noms d’auteurs : George Sand et Jules Sandeau. On dirait que celui-ci,
après la séparation, qui a commencé de lui faire un nom, a caché sa vie
et n’a plus montré que ses livres. A peine sait-on que Jules Sandeau
était, en 1835, de l’intimité de Balzac, que le grand romancier le
dépêchait alors à Théophile Gautier, qui venait de faire paraître
Mademoiselle de Maupin. Il s’agissait, pour Balzac, de recruter
Théophile Gautier pour la
Chronique de Paris. Gautier a raconté
comment il vit entrer, un beau jour, en 1835, dans sa petite chambre de
l’impasse du Doyenné, Jules Sandeau. Le déjeuner chez Balzac qui suivit
cette visite est devenu, avec la fidélité de mise en scène, la
curiosité de reproduction de Théophile Gautier, tout un chapitre
d’histoire intime et de psychologie littéraire. »
Dans une autre étude donnée par un écrivain mort trop tôt, M. Eugène
Lataye, au journal l’
Artiste (21 février 1858), je trouve un jugement
excellent sur Sandeau, et ces pages oubliées du critique disparu, les
meilleures qu’on ait consacrées à Sandeau vivant, mériteraient de
revivre :
M. Lataye y prouve que ce Sandeau, traité hier par les néo-naturalistes
de vil
idéaliste, fut, à son heure, un ami de cette « âpre vérité »
dont Stendhal proclamait la grandeur souveraine. Oui, Sandeau, au
milieu de la mêlée romantique, fut dès ses premières oeuvres, un
réaliste attendri et profond, étudiant la vie et l’homme sur nature.
La plupart, dit Eugène Lataye, avaient méconnu cette loi générale qui
domine l’art et la littérature aussi bien que la société, et que M.
Jules Sandeau a formulée à peu près dans les paroles suivantes : « La
réalité seule est féconde ; il ne s’agit que de savoir la comprendre
et l’aimer. » Quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse, nous ne pouvons
sortir de la vie ordinaire. Si développé que soit notre libre arbitre,
quelle que soit la puissance de notre force actionnelle, nous ne
pouvons échapper à la destinée qui nous est imposée par notre
organisation, nous ne pouvons graviter hors du cercle commun à tous. Le
rayon de ce cercle varie, il est vrai, pour chaque individualité
humaine, mais il faut bien se pénétrer qu’il a une limite fixe et non
indéfinie.
Seulement, et encore un coup, cette
réalité, Jules Sandeau «
l’interprétait » selon son tempérament et son âme. Il était, en art, de
la religion de Platon. Ce qu’il aimait, c’est la
splendeur du vrai,
l’héroïsme dans la passion, le
sublimé de l’amour. Mais un
sublimé
et un héroïsme de tous les jours, si je puis dire : - en deux mots, la
simplicité dans la grandeur. « Il ne faut pas nier, dit encore le
critique de l’auteur de
Marianna, que M. Sandeau ait atteint le
premier but, qui est de
créer ; ensuite, les idées qu’il expose
appartiennent à l’ordre des idées vraies et éternelles, considérées
dans les limites auxquelles chacun peut atteindre. Elles nous ont
démontré, une fois de plus, que ce n’est ni dans l’exagération ni dans
une originalité étudiée que réside la grandeur, mais que la véritable
supériorité de l’esprit est là où se trouve la soumission raisonnée et
intelligente aux exigences de la vie commune. »
Dans
Madeleine, les quatre objets de la vie humaine, « aimer,
travailler, rêver, espérer », se trouvent comme proclamés et chantés
par un poète de la prose. Dans
Marianna, le devoir, l’humble devoir
sans déception, est opposé à la passion, aux
hennissements de la
passion, comme disait Bossuet, avec une séduction inoubliable. Cette
Marianna est vraiment un
document sur l’âme humaine à une date
donnée. Qui n’a redit avec les héros déçus par la vie de ce livre en
regardant, à l’horizon, un coin de terre qu’on ne verra plus : « Le
bonheur était là ?... » Le mot est resté. Il a soulagé bien des coeurs.
Jules Sandeau mêle ainsi, dans ses livres, le paysage à l’étude de
l’âme. Il encadre les douleurs humaines en des décors qui n’empiètent
pas sur la psychologie, qui la complètent ou par leur harmonie ou par
leur ironie même. Comme Mme Sand, c’est un paysagiste de l’école de
Rousseau. Il y a sur sa palette un peu du bleu de la pervenche des
Charmettes. Il y mêle comme un parfum et une mélodie.
André Theuriet a comparé le talent lumineux de Sandeau à ces belles
journées d’été de notre Limousin et du Poitou. Dans toutes les oeuvres
de ce maître-charmeur, depuis
Madame de Somerville jusqu’au
Colonel
Evrard, il y a, en effet, de la lumière, une harmonie, une séduction.
Rien de trop, et tout s’y rencontre.
Madeleine, Mademoiselle de la
Seiglière, Sacs et Parchemins, la Maison de Penarvan, Jean de
Thommeray, autant d’oeuvres solides où la virilité est saine, où
l’effort et la pose n’apparaissent jamais. Autant d’oeuvres vivantes que
le théâtre a consacrées. Tout personnage qui peut passer du livre sur
les planches et vivre de la vie de la scène a du sang dans les veines.
J’ai conté, à propos de M. Émile Augier, comment Jules Sandeau et lui
avaient été amenés à collaborer, à écrire la
Chasse au Roman pour le
théâtre des Variétés. Sandeau était critique dans la
Revue de Paris
et il avait là salué l’avènement du maître qui donnait alors la
Ciguë
(1).
Au théâtre tout comme dans le roman, Sandeau
charma. Quelle fut la
part exacte de M. Régnier dans
Mademoiselle de la Seiglière, de M.
Adrien Decourcelle dans
Marcel et du maître Augier dans le
Gendre de
M. Poirier, la
Pierre de touche et
Jean de Thommeray ? Je ne veux
pas le rechercher.
Applaudissons ces chefs-d’oeuvre et jouissons-en sans en chercher le
secret. Il n’y a qu’un secret, du reste, en eux, c’est l’art de nous
séduire et de rester jeunes, frais et purs après des années. Quant à
leur histoire même, nous n’en saurons jamais rien. Jules Sandeau n’est
plus là pour en reporter le mérite à celui qui survit et qui, s’il
parlait, ne parlerait que de Sandeau.
Sandeau, sympathique et doux, apportait à la scène cette bonté qui est
pour l’homme comme la beauté morale. Avec lui, le public était mieux
que dompté, il était charmé, et, au mâle accent de son collaborateur,
l’auteur de
Marianna ajoutait comme une grâce et une douceur
féminines. Sandeau n’a donné seul qu’une pièce de théâtre,
la Maison
de Penarvan. Le roman était admirable ; la pièce (et le fait contredit
un peu ce que je disais tout à l’heure) réussit peu.
A la scène pas plus que dans ses livres, Sandeau, d’ailleurs, ne
violenta le succès : il le trouva sans le chercher. Il semblait peu
fait, lui, l’homme du rêve, pour l’art spécial et pratique du théâtre,
qui vit surtout de réalité. Mais cette réalité même, dont on parle
tant, il l’a cherchée, poursuivie, aimée. Il fit mieux que l’aimer, il
la fit aimer.
En nous peignant les orages mêmes de la vie, il semble, en effet, qu’il
veuille nous les faire oublier. Chez lui, les pleurs s’effacent vite
dans un sourire et l’ironie se fond dans une larme. Il a l’esprit qui
touche, parce qu’il a - c’est un mot qui pourrait être de lui - le coeur
spirituel.
Son théâtre plaît, comme ses romans, comme plaisait sa personne même.
Ses fières jeunes filles, ses coeurs dévoués, fidèles aux souvenirs,
inaccessibles aux lâchetés, préférant l’amour à l’argent et l’honneur
aux honneurs, ces vertueux et ces vaillants gardent comme un reflet de
son âme.
« Il existe, disait-il, un privilège de nature qui m’a toujours semblé
tenir le premier rang au commerce des hommes, c’est le don de plaire.
J’en dirais volontiers ce que Montaigne disait de la beauté. Comme la
beauté, il séduit et entraîne notre jugement ; avec une autorité plus
douce et plus sûre que celle du génie, il s’insinue au fond des âmes et
n’en trouva pas de rebelles. Heureux qui l’apporte en naissant ! »
Ce don, Jules Sandeau l’eut toujours et le garda jusqu’à la fin.
Aimable et aimé, - je répète ces mots qui le peignent - il apportait en
toutes choses une séduction particulière. Nous lui devons une des joies
de notre vie : il fit, à l’Académie, un rapport sur un de nos livres,
le Drapeau, et M. Camille Doucet voulut bien emprunter le jugement de
Sandeau pour caractériser nos efforts. Nous ne l’oublierons jamais.
Sandeau avait ainsi du féminin en lui et du charmant. Le théâtre, au
surplus, c’est la femme. Dramaturges, dites-moi les femmes que vous
avez créées, et je vous dirai qui vous êtes. Eh bien ! comme de vivants
fantômes, il me semble que des visions souriantes se penchent au-dessus
du dernier sommeil de Jules Sandeau : c’est Mlle de la Seiglière, c’est
la fière Renée de Penarvan et, entre elles deux, cette petite
bourgeoise aussi fière qu’elles, Antoinette Poirier, qui compte ses
quartiers de noblesse au nombre des battements de son coeur. Et elles ne
sont pas seules ! Ces vaillantes ont des frères. Le plus attirant
peut-être, c’est ce dernier né du conteur si français qui l’aima, notre
France, dans sa langue, dans son histoire, dans son héroïsme, dans ses
souvenirs, et voulut faire entendre sur la scène, après le grand mot de
Devoir, le beau nom de Patrie.
Je me rappelle encore, au dénouement de
Jean de Thommeray, la
dernière pièce que Jules Sandeau ait signée avec M. Émile Augier, le
saisissement qui nous prit lorsque, sur la scène de la
Comédie-Française, nous vîmes apparaître, dans leurs poudreux uniformes
de campagne, les mobiles de Bretagne, biniou en tête, avec le vieux
comte de Thommeray pour les commander. Il y avait là un mot qui donnait
le frisson, un de ces frissons d’enthousiasme et de foi qu’on trouve
encore même dans la défaite, et l’âme des deux auteurs était si haute
que nos espoirs en deuil pouvaient sans honte contempler ces vareuses
en lambeaux. Le vieux M. de Thommeray faisait l’appel de ses hommes et
lorsqu’il avait fini, un nouveau venu, l’héritier des Thommeray, enfant
prodigue échappé à la maison bretonne et emporté par la vie de Paris,
s’avançait tête nue et réclamait sa place au bataillon et sa part de
danger.
« Qui êtes-vous ? disait le père.
- Un homme qui a mal vécu et qui a juré de bien mourir ! »
Le commandant remettait un fusil à ce soldat inattendu et lorsque le
jeune homme était rentré dans le rang :
« Jean de Thommeray ! » disait le père en continuant son appel.
Alors une voix mâle répondait : Présent !
Présent ! ce fut quand sonnait l’heure de tous les dévouements, la
devise aussi, l’éternelle devise de Jules Sandeau.
Présent
à toute
bonne action, présent aux périls de ses amis, aux batailles des
anciens, aux débuts des nouveaux ; présent, toujours présent lorsqu’il
s’agissait de rendre un service ou de soulager une infortune ; et,
lorsque dans la bibliothèque des délicats on cherchera une de ses
oeuvres et on appellera son nom dans l’avenir, la postérité aussi
répondra par le dernier mot de
Jean de Thommeray : Présent !
Mais, plus heureux que son héros, après avoir noblement vécu, Jules
Sandeau a pu doucement mourir, aimé, respecté et pleuré, et nous lui
pouvons rendre cette justice que, doublement applaudi, doublement
célèbre, après avoir écrit le roman des âmes hautes et des esprits
fiers, il collabora au théâtre des honnêtes femmes, des coeurs droits et
des braves gens.
Le 11 février 1858, M. Jules Sandeau avait été élu membre de l’Académie
française. La poésie et le roman sortaient à la fois, ce jour-là,
victorieux de la bataille. M. Victor de Laprade succédait à Alfred de
Musset, et M. Jules Sandeau à M. Briffaut. « L’élection de MM. de
Laprade et Sandeau, disait l’Artiste, donne raison à nos espérances
et réconcilie heureusement l’Académie avec la littérature. Un culte
sincère pour la poésie, un rare talent de forme, un sentiment élevé des
grandes choses de l’art, méritaient depuis longtemps à M. de Laprade
l’honneur qui lui échoit. M. Sandeau, qui n’est qu’un conteur, mais un
conteur de la meilleure école, n’était pas moins digne du fauteuil
académique. Observateur délicat des moeurs modernes, interprète charmant
des sentimentalités nouvelles, paysagiste quand il le veut être et
poète presque toujours, l’auteur du
Docteur Herbeau sera désormais
l’une des physionomies les plus sympathiques de l’Académie française.
Cette élection sera d’un bon exemple ; elle nous rassure pour l’avenir.
»
La vérité est que Jules Sandeau était de ceux qui honorent une
Compagnie comme l’Académie. On lui fit bien sentir que, pour la
première fois, l’Institut, au pays de Le Sage, de l’abbé Prévost, de
Stendhal, de Ch. de Bernard, de Balzac, de Dumas et de Soulié, ouvrait
ses portes à un romancier. Mais quel romancier ! Un de ceux qui, par le
roman, nous ont, tout en le peignant, allégés de la vie.
Lui, ce consolateur des âmes, ne se consola jamais du malheur qui avait
frappé la fin de son existence :
« Les dernières années de Jules Sandeau ont été sombres, a dit M.
Gustave Frédéric. Il avait perdu son fils unique, officier de marine
brillant ; il ne faisait plus de pièces, plus de romans, il semblait
désintéressé de la vie, désintéressé de son nom et de son talent.
« Je sais un dernier roman qu’il aurait pu écrire, un roman idéal et
réel, une vision dans la souffrance, une union dans la mort. C’est le
roman de son fils, mourant à Menton d’une maladie de poitrine, pendant
qu’une jeune fille distinguée, charmante, atteinte du même mal,
s’éteignait dans une maison voisine. Jamais ces malades ne s’étaient
parlé, mais ils se suivaient des yeux, de la pensée. Un peu des fleurs
et des fruits qu’on apportait chaque jour à la jeune fille était envoyé
à celui qu’elle ne connaissait que par leur commune tristesse, par
cette sympathie de deux existences qui se voient finir toutes deux, du
même coup, en même jeunesse. Et quand elle expira, lui, quelques heures
après, rendit l’âme.
« Que la mère de cette jeune fille me pardonne d’avoir touché à un si
douloureux et si pur souvenir. Mais il me semble que si Jules Sandeau
n’a plus écrit de roman, c’est qu’il ne pouvait plus écrire que
celui-là. Et celui-là, ce roman qui n’a été qu’un rêve, cette entente
poignante et à distance, cette adoration muette, il a craint sans doute
de l’altérer, en le fixant dans des phrases écrites. Il y aurait trop
mis de son coeur, pour y pouvoir mettre tout son art. »
Ce fils adoré de ses parents, M. Émile Augier devait le faire, en
quelque sorte, revivre dans le discours qu’il prononça, après les
éloquentes paroles de M. Rousse et de M. Émile Perrin, sur la tombe de
Jules Sandeau.
Discours ? Non. C’était un acte que M. Augier accomplissait là. Jules
Sandeau lui avait lu si souvent certaine lettre écrite par M. Sandeau
fils, lettre superbe de sentiment, d’émotion et de style, lettre
digne
de mémoire, que l’ami survivant crut bon et doux à la mémoire de son
ami de venir évoquer le cher fantôme du fils devant la tombe du père.
- Il m’a semblé, disait Émile Augier à quelqu’un, que Sandeau eût été
heureux d’apprendre qu’on parlerait là de son enfant !
Et l’auteur de
la Ciguë n’avait qu’une crainte, c’était de ne pouvoir
lire sans larmes cette lettre vraiment faite, pour arracher des pleurs,
et que l’on pourrait placer, en vérité, dans les recueils populaires
destinés à enseigner à nos enfants le sacrifice et le devoir.
« Je veux, dit Émile Augier, rendre à mon ami un hommage dont il sera
touché, s’il nous entend devant cette tombe. Je veux réjouir son âme en
l’honorant dans son oeuvre la plus chère et la moins connue, dans ce
fils qu’il a tant aimé et dont la mort l’a tué.... Oui, tué ! car ce
coup terrible, en l’abattant, lui a ôté tout désir de se relever. «
Pourquoi, me disait-il un jour, pourquoi voulez-vous que je me soigne ?
Mon petit Jules est mort ! » Et cette adoration n’était pas
l’aveuglement de l’amour paternel. Jamais fils n’en fut plus digne.
Celui que son père appelait encore le petit Jules était un des
officiers les plus énergiques de notre marine... Ce vaillant jeune
homme eut le chagrin de ne pas prendre part à la lutte de 1870.
L’occasion parut pourtant s’offrir un jour, mais pour se dérober
aussitôt. C’était dans les mers du Japon, en rade de Yokohama. Sandeau
montait la frégate
la Vénus, mouillée auprès d’une frégate allemande,
la Méduse, quand la nouvelle de la guerre arriva dans ces lointains
parages. Aussitôt le commandant français leva l’ancre en faisant savoir
au Prussien qu’il allait l’attendre au large ; en attendant cette
rencontre qui ne devait pas avoir lieu, car le Prussien préféra rester
dans la neutralité de la rade, Sandeau écrivait à ses parents une
lettre que je vous demande la permission de vous lire. Elle est digne
de mémoire :
Yokohama, dans
la nuit du 13 au 14 octobre 1870.
...............................................................................................................................................................
« Dans quelques heures nous serons aux prises avec l’ennemi, nous
combattrons à forces à peu près équivalentes. - Je suis parfaitement
calme et sûr de moi ! J’ai votre chère pensée dans le coeur ; elle me
gardera, j’en suis certain. Pourtant, si je suis tué, mes pauvres chers
bien-aimés, dites-vous dans votre peine que votre enfant est mort en
accomplissant le premier des devoirs, en défendant l’honneur de son
pays.
« Je viens de recevoir vos lettres du 26 août. Vous l’aimez bien, notre
chère France ; vous ne lui en voudrez pas de vous avoir pris votre fils.
« A cette heure, la plus grave, la plus solennelle de ma vie, toute mon
âme est avec vous.
« Dans cette nuit, la dernière peut-être qui me reste à penser, j’ai
repassé mon enfance et ma jeunesse que vous avez entourées de tant
d’amour. Tout ce temps a été bien bon, la destinée m’a fait la vie bien
douce ; je serais ingrat si je pensais autrement. Mais tout cela
m’émeut et je ne veux pas être ému.
« J’ai confiance dans nos équipages, nous ne devons pas, nous ne
pouvons pas être vaincus. En ce qui me concerne, je ne verrai jamais
amener notre pavillon.
« Je suis à vos genoux, mon père et ma mère bien-aimés. C’est là que,
du fond de mon coeur, je prie Dieu de nous donner la force de venger ici
notre chère patrie.
« J’aurais pu mieux vivre, mais en descendant au fond de mon coeur, en
fouillant tous les replis, je sens que j’ai toujours été honnête ; je
ne trouve pas d’actions mauvaises ni de pensées méchantes, et je puis
porter la tête haute à cette heure qui va sonner.
« Adieu, je vous aime de toutes les forces de mon âme ; que Dieu nous
donne la victoire !
« J. SANDEAU. »
N’avais-je point raison de dire que cette lettre mérite de prendre rang
dans les livres destinés à faire aimer la patrie ?...
Tel père, tel fils. Il me semble, en la lisant, cette lettre émouvante,
que je relis quelque noble page comme le martial dénouement de
Jean de
Thommeray. C’est là du Sandeau vécu, comme le père faisait du Sandeau
écrit.
Ajoutons un dernier titre à tous ceux que mérita Sandeau. Ce
travailleur n’était pas riche ; on l’avait nommé conservateur à la
Bibliothèque Mazarine, place que vient occuper aujourd’hui un autre
romancier remarquable, Ferdinand Fabre, et Sandeau, ce laborieux au
travail difficile, qui mettait de si longs mois à terminer pour Hetzel
la Roche aux Mouettes, put venir en aide, plus d’une fois, à des
pauvres. Le libraire Werdet a raconté comment, étant tombé dans la
misère, Jules Sandeau
lui donna, en toute propriété, un de ses romans
pour subvenir aux besoins du malheureux éditeur. De toutes les fièvres
de son passé, Sandeau n’avait gardé que ses enthousiasmes et ses
habitudes de dévouement.
Peut-être a-t-il été tenté quelquefois d’écrire après
le Docteur
Herbeau ou
la Maison de Penarvan, ces chefs-d’oeuvre rêvés, quelque
livre puisé à la source amère des pleurs d’autrefois, mais il les avait
oubliés à demi, ces pleurs ; il n’avait pas dit, comme dans
Marianna,
en regardant le passé : « le bonheur était là ! » Non ; il avait poussé
doucement son fauteuil au coin du feu entre un livre aimé, une table
modeste, une femme et un enfant, et il avait dit, - heureux jusqu’au
jour où la mort lui prenait son fils adoré : « le bonheur est là ! »
Le bonheur ! Il le cherchait d’ailleurs dans le songe, lui, ce chasseur
de réalités de jadis. « Si vous voulez que cette histoire vous émeuve,
dit-il quelque part, ne la faites pas : rêvez-la ! » Mais il eut mieux
que le songe ; il aima et fut aimé. Ses confrères eux-mêmes
l’honoraient, saluaient en lui son charme. D’ailleurs, bien différents
des rivaux d’aujourd’hui, toujours l’ongle ouvert, ces gens d’autrefois
s’attachaient les uns aux autres.
Il y a dans la vie de Sandeau un trait qui a pu inspirer à Balzac
l’admirable, l’effrayant épisode de la servante vendant son corps, afin
d’apporter de l’argent à Lucien de Rubempré, sans le sou pour faire
enterrer sa maîtresse.
Balzac vivait avec Sandeau dans une intimité complète, en pleine misère
vaillante, dans une épique bohème qui n’a rien de commun avec la bohème
railleuse de Murger, cette bohème qui, n’ayant point dîné, trouvait des
mots en guise de cure-dents. Balzac, pauvre, avait des appétits de
luxe. Il lui fallait, du fond de sa pauvreté, se frotter à ce faubourg
Saint-Germain qu’il entrevit, devina, à travers une porte entre-bâillée
ou du fond de l’embrasure d’une croisée.
« Mon cher, dit-il à Sandeau, il me faut vingt francs ! Un louis !
Trouve-moi ça ! Je vais en soirée. Je n’y puis aller le gousset vide.
Fouille tes poches, bats les buissons, égorge un éditeur, fais ce que
tu voudras mais il me faut un louis ! »
C’était en hiver. Ce pauvre Sandeau avait un manteau chaud, sans luxe,
mais auquel il tenait beaucoup, un de ces manteaux dont on
s’enveloppait, à la cavalière, comme un Andalou dans sa cape. Il
descendit avec son manteau et rapporta le louis à Balzac.
A quelque temps de là, Balzac allant prendre le thé encore chez quelque
duchesse de Langeais, dit, le plus naturellement du monde, à son ami :
« Prête-moi ton manteau !
- Non, dit Sandeau, je ne te prêterai pas mon manteau !...
- Tu y tiens donc trop ?... Tu as peur que je te le gâte ?... Tu en es
à l’égoïsme des vêtements ?... Un manteau, c’est donc si précieux, un
manteau ?... Eh bien ! soit, j’irai sans manteau... Je boutonnerai mon
habit, je grelotterai, je m’enrhumerai, je... »
Et, s’arrêtant tout à coup dans ses brusqueries devant le bon sourire
doux de Sandeau qui le regardait, attendri, sans un reproche, il devint
tout rouge, serra brusquement dans ses robustes bras de Tourangeau le
petit Limousin timide et, les larmes aux yeux, comprenant tout :
« Ah ! mon pauvre enfant, dit-il, je suis une brute et je te demande
pardon ! »
Il y aurait beaucoup de traits pareils à trouver dans l’existence
honorée, vaillante et modeste de l’homme exquis dont le coeur vient de
cesser de battre. Sa vie fut un livre excellent et qu’on voudrait
relire.
Après avoir rêvé d’être grand, il fut parfait, ce qui vaut bien quelque
chose ; il se contenta de vouloir être bon, et il le fut. C’est, du
moins, un songe que chacun de nous peut réaliser.
(1) M. H. de la Pommeraye a
publié sur Jules Sandeau
critique théâtral un feuilleton des plus
intéressants dans le journal
Paris du 30 avril 1883. Dans un
feuilleton du 28 mars, M. de la Pommeraye ajoute, comme post-scriptum à
son excellente étude sur « Sandeau critique ; » et je trouve là un
trait qui fait connaître mieux encore l’auteur de
Marianna. M. de la
Pommeraye nous apprend que, le 7 mai 1850, MM. Louis Couailhac et
Bourdain faisaient représenter sur le théâtre des Folies-Dramatiques
une comédie-vaudeville en trois actes intitulée
Maurice et Madeleine,
pièce tirée de la
Madeleine de Sandeau. La pièce eut
quatre-vingts représentations, ce qui était un succès
pour l’époque. Or savez-vous ce que demanda, comme rémunération, Jules
Sandeau ? Lisez la lettre
authentique - dont l’original est entre mes
mains - adressée à M. Couailhac, l’un des auteurs et, parmi nos
confrères, l’un de nos
anciens
qui ont le plus de jeunesse d’esprit,
le plus de chaleur de coeur et le plus de courtoisie dans les relations
: « Je suis charmé, monsieur, que le sujet de ce petit roman vous ait
semblé digne de la scène ; je fais des voeux sincères pour le succès de
votre pièce et vous pire de vouloir bien m’envoyer une petite loge pour
la première représentation. « Recevez, etc. J
ULES S
ANDEAU. » « N’est-ce pas charmant, ce romancier qui a fourni le sujet d’une
comédie et qui, en retour, sollicite... une petite loge pour la
première représentation ? Nous sommes loin de ces moeurs, ajoute avec raison M. de la Pommeraye.
»