NOTICE SUR
LES CHEVAUX ORIENTAUX
Ayant été chargé de la direction
générale des manoeuvres du camp de Sultanieh,
où étaient réunies des troupes de
toute la Perse (de la mer Caspienne au golfe Persique, et de la
frontière kurde à celle qui touche les Afghans et
les Beloutches), la nature de mes fonctions m'a mis en rapport avec les
principaux chefs venus pour présenter leur hommage au
souverain, suivis d'un grand attirail de cadeaux, de serviteurs, et des
plus beaux chevaux des régions qu'ils quittaient.
C'est en dessinant et mesurant ces chevaux, que j'ai pensé
à publier cette courte Notice ; mon intention n'est pas de
modifier l'histoire du cheval oriental, au point de vue scientifique,
mais de présenter le résumé de mes
recherches, persuadé que toute observation, si minime
qu'elle soit, mérite d'être prise en
considération quand elle a été faite
consciencieusement.
MM. les vétérinaires principaux, membres de la
Commission d'hygiène hippique au Ministère de la
Guerre, virent mes dessins, et m'écrivirent la lettre
suivante
Paris, 2 juin 1862.
« M
ONSIEUR,
Après avoir vu, avec le plus vif
intérêt, vos dessins représentant les
différentes races de certains peuples orientaux, la
spécialité de nos études nous a fait
apprécier vos dessins des races de chevaux
élevés dans les pays que vous avez parcourus. On
est obligé de convenir que les descriptions qui ont
été données sont, jusqu'à
ce jour, incomplètes et mêmes fausses ; il n'y a
rien d'étonnant à cela. Les poètes les
ont décrites avec leur imagination ; les voyageurs, avec le
peu de soin qu'un objet accessoire au but de leurs voyages devait
comporter ; d'autres écrivains, enfin, ont
été influencés par des descriptions
antérieures qui étaient loin d'être
exactes. - Nous sommes convaincus que vous avez fait
particulièrement une étude sérieuse et
consciencieuse du cheval oriental. Vous êtes
arrivé dans ce pays sans idée
préconçue, avec votre esprit rigoureux
d'observation ; vous n'avez pu que reproduire le cheval tel que vous
l'avez vu, c'est-à-dire tel qu'il était. Nous
pensons donc qu'un travail fait par vous, sur le mode
d'élevage et sur les services des chevaux appartenant aux
races que vous avez si bien observées, remplirait la lacune
qui existe dans la connaissance de certains chevaux orientaux,
notamment de ceux de la Perse.
Agréez, Monsieur, l'assurance de notre parfaite
considération.
Les Vétérinaires principaux,
Signés : GOUX, LABORDE, AUBOYER. »
________
Cheval Oriental. - Le grand nombre de chevaux arabes que j'ai vus, ce
que j'ai lu, ainsi que mes conversations avec des observateurs
sérieux, qui ont passé une vingtaine
d'années en Arabie, prouvent que l'extérieur du
cheval arabe a subi complètement l'influence du climat.
Il a de l'analogie avec l'homme du désert, pour la finesse
de son squelette, pour la forme de ses muscles dépourvus de
graisse, l'élasticité de ses tendons et la
vigueur de ses articulations.
Origine. - Le cheval ne paraît pas originaire de l'Arabie :
il n'est pas question de chevaux dans l'expéditionn d'AElius
Gallus ; à cette époque, la monture des Arabes
était le dromadaire, ainsi que le constatent les notes
jointes à cette description.
Pour remonter à l'origine de cette noble race, il est utile
de faire des recherches sur l'espèce chevaline dans le
voisinage de l'Asie centrale et, surtout, du plateau de l'Iran.
L'antiquité du cheval de ces contrées se
révèle par les auteurs classiques et par les
monuments ; leur beauté a été
remarquée dès les temps les plus
reculés.
Essayons de trouver la souche-mère du cheval arabe, hors des
contrées maintenant occupées par les
Ismaélites, et relatons les caractères physiques
et intellectuels d'une pareille souche, en consultant, surtout, les
voyageurs qui ont étudié les alentours de la mer
Caspienne (1), ancienne pépinière des chevaux
persans. (Ce mot étant employé dans un sens
géographique un peu étendu, puisque les Persans
n'ont eu des chevaux et n'ont appris à s'en servir
qu'à l'époque de leurs conquêtes). Nous
trouvons, à l'ouest de la Perse, des chevaux ayant
parfaitement le type arabe, et, dans le midi de l'Iran, le
même modèle avec de plus grandes dimensions.
Sol où se trouve l'Arabe. - On peut répartir le
cheval arabe dans l'Afrique septentrionale, dans l'Égypte
où la race fut introduite par les enfants du
désert, et dans l'Arabie, la Syrie et la
Mésopotamie. Il dégénère
bien vite dans la basse Égypte, en subissant à
peu près les mêmes modifications que l'homme
arabe. La race égyptienne tient encore du sang de ses
ancêtres ; mais sa robe, ses formes, la puissance de ses
membres ainsi que son tempérament ont
été beaucoup altérés, et il
ne reste que la taille qui puisse nous guider pour remonter
à sa souche.
La race des chevaux employés par les Mamelouks est presque
éteinte : elle tenait de l'Arabe et du Dongolani ; cette
race était supérieure à celle du pur
Arabe, par sa charpente osseuse plus pesante et par la force de ses
muscles. Les déserts de la Mauritanie ont probablement
donné des chevaux meilleurs que l'Égypte.
J'ai vu pendant mon voyage au Caire, dans les écuries d'un
Turc, de très-beaux chevaux et surtout 24 juments
remarquables ainsi que leurs poulains : rien de plus gracieux que les
ébats de ces animaux, s'exerçant librement dans
un préau spacieux.
Ces chevaux sont sobres et bons coureurs. Le vice-roi actuel a,
m'a-t-on dit, offert d'engager la lutte avec des chevaux anglais,
à la condition de courir 25 lieues de suite sur un terrain
non préparé. Je crois, cependant, ces produits
inférieurs à ceux du Nedj et de l'ancienne
Assyrie (2).
L'Arabie possède maintenant peu de chevaux ; le petit nombre
de ceux qu'on conduit par occasion, sur les marchés de
Syrie, y sont forts chers, et l'on y amène rarement des
juments, dont l'Arabe ne se défait que lorsque ses produits
sont mauvais.
Les ravages commis par les armées égyptiennes
achevèrent de dépeupler l'Arabie, et c'est
maintenant entre la Syrie et la Mésopotamie que l'on trouve
le grand groupe des Anézés toujours florissant.
Cheval du Nedj. - Le cheval du Nedj est petit de taille et a les
formes ramassées ; sa couleur est
généralement claire : blanche, grise,
tachetée, etc. Les bais foncés sont rares, sauf
quelques juments ; on ignore presque le cheval noir en Arabie.
La robe du cheval arabe est d'un lustre métallique, soyeuse
au toucher.
Les formes sont en harmonie parfaite ; la tête petite, le
front large, sillonné de veines ; les yeux bien
taillés et ouverts, pleins d'intelligence et de
vivacité ; les oreilles droites, courtes et pointues ; les
naseaux ouverts, les lèvres inquiètes et
arrondies.
Le garrot, la poitrine et l'encolure ont beaucoup de largeur ; la
croupe bien voûtée sans pente ; la queue
très-fournie et portée loin du corps ; les
extrémités fines et solides ; les jarrets
arrondis ; les muscles des hanches et les tendons saillants ; les
sabots durs et petits.
Le front du cheval arabe respire l'intelligence et la distinction ; il
ne dit rien au repos, qui permet de juger sa charpente ; il a
l'air maigre et fatigué ; en action, il n'est plus le
même.
La jument, réellement noble, nous frappe par la largeur de
son bassin, la longueur du tronc, la grande finesse des
extrémités, le cou allongé et souple,
la douceur du regard. Une foule de contes arabes parlent de
l'intelligence, de la sobriété, de la
résistance et de l'attachement du cheval à son
maître ; la jument, surtout, paraît faire partie de
la famille.
La facilité, avec laquelle on le nourrit et on le soigne,
permet au cheval arabe de fournir de longues courses ; on dit
même qu'on peut remplacer momentanément la
nourriture végétale par de la viande
hachée et réduite en bouillie, par du lait, etc.
On m'a cité les chevaux turcomans pour le même
fait, que je n'ai cependant pas eu occasion de vérifier ;
mais M. le colonel Vallot, ex-directeur des établissements
hippiques de l'Algérie, m'a assuré avoir
expérimenté sur 13 chevaux venant de Syrie, dont
9 ont accepté cette nourriture.
Le cheval arabe n'atteint son plein développement
qu'à l'âge de 8 ans, l'étalon conserve
très-longtemps ses facultés
procréatrices, qui ont de bons résultats
jusqu'à l'âge de 26 ans (3).
Quelque soigneux que soient les Arabes pour leurs chevaux, ils les
montent trop tôt ; d'où il résulte
qu'il y a peu de chevaux arabes sans défaut
extérieur, surtout dans les articulations.
En Perse, à 7 ans, âge le plus propice pour un
cheval de guerre, l'arabe est déjà
réputé vieux, l'on hésite à
l'acheter sachant qu'on s'en défera difficilement ; il est
vrai qu'on a commencé à le fatiguer
dès l'âge de 3 ans.
Toutes les fois qu'on regarde la campagne, on aperçoit un
cavalier couché sur l'encolure de son cheval
lancé à fond de train, lui maintenant la
tête haute en serrant la bride à hauteur de la
crinière ; puis, on le voit arrêter brusquement sa
monture par un mouvement violent qui la fait asseoir sur les jarrets,
et, par un renversement du cou, amener verticalement la tête,
les naseaux en l'air.
Le cavalier, qui tourne et repart en sens opposé, est
réputé habile écuyer en Perse.
L'homme, pour y parvenir, tire sur la bride en se jetant brusquement en
arrière, de manière à coucher son dos
sur la croupe du cheval.
On comprend ce que peut devenir la bouche d'un cheval ainsi
torturée, et les tares qui sont la conséquence de
tels exercices.
Tous les chevaux persans portent au vent, parce qu'ils sont
montés de la même manière ; il n'est
pas un cheval au galop dont les oreilles ne touchent presque la
poitrine de son maître. La construction de la selle
empêche l'action de la jambe ; l'homme étant comme
assis, le ventre du cheval n'a que le contact douloureux d'un large
étrier, dont le coin l'attaque continuellement.
Cheval Persan. - J'ai souvent lu et entendu citer la race persane,
sans que les descriptions qu'on en donne m'aient fait conclure cette
origine ; et, après trois années de recherches,
je suis resté au même point. C'est pourquoi, en
voulant parler des chevaux que j'ai vus et dessinés dans
l'Iran, j'ai dû m'étendre beaucoup sur les
caractères de ceux du Nedj et de Mésopotamie ;
puisqu'il faut accorder la dénomination persane aux chevaux
de Chiraz qui sont de grands arabes, ou aux turcomans qui en
diffèrent beaucoup ; ceux-ci ont probablement servi
à l'ancienne cavalerie des Parthes.
Les Persans prisent beaucoup la taille du cheval ; aussi, emploient-ils
fréquemment le turcoman, non comme cheval de guerre, mais en
cérémonie, pour les transporter et les attendre
à la porte des gens de distinction qu'ils visitent.
Montures des Persans. - Le cheval de l'Arabistan leur sert
à la chasse ; tandis qu'en voyage, ils ne
dédaignent pas le modeste iabou. C'est ainsi que l'on
désigne la monture qui est tantôt un karabagh,
tantôt un cheval kurde, ou un petit arabe de
piètre origine, animaux solides, sobres et infatigables,
portant le bagage et la nourriture de plusieurs jours, et, à
l'occasion, doublant l'étape sans broncher.
Quoique j'aie placé le iabou en dernier, je ne le regarde
pas moins comme le vrai cheval de Perse, celui que j'ai toujours vu
employé par les hommes qui veulent une monture utile ; par
les maraudeurs Kurdes, qui ont besoin d'arriver et de s'en aller vite ;
par les goulams (courriers du roi), qui portent des ordres dans les
provinces, et par la nombreuse cavalerie
irrégulière que j'ai vue au camp de Sultanieh.
Tous ces gens montaient des chevaux maigres et nerveux, tellement
chargés qu'ils semblaient ne pouvoir se remuer ;
c'était surprenant de les voir, animés par le
maître, se cabrer, sauter et se tourner bout-pour-bout, sans
que leurs pieds de derrière quittassent terre.
Leurs allures habituelles sont le pas, l'amble, le galop et l'aubin qui
tient de l'amble et du galop ; le trot est une exception.
Je citerai, cependant, un cheval de courrier que j'ai maintenu
à cette allure pendant cinq heures, ayant en croupe mon
bagage pesant environ trente kilogrammes, réparti dans deux
grandes saccoches sur les flancs. On force, par l'action continuelle du
fouet, ces chevaux qui tombent souvent pour ne plus se relever. Mais
que de misères ces pauvres animaux ont endurées,
quel fond et quelle charpente pour résister à
tant de privations et de fatigues! Voilà ce que peut cette
race flétrie sous le nom de iabou, que les Persans
paraissent dédaigner, mais dont ils sont trop heureux de se
servir dans de fréquentes occasions, que j'ai assez
remarquées pour en parler avec assurance.
Cheval de Karabagh. - Le karabagh est le cheval arabe avec des formes
plus rondes, large poitrine, forte encolure, tête un peu
massive, jambes courtes et musculeuses ; également bon pour
la plaine et la montagne. Son sabot est petit, jointé court
et dur. Moins souple que le cheval persan, le karabagh a
généralement le rein court, la croupe ronde, le
tronçon de la queue très-fort et
renflé, les crins soyeux, généralement
alezans dorés avec des reflets métalliques ; la
nuance rougeâtre sur un ton chaud de jaune est la robe la
plus estimée. Les Persans en font grand cas comme chevaux de
route ; on leur fait une marque sur la fesse gauche indiquant s'ils
sont de bonne, de médiocre, ou de provenance
inférieure.
J'ai chassé les gazelles avec un cheval karabagh, pendant
huit jours consécutifs dans le désert, faisant
des courses de dix, douze et même quatorze heures, chaque
jour, sans que la santé de ce cheval, qui était
très-peu soigné pendant ce temps, parût
en souffrir. Un mois après cette chasse, et sans avoir
cessé de le monter pendant trois ou quatre heures chaque
jour, je fis une excursion dans des montagnes rocailleuses du
côté de Démawend, monté sur
ce même cheval, sans que sa santé en fût
altérée.
La province de Karabagh faisait partie de l'ancien empire persan ; elle
est traversée par le quarantième degré
de latitude et limitée, à l'est par la mer
Caspienne, à l'ouest par le lac Séwan, au nord
par la Géorgie et la Koura, et au sud par l'Azerbeidjan et
l'Arax.
Les Russes, qui occupent maintenant ce pays, doivent tirer un grand
parti des chevaux karabaghs, très-estimés dans le
pays que j'ai parcouru ; cependant j'en ai peu vu pendant mon
séjour à Tiflis, ville assez
rapprochée de la Caspienne pour profiter d'une race de
chevaux qu'on pourrait rendre si utile.
Je ne pense pas que les chevaux cosaques,
désignés sous le nom de kabardiens, que les
habitants prétendent si bons et si durs à la
fatigue, proviennent des karabaghs dont ils n'ont pas la forme ; ils
sont, je crois, originaires des montagnes du Caucase.
Il me reste à parler, comme sous-genre, du cheval kurde qui
sert à la cavalerie légère et,
surtout, aux escarmouches.
Cheval Kurde. - Le kurde ne paie pas de mine : il a les crins longs
et rudes, les jambes nerveuses, la tête peu
élégante, les oreilles longues, de l'ardeur et de
la sobriété ; j'aurais cru ce cheval toujours
petit, si je n'avais eu l'occasion d'en dessiner et mesurer d'une
grande et belle provenance, qui descend du Nedj et se renouvelle dans
les environs de Soultz-Bulak au sud du lac d'Ourmiah. Ces chevaux
appartiennent à un grand seigneur persan ; on les
désigne sous le nom de
gamalmas (rétif au mors)
qui leur est légèrement appliqué.
Les chevaux que l'on trouve du Kurdistan au Kirman, en suivant la ligne
des montagnes du Louristan, sentent plus ou moins la provenance arabe
et n'ont rien de remarquable.
En remontant du sud à l'est par le Beloutchistan et
l'Afghanistan, les chevaux semblent être du type dit Indien ;
ils tiennent du cheval persan comme celui-ci tient de l'arabe, avec le
corps plus allongé ; ils paraissent descendre du Turkestan
comme mélange ; ces chevaux sont peu gracieux (4).
Cheval Turcoman. - En remontant vers le Nord, nous rencontrons le
cheval turcoman, qui, pour beaucoup de personnes, est le type du cheval
persan. Il n'est cependant pas très-répandu dans
le centre ni dans le sud de la Perse ; on n'en voit pas dans l'ouest.
C'est un cheval médiocre pour les montagnes ; aussi,
réserve-t-on tous ses moyens pour franchir une
longue plaine ; il est ordinairement employé dans les
razzias aventureuses et éloignées.
Sa tête est légèrement
busquée ; ses oreilles assez longues, mobiles et
sèches, donnent de l'inquiétude à sa
physionomie. Les muscles de son cou semblent gonflés par
l'absence de crinière ; celle-ci, pour ainsi dire
toujours rasée, ne deviendrait pas longue si on la laissait
pousser, et se tiendrait raide sur le cou. J'ai vu plusieurs essais
n'amenant qu'à ces résultats, malgré
une assez longue épreuve.
Le corps du turcoman est long, sa poitrine profonde et un peu
serrée ; la croupe, assez courte, suit le dos en ligne droite
; l'attache de la queue est peu vigoureuse, et celle-ci peu fournie ;
les jambes minces, et les sabots généralement
défectueux ; les pieds n'ont pas
l'élégance des autres formes sveltes et
dégagées de ce cheval.
Les Persans mettent le plus grand soin à entretenir fin et
brillant le poil de ces chevaux ; aussi les couvrent-ils avec des
feutres depuis les oreilles jusqu'à la queue ; ils usent,
ainsi, le poil au lieu de le conserver, et dénudent presque
toujours les hanches, ce qui est d'un très-mauvais effet.
Ils font de ce cheval un animal de cérémonie,
incapable d'un service réel, comme je l'ai dit
précédemment.
C'est dans les déserts, à l'est de la mer
Caspienne, qu'il faut étudier les chevaux turcomans. Le
baron Bode en reconnaît trois espèces : les
tekkés sont dits les meilleurs pour de longs voyages et des
marches forcées ; les goklands ainsi que les
yamouds sont plus élancés et plus
véloces. Hérodote et Strabon disent que le
turcoman descend du cheval niséen.
Voici quelques renseignements qui m'ont été
donnés par un homme du pays élevant
lui-même ses chevaux. Je traduis :
« En Perse, il n'y a point de haras proprement dits,
ce qu'on appelle
Ilkhi est un troupeau de chevaux pris au hasard,
où tous les animaux se trouvent
pêle-mêle, juments et étalons qui
s'accouplent à leur gré, sauf exception rare
où il s'agit d'animaux de prix.
La jument met bas sans aide ; on est une année sans
s'occuper du poulain, auquel on met alors un licol, et ce n'est que peu
à peu qu'on fixe ce licol à la mangeoire pendant
quelques instants, pour le remplacer bientôt par un
léger bridon.
Quand le poulain atteint l'âge de 2 ans, s'il est d'un
caractère doux, on le selle et on le monte sans plus de
préparatifs. S'il paraît difficile, on lui attache
sur le dos un sac de terre, pendant 24 heures, et l’on
répète cette opération
jusqu'à ce que l'animal y soit habitué. On le
dresse alors ; et, à 3 ans, il est
considéré comme prêt à
servir. »
Généralement, les Persans n'estiment plus un
cheval dès l'âge de 7 ans.
Passons maintenant du Turkestan, c'est-à-dire du nord de
l'Orient (si je puis me permettre cette désignation),
à la manière d'élever les chevaux au
midi de ce même Orient, c'est-à-dire
l'Égypte.
Je vais traduire maintenant, pour les chevaux égyptiens, ce
qui m'a été dit au Caire, par le palefrenier en
chef des chevaux d'Ismaël-Pacha, en conservant la
naïveté de son récit :
« On fait couvrir la jument au milieu du mois de
janvier, époque de la mise au vert. L'accouplement se fait
deux fois dans un jour, le matin et le soir ; cela suffit
ordinairement. Si, après un intervalle de trois ou quatre
jours, la jument rue à l'étalon, c'est signe de
réussite. Après la saillie, on monte la jument,
on la fait courir pour lui faire digérer la semence.
Au bout de quatre mois, on observe ses flancs après qu'elle
a bu, et si l'embryon remue, on est fixé.
Pendant les trois mois que les chevaux sont au vert sans qu'on les
monte, ils ne sont pas nettoyés. Le matin, on jette sur la
prairie un peu de poudre de Henna, qui absorbe l'humidité de
l'herbe, ce que l'on croit très-utile à la
santé du cheval.
Les chevaux sont susceptibles de gagner la toux et le mal de poitrine
en quittant le vert. Pour les en préserver, on leur frotte
aussitôt la poitrine avec un onguent fait d'huile, d'oeufs et
d'eau-de-vie ; et, trois jours après, on les lave avec du
savon et de l'eau tiède, puis on les monte.
Le poulain étant sevré, on lui donne une
poignée d'orge le matin et le soir et très-peu de
paille : on croit que la paille rend le cheval mou. On monte la jument,
à l'âge de 2 ans et 1/2, tandis que le cheval
n'est monté qu'à 3 ans.
On tâche de lui maintenir la bouche tendre, et on l'habitue
graduellement à la fatigue ; on le fait courir
après la première sueur. On le châtre
ordinairement à 5 ans, quoiqu'on puisse lui faire subir
cette opération à tout âge.
Un cheval est fait quand il a accompli l'âge de 7 ans.
Un cheval monté mange 4 kilogrammes 1/2 d'orge, un tiers le
matin et deux tiers le soir, très-peu de paille et un peu
d'herbes sèches. On l'étrille et on le lave
quelquefois avec du savon et de l'eau tiède. On nettoie
toujours la crinière, la queue et les pieds quand il rentre
à l'écurie, où on le tient
débridé.
Toutes les fois qu'un cheval a été
monté, il faut en essuyer la sueur et le promener.
On fait coucher le cheval sur du fumier sec ; la nuit, surtout l'hiver,
on lui met une couverture.
Le fer du cheval est proportionné à son sabot. On
frotte d'abord le sabot avec du goudron et de l'huile de graine de lin,
puis avec des oignons, on introduit l'huile entre le fer et le sabot
pour le fortifier.
L'écurie bien aérée est
pavée avec des planches assez disjointes pour laisser passer
l'urine. On attache tout simplement le cheval à la mangeoire.
En choisissant un cheval, on exige qu'il ait la tête petite,
les oreilles proportionnées, les jambes fines, la bouche
petite, le cou long, le sabot fort et court-jointé. Les
long-jointés sont des chevaux faibles. On
préfère la robe châtaine, aussi
foncée que possible, les chevaux gris sont
considérés comme faibles ; s'ils sont noirs sans
tache blanche, on les croit vicieux. Quand un cheval a les quatre
jambes blanches et une tache blanche sur le front il n'est pas mauvais
; mais on ne prise pas celui qui a seulement les quatre jambes
blanches. »
Les Egyptiens n'ont que des moyens grossiers pour soigner les chevaux
malades : frotter avec de la graisse et faire avaler des oeufs crus
sont à peu près les seuls remèdes
qu'ils connaissent ; on saigne fréquemment le cheval
à la langue. Ils n'emploient que la brûlure pour
guérir l'enflure du genou.
J'ai parlé des chevaux de la cavalerie persane, qui est
complètement irrégulière parce qu'on
ne peut compter comme utilement organisés quelques pelotons,
dits
de goulams, vêtus presque uniformément et
supposés instruits par la méthode
européenne, que j'ai vu dirigée, dans la
même année, d'abord par un Autrichien, puis par un
Français, auquel a succédé un Anglais.
L'armée persane devait jadis sa force à la grande
mobilité des petits chevaux nerveux de ses cavaliers, que
les chefs de tribus amenaient, à jour fixe, au chef de
l'Etat.
Chaque cavalier, qui portait tout avec lui, était
animé par l'espoir du pillage qui, dans ces temps
reculés, n'était jamais trompé.
Le chameau dit
Zambourek est aussi un animal de guerre
employé par les Persans.
Le dromadaire ou
choutour sert au transport de la plus grande partie
des caravanes et des approvisionnements ; il est originaire de la
Perse, grand et fort au nord, petit et plus agile dans le midi.
Très-docile, il demande peu de soins et supporte un poids
d'au moins 350 kilos. Sa consommation quotidienne ne dépasse
pas 5 kilogrammes de paille hachée, et 3 kilogrammes d'orge.
On peut pousser sa marche jusqu'à 20 lieues par jour quand
il n'est pas trop chargé. Un chamelier suffit à
la conduite et au soin de sept de ces animaux.
Le dromadaire coureur que les Arabes appellent
Mehari, se trouve dans
les environs du golfe Persique et même dans le
Béloutchistan. On peut lui faire franchir une trentaine de
lieues par jour.
Le zambourek est employé au transport de petites
pièces de canon. Il y a environ un siècle que les
Persans se servent de cette artillerie pouvant attaquer l'ennemi aussi
promptement que l'éviter et le fuir ; mais ces
espèces de couleuvrines ne doivent plus produire d'effet,
maintenant que les ennemis orientaux de la Perse, les Afghans et
Beloutches, longtemps arriérés dans leur
armement, remplacent les fusils à mèches, que
j'ai vus à de leurs soldats il y a deux ans, par des fusils
à pierre et même à percussion.
On comprend l'inutilité d'un tir n'ayant qu'un
très-court but-enblanc, et dont la
régularité ne peut être
assurée par un appui grossier qui repose lui-même
sur un animal, avec des projectiles d'un calibre toujours
inférieur à celui de la pièce dont le
poids ne va jamais à 40 kilogrammes (5).
D'ailleurs, le chameau se prête peu aux évolutions
de retraite et n'est amené que progressivement à
vaincre sa lenteur : les montagnes, la boue et les marais le rendent
craintif et le mettent en péril. Les terrains pierreux
exigent l'emploi de sabots en cuir fort, pour préserver le
pied de l'animal, dont le dessous de la corne est trop mou (6).
Il y a une centaine d'années que les Afghans apprirent
à leurs voisins, en s'en servant victorieusement contre eux
dans les environs d'Ispahan, le service qu'on pouvait tirer des
zamboureks ; mais il est temps que les Persans utilisent ces montures,
ou, mieux encore, les mulets, qui parcourent d'un pied sûr
toutes espèces de pentes et de terrain, à
transporter les pièces de campagne, fondues et
montées, pour le transport rapide, par un capitaine
d'artillerie faisant partie de la mission française de 1858.
Et, si le gouvernement persan étendait cette construction
aux canons rayés de montagne du calibre de 4 et du poids de
103 kilogrammes, il répondrait à tous les besoins
de l'artillerie.
Le zambourek, bizarrement harnaché, est un animal de parade,
servant aux détonations qui annoncent les fêtes
ainsi que le départ ou le retour du roi, et dont
l'équipement et l'armement ne sont d'aucune
utilité militaire.
Rien de plus pittoresque qu'un cortége royal, où
figurent les zamboureks armés, accompagnés de
musiciens montés, aussi, sur des dromadaires
caparaçonnés.
MOYENNE DES MESURES
Que j'ai prises sur les chevaux de Perse parmi les Arabes, les
Turcomans et Karabaghs.
|
Arabes |
Turcomans |
Karabaghs |
De l'extrémité occipitale au bout des lèvres
Du point culminant du garrot à la pointe de l'épaule
Du point culminant du garrot à terre
De la base du garrot au-dessous du ventre
De la saillie de l'humérus à la pointe de la fesse
De la pointe de la hanche à la pointe de la fesse
De l'apophyse olécrane à terre
De l'os crochu à terre
De l'extrémité supérieure du canon à terre
Largeur du poitrail d'un court extenseur à l'autre
De l'apophyse olécrane à la partie supérieure de la rotule
De la même à l'extrémité supèrieure du canon
De la pointe de la fesse au calcanéum
Du calcanéum à terre
De la partie antérieure de la rotule à la tête du canon
De cette dernière à terre
De l'extrémité occipitale à l'omoplate |
0m59
0m61
1m53
0m61
1m51
0m50
0m90
0m47
0m37
0m40
0m71
0m52
0m68
0m61
0m71
0m48
0m68 |
0m61
0m66
1m63
0m64
1m63
0m50
0m94
0m50
0m39
0m38
0m87
0m53
0m73
0m64
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DOCUMENTS HISTORIQUES
SUR LES CHEVAUX ORIENTAUX.
Hébreux et Canaanites.
Le cheval ne figure guère parmi les animaux domestiques qui
constituaient la fortune des patriarches
hébraïques. Il n'est question que de
chèvres, de moutons, de boeufs, de vaches, de chameaux,
etc., etc. Encore les frères de Joseph chargaient-ils sur
des ânes les grains acquis en Egypte. (V. les
Hypogées de BeniHassan.)
Les Philistins possédaient (V.
Samuel)
déjà à l'époque de
Saül des chevaux et des chars de guerre. Les haras de Salomon
étaient très-étendus pour les chevaux
de chars et de cavalerie.
Assyriens et Babyloniens.
Les Assyriens et les Babyloniens sont
représentés, dans la Bible, combattant toujours
avec de nombreux chars et à cheval ; il est fort probable
que les rois des Juifs tiraient leur cavalerie de ce
côté, après avoir étendu
leur domination jusqu'à l'Euphrate ; il faut constater la
présence des chevaux sur les monuments de ces
contrées.
Arabes et Arabie.
Les Madianites, qui achetèrent Joseph à ses
frères, sont accompagnés de chameaux. Nulle part,
dans la Bible, où il est question des Arabes (Chronique 11,
Isaias, Jérémias, Nahun), il n'est fait mention
du cheval. Les cadeaux, qu'ils offraient aux rois juifs, consistaient
en métaux précieux et en chameaux ; on ne leur a
jamais donné des chevaux pour monture.
L’Égypte.
L'Egypte, au contraire, aurait déjà
possédé le cheval dans une haute
antiquité. Ainsi, le Pharaon fait promener Joseph sur un
char ; il poursuit Moïse avec des chars et de la cavalerie,
comme le confirment les mouvements égyptiens.
Les signes hiéroglyphiques ne contiennent cependant aucune
partie concernant le cheval. Ceci exige des recherches
ultérieures.
AUTEURS GRECS.
Hérodote.
Hérodote parle des Arabes et de l'Arabie, sans jamais
mentionner le cheval, pas même dans les passages
où il cite les produits du pays ; et, cependant, il
décrit avec assez de netteté les deux races du
mouton de l'Arabie. Les cadeaux, présentés par
les Arabes aux grands rois de Perse, consistaient en aromes.
Dans le chapitre, où il parle de toutes les nations qui ont
fourni des contingents à l'armée de
Xerxès, en décrivant leurs costumes de guerre, il
ne mentionne que l'armure des Arabes, qui ne figeraient pas parmi leurs
cavaliers.
Cependant, Hérodote n'a pas négligé
des détails sur les chevaux
babyloniens (I, 192); sur les
chevaux
blancs sacrés (I, 189 et VII, 55) ; sur ceux de la
Cilicie (III, 90); de l'
Inde et de la plaine
Médique
de
Nisée (III,106) ; de la
Paconie (V, 16) ; de la
Thessalie (VII, 196); et même sur les
Sigynnes, qui
ressemblent le plus aux chevaux des Cosaques actuels.
Ces mêmes récits mentionnent encore les chevaux
employés aux courses olympiques (I), et l'on voit (IV, 189)
que ce sont des juments qui y remportèrent le prix.
CITATIONS.
Chevaux de la Babylonie (I,192).
Le roi avait là, outre les chevaux de guerre, 800
étalons pour couvrir les juments au nombre de 8.000. Car
chaque étalon couvrait 20 juments.
Chevaux Niséens (VII, 40).
Après, venaient les dits chevaux sacrés,
superbement harnachés, appelés
Niséens, du nom d'une grande plaine de la Médie
qui nourrit la grande espèce appartenant à cette
race.
Chevaux de l'Inde (III, 106).
Tous les animaux quadrupèdes et volatiles de l'Inde sont
plus grands que dans les autres contrées, à
l'exception dès chevaux qui sont surpassés par
ceux de la Médie appelés Niséens.
L'histoire de Cyrus confirme ces données.
Les Persans doivent leur cavalerie aux Mèdes et aux
Babyloniens. Il est curieux de relater que la mer Caspienne doit son
nom au mot
Caspis, signifiant bon cheval. Dans l'ancienne langue des
Persans, tous les noms propres, finissant en
asp, se rapportent au
cheval, en rappelant l'importance que l'on attachait à cet
animal ; la plupart de ces noms remontent à une haute
antiquité : Gustasp, Lohrasp, etc.,'etc., etc.
Ainsi, les témoignages des auteurs sont négatifs
jusqu'ici quant à la présence du cheval en
Arabie, dans la haute antiquité.
Strabon.
Strabon abonde encore dans ce sens ; il était l'ami intime
du préfet d'Egypte, OElus Gallus, qui entreprit une
expédition désastreuse pour conquérir
l'Arabie.
Ce célèbre géographe
dépeint les Arabes comme des négociants qui se
sont enrichis par le commerce et dont le pays possédait des
aromes, des métaux précieux, des maisons et des
meubles. Ils sont peu aptes à la guerre ; leurs caravanes
n'emploient que des chameaux.
Les Arabes (
Scenitoe) vivant sous la tente sont décrits
comme adonnés au brigandage ; mais, nulle part, il n'est
question du cheval ; plusieurs passages prouvent, même, que
les Arabes n'avaient pas encore de chevaux au premier siècle
de notre ère.
CITATIONS.
Les brebis des Nabatéens ont le poil blanc ; leurs boeufs
sont grands, le pays ne produit pas de chevaux ; on les remplace par
des chameaux. (Ch. 784.)
Les déserts de l'Arabie sont occupés par des
hommes de la tente qui élèvent des chameaux
(
Scenitoe, Ch. 765.)
Les notes précédentes se rapportent à
l'Arabie du Nord et du Centre. Strabon dit aussi : Que dans l'Arabie
méridionale, il y a abondance d'animaux domestiques ;
à l'exception des chevaux, des mulets et des cochons (Ch.
768.)
Diodore de Sicile.
Les renseignements de Diodore de Sicile confirment les
allégations de Strabon ; dans les nombreux passages qui se
rapportent aux habitants de l'Arabie et à ses produits, il
n'y a pas un mot sur le cheval.
Ainsi, il dit des habitants du Nord (
Nabatéens, XlX, 94) :
Les uns élèvent des chameaux, les autres des
brebis, etc. Il entre dans de grands détails sur la faune de
l'Arabie, dans le chapitre II ; mais il dit, § 45,
où il s'agit des Arabes du Midi, permanents ou
nomades :
« Ils font paître de nombreux troupeaux dans des
plaines immenses... Il y a abondance de bétail, surtout des
boeufs et des brebis de la race à queue grande et
épaisse. Le pays produit aussi des chameaux en
quantité et de différentes races... dont les dromadaires
employés dans la guerre ; « chacun de ces dromadaires
portent deux guerriers qui se
tournent le dos. » (
Archers).
Le même auteur, en parlant des Debais et de leur
contrée pittoresque sur la côte orientale de
l'Arabie, dit : « Ils élèvent des
chameaux qui leur rendent service dans toutes les circonstances de la
vie, car c'est montés sur ces animaux qu'ils vont au combat.
(III, 45.) »
Arrien, dans l'expédition d'Alexandre (VII, 13), dit que
celui-ci vit 50.000 chevaux du roi dans la plaine qui leur
était destinée, et qu'Hérodote a
appelé Nisaion, laquelle en avait contenu jusqu'à
150.000.
Le même auteur, tout en faisant mention des Arabes et surtout
de l'étendue considérable de leur pays, ne dit
pas un mot de leurs chevaux. Déjà, sous
Alexandre, tous les Parthes, les Hyrcaniens et les Zapoures
guerroyaient à cheval.
AUTEURS ROMAINS.
Les auteurs romains, quoique appartenant à des
époques plus rapprochées de la nôtre,
ne connaissaient pas le cheval en Arabie
avant le IVe siècle
de notre ère ; et Pline (
Histoire Naturelle), qui donne
des renseignements très-curieux sur le cheval en
général, n'en connaissait pas non plus en Arabie.
C'est seulement vers l'année 353 de notre ère, que Ammien Marcellin, auteur latin quoique
d’origine grecque, officier romain qui avait suivi les
légions impériales presque dans toutes les
parties du globe alors connues, trace sous le nom de
Saraceni le
portrait de l'Arabe, tel qu'il en est parlé depuis le temps
du Prophète. - « Profitant de l'assistance des
chevaux à côté des dromadaires agiles
et élancés. (XIV, IV, I, 599.)
Equorum adjumento
pernicium graciliumque camelorum per diversa reptantes. »
Il paraît, en effet, que les Arabes furent les successeurs et
les rivaux des Parthes ; et c'est précisément du
côté de la Mésopotamie qu'on les a
rencontrés à cheval pour la première
fois.
Ainsi, en s'en rapportant aux auteurs anciens : les
Égyptiens, les Scythes, les Assyro-Babyloniens, les Grecs,
les Juifs, les Hindous, les Romains, les Numides, les Parthes, etc.....
sans compter les Médo-Persans, possédaient et
élevaient des chevaux avant les Arabes, dont le sol
était propice aux chameaux qui s'y procréaient en
abondance.
Je ne veux pas clore ces quelques recherches, que j'aurais pu pousser
plus loin, sans donner l'opinion plus récente de M. Pictet,
dans son livre sur les
Origines Indo-Européennes, p. 344,
Essai de Paléontologie lingustique :
« §87. LE CHEVAL.
La patrie primitive du cheval n'est pas mieux connue que celle du
boeuf, bien que l'unité de l'espèce semble devoir
simplifier la recherche de son origine locale. Pallas croit que le
cheval se trouve encore sauvage dans les steppes de l'Asie centrale et
occidentale ; mais rien ne prouve qu'il ne l'y soit pas redevenu, comme
dans les pampas de l'Amérique du Sud. Link incline
à le croire originaire de l'Arabie et de l'Afrique du Nord,
parce que c'est là que le cheval atteint à sa
plus haute perfection (Urtwelt, I. 389) ; mais cet argument ne saurait
être considéré comme
décisif. Au point de vue linguistique, cette question a peu
d'importance, parce que, dès le début, nous
trouvons le cheval associé à l'homme chez les
peuples les plus anciens, et recevant de chacun d'eux des noms
particuliers. Les transitions de ces noms d'une famille de langues
à une autre s'expliquent par les importations
subséquentes des races de chevaux propres à tel
ou tel pays, échanges qui ont dû être
fréquents à cause de la facilité avec
laquelle l'animal pouvait se transporter au loin ; ainsi, bien que
l'Arabie ait possédé, dès les temps
les plus reculés sans doute, une excellente race chevaline,
et que l'arabe, pour désigner l'animal, ait une
surabondance de termes indigènes, on y trouve cependant le
mot
faras, en hébreu
pârâsh, en
éthiopien
paras, qui ne signifie autre chose que le cheval
persan, de même que le sanscrit
pârâsika. (Héb.
Paras; arabe,
Fâris ; perse,
Persan,
Fars,
Farsi.)
On aurait donc tort ici de chercher, avec
Génésius, une étymologie
hébraïque d'ailleurs peu satisfaisante. Le sanscrit
aussi, dans sa riche synonymie de l'animal, présente un
assez grand nombre de termes évidemment
étrangers, parce que l'Inde, dont le climat est peu
favorable à l'élève des chevaux,
tirait les siens du Nord et de l'Occident. »
NOTES :
(1) En langue
Zend (ancien persan),
Khou veut dire bon et
Asp
cheval d'où vient
Caspienne, anciennement
Caspis.
(2) A l'occasion du cheval égyptien, je dois relater
quelques lignes d'un rapport fait par an
vétérinaire qui, en 1861, a dû se
procurer en Égypte des chevaux pour l'expédition
de Chine. II dit :.... « Le cheval égyptien se
rapproche du cheval barbe par sa taille, sa conformation
générale, ses allures et la douceur de son
caractère ; il est étoffé, a le rein
court, bien attaché, la croupe ronde, horizontale ;
il est élevé sur les membres, dont les rayons
supérieurs sont longs et bien détachés
du tronc ; les articulations sont larges, les tendons forts, bien
suivis et secs ; la tête est courte, carrée,
expressive et bien attachée ; l'encolure est bien
musclée ; la conformation de cet animal implique une
énergie et une résistance peu communes ;
l'embonpoint extraordinaire, qu'on lui reproche et qui le
déprécie quelquefois, est causé par le
régime auquel on le soumet en Égypte,
où il est nourri, pendant cinq ou six mois de
l'année, avec du trèfle et d'autres herbes en
quantité trop considérable. »
Ce rapport est daté de Saigon, décembre 1861.
(3) L'Arabe attache le plus grand prix à l'origine du cheval
; la plus ancienne, celle des Dehmans-Sheihans, ne remonte
qu'à l'époque du Prophète, ce qui
prouve aussi que l’Arabie n'a pas toujours
possédé le cheval.
L'Arabe met de l'importance à la
généalogie de son cheval, parce que cette
généalogie indique la pureté du sang
et ce que l'on peut attendre d'un cheval issu de familles, dont chacune
a des qualités spéciales : ainsi les
Saquélaonis et, surtout, le rameau des Saquel-Ghidrans, sont
réputés pour l'attaque à la guerre.
Les Manéquis jouissent du prestige de la
vélocité ; ils sont bons pour les surprises et la
fuite. Les Tréquis sont renommés pour leur
puissance génératrice. Les Obeyans
possèdent d'autres qualités, etc.
Les Arabes attribuent les formes au père et les
qualités à la mère.
Ils choisissent les juments pour les entreprises hasardeuses ; ce qui
explique la difficulté d'en acquérir de bonnes.
Ils sont très-superstitieux pour les épis, les
balsames et même la couleur de la robe.
(4) Le capitaine Postkans, dans son ouvrage publié par la
Société Ethnologique de Londres, ler vol. 1848,
p. 114, dit que les chevaux des Beloudjes sont larges et puissants,
qu'ils fatiguent leurs cavaliers par la marche
accélérée et les allures d'amble,
qu'il est impossible d'atteindre leurs juments, qui
présentent un aspect faible et insignifiant. Ces juments
portent un homme armé à une distance incroyable ;
la souche turcomane est peut-être la seule qui rivaliserait
avec elles.
(5) Le canon du plus petit calibre (dit de troupes
légères), inventé par Gribeauval en
1789, lançait un boulet de 500 grammes. Son âme
avait un diamètre de 51 millim.,5 ; son poids
était de 133 kilogrammes et sa longueur de 1
mètre 35 c.
(6) J'ai donné le nom de chameau au Zambourek, parce que la
plupart des zamboureks ont deux bosses, ainsi qu'une
crinière et des touffes énormes de poils noirs
qui couvrent la partie antérieure des jambes de devant et
descendent jusqu'aux genoux.
Ce que j'ai dit du dromadaire, s'applique aussi au zambourek, qui vient
du nord, et sert particulièrement à la
reproduction.