DUMONTEIL,
Fulbert (1830-1912) : Le
tigre
(1882).
Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (07.II.2009) Texte relu par : A. Guézou Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex -Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01 Mél : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] 100346.471@compuserve.com http://www.bmlisieux.com/ Diffusion libre et gratuite (freeware) Texte établi sur un exemplaire (BmLx : nc) de l'ouvrage Les Animaux chez eux illustré par Auguste Lançon (1836-1887) paru chez L. Baschet à Paris en 1882. Le
tigre
par
Fulbert Dumonteil
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Il n’y a peut-être pas dans la création de plus bel animal que le Tigre.
Le Tigre est un grand calomnié. Autant sa renommée est terrible et sa légende odieuse, autant sa force est extraordinaire et sa beauté admirable. Sa souplesse, son agilité tiennent du prodige. Rien n’égale la puissance et la grâce, le charme terrifiant et superbe de ce grand chat de neuf pieds ! Un classement puéril a fait du Tigre comme un vice-roi des animaux, ayant pour sultan le Lion. Le Tigre ne relève que du Tigre et ne partage avec personne sa couronne ensanglantée. C’est tout simplement le monarque de l’Asie, comme le Lion est le roi de l’Afrique. L’un règne en souverain sur les rives du Gange ; l’autre a pour trône l’Atlas ! Tous les deux sont des souverains terribles en même temps que de misérables bohémiens, sans cesse aiguillonnés par la faim, tourmentés par le jeûne, exposés à la mort, toujours à la recherche d’un dîner chimérique dans les jungles ou le désert. Potentats errants et affamés, ils logent éternellement à la belle étoile ; ils y couchent, ils y soupent ou n’y soupent pas et se campent contre un arbre ou un rocher, drapés dans leur maigreur majestueuse comme un mendiant espagnol dans son orgueilleuse pauvreté. Indomptable et indompté, intraitable et cruel, hypocrite, ingrat, sans cesse altéré de sang, repu et jamais assouvi, implacable autant qu’irrésistible, égorgeant pour égorger, immolant pour son plaisir la victime qu’il ne saurait dévorer et se vautrant avec délices dans le sang qu’il ne peut plus boire, tel est le Tigre de la légende. Celui-ci, on ne le trouve ni aux Indes, ni en Chine, ni dans aucun pays. Il n’existe que dans le domaine de l’ignorance et de la fantaisie. L’imagination entoura le Tigre d’une auréole de carnage et il a passé, dans l’histoire naturelle, le muffle souillé de taches de sang que toutes les eaux du Gange ne sauraient laver. Le Tigre n’a point la douceur de l’agneau : la nature lui infligea d’autres goûts et lui imposa surtout un appétit plus grave... Le grand carnassier de l’Inde est assurément moins féroce que la Taupe ou la Belette, et nous écrasons, sous chacun de nos pas, des insectes plus cruels que le Tigre ! Le Tigre s’apprivoise peut-être mieux que le Lion, et se familiarise bientôt avec le gardien qui le traite avec douceur. Non seulement il apprend à connaître et à respecter la main qui le nourrit ; mais, friand de caresses autant qu’un chat domestique, il ronronne en voûtant son dos gigantesque sous le doigt souverain de l’homme. Quand le Tigre n’est pas absolument affamé et qu’on ne l’effraye point, il reste calme, prend des airs dédaigneux ou distraits. En léchant avec une grâce adorable ses larges pattes de velours, il semble dire à l’homme : « Merci, je viens d’en prendre ; tu n’as qu’à repasser demain. » Vous voyez bien qu’il n’est pas si sanguinaire ! Et, d’ailleurs pourriez-vous bien me dire quel est le plus cruel du Tigre, qui boit carrément du sang, ou de la Vipère, qui se délecte dans le lait ? Le tigre est répandu sur la plus grande surface de l’Asie. C’est un montagnard qui s’en va volontiers dîner dans la plaine. La chaleur lui plaît, mais son manteau royal brave les frimas. Le Bengale et la Mongolie, le royaume de Siam, le Tonkin, la Chine, la Birmanie, voilà les domaines du Tigre. Il se promène dans le Thibet et il a un pied à terre dans l’île de Sumatra. Tout le monde connaît le Tigre. Ce noble étranger est aussi populaire que le Lion. Sa beauté est sans rivale. Rien d’éclatant, d’original, de délicat, de mathématique et de fini comme la peau du Tigre. Ce n’est pas un manteau, c’est un dessin ; ce n’est pas un pelage, c’est un éblouissement, un vertige, une harmonie : de fines et élégantes bandes noires, colliers et bracelets qui se détachent sur un fond d’or, se suivent, s’écartent, se soudent, s’élargissent, se recourbent, s’amincissent, se fuient, se retrouvent, se confondent ; et tout cela s’harmonise, se complète et se tient. C’est une figure, c’est un tableau. Un géomètre a tracé ces lignes ; un peintre a dessiné ces bandes ; n’y touchez point, vous effaceriez ces couleurs. Au repos, il semble peut-être lourd sur ses pattes trapues ; masse indolente et superbe, majesté pesante et terrible, il a l’air de sommeiller ; mais que le péril l’excite ou que la faim l’aiguillonne, il se lève, bondit, frappe, attaque et tue presque à la fois. – C’est un trait qui passe, un cri qui part, la foudre qui éclate. Sous sa griffe, un râteau, sous sa patte, une massue, sa victime, daim, loup, sanglier, homme ou cheval, tombe la nuque brisée, le ventre ouvert... Vingt dogues ne sauraient le faire reculer. Celui que sa patte atteint n’est plus qu’un invalide ou un mort. Acculé contre un arbre ou un rocher, la gueule sanglante et le poil hérissé, la face ridée, l’oeil en feu, il agite sa patte formidable comme s’il jonglait ! Ce qu’il touche tombe, et ce qui tombe ne se relève plus. Il n’y a pas d’animal à qui la nature ait plus largement dispensé les qualités physiques, la grâce, la vigueur, l’agilité. D’un bond, il saute dans un enclos, par-dessus de hautes palissades, et d’un bond il en sort, chargé d’un buffle qu’il emporte comme un chat ferait d’une souris. Il dort toute la journée, se couchant là où l’aurore l’a surpris, se réveillant le soir, dans les hautes herbes impénétrables où il a passé le jour. Ce qu’il aime, c’est la nuit, où ses grands yeux errants étincellent d’un feu sauvage, où sa belle robe mouchetée s’allonge, se replie, s’étale, rampe, ondule comme un tapis vivant. Antithèse curieuse, le Bengale a donné son nom à la plus délicate des fleurs, comme au plus terrible des carnassiers. Si l’on excepte l’Éléphant, cette forteresse, aucun animal ne peut résister au Tigre. Il a pourtant un adversaire terrible et souvent heureux dans le Buffle sauvage, son ennemi mortel. A la vue du Tigre, il s’avance avec une majesté sauvage, défiant son adversaire en faisant voler la poussière sous son sabot furieux. Au mugissement de l’un, répond le mugissement de l’autre, et tandis que le Tigre s’aplatit comme un Chat prêt à bondir, le Buffle se précipite sur son adversaire, opposant aux griffes du fauve ses cornes, deux épieux, et son front, un maillet. Un nuage de poussière voile les combattants ; c’est à peine si l’on aperçoit deux masses qui roulent, des chairs qui pendent, du sang qui coule. Enfin la poussière tombe et le silence règne dans les jungles. Quel est le vainqueur du Tigre ou du Buffle ? Tous les deux sont morts. Le plus souvent, le Tigre, dans un bond vertigineux, saute au cou du Buffle aveuglé par la rage, l’étrangle, l’égorge et en quelques coups de crocs formidables met ses tripes au vent. Quelquefois, aussi, le Buffle, dans un élan furieux, prévient son adversaire, le jette en l’air de ses cornes terribles, et le foule à ses pieds, palpitant, les os fracassés, s’en va, puis revient, implacable, acharné, pour broyer un cadavre. Quand le Tigre aperçoit l’homme pour la première fois sur la limite des forêts, il paraît qu’il ne l’attaque jamais. Il le considère avec un mélange de surprise et de dédain : « Quel est donc ce pygmée ? » Ce pygmée est le maître du Monde et le dompteur de la Création. Les Annamites ont eu l’ingénieuse idée de se débarrasser de Monseigneur le Tigre, comme ils l’appellent respectueusement, en lui donnant un concert : ce n’est meurtrier que pour les oreilles. Armés de tams-tams, de gongs, de tambours, de trompes et de crécelles, les assaillants, je n’ose dire les musiciens, forment un vaste cercle autour du bois où les Tigres font la sieste. Surpris dans leur sommeil, étourdis par un tintamarre extravagant qui éclate comme une bombe au sein des forêts, les Tigres sont pris d’une terreur folle, restent sur place, hésitants, tremblants, l’oreille basse, comme paralysés, ne songeant ni à fuir ni à se défendre. On peut alors s’approcher d’eux et les tuer impunément à coups de fusil, à coups de lance. Si, par extraordinaire, l’un d’eux parvient à vaincre sa surprise et à s’échapper, il s’enfuit dans les montagnes de toute la vitesse de ses jambes, comme s’il avait un orchestre dans la tête. Il n’ira plus au concert. Les Annamites font au Tigre une autre chasse qui n’est pas moins pittoresque : ils sèment autour de son repaire de larges feuilles de figuier, arrosées d’un liquide gluant. Le Tigre sort de son gîte royal et s’avance fièrement sur ce tapis trompeur. Une feuille s’attache à sa patte, puis une autre, puis cinq, puis dix. Il s’étonne, il s’irrite, ne comprend rien à cette détestable plaisanterie. De sa gueule, déjà frémissante de colère, il essaye de débarrasser ses pattes de ces guêtres étranges et maudites. Mais bientôt son muffle, son cou, son poitrail se couvrent de feuilles inséparables. Furieux, il se roule dans l’herbe, rugissant, mordant le sol, bondissant, retombant, partagé entre la stupéfaction et la rage ; et plus il veut se débarrasser de ce feuillage qui s’attache à ses flancs, se colle sur son dos, s’entasse sur sa tête, plus il s’empêtre dans cette robe de Nessus qui ne le brûle pas, mais l’entrave, le suffoque, l’étouffe. Ce n’est plus un Tigre, mais une masse informe, étrange, roulante et bondissante de feuilles qui semblent animées. – On dirait un soldat de Brunehaut. Enfin, palpitant, exténué, à bout de force et de souffle, il tombe pour ne plus se relever. Ce n’est plus un adversaire, c’est un bloc. Les chasseurs arrivent et assassinent le grand assassin de troupeaux. Fatigué de servir d’entre-côte au roi des jungles, l’homme fait au Tigre une guerre acharnée. Aussi, le plus beau des fauves devient plus rare de jour en jour et l’on peut prévoir l’époque où son trône, barbouillé de sang, sera mis aux enchères. Il existe bien des espèces de tigres, toutes imposantes et gracieuses, drapées d’un manteau magnifique, ornement et terreur des contrées où éclatent leurs rugissements. D’un bond que ne saurait faire le Tigre royal, passons de l’Asie en Amérique et arrêtons-nous devant le Jaguar, ce tyran des prairies qui commande aux plaines du Nouveau-Monde comme le Lion en Afrique et le Tigre sur les bords du Gange. C’est un franc bohémien des steppes, galvaudant sa couronne ensanglantée de forêt en forêt, de montagne en montagne, dans le carnage des belles nuits étoilées, sans gîte ni tanière, sans famille, sans foyer, s’en allant toujours seul, fuyant la société, à la recherche éternelle d’une proie. C’est un vrai Tigre, le Tigre américain. Et Humboldt a vu des Jaguars traverser à la nage des fleuves d’une lieue, traînant à leur gueule un Cerf ou un Cheval. Il égorge tout ce qu’il rencontre et l’on assure qu’il attaque le puissant alligator lui-même, qu’il va défier au sein des rivières. C’est toujours un duel à mort : ou le Jaguar étrangle le Caïman ou le Caïman l’entraîne et le noye au fond des eaux. Le prince de Wied a rencontré des Jaguars aussi grands que le Tigre royal. Reugger et d’Azara comparent sa force prodigieuse à celle du Lion. Son cri est terrible, et tout tremble dans les forêts quand son formidable hou-hou fait retentir les échos à deux lieues à la ronde. C’est bien là la voix d’un maître ! Le Tigre américain a un goût particulier pour le nègre, dont les fortes exhalaisons l’attirent de très loin. Pour lui, le blanc n’est qu’une viande de seconde catégorie. Mais, faute d’un mulâtre ou d’un Indien, le Jaguar se contente d’un Espagnol. Quand un nègre et un blanc voyagent ensemble, le nègre est toujours le préféré, et, comme une seule victime suffit au Tigre américain, le blanc continue paisiblement sa route en remerciant le Seigneur de l’avoir fait descendre non de Cham, mais de Japhet. On chasse le Jaguar à la lance, à la fourche, au couteau, à la massue, à la flèche, au lacet. Ces deux dernières chasses sont les plus sûres et les plus curieuses. Dans le premier cas, le puissant animal est empoisonné ; dans le second, il est étranglé. L’Indien se fabrique une barbacane avec un bambou et de toutes petites flèches avec des épines qu’il trempe dans le terrible poison appelé curare. Poursuivi par une meute de dogues, le Tigre d’Amérique grimpe sur un arbre d’où il nargue ses adversaires hurlants. C’est alors que le chasseur lui envoie ses flèches empoisonnées, qui pénètrent plus profondément que la balle de la meilleure carabine. C’en est fait : le Jaguar se raidit, tremble et tombe, ébauche un rugissement, expire dans une convulsion horrible. Une épine a vaincu le roi des pampas. Dans le Paraguay, quand le Jaguar a grimpé sur un arbre, on lui lance, avec une adresse merveilleuse, un lacet autour du cou. Il a été vu ; il est pris. Un chasseur attache aussitôt un bout de la corde à l’anneau de sa selle et lance son cheval au galop, traînant en rase campagne le fauve rugissant de colère et de douleur. Si le Tigre, disloqué, meurtri, sanglant, oppose une dernière résistance, un autre chasseur lui passe un second lacet aux jambes de derrière, et les cavaliers, galopant à toute bride en sens opposé, n’ont bientôt plus qu’un cadavre entre eux. Une corde a suffi pour étrangler le tyran des forêts. Il n’est pas rare de voir de petits Jaguars apprivoisés dans un village américain. Après avoir empoisonné ou étranglé ses parents, l’Indien l’emporte dans sa cabane, lui passe une corde au cou et l’attache devant la porte, à la branche d’un palmier. Le petit Jaguar s’apprivoise, il oublie tout ; on lui donne de la viande cuite, du lait et des boules pour jouer ; il s’amuse avec les chiens, ces ennemis mortels de sa race, et fraternise avec les chats, ces pygmées ! Il est captif, il est vaincu. Mais, un jour, il regarde d’un air étrange ses compagnons de jeux et, d’une patte dédaigneuse, il repousse les boules comme s’il venait de comprendre qu’un jouet ne vaut pas la liberté. Il s’étend comme une couleuvre à l’ombre du palmier et semble prêter l’oreille au bruit des forêts lointaines son oeil brille, sa queue frissonne, son flanc bat : n’entend-il pas le terrible hou-hou du grand carnassier des pampas, du formidable Tigre américain ? D’un coup d’épaule, il brise sa chaîne ; d’un bond, il gagne la forêt. Il est libre, et, comme s’il voulait venger les siens, là où sa mère fut tuée, il tue ! La jungle l’emporte sur la niche, la liberté sur la chaîne : le prisonnier, l’orphelin, l’enfant se fait homme, se fait Tigre. Tout tombe sous sa griffe ou meurt sous sa dent. C’est une vaste hécatombe de fauves, de reptiles et d’oiseaux. Le petit joueur de boules n’appartient plus qu’aux forêts. Né dans l’esclavage, on peut se faire à la chaîne et oublier la liberté. Mais si, secouant le joug, on retourne une bonne fois à la liberté, on finit par l’aimer tant qu’on ne peut plus s’en séparer. D’un bond nouveau retombons du Paraguay au Bengale et revenons au Tigre d’Asie. Je vous le présente non plus en manteau royal, mais en robe de chambre. Les amours du Tigre ne durent que deux ou trois semaines. Mais quelles amours ! Ce sont des combats épouvantables et de monstrueuses caresses mêlées de cris terrifiants comme en peuvent faire entendre des Chats de neuf pieds ! Le Tigre est un papa gâteau plein de bonhomie et de tendresse pour ses gracieux bébés. Pour jouer avec sa joyeuse famille, il néglige les troupeaux du voisinage et oublie l’humanité. C’est plaisir de voir ce grand buveur de sang ronronner comme un chat en léchant ses petits, faire le gros dos, étaler ses crocs indulgents dans un bâillement bourgeois, se rouler dans l’herbe avec ses enfants, leur donner de petites tapes sur la joue avec sa large main gantée de velours, enlacer sa petite famille avec sa longue queue chargée de bracelets, comme on passe le bras autour du cou d’un ami. Et, si quelque fauve des steppes vient à passer, s’arrête surpris, au lieu de bondir et de le dévorer, le papa Tigre, le regardant d’un oeil calme, semble lui dire : « Pardon, ne seriez-vous pas aussi père de famille ? » Mais c’est surtout la mère qui est chargée de l’éducation des enfants. C’est elle qui leur apprend la chasse, la pêche et la guerre. Tapie sur les bords d’un marais, elle prend le reptile au passage et l’oiseau au vol. - Voilà, mes enfants, comment on chasse. Blottie, comme une grande chatte, le long des torrents et des rivières, elle étend doucement la patte et fait sauter sur la rive le poisson qui sera le plat du jour. - Voilà comment on pêche, mes enfants. Cachée dans les hautes herbes, tandis que ses petits font le guet, elle bondit sur le cheval sauvage et l’égorge. Ne faut-il pas que tout le monde vive ? - Voilà comment on tue, mes fils. Mise en face du chasseur, elle a brisé trois lances et broyé une massue ; une balle l’a frappée au coeur ; elle tombe enfin, se traîne, se débat, se meurt ; et son dernier rugissement, mêlé de fureur et d’amour, semble dire aux siens : - Voilà comment un Tigre doit mourir ! Si, au contraire, un chasseur lui a ravi ses petits et les emporte au galop de son cheval, elle les suit durant trois lieues en bondissant à travers les torrents et les buissons ; puis, elle tombe épuisée de fatigue et de rage, et dans un cri désespéré, rugissement suprême de tristesse et d’amour, elle a l’air de dire : - Voyez, mes enfants, comme je vous aimais ! Alors, étendue sur l’herbe, qu’elle mord avec frénésie, elle semble morte au monde des forêts. Qu’un beau Tigre s’avance en faisant miroiter les ors de son manteau royal, elle ne le voit pas ; qu’il fasse entendre un rugissement adouci et provocateur, elle ne l’entend pas. Ce n’est pas un époux qu’elle cherche, ce sont ses enfants qu’elle demande ; ce sont ses petits qu’elle appelle, qu’elle pleure, et elle ne veut pas être consolée. FULBERT
DUMONTEIL.
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