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M. Nadaud et M. Pelletier : Le couteau du boucher : Pacotte (1926).
NADAUD, Marcel & PELLETIER, Maurice :  Le couteau du boucher : Pacotte, (1926).
Saisie du texte et relecture : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (10.VII.2007)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] obogros@ville-lisieux.fr
http://www.bmlisieux.com/

Diffusion libre et gratuite (freeware)
Orthographe et graphie conservées.
Texte établi sur un exemplaire de la médiathèque (BM Lisieux : nc) , coupures de presse extraites du Petit Journal du 08 au 12 février 1926. Série "Nos enquêtes : les grandes erreurs judiciaires".
 
Le couteau du boucher
(Pacotte)
par
Marcel Nadaud, & Maurice Pelletier

~ * ~


I. - Un nouveau Troppman

Dans la nuit du 10 au 11 septembre 1897, - nuit toute de rafales, de pluie et de tempête sévissant sur le grand plateau dijonnais, - un homme à demi-mort, râlant, tout ensanglanté, venait s’abattre à la porte d’une maison surveillant l’orée de Ruffey-les-Echirey, petite bourgade sise à deux lieues de la métropole bourguignonne.

Sur la marche boueuse d’un perron bas, il hurlait dans le vent :

- Coquibus ! Coquibus !...

Son poing martelait le vantail, de plus en plus faiblement :

- Coquibus ! je suis à moitié tué. Ouvre-moi !...

Rien ne répondant à son appel, il rassembla toutes ses forces, pour lancer un dernier cri :

- Coquibus !... Il s’est sauvé !... Ouvre-moi !... C’est le gendre de Girardot !

Cette fois, on a entendu. La fenêtre s’éclaire, la porte s’ouvre. Coquibus sort, tandis que sa femme, sur le seuil, lève la lampe. Une ombre se traîne jusque dans la maison.

- Quand je te disais que c’était Redon !...

- A boire, j’ai soif !...

Il avale un verre d’eau. Effarés, les époux Coquibus n’osent approcher de ce spectre dégouttant de sang, dont le cou était tranché sur la gauche d’une large entaille.

- C’est le gendre de Girardot qui m’a assassiné ! Cours vite chez la Justine ; il doit les avoir assassinés, car j’ai entendu crier…

- Reste avec lui, la Marie, ordonne Coquibus. Je vais aller réveiller les voisins et le maire, et on va aller voir chez les Méot. »

Quelques minutes après, cependant que l’on s’empressait autour de Redon, répétant inlassablement : « C’est le gendre de Girardot ! », le maire, M. Mongeot, accompagné de nombre d’habitants, franchissait le seuil d’une maison voisine, à l’intersection de la route traversant le village et du chemin des Crais conduisant à la gare. La pièce dans laquelle il entrait était plongée dans l’obscurité. Une allumette fut craquée. M. Mongeot recula d’effroi.

La face contre le sol, gisait dans une mare de sang la maîtresse de la maison, Mme Vve Méot. Couchée dans un lit, près de la porte, sa fille Anaïs, âgée de 18 ans, était recouverte d’un drap ensanglanté. Elle était morte ; elle aussi égorgée, une trace d’ongle barrant sa lèvre supérieure. Enfin, dans la chambre du fond, le jeune Félicien, le fils de Mme Méot, un garçonnet de 12 ans, également alité, avait, comme sa soeur et sa mère, la gorge tranchée, jusqu’à la colonne vertébrale. Un lit vide, dans le fond de la pièce, accusait les traces ensanglantées d’une main, comme si le meurtrier avait cherché une dernière victime, heureusement absente.

Aucune trace de rixe auprès de Mme Méot, sinon un litre d’eau-de-vie cassé, tout son liquide répandu sur le carreau. Sur la table, un verre à moitié plein d’alcool. Dans la pièce du fond, une armoire ouverte, mais où rien ne paraissait avoir été dérangé.

Dans l’écurie, voisine de la maison, un des chevaux de Mme Méot, tout harnaché, attendait devant sa mangeoire.

Une arrestation précipitée

Cependant le maire, sans attendre davantage, envoyait immédiatement à Dijon le garde champêtre aviser le Parquet. Ordre fut donné à la maréchaussée d’aller se saisir, rue du Bourg, en plein centre de la ville, du boucher Alfred Pacotte, gendre de M. Girardot. Il était difficile d’accuser la magistrature de mollesse ; c’était à minuit moins un quart que Redon avait frappé à la porte de Coquibus ; à deux heures, un petit détachement de gendarmes, sous le commandement de l’adjudant Lombard et du brigadier Camus, allait arrêter celui que Redon, domestique des Méot, accusait du quadruple assassinat.

Après plusieurs appels, un homme brun à fortes moustaches, en chemise et pieds nus, vint ouvrir. Les gendarmes se firent amener dans sa chambre ; le brigadier Camus alluma le bec de gaz, observa que le lit était défait et que, malgré des yeux un peu hagards, Pacotte semblait complètement réveillé. Ses cheveux étaient plaqués par places. L’aile droite du nez accusait une petite tache de sang de la grosseur d’un pois.

- Vous êtes seul ? lui demanda l’adjudant Lombard.

- Oui, ma femme et le petit sont chez le père, à Ruffey.

- Vous avez une bicyclette ?

- Oui, dans la boutique.

- Bien, maintenant, habillez-vous et suivez-nous.

Sans faire une observation, le boucher alla prendre dans la cour, sur laquelle était ouverte la fenêtre de la chambre, une paire de chaussettes toutes mouillées qui séchaient à un fil. Etait-ce somnolence ou trouble ? Il chaussa son pied droit d’une bottine, son gauche d’un soulier, puis il passa ses vêtements, entièrement secs, qui attendaient sur une chaise proche du lit, enfila sa blouse, coiffa un chapeau et suivit les gendarmes, sans même leur poser une question.

- Pourquoi n’avez-vous pas interrogé ceux qui vous arrêtaient sur le motif de votre arrestation ? demandera-t-on par la suite.

- Je pensais bien qu’ils ne me diraient rien. Et du moment qu’on me demandait ma bicyclette, je croyais qu’il s’agissait d’une infraction de voirie.

Sans tarder, et dans la nuit même, à 3 h. 30, le parquet, représenté par M. Passot, substitut, M. Cornereau, juge d’instruction, et M. Mugnier, greffier, se transportait sur les lieux du crime où l’avaient précédé le brigadier Faret et les gendarmes à cheval Berget et Jeannerot, de Dijon. Il recueillait la déposition de Redon, domestique de la veuve Méot et le seul survivant du massacre. Malgré ses blessures, le malheureux, lardé de six coups de couteau, trouvait la force de faire le récit suivant.

La déposition du moribond

Au cours de la nuit, sans qu’il pût préciser l’heure, sa patronne était venue le réveiller dans l’écurie où il était couché et lui avait fait « garnir un cheval », pour aller « aider Alfred à démarrer sa voiture ». Il avait parfaitement reconnu l’homme, vêtu d’une grande blouse bleue, qui accompagnait Mme Méot. C’était un nommé Pacotte, boucher à Dijon, et gendre d’un certain Girardot, cultivateur à Ruffey. La voiture, chargée d’une vache, se serait embourbée près de la maisonnette du chemin de fer.

Redon, armé d’une lanterne, sortit de l’écurie en emmenant l’animal, cependant que Pacotte demandait de l’eau-de-vie à Mme Méot qu’il appelait Justine. Il était à 50 mètres de la maison quand il perçut un cri d’effroi. Il se retourna, mais, n’entendant plus rien, il poursuivit sa route. Il avait fait à peu près 200 pas et était arrivé à la hauteur de meules de paille quand Pacotte le rejoignit en courant et lui demanda sa lanterne. Il la lui avait à peine donnée qu’il recevait un violent coup derrière la tête. Il s’enfuit à travers champs, mais tomba dans un labour où il reçut « un nouveau coup sur le cou ». Traîné quelques mètres par les jambes dans une pièce de choux, il fut laissé dans un sillon par le meurtrier qui le croyait mort. Au bout de quelques instants, se sentant seul, il rampa jusqu’à la maison d’une demoiselle Noireau qui n’ouvrit pas, puis, poursuivant sa route, il grimpa sur un mur, se laissa glisser sur des bûches et arriva à la porte de Coquibus.

Confronté avec Redon, Pacotte protesta avec énergie. Il n’était pas venu à Ruffey, affirmait-il. Il n’avait pas quitté Dijon de la soirée. Un conducteur à l’abattoir, Dumortier, lui avait apporté de la viande à 6 heures et demie. Pacotte lui avait commandé un ris de veau, puis avait soupé et rangé sa viande. A huit heures, il était allé à son écurie, rue de la Mégisserie, de l’autre côté de l’Ouche, soigner son cheval, un boeuf et trois moutons. Il avait rencontré un boucher de la place Saint-Jean qui s’était étonné de l’heure tardive à laquelle Pacotte se rendait à son écurie ; puis il avait jeté, place Saint-Georges, une carte postale, avait souhaité le bonsoir à un tailleur de ladite place, et était rentré vers 9 heures et demie à sa boutique, d’où il n’avait pas bougé. Il protestait avec énergie contre l’accusation portée contre lui. Confronté avec Redon et mis en présence des victimes :

- Ce n’est pas moi qui ai commis ce crime, s’écria-t-il. J’aurais mieux aimé me tuer moi-même. Je n’avais aucun motif de vengeance contre les Méot !...

Ces protestations ne convainquirent pas M. Cornereau qui signa sur le champ un mandat d’arrêt et commença son enquête. Tout d’abord, il mit hors de cause un certain X…, ancien domestique de Mme Méot, renvoyé un mois auparavant et qui, au moment de son départ, avait proféré des menaces contre son ex-patronne. Puis il s’occupa de recueillir les témoignages et, le 17 septembre, commit un expert, le chimiste Bellier.

Les premiers renseignements pris sur Pacotte étaient loin d’être mauvais. Agé de 29 ans et orphelin, il avait fait son service militaire à Angoulême : bien noté, il avait été l’ordonnance d’un officier, le commandant Duault. Rentré au pays natal, il avait acheté, en 1894, avec les 15.000 francs provenant de l’héritage paternel, le fonds de boucherie de la rue du Bourg. Il s’était marié en 1895, le 20 février, avec Mlle Joséphine Girardot, de Ruffey, qui lui avait apporté une petite dot de 4.000 francs. Il venait d’être père. C’était, dit un témoin, « un garçon rangé, pas tapageur, plutôt un peu froid, allant rarement au café. Etant garçon boucher, il avait mis de l’argent de côté. », ce qui aurait été un fait anormal pour un jeune homme de son état.

Toutes les dépositions recueillies par M. Cornereau confirmaient la véracité des dires de Pacotte. Les perquisitions montraient ses blouses et ses couteaux au complet. L’opinion des habitants de Ruffey était nettement pour lui. Personne ne l’avait vu dans ce village, ni à Dijon, entre 10 heures et demie et minuit et demi. Contre le boucher de la rue du Bourg, il ne demeurait que certains on-dit sans fondement, comme une histoire de petit chien noir à qui il aurait coupé la tête, sans que personne d’ailleurs l’eût vu, et la déposition du seul et unique témoin Redon.

Mais l’opinion publique, surexcitée par une série d’effroyables crimes impunis, dont l’assassinat de la bergère Augustine Mortureux, au bois du Chêne, le 12 mai 1895, dont le tristement fameux Vacher se reconnaîtra coupable deux ans après, l’opinion, qui vit d’impressions et non de réalités, réclamait un coupable. La justice tenait un suspect : tant pis pour le suspect ! Et c’est dans cette atmosphère d’orages et de passions que, un mois après l’ouverture de l’enquête, M. Cornereau est dessaisi de l’instruction et que M. Tondut en est chargé.

Avec M. Tondut, le compte de Pacotte est bon : « C’est un nouveau Troppmann », dira-t-il. Ce Troppmann II, il fera tout pour le faire passer par la même voie que le Troppmann I, par la lunette de la guillotine.

II. -  La faillite de la Justice

Ce n’était pas un juge d’instruction banal que M. Tondut. Et Pacotte, ancien soldat discipliné et commerçant patenté, qui, de tout temps, n’avait cessé de professer le plus grand respect pour toutes les institutions établies, se demanda, le 12 octobre, premier jour qu’il entra dans le cabinet du nouvel instructeur commis depuis une semaine, de quelle mystification il était le jouet.

Négligemment renversé dans son fauteuil, les pieds sur la table, M. Tondut accueillit Pacotte par un bon sourire et ces simples mots :

- Asseyez-vous donc, mon ami, nous allons rechercher ensemble le criminel !...

Et, là-dessus, il exposa en détail tous les arguments militant pour la culpabilité de Pacotte, sans toutefois le nommer. Grosse malice. Car, ou bien Pacotte se taisait, ce qui permettait au juge d’instruction de triompher : « Vous vous rendez à la logique de mon hypothèse ; vous êtes donc l’assassin », ou bien Pacotte faisait ses petites objections, à quoi le juge d’instruction repartait victorieusement : « Vous vous êtes reconnu : c’est donc vous le coupable ! »

Effroyable dilemme, dont s’affole le cerveau assez épais de Pacotte. Quand il proteste qu’il ne sait rien, M. Tondut lui rétorque : « Je ne vous demande pas si vous savez quelque chose », ou bien : « Vous ne voulez rien savoir et vous ne voulez juger de rien ».

Et, complaisamment, lentement, M. le juge d’instruction Tondut s’étendait sur les qualités de calme que devait avoir l’assassin, qui n’était certes pas Pacotte, mais qui devait être un boucher présumé Alfred.

Pacotte avait beau se débattre :

- Je n’aurais pas demandé la goutte ; je ne bois point…

L’autre, de plus en plus doucereux, répondait :

- Je ne parle pas de vous en ce moment ; je vous parle de l’individu qui, selon toute apparence, a commis ce quadruple crime. je vous l’ai répété dix fois ; et, en dépit de cela, vous répondez comme si, à l’heure qu’il est, je vous accusais formellement !...

Et que faisait-il d’autre, le brave M. Tondut ?

- Je n’attribue la chose qu’au fait par vous de vous rendre à la logique de mon argumentation.

Une évasion maladroite

C’étaient de bien grands mots pour le jeune boucher que tant d’éloquence éblouissait. Un moment, M. Tondut,  parlant de la déposition Redon, la commente :

- Elle est faite dans des circonstances qui ne permettent pas à un moribond d’insulter la justice.

Pacotte comprend tout de travers :

- Je n’ai jamais insulté la justice.

- Persistant dans votre tactique, vous ne voulez pas encore comprendre ce que je vous dis.

Il était assez difficile à Pacotte de ne pas persévérer dans sa « tactique », pas plus que le plomb ne peut, sous l’influence d’aucun juge d’instruction, quelque malin qu’il soit, se transformer en radium. Le malheureux a beau protester qu’il fallait « être brigand pour faire ça », le juge fait la sourde oreille.

- Semblables choses ont été dites trop souvent, et par de grands criminels, pour que j’y attache la moindre importance. »

Tant et si bien qu’à la fin de cet interrogatoire affolant, Pacotte se sent traqué ; il perd la tête. Lorsque la porte s’ouvre, il blondit devant les gendarmes et, à toute allure, dégringole l’escalier. Attirée par les cris, la concierge ferme au verrou la porte donnant sur la rue du Palais. Les gendarmes s’emparent de Pacotte et le ramènent, abattu, dans le cabinet de M. Tondut qui triomphe : cette fuite n’est-elle pas l’aveu de la culpabilité ?

Le coup de grâce

Le lendemain, quand a lieu la confrontation avec Redon, Pacotte a repris tout son calme. On lui a assez reproché, la veille, d’avoir perdu son sang-froid. Mais cette fois, il en a trop. Le juge d’instruction qui ne recule devant aucun effet lui assène ce dernier coup :

- Je suis chargé de vous apprendre une triste nouvelle.

Pacotte ne bronche pas. Quelle épreuve va-t-il avoir encore à supporter dans le désastre qui l’emporte, lui, sa fortune, son honneur, sa vie peut-être ?

- Votre jeune enfant vient de mourir !...

Un silence, qui se prolonge deux minutes : brusquement, brutalement, l’inculpé jette :

- Pourquoi ne me l’avez-vous pas appris plus tôt ?

Puis il retombe dans son mutisme. Mais de cette douleur concentrée, de cet accablement définitif, M. Tondut avait déduit une insensibilité et un manque de coeur qui servaient étrangement la thèse de l’accusation.

Par exemple, il y avait une question qui gênait le bon M. Tondut : le mobile du crime. Pourquoi Pacotte aurait-il massacré la famille Méot ?

Par amour ? Amour pour qui ? L’hypothèse avait été émise d’un mariage manqué avec Anaïs, qui aurait causé chez Pacotte une déception tragique. Mais Anaïs était trop jeune pour le boucher ; celui-ci, d’autre part, avait épousé une jeune fille de Ruffey, et que lui avait présenté sa belle-mère, soeur de Mme Méot.

Par intérêt immédiat ? On n’avait rien volé chez les Méot, ou tout au moins on n’avait rien retrouvé chez Pacotte qui pût provenir de chez les Méot.

Par calcul lointain ? M. Tondut s’était arrêté à l’étrange théorie suivante ; en supprimant d’un coup les trois Méot, il faisait entrer sa belle-mère en possession de la portion de l’héritage à lui revenir. Il pouvait espérer que l’affection de Mme Pacotte ne l’abandonnerait pas et se manifesterait par une inscription sur son testament. Mais outre que la bonne dame n’avait que 48 ans et que pareil legs risquait fort d’être à retardement, elle n’avait aucune raison, comme elle dira à l’instruction, de priver ses héritiers directs, des cousins germains, de ce qui pourrait leur revenir un jour. Plus encore, l’héritage de la veuve et des enfants Méot fut au total de 10.946 fr. 72, desquels la moitié revenait à la belle-mère de l’inculpé. Ç’aurait été pour courir la chance d’hériter de 5.473 fr. 36, dans vingt ans, que Pacotte eût égorgé quatre personnes ? La question est trop absurde pour mériter une réponse.

Et pourtant M. Tondut se la pose gravement ; et après lui, M. le procureur général Cunisset-Carnot, qui occupera le siège du ministère public, fera au jury l’injure de la lui poser. Mais, sentant l’absurdité de sa théorie, il battra en retraite : « Le crime de Pacotte, dit-il, est d’autant plus grand qu’il n’a été inspiré ni par la passion ni par un mobile qui aurait un semblant de raison d’exister ! » Bizarre criminel, qui tue pour rien, pour le plaisir, je dirai : par sport !

La vérité, c’est que l’accusation était fort ennuyée. Mais, comme disait M. Tondut, « elle aimait mieux tenir vingt innocents que lâcher un coupable ». Au 23 octobre, son bilan se décomposait ainsi : témoins de moralité, tous en faveur de Pacotte ; témoins contre Pacotte, en pleine déroute ; de témoignage précis sur le meurtre, un seul et unique du genre. Il n’y avait plus rien à attendre que du rapport de l’expert.

L’expertise

Celui-ci, M. Bellier, professeur à l’Ecole de médecine, dépose, le 24, les conclusions de son expertise. Sur 28 objets, vêtements, outils, lanterne, etc… saisis tant à Dijon qu’à Ruffey, un seul, un chapeau de feutre, comporte une petite tache de sang sur le derrière. Soumise à l’analyse, cette petite tache de sang, - M. le procureur général, pour obtenir un effet d’audience, la baptisera « large tache », - paraît provenir de sang humain. Et l’expert, prudent, ajoute : « Il y a des circonstances qui nous empêchent d’être complètement affirmatif ».

Par contre, les quatre décigrammes de terre grattée sur les chaussettes de Pacotte semblent être identiques à un prélèvement fait dans le champ de choux où est tombé Redon. Mais ils se rapprochent aussi sensiblement de la terre du village de Varois, où Pacotte est allé dans la matinée du 11.

De plus, on crut constater que l’ongle du pouce de Pacotte mesurait 22 millimètres 5, juste la dimension de la trace relevée sur Anaïs.

M. Tondut s’appuie sur ces éléments plutôt fragiles, comme le phare de la justice sur le rocher de l’iniquité. Il a son coupable qu’il va pouvoir jeter en pâture à l’opinion. Comment, pourquoi Pacotte est-il coupable ? Il n’en sait rien. Mais il lui faut un criminel. Il tient celui-là. Et tant pis pour celui-là.

Avec quelle complaisance accueillera-t-il des dépositions dans le genre de celle d’Albert Tissier, garçon renvoyé par Pacotte et dont l’oncle redevait encore à celui-ci 500 francs, pour récupération de quoi saisie qui avait été pratiquée ! Aussi bien y aura-t-il rétractation sur les affirmations de fait les plus compromettantes. Au besoin, il suscitera des témoignages : « un mouton » détenu à la prison de Dijon, du nom de Denis, qui, depuis la mi-septembre partage la cellule de Pacotte, viendra dire :

- Pacotte m’a parlé d’une tentative d’évasion. Il m’a dit : « Je voudrais bien aller à l’instruction. Je pourrais peut-être m’évader. »

Or, ce n’est que le 19 novembre que Denis fera cette révélation. Pourquoi, chargé qu’il était de la surveillance de Pacotte, n’a-t-il pas révélé en temps utile au gardien-chef les intentions de son co-détenu ? Il est permis d’en inférer que cet homme, d’une moralité douteuse, et tellement chargé de condamnations que le président refusera de lui en demander le nombre, a joué la partie du ministère public, dans l’espoir d’un adoucissement de peine.

Et l’avocat, demandera-t-on ?

L’avocat, Me Jacquier ? Il préparait sa plaidoirie. L’instruction était encore secrète ; l’inculpé, interrogé en l’absence de son défenseur était voué à tous les affolements ; il était le jouet d’un magistrat, porté, par tendance professionnelle, à voir un coupable en tout homme amené devant lui. Petit jeu du chat et de la souris. Et si la souris a le malheur de perdre une seconde la tête, si Pacotte essaie de fuir la griffe du chat-fourré jouant avec sa liberté et avec sa vie, c’est une culpabilité nouvelle qui se fond avec les présomptions de culpabilité anciennes.

Cependant l’instruction touchait à sa fin. Un troisième juge succède à M. Tondut. C’est M. Berland, à qui est dévolu le soin d’entendre une dernière fois Pacotte, le 29 octobre, et de dresser l’ordonnance de renvoi. Et le 1er décembre, Pacotte comparaissait devant le jury de la Côte-d’Or.

Les assises étaient présidées par M. Belin. Le procureur général en personne, M. Cunisset-Carnot, avait tenu à s’asseoir au siège du ministère public.

Ce que fut ce procès, les chroniqueurs judiciaires de l’époque l’ont dit sans ménagement : « la faillite de la justice ».  « La justice a failli à sa tâche : elle n’a rien trouvé » dira le Matin. « On est bien forcé, confesse le Gaulois, de s’apercevoir qu’il existe dans l’accusation telles lacunes que l’habileté oratoire la plus consommée sera impuissante à combler ». Et Albert Bataille, du Figaro, avouera que, sans un incident, celui du petit chien noir, incident controuvé d’ailleurs, il n’aurait jamais cessé de douter de la culpabilité de Pacotte. « Tout cela, écrivait-il, ne me satisfait point ».

Mais la foule réclamait une tête. Cette tête, M. Cunisset-Carnot suppliait le jury de la lui jeter « sans regrets, sans remords ». Dans son réquisitoire, il se livrait aux suppositions les plus hardies, sans parvenir toutefois à donner une version plausible. Et, à bout de souffle, il lançait : « Le crime de Pacotte est d’autant plus grand qu’il est plus inexplicable ». Il allait, dans son incapacité à élucider le drame, jusqu’à suspecter les relations de Pacotte et des dames Méot, alors que l’instruction avait établi la parfaite correction des rapports entre l’accusé et les victimes.

Mais l’avocat fut nettement au-dessous de sa tâche. Au lieu d’en appeler à la foule elle-même, il trembla devant elle. Au lieu de discuter pied à pied les présomptions, d’établir les lacunes de l’instruction, de combattre le réquisitoire par le réquisitoire lui-même, il se perdit en menues chicanes et donna l’impression du découragement. Dès lors, l’issue du débat était fatale.

Au bout d’une heure dix de délibération, le jury rapportait un verdict affirmatif, sans circonstances atténuantes. C’était la mort.

Le barreau dijonnais, lui, n’avait pas perdu la tête devant les hurlements de la foule ; il décida d’agir. Il signa une supplique. Et quand, le 30 décembre, le pourvoi en cassation fut rejeté, Me A. Boullier, le nouvel avocat choisi par Pacotte, entra en campagne. Il commença par s’inscrire en faux contre l’arrêt de Dijon. Le 13 février, la Cour suprême rejette cette inscription. Alors il demande et obtient une audience de Félix Faure qui, sur les instances de M. Accarias, de la Cour de cassation, signa la commutation de peine de Pacotte. Courageusement. « Si le Président de la République a quelque doute sur la popularité qu’il s’est acquise de ce chef, écrivait, le 23 février 1897, le Petit Bourguignon, il n’a qu’à tenter un voyage en Côte-d’Or ces temps-ci. Il verra comment il y sera reçu ».

Vingt-neuf ans ont passé. L’affaire Pacotte n’est pas close. Celui qui ferait la lumière aurait peut-être, à Dijon, un autre accueil que celui promis il y a vingt-neuf ans à M. Félix Faure.


III. - La révision s’impose

Le 9 novembre 1908, Pacotte, dévoré de consomption, de paludisme, de chagrin, mourait à Saint-Laurent-du-Maroni, où il exploitait depuis un an une petite concession. Malade depuis des mois, il s’était toujours refusé à enter à l’hôpital, malgré l’anémie qui vidait ses veines et l’oedème qui rongeait ses muscles. Il allait dormis sous l’implacable soleil équatorial, sans avoir eu la consolation de voir reconnaître son innocence, sauf d’un petit groupe d’amis dévoués qui, depuis dix ans, luttaient pour sa réhabilitation.

Malgré une tentative d’évasion, huit ans auparavant, le bagnard n’avait cessé de mériter, par sa tenue et sa correction, les bienveillances de l’administration pénitentiaire. C’est peut-être que l’on cherchait des aveux nécessaires à la libération de certaines consciences. Quelques mois avant sa mort, il avait été visité par M. Fonfrède, procureur de la République, qui lui avait demandé des détails sur le drame de Ruffey et l’avait pressé d’avouer. M. Fonfrède était reparti comme il était venu, sans obtenir ce qu’il désirait.

La mort de Pacotte était un coup rude pour ses défenseurs. Ils avaient eu, jusqu’au bout, l’espoir qu’ils obtiendraient son retour dans la mère-patrie pour la révision de son procès. Depuis dix ans que la lutte était engagée, jamais ils n’avaient été si près d’aboutir. Brutalement, la destinée arrêtait provisoirement leurs efforts. Pacotte, qui ne cessait, par-delà les mers, de jeter à la France ses cris d’innocence, Pacotte, qui grinçait des dents : « Je suis le transporté Pacotte, mais je devrais être Pacotte, boucher à Dijon », Pacotte, qui signait nostalgiquement : « Pacotte, Français, pas Guyanais », Pacotte était mort sans avoir eu la joie de revoir les tours géminées de Saint-Michel trouant l’azur profond du vieux ciel de Bourgogne.

Mais il restait sa mémoire. Et des hommes de bien, - ils sont trois : Me A. Boullier, son défenseur, M. Max Deschamps, un paysan obstiné de vieille souche parlementaire, originaire de Spoy, comme Pacotte ; et M. Minot, - n’ont cessé depuis lors de lutter pied à pied, accumulant les documents, battant le pays pour rassembler les témoignages, renforçant chaque jour leur argumentation.

Aujourd’hui, leur dossier est prêt. Requête a été adressée au garde des Sceaux et aux membres de la Commission de Révision. Négligences de l’instruction, faiblesse de l’accusation, faits nouveaux, tout un arsenal, d’une importance exceptionnelle, a été constitué. Et le faisceau de preuves groupées par eux est tel qu’il est impossible, aujourd’hui, en conscience, de conclure à la culpabilité de Pacotte.

Les négligences de l’instruction

Le premier souci d’un juge d’instruction aurait dû être celui-ci : « Il y a eu crime. J’ai une dénonciation. Mais émanant de qui ? On me dit que Pacotte est le criminel. Mais un autre que lui n’aurait-il pas commis le crime ? »

Donc, il aurait commencé par s’assurer de la valeur morale de ce témoin, témoin unique, témoin précieux, de Redon. Et il se serait aperçu d’abord que Redon était un repris de justice, condamné en 1881, à un mois de prison pour vol. Il se serait rendu compte, ensuite, que Redon était un dégénéré alcoolique, un déchet humain, un minus habens.

Il aurait ensuite écouté les accusations courant dans le pays contre un homme, vivant encore, et que nous désignerons par l’initiale de X… Il ne se serait pas contenté d’interroger deux fois seulement, et avec quelle rapidité ! ce dit X…, domestique renvoyé de Mme Méot, et renvoyé pour inconvenances envers Anaïs. Il aurait attaché quelque importance aux menaces proférées par X…, au moment de son renvoi, un mois auparavant. Il aurait réclamé sur X…, un rapport de police. Au besoin, il aurait perquisitionné chez X… Il se serait demandé pourquoi X… avait prétendu avoir été de battage de blé, la veille, le 11, alors qu’il n’en était rien. Il aurait été intrigué par le masque de paille et de balles sous lequel X… se dissimulait, le 12, au moment de la descente sur les lieux.

Il y a des empreintes digitales, ne serait-ce que les traces de mains ensanglantées sur le lit vide. Pourquoi ne les fait-il par relever ?

Il y a des empreintes de chaussures, dans le champ et dans la maison du crime ? Pourquoi ne vérifie-t-il pas si elles concordent avec les bottines de Pacotte ou, à leur défaut, avec celles d’un autre ?

Il ne se demande pas pourquoi la poignée de la lanterne, que Redon prétend avoir passée à l’assassin, postérieurement à un triple égorgement, n’accuse aucune trace de sang.

Il fait opérer des recherches dans un rayon de 7.000 mètres, pour retrouver la blouse et l’arme du meurtrier, mais il néglige de fouiller dans un rayon de 20 mètres.

Les erreurs de l’instruction

En trois mois, trois juges d’instruction ont successivement associé leurs efforts pour accumuler ces oublis. « C’est beaucoup, dit Candide ». Pour multiplier les erreurs, ils ne seront pas moins. « C’est beaucoup, dit Martin. »

Ils accepteront, comme parole d’Evangile, les dépositions de Redon, oublieux du brocard pourtant fondamental : « testis unus, testis nullus ».Un témoin pour trois juges : à la Cour de Dijon, en 1896, en faisait trois témoins. Ils ne s’apercevront pas des contradictions, pourtant nombreuses, de ce témoin unique. Tantôt Mme Méot est entrée seule dans l’écurie, tantôt accompagnée du criminel. Ils ne chercheront pas à savoir comment le cheval amené sur le chemin des Crais par Redon, a pu rentrer tout seul à son écurie.

Ils trouveront tout naturel que Redon soit couvert de terre, mais ne s’étonneront pas que les vêtements de Pacotte n’en portent pas trace, bien que celui-ci, d’après Redon, soit tombé sur les genoux près de lui.

Ils trouveront normal que, perdant son sang, la gorge tranchée, Redon ait pu grimper le mur de clôture de Coquibus.

Ils ne blâmeront pas les gendarmes d’avoir omis de vérifier si le lit où était couché Pacotte était chaud et gardait l’empreinte d’un corps.

Ils ne s’émeuvent pas de l’absence de toute trace de sang humain sur les vêtements de Pacotte.

Ils retrouvent toutes les blouses et tous les couteaux de Pacotte. Aucune trace de sang. C’est que la blouse et le couteau ont été volés. A qui ? Ils ne cherchent pas à le savoir.

Ils ne s’inquiètent pas de savoir comment un homme qui a fait 14 kilomètres sous la pluie a pu garder ses vêtements secs.

Ils qualifient « large » une tache que l’expert traite de « petite ».

Ils n’examineront pas les ongles de Pacotte et ne les contremensureront pas : sinon, ils se seraient aperçus que le plus grand avait 14 m/m 5 et non 22 m/m 5, inférieur par conséquent à la trace relevée sur Anaïs.

Ils s’extasieront sur la précision des coups portés aux victimes, alors que ceux portés à Redon étaient rien de moins que précis.

Ils s’étonneront qu’une boutique qui ferme à huit heures, ne permette à son propriétaire, seul exploitant, d’aller à son écurie que la besogne quotidienne terminée.

Ils jugeront anormal que soient humides les chaussettes d’un boucher qui a lavé son carreau à grande eau.

Ils traduiront « réservé » par sournois, et « économe » par intéressé.

Ils taxeront de cupidité un homme qui a préféré une jeune fille qui lui plaisait avec 4.000 francs de dot, à une autre jeune fille qui ne lui plaisait pas avec 10.000.

Quand cet homme reste calme, c’est pour eux le sang-froid du grand criminel ; quand cet homme, torturé moralement, s’emporte, c’est pour eux la violence du grand criminel.

Les faits nouveaux

Lorsque la justice accuse une telle carence, carence poussée au point qu’aujourd’hui encore, un magistrat, récemment chargé d’une enquête sur ce sujet, écrivait, le 25 juin dernier : « Je ne suis pas juge d’instruction, et je ne procède pas à une enquête contradictoire ; je ne communiquerai (à l’avocat de Pacotte) aucune pièce et ne commettrai aucun expert. Je n’engagerai pas un sou de dépense, ne ferai pas un acte, n’écrirai pas une ligne de plus », c’est à l’opinion qu’il appartient de prendre l’affaire en main.

L’enquête, menée depuis 1897 par les défenseurs de Pacotte, a révélé vingt faits nouveaux. Ils méritent d’être pris en considération par la Cour Suprême. Pour nous, nous ne nous arrêterons qu’aux plus importants.

L’assassin était boucher. X… avait été boucher.

L’assassin avait une blouse et un couteau. La blouse et le couteau ont été retrouvés en janvier 1908 par M. Armand Desfray, locataire de la maison Méot, dans un fossé voûté longeant l’entrée de la cour. La blouse portait les initiales X… Or, X… avait une blouse qui disparut le lendemain du crime.

L’assassin a demandé de l’eau-de-vie. Pacotte était sobre ; X… était buveur.

L’assassin était gaucher. Les coups portés par devant ont atteint les victimes à droite ; les coups portés par derrière ont atteint les victimes à gauche. Pacotte était droitier ; X… était gaucher.

X…, de plus, désirait Anaïs ; il lui avait annoncé que son mariage ne se ferait pas, X… n’avait cessé de menacer Mme Méot. X… n’avait cessé d’user d’intimidations envers les témoins.

L’on reconstitue très bien le crime. Mme Méot vient de toucher 1.800 fr. pour son blé. On ne retrouvera cette somme ni chez elle, ni chez Pacotte. X…, pour assouvir sa vengeance et sa cupidité, s’entend avec Redon ; il a la même voix que Pacotte, entre chez Mme Méot, commet son forfait, va partager avec Redon le fruit du vol. Il veut supprimer un témoin gênant, le manque, mais lui jette, pour dernier avertissement : « Si tu n’accuses pas Pacotte, tu es complice. » Redon comprend. Mais quel malheur pour lui que ses témoignages aient varié !

La demande en révision

Une demande en révision est introduite devant le garde des Sceaux. Il est impossible de la passer sous silence. L’honneur du mort la réclame, la moralité publique l’exige. Aucune raison d’Etat, aucun esprit de corps, ne peuvent s’opposer à la vérité. Quelle crise morale pourrait se déchaîner chez les humbles dans un conflit après la Justice et les juges !

Pour obtenir la réhabilitation de Pierre Vaux, la Bourgogne a attendu quarante-cinq ans. En voici trente qu’un soupçon d’erreur plane sur la Cour de Dijon. Devrons-nous attendre encore vingt ans ? Un délai d’un demi-siècle, est-ce la durée suffisante et nécessaire à la révision d’une erreur ?

Il y a quatre morts : Mme Méot, Anaïs, Félicien, innocentes victimes d’un assassin ; Pacotte, victime d’une erreur. Faudra-t-il qu’il y en ait une cinquième : l’honneur de la Magistrature ?

~~~

Mais dans l’angoisse qui nous étreint, nous éprouvons un immense réconfort à apprendre que le dossier, constitué à grand’peine par Me Boullier, est en ce moment entre les mains de M. Gilbert, directeur des Affaires criminelles et des Grâces au ministère de la Justice. Cet homme de coeur, ce magistrat distingué, ce criminaliste éminent qui s’imposa lors de l’affaire Landru, ne pourra manquer de s’émouvoir, comme nous nous sommes émus nous-mêmes, au vu de tant d’incohérences et de tant de contradictions. Et sa haute conscience saura éliminer la passion et déjouer l’intrigue pour faire triompher l’idéal humain le plus élevé : le Droit.


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