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[Jean-Baptiste de Brébisson] : Diverses espèces de pommiers cultivés en Normandie(1840)
[BRÉBISSON, Jean-Baptiste de (1760-1832) ] : Diverses espèces de pommiers cultivés en Normandie (1840).
Saisie du texte : O. Bogros pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (04.III.2016)
[Ce texte n'ayant pas fait l'objet d'une seconde lecture contient immanquablement des fautes non corrigées].
Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Courriel : mediatheque@lintercom.fr, [Olivier Bogros] obogros@lintercom.fr
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Diffusion libre et gratuite (freeware)
Texte établi sur l'exemplaire de la Médiathèque (Bm Lx : Norm 850) de l'Annuaire des Cinq Départements de l'Ancienne Normandie, 7e année, 1841, publié en 1840 à Caen par l'Association Normande chez A. Le Roy.


DIVERSES ESPÈCES
DE
POMMIERS A CIDRE
cultivées en Normandie.

~ * ~


Depuis quelques années, l’agriculture, qui a fait tant de progrès en Normandie, est restée stationnaire quant à la fabrication de la boisson connue sous le nom de cidre. On apporte souvent la plus grande négligence dans le brassage, et l'Association se propose de publier prochainement quelques instructions à ce sujet ainsi que sur les pommes qui produisent le meilleur cidre. Il est évident que la qualité des fruits influe considérablement sur celle de la boisson, quelle que soit d'ailleurs l'influence du terrain qui les produit. Telle espèce de pommes donne un cidre plus léger, d'un goût plus agréable que telle autre espèce ; et si l'on faisait plus d'attention aux proportions dans lesquelles doivent être combinés les fruits qui produisent le meilleur cidre, on arriverait à des résultats tout autres que ceux que l'on obtient le plus généralement.

Quelques cultivateurs ont fait cette étude pour eux seuls, mais aucuns, que nous sachions, n'ont communiqué leurs observations ; elles n'ont jamais été consignées dans aucun ouvrage d'agriculture, et l’Association, en consacrant, dans le cours de ses enquêtes, un certain nombre de questions sur les qualités diverses obtenues par telle ou telle espèce de pommes, pourra, plus tard, publier quelques documents utiles sur ce sujet.

Avant tout, elle croit devoir attirer l'attention sur la nomenclature des pommiers cultivés dans le pays, et réimprimer le catalogue qu'en avait donné feu M. de Brébisson, de Falaise, savant naturaliste et consciencieux observateur. Ce catalogue peut bien n'être pas complet. Peut-être aussi que certaines espèces qu'on y trouve mentionnées sont aujourd'hui à peine cultivées dans le pays ; car on remarque chez les agriculteurs une tendance à simplifier la culture du pommier, en la ramenant à un petit nombre d'espèces ; et depuis quelque temps, nous avons vu planter seulement sept à huit espèces de pommiers sur des terres où l'on en voyait plus de quarante espèces différentes il y a trente ans. Quoi qu'il en soit, le catalogue de M. de Brébisson est très-précieux, et un merveilleux travail que l'on possède sur ce sujet.

CATALOGUE DES POMMIERS A CIDRE.

Les espèces marquées d'une astérisque (*) sont celles dont la désignation est présentée comme certaine et résultant d'une confrontation directe faite par M. de Brébisson lui-même ; la désignation des autres espèces, sans offrir la même garantie, lui a cependant été indiquée par des agronomes et des observateurs dignes de confiance. Les pommiers, selon l'usage général indiqué par la nature, sont rangés sous trois grandes classes : ceux de première saison ou précoces, ceux de seconde saison, enfin ceux d'arrière-saison ou tardifs.


POMMIERS PRÉCOCES OU DE PREMIÈRE SAISON.

* Girard, amère. Bonne espèce, très-productive. Cidre de bonne qualité. Pays d’Auge, Bessin, Bocage, Ille-et-Vilaine, Manche, Falaise. — Papillon, Renouvelet, Seine-Inférieure.

Lente-au-Gros. Deux espèces. Douces. Bonnes espèces. Cidre un peu clair. Pays d’Auge, Eure. — Moussette, Ille-et-Vilaine.

Louvière, amère. Mauvaise espèce. Peu productive. Cidre de peu de durée. Bessin, Cotentin, Bocage.

* Rélet. Deux espèces. Douces. Bonnes espèces, très-fertiles. Cidre Léger et bon. Bessin, Manche. — Coqueret, Falaise, Orne, pays d'Auge, Seine-Inférieure.

Castor, douce. Mauvaise espèce. Cidre clair et peu durable. Bessin.

Cocherie-Flagellée, douce. Bonne espèce, très-fertile. Cidre délicat. Avranches.

Gai, douce-amère. Petit fruit, sec, fertile. Cidre qui n'est bon que la seconde année ; se conserve trois ou quatre ans. Ille-et-Vilaine, Manche, Bessin.

* Doux-Veret, douce. Très-bonne et très-féconde espèce. Cidre de bonne qualité. Bessin, pays d’Auge, Orne, Manche, Bocage. — Musel, Doux-à-Mouton, Seine-Inférieure. —
Rouge-Bruyère, Gournay, Falaise, Lisieux.

Guillot-Roger, douce. Bonne et très-fertile espèce. Cidre délicat. Pays d’Auge, Bocage.

Saint-Gilles, douce. Très-productive. Cidre léger. Cotentin. — Longue-Queue, Bocage.

* Blanc-Doux, douce. Très-bonne espèce. Cidre épais qui s'éclaircit et devient bon. Bocage, Falaise. — Blanchet, Doux-de-la-Lande, Bessin, — Gros-Blanc, Lisieux.

* Haze, douce. Très-bonne espèce. Cidre excellent. Bocage, Bessin, pays de Caux, Eure, Falaise.

* Renouvelet, douce. Petite, mais très-bonne et très-productive espèce. Cidre excellent. Pays d'Auge, Cotentin, Ille-et-Vilaine, Eure, Orne, Falaise.

* L'Épicé, douce. Bonne espèce, mais peu productive. Bon cidre. Eure, pays d'Auge. — Bellefille, Petit-Dammeret, Aumale, Petit-Retel, Aufrielle, Pont-Audemer. — Pomme-de-Lièvre de Gournay. —Doucet, Falaise, Lisieux.

Fausse-Varin, amère. Bonne espèce. Pays d'Auge, Bernay.

Orpolin-Jaune, douce. Bonne espèce. Bon cidre. Pays d'Auge.

Greffe-de-Monsieur, douce. Bonne espèce. Cidre clair et léger. Cotentin, Avranches, Ille-et-Vilaine. Elle a le mérite de fleurir tard.

Court-d'Aleaume, amère. Peu productive. Fleurit tard. Cidre bon et bien coloré. Pays d’Auge, Cotentin.

* Amer-Doux-Blanc, douce-amère. Très-bonne et productive espèce. Cidre bon et durable. Cotentin, Bessin, Eure, Orne, Seine-Inférieure, Somme, pays d'Auge, Bocage, Falaise.

Quenouillette, douce. Peu productive. Fruit petit. Cidre clair et bon. Orne, pays d'Auge.

Blanc-Mollet, douce-amère. Bonne espèce, très-productive et durable. Cidre bon, qui se conserve long-temps. Pays d'Auge, Eure. — Douce-Morelle-d''Aumale, Grande-Vallée, Gournay, pays de Caux, Boumois, Oise.

Jaunet, douce. Bonne espèce, productive. Cidre bon et durable. Eure, Orne, pays d'Auge. — Gannel, de Gournay.

Groseillier, douce. Bonne espèce, très-fertile. Cidre clair et durable. Pays d'Auge, Cotentin. — Berdouillère, Queue-de-Rat, Janvier, Seine-Inférieure, Oise.

Doux-Agnel, douce. Bonne et fertile espèce. Cidre clair, agréable, mais de peu de durée. Bocage, Cotentin, pays d'Auge, Somme, Bessin.


POMMIERS MOYENS OU DE SECONDE SAISON.

* Fréquin, amère. L'une des meilleures et des plus productives espèces. Cidre excellent et durable. Pays d’Auge, Bessin, Cotentin, Manche, Ille-et-Vilaine, Orne, Eure, Seine-Inférieure, Oise, Somme, Bocage, Falaise.

* Petit-Court, douce. Bonne et fertile espèce. Cidre bien coloré, agréable et de longue durée. Bessin, Manche, Bocage.

* Doux-Evêque, douce. Bonne espèce Cidre clair, léger, agréable et de peu de durée. Eure, Orne, Ille-et-Vilaine, Manche, Cotentin, Bessin, Bocage, Falaise, pays d'Auge, Seine-Inférieure, Somme, Oise.

Paradis, douce. Espèce médiocre et de peu de durée. Cidre peu estimé. Cotentin, Seine-Inférieure.

Varelle, douce. Mauvaise espèce. Cotentin, Bessin.

Herouet, douce. Bonne et fertile espèce. Cidre excellent et nourrissant. Bessin, Cotentin, Bocage, pays d'Auge.

Gros-Bois, Mouronnet, Avocat, douces. Bonnes espèces qui ne sont connues que dans le Bessin.

* Amer-Doux, amère. Très-bonne et très-productive espèce. Cidre fort et durable. Eure, Cotentin, Bessin. — Gros-Amer, Falaise.

Saint-Philibert, douce. Bonne espèce, très-fertile. Cidre fort, très-coloré et de longue durée. Pays d'Auge, Cotentin, Eure. — Bonne-Sorte, Grande-Sorte, Seine Inférieure.

Douce-Ente, douce. Espèce médiocre, assez productive. Cidre léger, peu durable. Pays d'Auge, Cotentin. — Clos-Ente de l'Eure. — Verte-Ente de Bernay.

Chargiot, douce. Mauvaise espèce. Pays d'Auge.

* Long-Pommier, douce. Bonne espèce, fertile. Cidre délicat. Pays d’Auge, pays de Caux, Manche, Eure. — Etiolé de Falaise.

Cimetière, douce. Bonne, très-productive. Cidre très-coloré et durable. Pays d'Auge, Bernay. — Blagny, Eure.

* D'Avoine, douce. Bonne espèce, produit beaucoup. Cidre ambré, très-bon et très-durable. Eure, Orne, Ille-et-Vilaine, Cotentin, Bocage, pays d'Auge, Seine Inférieure, Somme. — Grosse-Queue, Falaise.
 
* Ozanne, douce. Très bonne espèce, charge beaucoup. Cidre excellent et bien coloré. Pays d'Auge, Bessin, Seine-Inférieure, Oise, Somme, Falaise. — Orange, Manche, Bocage.

* Gros-Doux, douce. Bonne et fertile espèce. Cidre bon et agréable. Bessin, Manche, Ille-etVilaine, Falaise. — Binet, Gros-Binin, Seine-Inférieure.

* Moussette, amère. Bonne espèce, très-productive. Cidre bon et durable. Manche, Bocage, Orne. — Amer-Mousse, Noron, Falaise.

Cusset, amère. Espèce peu connue. Environs d'Avranches.

De Roi, douce. Avranches.

* Gallot, douce. Petite, mais bonne espèce, très-fertile. Cidre ambré, agréable, mais de peu de durée. Orno, Manche, Bessin, Bocage, Falaise.

* Pépin-Percé, ou Doré, ou Noir, douce. Espèce qui produit beaucoup. Cidre léger, bon, peu durable. Eure, Orne, Manche, Bessin, Falaise, Somme, Oise.

* Damelot, amère. Bonne espèce. Bon cidre, léger, mais durable. Orne, pays d'Auge, Bocage, Falaise.

* Rouget, douce. Espèce très-productive. Cidre agréable, mais peu coloré et de courte durée. Eure, Manche Orne Cotentin, Falaise. — Rouge-Pottier, pays d'Auge. — Gros-Ecarlate, Gros-Rouget, Seine-Inférieure.

Cul-Noué, amère. Bonne espèce, produit beaucoup. Cidre excellent et très-durable. Cotentin, pays d'Auge, Eure, Ille-et-Vilaine. — Ennouée, Queue-Nouée, Seine-Inférieure.

Piquet, amère. Espèce médiocre. Cidre pâle et peu durable. Seine-Inférieure.

Menuet, douce. Espèce peu fertile. Cidre de bonne qualité. Manche, Ille-et-Vilaine.

Peau-de-Vache. Variété précoce. Douce. Bonne espèce. Cidre bon et agréable. Environs de Lisieux.

Souci, douce. Bonne, mais petite espèce, fruit abondant. Cidre bon et durable. Cotentin, pays d'Auge, pays de Caux, Eure, Ille-et-Vilaine.

Chevalier, douce. Bonne espèce. Cidre agréable à l'œil et au goût. Cotentin, pays d'Auge.

Blanchette, douce. Bonne et fertile espèce. Cidre excellent. Environs de Lisieux et de Bernay.

Jean-Almi, douce. Espèce qui donne de bon cidre. Cotentin.

Turbet, douce. Bonne et productive espèce. Cidre très-spiritueux. — Turbat-Caput, Cotentin, Eure, pays d'Auge, Oise.

Becquet, douce. Bonne et très-fertile espèce. Cidre excellent, riche en couleur et durable. Manche, Eure.

* Cappe, douce. Bonne espèce, produit peu. Cidre bon et durable. Bessin, Cotentin, pays d’Auge, Falaise.

Doux-Ballon, douce. Bonne espèce. Bon cidre. Cotentin.

* L'Epicé, douce. Bbonne espèce. Très-bon cidre. Manche, Orne, Ille-et-Vilaine. — Doucet, Falaise, pays d'Auge.

Doux-Dagorie, douce. Espèce aussi peu estimée pour sa qualité que pour son produit. Cidre coloré, mais faible. Bessin, Orne, Bocage.

Feuillu, douce-amère. Espèce médiocre. Cidre épais qui s'éclaircit. Pays d'Auge, Bessin.

De Rivière, douce. Bonne espèce. Cidre délicat et ambré. Bocage, Orne, Bessin, Manche.

Préaux, douce. Bonne, mais petite espèce, très-fertile. Cidre clair, ambré et durable. Bessin, Cotentin, pays d'Auge, Bocage.

Guibour, douce. Espèce peu connue, dont on vante le cidre dans le Bessin.

Varaville, douce. Bonne et fertile espèce. Cidre coloré, fort et durable Cotentin, pays d'Auge, Bessin, Eure.

Colin-Antoine, douce. Espèce médiocre. Cidre peu estimé. Seine-Inférieure. — Colin-Jean, environs de Lisieux.

Hommée, douce. Grosse et bonne espèce. Cidre léger, peu durable. Orne, Bocage, Ille-et-Vilaine, Somme.

* De Cote, douce. Grosse et bonne espèce, très-productive. Bon cidre. Pays d'Auge, Orne, Bocage, Falaise.


POMMIERS TARDIFS OU DE TROISIÈME SAISON.

* Germaine, douce. Bonne espèce, très-productive. Cidre excellent, bien coloré et durable. Pays d'Auge, Seine-Inférieure, Somme, Oise, Bocage, Bessin, Manche, Ille-et-Vilaine, Orne, Eure, Falaise.
 
* Reboi, douce. Bonne et productive espèce. Cidre bon et durable. Orne, Falaise, Bocage, Manche, Ille-et-Vilaine, Eure.

* Marin-Onfroi, douce. Très-bonne espèce, très-fertile. Cidre excellent. Eure, Orne, Ille-et-Vilaine, Manche, Bessin, Bocage, Falaise, pays d'Auge, Seine-Inférieure, Oise, Somme.

* Sauge, amère. Bonne espèce, produit peu. Cidre clair et agréable. Eure, Orne, Manche, Bocage, Falaise, pays d'Auge, Seine-Inférieure.

* Barbari, douce. Espèce très-fertile. Cidre fort en couleur, s'éclaircit la seconde année. Eure, Orne, Ille-et-Vilaine, Manche, Bessin, Bocage, Falaise, pays d'Auge, Seine-Inférieure, Somme, Oise.
 
* Peau-de-Vache, douce. Bonne et féconde espèce. Cidre excellent et durable. (On en connaît deux variétés dans le pays d’Auge) Eure, Orne, Manche, Bocage, Falaise, pays d'Auge, Seine-Inférieure, Oise.

Messire-Jacques, amère. Bonne, mais peu fertile espèce. Cidre clair, délicat et peu durable. Orne, Manche.

* Bédan, douce. Bonne espèce, produit beaucoup. Très bon cidre, mais un peu clair. Ille-et-Vilaine, Manche, Bessin, Bocage, Orne, pays d'Auge, Eure, Seine-Inférieure, Somme, Oise, Falaise.

* Bouteille, douce (deux variétés). Bonne espèce, très fertile (à piler avant sa maturité). Cidre agréable et coloré. Pays d'Auge, Bocage, Orne, Seine-Inférieure, Falaise.

La Petite-Ente, douce. Espèce extrêmement tardive. Bon cidre, très-coloré. Pays d'Auge.

Duret, douce. Espèce très-vantée pour son cidre clair et spiritueux. Bocage, Eure.

Œil-de-Bœuf, amère. Espèce médiocre, mais fertile. Cidre faible et peu durable. Bocage.

Haute-Bonté, amère. Bonne et fertile espèce. Cidre délicat, bien coloré, peu durable. Bocage, Seine-Inférieure, pays d'Auge.

* De Chennevière, amère. Espèce très-productive. Cidre clair et de médiocre qualité. Manche, Orne, Bocage, Falaise.

* De Massue, douce. Bonne et féconde espèce. Cidre très-fort et durable. Bessin, Bocage, Manche, Ille-et-Vilaine, pays d'Auge, Falaise.

De Cendres, amère. Bonne et fertile espèce. Cidre ambré, très-agréable au goût. Bessin, Bocage, Orne.

Aufriche, douce. Bonne espèce, peu fertile. Cidre excellent, ambré et durable. Eure, Orne, Ille-et-Vilaine, Manche , Bessin, Bocage.

* Fossette, douce. Bonne et fertile espèce. Bessin, Falaise.

Ros, douce. Prépetit, amère. Espèces estimées dans le Bessin.

Grimpe-en-Haut, amère. Espèce peu productive. Arbre ayant un port élevé. Cidre agréable et durable. Bessin. — Long-Bois, pays d'Auge. — Haut-Bois, Menerbe, Seine-Inférieure.

Saux, douce-amère. Bonne, mais peu fertile espèce. Cidre excellent et durable. Bessin, Manche.

Pétas, amère. Espèce connue et estimée dans le Bessin.

Doux-Bel-Heur, douce. Bonne et fertile espèce. Cidre clair et durable. Cotentin, pays d'Auge, Eure.

Camière, douce. Grosse et bonne espèce. Cidre très-bon et durable. Bessin, Cotentin, Eure, pays d'Auge.

Sauvage, douce. Grosse et bonne espèce, très-fertile. Cidre très-coloré, excellent et de longue durée. Cotentin, Bessin, Orne, pays d'Auge.

* Gros-Doux, douce. Belle et bonne espèce. Cidre bon et agréable. Bessin, Bocage, Orne, Eure, Seine-Inférieure, Falaise.

Sapin, douce. Belle et bonne espèce. Cidre de belle couleur et durable. Bessin, Eure, Manche, Seine-Inférieure.

Doux-Martin, douce. Bonne espèce. Cidre excellent, ambré et durable. Manche, Ille-et-Vilaine, Eure, Orne. — Saint-Martin, Rouge-Mulot, pays d'Auge.

Muscadet, douce. Bonne, mais petite espèce, très-féconde. Cidre bon et durable. Eure, Manche, Orne, pays d'Auge.

Boulemont, douce. Espèce médiocre. Cidre clair et peu durable. Pays d'Auge.

Tard-Fleuri, douce. Deux variétés bonnes et fertiles. Cidre bon et agréablement coloré. Ille-et-Vilaine, Manche, Eure, Seine-Inférieure, pays d'Auge.

A-Coup-Venant, douce. Belle et bonne espèce, très-fertile. Cidre clair, délicat, mais peu durable. Manche, Orne, Seine-Inférieure.

Adam, douce. Bonne espèce, peu fertile. Cidre riche en couleur, fort et durable. Bessin, pays d'Auge.

De Suie, amère. Espèce médiocre, peu productive. Cidre fort, épais, qui s'éclaircit la troisième année. Pays d'Auge, Bernay.

Gros-Charles, douce. Espèce peu prisée quoique fertile. Cidre clair et peu durable. Seine-Inférieure, Somme.

La Sonnette, douce. Espèce médiocre. Cidre sans qualité. Seine-Inférieure, Somme, Oise, Eure.

Jean-Huré, douce. Espèce très-vantée, peu connue en Normandie. On la dit très-bonne, très-fertile, et donnant un cidre excellent.


Nous croyons devoir faire suivre ce Catalogue de quelques principes sur la culture des pommiers à cidre, que nous allons tirer du Mémoire de M. de Brébisson et du Bulletin de la Société d'agriculture, sciences et belles-lettres du Mans.


CULTURE DU POMMIER.

« Le moyen de cultiver le pommier à cidre avec succès et de former soi-même des pépinières, est de les placer dans un sol voisin ou analogue à celui où l'on se propose de planter. Lorsque l'on aura à choisir entre un terrain très-gras et très-riche ou un terrain médiocre, il sera toujours sage de donner la préférence au dernier. On donnera au terrain un ou deux labours, afin de le bien nettoyer de toutes les mauvaises herbes qui pourraient nuire à la plantation que l'on se propose de faire. On dresse le terrain en planches de deux à trois pieds de large ; on sème à la volée, avant ou après l'hiver, mais mieux avant, les pépins que l'on a choisis Nous disons choisis, parce qu'il est d'usage que l'on tire ces mêmes pépins du marc ou résidu des pommes pilées. Il en résulte qu'une partie de ces pépins, qui ont été fortement froissés ou même écrasés, lèvent fort mal ou ne lèvent point du tout. Il vaut donc beaucoup mieux , à l'époque de la maturité des pommes, choisir sur les arbres, ou dans le monceau de pommes cueillies, les plus beaux fruits et les meilleures espèces connues, soit relativement à la qualité du cidre, soit relativement à leur fécondité, et les garder jusqu'à ce qu'elles commencent à pourrir. Alors on en ôte les pépins, que l'on sème tout de suite ou que l'on garde fraîchement dans du sable, si l'on ne sème qu'au printemps. De cette manière on aura semis choisi, qui ne peut que contribuer plus efficacement au succès de l'opération.

Comme il arrive souvent que, par cette voie des semis, on obtient des variétés, même des espèces nouvelles, il sera à propos, si l'on a ce projet en vue, de faire un choix de pépins comme nous venons de l'indiquer ; il faudra aussi que le terrain où l'on se propose de les planter soit très-amélioré, ou mieux encore qu'il soit réduit en terreau. Les soins à donner au semis ne consistent qu'à le sarcler, l'arroser légèrement dans les grandes sécheresses, et éclaircir un peu le plant, s'il était trop abondant. Il sera prudent de le mettre aussi à l'abri des grands froids, en le couvrant avec un peu de longue paille.

Un an après, c'est-à-dire au printemps suivant, on arrache le jeune plant, en prenant les précautions nécessaires pour conserver les racines aussi entières qu'il sera possible. M. de Brébisson excepte le pivot, qu'il regarde comme essentiel à supprimer. Le jeune arbre, dit-il, forcé, par le retranchement de cette racine, de tirer les sucs nourriciers dont il a besoin des racines latérales, celles-ci se multiplient, se fortifient et commencent d'avance à prendre la direction qu'elles auront dans l'arbre adulte.

En faisant choix d'un terrain convenable pour mettre le plant que l'on vient d'arracher, on a dû se fixer sur celui qui avait de l'analogie avec le verger que l'on se propose de former ou de replanter. Un terrain neuf est celui qu'il faut préférer ; et, si l'on est obligé de l'améliorer, on emploiera un terreau végétal, c'est-à-dire composé de débris de végétaux, préférablement à tout engrais tiré des animaux ; et si enfin, pour rendre cet engrais plus substantiel, on était obligé de recourir au fumier, celui de vache serait le plus convenable. On doit être fort économe de cette dernière ressource, le fumier étant regardé comme une des principales causes des chancres qui attaquent souvent les pommiers.

Les préparations-nécessaires à donner au terrain consistent à le fouir le plus profondément qu'il sera possible, pour bien ameublir la terre et la nettoyer de toutes les mauvaises plantes qu'elle pourrait contenir. S'il s'agit de la pépinière à obtenir des variétés ou des espèces nouvelles, il faudra encore renchérir sur les engrais et les améliorations à donner au terrain. Ensuite on procédera à la plantation des jeunes pommiers. On fera des rigoles dont la largeur sera proportionnée à leurs racines. On les y placera, en ayant soin de les tenir au moins à deux pieds de distance, en tous sens, les uns des autres. Ce travail fini, les soins se borneront à un petit labour au printemps, qu'il sera à propos de renouveler automne. Après ce dernier, on couvre le sol avec du chaume, de la fougère, de la bruyère, ou des feuilles. Cette précaution met les racines et le pied des arbres à l'abri des grandes gelées, et fournit un engrais que l'on enfouit en donnant le labour du printemps.

» A deux ans de la dernière plantation, on coupe an printemps tous les jeunes arbres par le pied. Cette opération qui se fait en bec de flûte avec la serpette, A pour but de fortifier les racines, et de donner aux nouveaux jets une tige plus élancée, plus nette, plus saine et plus vigoureuse. Quelques cultivateurs se refusent à cette pratique ; M. de Brébisson la regarde comme très-avantageuse.

Au mois de juillet suivant, on supprime tous les jets, excepté celui qui est le plus fort, le plus vigoureux, et dont la direction la plus droite donne les meilleures espérances. Ce dernier, étant celui sur lequel se fixe l'attention du cultivateur, sera celui qui aura tous ses soins. A ceux dont nous avons parlé, il va falloir désormais joindre la taille : le printemps est l'époque la plus favorable. La sève de celle saison étant la plus abondante, recouvrira mieux d'écorce les plaies un peu considérables que l'on aurait faites. Le but étant d'avoir des arbres droits et vigoureux, il faudra conserver, aux dépens des autres, la tige dont la direction sera la plus perpendiculaire. Si cependant, malgré tous les soins que l'on aura pris, une branche latérale, de celles que l'on appelle gourmandes, se trouve beaucoup plus forte et plus vigoureuse que la tige principale, il faudra lui sacrifier cette dernière, et faire prendre à celle que l'on conserve la direction à laquelle elle est destinée. Il en sera de même si votre arbre forme quelques fourches avant d'avoir atteint la hauteur d'au moins six pieds ; il faudra supprimer la branche la plus faible de chaque fourche. Les plaies qui résultent de ces diverses amputations doivent toujours être faites avec autant d'économie que de prudence, afin d'éviter les inconvénients qui pourraient en résulter, soit en rendant l'arbre plus faible, quelquefois difforme, quelquefois même en lui occasionant des chancres.

Lorsque le sujet a atteint la hauteur convenable de six à huit pieds, on l'y arrête en l’étêtant. Alors il forme une tête, et la sève plus puissamment attirée par les nouvelles branches, fortifie et fait grossir le haut du tronc. Quand il est de grosseur à recevoir la greffe, on achève de supprimer toutes les branches qui se trouvent au-dessous de la plaça où l'on compte greffer. Ces plaies se recouvrent dans l'année, et l'on greffe au printemps suivant.

La greffe en fente, que tout le monde connaît, est la meilleure. Quelques cultivateurs préfèrent mettre leur sujet en place, et le greffe un ou deux ans après ; M. de Brébisson pense qu'il est plus avantageux de greffer dans la pépinière, et mettre en place deux ans après. Sa raison est que le sujet, n'ayant pas souffert par la transplantation, doit être mieux disposé à recevoir et à transmettre à la greffe les sucs nécessaires pour la faire reprendre. La situation toujours plus soignée de la pépinière mettra aussi la jeune greffe à l'abri de beaucoup d'accidents qu'elle aurait à craindre en plein champ.
 
» Après six ou sept ans de soins, et souvent avant, un cultivateur reçoit la récompense qu'il a lieu d'attendre d'une pépinière qui a été bien conduite. C'est à cet âge que les sujets sont bons à greffer. Un amateur de variétés ou d'espèces nouvelles, attendra que ses sujets aient produit, et ne se décidera à les greffer qu'après s'être assuré de l'imperfection de ses essais. Par-là il sera encore à portée de savoir plus sûrement lesquels de ces mêmes sujets sont précoces, moyens ou tardifs, et d'adapter, à chacun la greffe avec laquelle il a naturellement plus d'analogie. Il n'oubliera pas davantage que les greffes doivent être choisies sur les arbres les plus sains, les plus vigoureux, et prises par préférence sur le côté exposé au midi. Il poussera l'attention jusqu'à remarquer la situation du sujet dans la pépinière ; et, lorsqu'il le mettra en place, il aura soin de tourner au sud le côté de l'arbre qui, dans la pépinière, avait cette même direction.

C'est au mois de mars que l’on greffe. Une température douce, sans, sécheresse comme sans humidité, est la plus convenable. Les vents d'ouest et de sud étant ceux qui contribuent à nous donner cette température, il n'est pas hors de propos de les indiquer comme ayant de l'influence sur le succès de cette opération.

C'est une chose bien connue que la greffe sert non seulement à conserver les espèces, mais qu'elle les perfectionne à tel point, qu'un arbre que l'on greffe plusieurs fois avec la même espèce va toujours s'améliorant de plus en plus, en raison du nombre de fois qu'il aura été greffé.

Il est également d'expérience que le pommier de reinette franche, dont les branches se couvrent fréquemment de chancres, n’a que très-rarement cet inconvénient lorsque sa greffe a été placée sur un arbre précédemment greffé. On assure que le pommier de doux-évêque offre,  plus que tout autre, cet heureux préservatif.

Si l'on a en vue de former un verger, il faut planter en quinconce ; dans les terres labourables on doit planter en lignes croisées. Cette disposition s'accorde mieux avec les mouvements de la charrue. Quant à la distance émettre entre chaque arbre, elle doit être relative au terrain, et telle qu'il se trouve entre chaque tête d'arbre un espace vide égal à celui qu'occupe la tête d'un pommier. Si l'on plante en avenue ou en ceinture, c'est-à-dire autour d'un champ, il suffira que les arbres soient assez éloignés les uns des autres pour que leurs branches ne se croisent pas.

Les fosses destinées à les recevoir doivent être faites quelques mois d'avance. Elles seront proportionnées et relatives au sol dans lequel on plantera. Dans un sol léger, elles seront profondes, afin que les racines trouvent et conservent plus de fraîcheur. Il en sera tout autrement si le sol inférieur est argileux. En creusant dans celui-ci au-dessous du sol cultivé, il en résultera une espèce de citerne, dans laquelle les racines pourriront. Dans un bon terrain, la fosse a ordinairement deux pieds de profondeur et quatre pieds de diamètre.

En la creusant, on fait un monceau de tous les gazons qui en couvraient la surface ; on en fait également un de la terre végétale, et la terre que l'on tire du fond de la fosse forme un troisième tas.

L'arbre doit être enlevé de la pépinière de manière à lui conserver toutes ses racines, et à ce qu'elles soient aussi entières que possible.

Dans les terrains secs, on plantera en automne. Dans un sol frais ou humide, il vaudra mieux planter au printemps. On commencera par jeter au fond de la fosse le gazon, que l'on aura soin de briser. On le couvrira d'une légère couche de terre végétale, sur laquelle on placera le pommier, dont on étendra soigneusement les racines, ayant pour but de les tenir le plus éloignées que l'on pourra les unes des autres ; ensuite on répandra dessus le reste de la terre végétale, que l'on aura bien ameublie. S'il se trouve un second étage de racines, on doit prendre avec lui les mômes précautions qu'avec le premier.
Parvenu à l’âge où il commence à produire, le pommier réclame encore quelques soins, tels que de donner des labours à ceux qui, plantés dans un verger ou dans un herbage, n'ont pas la ressource des engrais, dont jouissent ceux qui se trouvent dans les terres labourables. Un bon agronome ne laisse pas s'écouler trois années sans enlever les gazons qui entourent ses arbres dans un rayon de cinq à six pieds de diamètre. Cette opération, qui se fait avant l'hiver, a pour but de faire arriver plus directement aux racines les principes qui viennent des neiges et autres météores de l'hiver. C'est encore un moyen de détruire les chrysalides des chenilles qui s'étaient enterrées au pied de l'arbre.

Dans les terrains frais, on recommande l'usage de la marne déjà fusée à l'air pendant un hiver, et que l'on répand sur la place découverte. Dans un terrain sec, on lui substituera avec succès un terreau végétal, et notamment composé de parties égales de résidu ou marc de pommes pourries et de terre végétale. Au printemps, on a soin do replacer les gazons enlevés avant l'hiver, et d'en couvrir les engrais que l'on a mis au pied des arbres.

En vieillissant, le tronc et les principales branches se couvrent d'une grosse écorce sèche, raboteuse, remplie de crevasses, qui donnent asile aux chenilles et autres insectes malfaisants, et contribuent à multiplier les mousses, les lichens, etc. , et autres plantes parasites, qui, jointes à cette même écorce, que l'on peut regarder comme une maladie cutanée des arbres, en obstruent les pores, les privent des émanations bienfaisantes de l'atmosphère, et rendent leur végétation plus malheureuse et plus difficile.

M. de Bois-Jugan assure qu'il a débarrassé ses pommiers des mousses et écorces chancreuses, en les frottant au commencement du printemps avec un gros pinceau trempé dans un lait de chaux un peu épais.

M. de Brébisson cite avec confiance un moyen qu'il a vu employer avec beaucoup de succès par quelques propriétaires du pays d'Auge. Ce moyen consiste à faire enlever toutes les vieilles écorces remplies de crevasses avec un outil connu des charpentiers sous le nom de plane, qui doit être beaucoup moins aiguisé qu'il ne l'est d'ordinaire. Ce travail, qui semble long et effrayant pour les cultivateurs négligents, s'exécute très-promptement et a les résultats les plus avantageux.

Les arbres auxquels on donne de semblables soins, loin de dépérir, prospèrent. On n'est pas obligé de les débarrasser annuellement de cette quantité de brandies sèches dont sont remplis les pommiers des cultivateurs peu soigneux. Ils ne se couvrent pas non plus avec autant de facilité de cet arbuste parasite, le gui, qui semble les métamorphoser en arbres toujours verts , lorsque ses graines, implantées dans les mousses et les crevasses des écorces, trouvent à la fois le moyen de s'y fixer, d'y germer, et de s'y multiplier de la manière la plus préjudiciable, si on ne les en débarrasse au plus tôt.

Le produit de ce travail, exécuté sur le tronc et les plus grosses branches, est un monceau d'écorces, de mousses, etc., qui brûlé, donne de très-bonnes cendres et en grande quantité.

On doit aussi continuer de supprimer les branches trop abaissées ; elles gêneraient l’agriculture, rendraient nulles ou au moins de peu de valeur les productions du sol, et donneraient aux bestiaux la facilité de les ronger et de déchirer les arbres en les tiraillant sans cesse.

M. de Brébisson insiste fortement pour qu'on rejette de la formation d'un verger de pommiers à cidre toute espèce dont la saveur serait acide. Quel que soit le sol, cette espèce donne toujours une liqueur d'une qualité fort inférieure aux deux autres.

Un des grands inconvénients attachés à la culture du pommier à cidre, dit M. Sageret, est sans contredit l'alternat de son produit. On m'a assuré que depuis quelque temps on semait beaucoup en Normandie, et qu'on obtenait ainsi des pommiers francs de pied, qui donnent un produit, sinon meilleur, au moins plus sûr que les pommiers greffés. Je le crois, ajoute M. Sageret : les arbres non greffés sont en général plus rustiques ; le semis, en outre, peut produire des variétés moins sujettes à alterner, ou qui, fleurissant à des époques diverses, ont quelques chances de résister aux intempéries des saisons. »



[ANNEXE]

AMÉLIORATION DES CIDRES.
COPIE D'UNE LETTRE
ADRESSÉE A M. LE PRÉFET DE LA SEINE-INFÉRIEURE,
Par MM. DUBREUIL et J. GIRARDIN,
Professeurs à l'école d'agriculture et d'économie rurale du département.

MONSIEUR LE PRÉFET,

La culture des arbres à fruits à cidre est, pour la Normandie, ce que celle de la vigne est pour les pays vignobles. Ces arbres méritent donc toute la sollicitude des agriculteurs de nos contrées, et il semble que le choix, la conduite de ces arbres, ainsi que la confection du cidre, devraient être pour eux l'objet de soins assidus. Il n'en est rien cependant, Monsieur le préfe t; aussi la liqueur qui sert de boisson habituelle à près du quart des habitants de la France, est bien loin d’acquérir, dans les mains de nos cultivateurs, toutes les qualités qu'elle pourrait offrir. Cela est dû, d'une part, aux pratiques vicieuses qu'ils emploient pour sa préparation, et, de l’autre, au peu de discernement qui préside au mélange des diverses variétés de fruits à piler.

Quant à la première cause, nous nous efforçons de la faire disparaître en indiquant, dans nos leçons, les procédés de fabrication qu'il convient de substituer aux anciens, et déjà nous avons pu remarquer avec satisfaction que nos observations ont été mises à profit dans quelques exploitations.

Mais la deuxième cause, le mauvais mélange des diverses variétés de fruits, est plus difficile à détruire.

En effet, pour pouvoir indiquer celles des variétés qui doivent être mélangées les unes avec les autres, ainsi que les proportions dans lesquelles ces mélanges doivent être opérés, il faudrait savoir distinguer nettement les variétés si nombreuses des pommiers. Or, dans l'état actuel des choses, cela est presque impossible, attendu la confusion qui règne dans la synonymie de tous ces arbres, confusion telle, que la même variété porte un nom différent dans chaque canton.

Ce n'est que lorsqu'on aura débrouillé ce chaos, étudié d'une manière suivie toutes les variétés et déterminé la valeur comparative de leurs fruits, qu'il sera possible d'arriver à formuler des principes qui puissent servir de guide aux cultivateurs.

Mus par le désir de remplir le plus complètement possible la mission dont vous nous avez chargés en nous confiant l'enseignement agricole dans le département , nous avons l'intention de nous livrer à cet utile travail. Mais, pour l'entreprendre et l'exécuter avec succès, votre concours, Monsieur le préfet, nous est indispensable.

Voici le plan que nous avons adopté, dans l'espoir de voir les résultats do nos recherches recevoir une application plus étendue.

1. Obtenir d’abord, par l'entremise de MM. les préfets, la collection complète des greffes des pommiers et des poiriers à cidre de chacun des cantons des treize départements dans lesquels on s'occupe de la culture de ces arbres sur une grande échelle.

Ces départements sont : la Seine-Inférieure, le Calvados, l'Orne, l’Eure, la Manche, composant l'ancienne province de Normandie ; puis l'Oise, les Côtes-du-Nord, l'Ille-et-Vilaine, le Morbihan, la Somme, la Sarthe, l'Aisne et Seine-et-Oise (1).

Une instruction sur la manière de récolter, d'étiqueter et d'emballer les greffes demandées, serait envoyée par nous à MM. les préfets.

2. Greffer ensuite, au jardin des plantes, dans l'espace concédé à l'école d'agriculture par l'administration municipale, les greffes qui nous seraient envoyées de cette manière.

3. Au bout de trois à quatre ans, ces greffes portant fruit, fixer la synonymie de chaque variété pour les différents cantons , étudier les qualités de chaque sorte de fruit, fixer ainsi les bonnes espèces à conserver, signaler les mauvaises à détruire, et déterminer, enfin, dans quelles proportions les bons fruits des divers solages doivent être mélangés pour obtenir le meilleur moût, et par suite, le meilleur cidre possible.

Voilà, Monsieur le préfet, l'immense travail que nous voulons entreprendre, et auquel nous apporterons l'ardeur la plus assidue, parce que nous sentons de quelle utilité il sera pour tous les pays à cidre. Mais, nous le répétons, il nous sera impossible de l'effectuer sans votre appui bienveillant et éclairé.

Ce que nous sollicitons de vous, c'est que vous veuilliez bien nous faire obtenir, par voie administrative, les greffes de toutes les variétés de pommiers et de poiriers cultivés dans le département, et que vous invitiez MM. les préfets des douze autres départements ci-dessus désignés, à réunir pour nous la même collection, et à nous l'adresser. Nous n'aurions pas assez d'influence par nous-mêmes pour décider les cultivateurs à faire cet envoi d'une manière régulière et complète ; les efforts des Sociétés d'agriculture seraient également impuissants. Vous seul, Monsieur le préfet, pouvez tenter celte entreprise avec succès.

Quoique nous n'ayons l'intention de greffer qu'au mois de juillet prochain, nous vous prions de nous faire connaître le plus tôt possible votre décision ; car si, comme nous n'en doutons pas, elle nous est favorable, il nous faudra, dès la fin de cet automne, planter les sujets destinés à recevoir les greffes qui nous parviendront.

Veuillez bien, Monsieur le préfet, agréer l'expression du profond respect avec lequel nous avons l'honneur d’être,

Vos très-humbles et très-obéissants serviteurs,

J. GIRARDIN.                  A. DUBREUIL.


INSTRUCTION pour la récolte et l'envoi des greffes de pommiers et de poiriers à MM. Dubreuil et J. Girardin, professeurs à l'école d'agriculture de la Seme-Inférieure.

1° Prendre exactement une greffe de chacune des variétés de pommiers et de poiriers cultivées dans le canton, pour la confection du cidre ou du poiré.
2° Choisir pour greffe un rameau vigoureux né du dernier printemps, et pourvu d'yeux bien apparents à l'aisselle des feuilles.
3° Enlever les feuilles de chacune des greffes immédiatement après leur récolte, en laissant toutefois la queue ou pétiole de la feuille.
4° Placer sur chaque greffe un numéro en parchemin, en carton, ou en fort papier fixé par un fil.
5° Inscrire sur le tableau ci-joint, et en regard du numéro correspondant à celui de la greffe, le nom ou les noms sous lesquels, cette variété est connue dans le canton.
6° Inscrire, en regard de ces noms, et dans la colonne réservée à cet effet, la forme qu'adopte généralement la tête de chaque variété, c'est-à-dire si elle est plutôt ronde que pyramidale, ou plutôt pyramidale que ronde.
7° Indiquer également, dans la 4e colonne du tableau, le produit ordinaire en fruits de chaque variété, en inscrivant ces mots : Produit considérable, produit moyen, produit faible
8° Diviser en deux paquets les greffes de pommiers et de poiriers.
9° Réunir ensuite les deux paquets, les emballer soigneusement dans de la mousse humide, puis recouvrir le tout avec de la paille solidement ficelée ;
10° Mettre dans le paquet le tableau ci-joint, dûment rempli, en l'enveloppant dans plusieurs doubles de papier ; puis adresser ce paquet, par la voie la plus prompte, à M. Dubreuil, professeur à l'Ecole d'Agriculture du département de la Seine-Inférieure, à Rouen.
11° Effectuer la récolte de ces greffes vers le 15 juillet, et les expédier immédiatement.
12° Enfin, indiquer en tête du tableau à remplir, le nom du département et du canton où les greffes auront été récoltées, ainsi que le nom et l'adresse du cultivateur qui aura bien voulu s'associer à un travail aussi utile, en acceptant cette mission.

MODÈLE DU TABLEAU A REMPLIR

Département d ...................                                    Canton d ................
Greffes récoltées et envoyées par M ................ Commune d ..........

Nos des
GREFFES

NOMS DES VARIÉTÉS
FORME
de la
tête des arbres
PRODUITS
en fruits
des variétés
1
2
3
4
5
6
7
8





Délibération prise par la Société Centrale d'Agriculture du département de la Seine-Inférieure.
 
MM. Dubreuil et J. Girardin, ayant soumis le projet de travail ci-dessus indiqué à l'approbation de la Société centrale d'agriculture  la Société a arrêté, dans sa séance du 10 décembre 1840, qu'une somme de 500 francs, à valoir sur son budget de 1841, serait accordée aux auteurs du projet, pour subvenir aux frais qu'entraînera l'accomplissement de leur travail.

L'Association normande s'associe complètement à la Société d'agriculture de la Seine-Inférieure pour recommander le projet de MM. Dubreuil et Girardin ; elle invite tous ses membres à seconder ces habiles professeurs en leur communiquant tous les renseignements qu'ils possèdent, et en leur faisant parvenir des greffes. La basse Normandie, si riche en pommiers, devra fournir à MM. Girardin et Dubreuil un certain nombre d'espèces peu connues dans l'Eure et la Seine-Inférieure. Nous espérons donc que tous les membres de l'Association rivaliseront de zèle pour les leur faire connaître. Le travail projeté intéresse tout particulièrement nos départements du Calvados, de l'Orne et de la Manche.

______
NOTE :

(1) Outre les treize départements cités, il y en a encore vingt-trois autres où l'on produit du cidre ; mais la quantité en est si peu considérable, comparativement à celle fournie par les treize premiers, que nous avons cru pouvoir nous dispenser de les comprendre dans notre travail. La quantité du cidre fabriqué dans le département le plus productif des vingt-trois départements négligés par nous, représente à peine une valeur de 500 mille francs. Dans le moins productif des treize dont nous nous occuperons, la valeur du cidre produit dépasse 1 million de francs.


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