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F. Bresson : Rapport sur la fabrication des bretelles à Rouen (1843)
BRESSON, F. (18..-18..) : Rapport sur la fabrication des bretelles à Rouen.- Rouen : imprimerie de L.-S. Lefevre, 1843.- 16 p. ; 20 cm.
Saisie du texte : O. Bogros pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (07.XII.2017)
[Ce texte n'ayant pas fait l'objet d'une seconde lecture contient immanquablement des fautes non corrigées].
Adresse : Médiathèque intercommunale André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
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Orthographe et graphie conservées.
Texte établi sur l'exemplaire de la Médiathèque (Bm Lx : Norm n.c.).

Rapport sur la fabrication des bretelles à Rouen (1843)

Rapport
sur la
fabrication des bretelles
à Rouen

 
PAR

M. BRESSON
Ingénieur civil

~*~


MESSIEURS,

La fabrication des bretelles est maintenant acquise à la ville de Rouen. Grâce aux efforts, à l'intelligence et surtout à la persévérance de M. Capron d'abord, et ensuite de MM. Sauvage et Huet, nous ne redoutons plus aucune concurrence, ni à l'intérieur ni à l'extérieur. Les Anglais, si habiles pourtant, n'ont pu suivre les progrès des industriels que je viens de vous nommer, et partout ils leur ont cédé la place ; aussi nos fabricants vendent-ils une grande partie de leurs produits en Italie, en Allemagne, en Turquie, en Russie et surtout en Amérique, malgré les énormes droits dont ils y sont frappés.

Il y a vingt-cinq ans environ que la fabrication des bretelles fut introduite dans notre ville ; en 1825, les deux plus forts fabricants étaient M. Authaume et M. Bavant ; ils avaient l'un et l'autre 4 à 5 métiers à 4 et 6 pièces, qui produisaient chacun environ 80 mètres de tissus par jour. Ces commerçants avaient des relations si peu étendues qu'ils livraient leurs produits aux quincaillers de la ville qui en opéraient la vente.

En 1825, M. Capron se mit à fabriquer ; il n'avait alors que quelques métiers en tout semblables à ceux connus. En 1828, il fit un voyage à Nîmes, c'était dans cette ville que se fabriquaient les bretelles pour l'exportation ; il se mit au courant des affaires de cette place, il étudia sa manière de travailler et revint à Rouen avec l'idée bien arrêtée de tenter quelqu'affaire avec l'étranger ; ses efforts furent heureux ; chaque année alors il augmenta son matériel, si bien qu'en 1838 il avait 75 métiers à 8 et 10 pièces, qui donnaient chacun 150 mètres de tissus par jour, et cependant, il ne pouvait suffire à toutes les demandes qui lui étaient faites.

C'est alors qu'il sentit la nécessité de tisser les bretelles mécaniquement ; étant allé chez M. T. Legrand, à Saint-Martin-du-Vivier, il y vit des métiers mécaniques à tisser le calicot, et il fut alors persuadé qu'il y avait possibilité d'arriver au même but pour les tissus à bretelles. Il prit un mécanicien chez lui, mais après plusieurs mois d'expériences sans succès, il le congédia, acheta un métier à calicot, afin d'expérimenter sur ce métier même ; il eut alors quelques résultats satisfaisants, mais il restait une assez grande difficulté à vaincre, c'était d'obtenir le déclanchement du métier, quand l'une des navettes se trouvait arrêtée en chemin ; ce déclanchement existe dans le métier à calicot il est vrai, mais là il n'y a qu'une navette, et cette navette est volante ; il fallait donc en modifier le mécanisme de manière à répondre aux nouvelles exigences. M. Martinet, mécanicien à Rouen, s'en étant occupé, sur la demande et sur les indications de M. Capron, réussit, et céda son moyen à M. Capron qui, en juin 1839, lui commanda 50 métiers, puis 50 autres métiers un peu plus tard ; ainsi fut acquise à l'industrie la fabrication mécanique des tissus à bretelles.

Ce sont ces 100 métiers qui meublent l'établissement que nous avons visité à Darnétal : ils tissent chacun 8 pièces, quelques uns 10, soit en tout plus de 800 pièces en fabrication à-la-fois, au moyen d'une force de dix-huit à vingt chevaux, dont dix sont fournis par la rivière de Robec , et huit par une machine à vapeur.

Aujourd'hui M. Capron est arrivé à fabriquer annuellement 4,500,000 mètres de tissus, soit 3,000,000 de paires de bretelles, ou 10,000 paires chaque jour ; il emploie, dans son année, 100,000 kilogrammes de coton, soie et caoutchou, et la valeur de sa production est de 900,000 fr.

M. Sauvage, dont la fabrique de bretelles était très-importante, n'a pas voulu rester en arrière ; aidé d'un mécanicien fort adroit, M. Bonneau, il a monté des métiers à 8 et 12 pièces, qui marchent mécaniquement, et offrent l'avantage de pouvoir suspendre le travail pour une, deux ou trois bandes, sans que le métier cesse de battre pour les autres.

M. Sauvage fabrique beaucoup, mais tous ses métiers marchent encore à bras ; il y a deux ans qu'ils devraient marcher mécaniquement, mais des circonstances indépendantes de sa volonté l'ont arrêté ; d'ici à quelques mois, tous ces métiers seront mus au moyen d'une machine à vapeur de 20 chevaux qu'il monte dans son établissement du faubourg Saint-Sever. Nous regrettons qu'il ne se soit pas présenté au concours avec ses concurrents, cela nous aurait autorisé à entrer dans de plus grands détails sur le mode et sur l'importance de sa fabrication ; nous croyons ne pas nous tromper beaucoup en évaluant sa production quotidienne à 5,000 paires de bretelles, soit 1,500,000 paires dans l'année.

MM. Huet et Geuffray sont entrés les derniers dans cette carrière ; ils ont commencé à fabriquer à bras en 1837, mais ils n'ont pas tardé à regagner le temps perdu ; nous avons visité leur établissement qui est aussi à Darnétal, et mis en mouvement par une machine à vapeur de dix à douze chevaux : il est meublé de 74 métiers, dont 20 à 1 seule pièce, 16 à quatre pièces, 27 à 8 pièces, et 11 à 12 et 14 pièces.

Les petits métiers à 1 pièce sont destinés à la fabrication des articles fins, des tissus brochés en soie, à la passementerie ordinaire, une femme ou un jeune homme de seize à dix-huit ans peut surveiller 3 de ces métiers, qui produisent chacun de 15 à 25 mètres de tissus par jour, suivant la complication du dessin.

Les métiers à 4 pièces sont destinés au tissage des articles très-forts ; ils peuvent produire 75 à 80 mètres par jour ; ceux à 8 pièces donnent de 120 à160 mètres, suivant la force des tissus ; quant aux métiers à 12 et 14 pièces, ils ne sont employés que pour les articles légers ; ils produisent jusqu'à 300 mètres en frappant 80 coups à la minute.
Ainsi, Messieurs, quant tous les métiers de cet établissement sont en activité, il y a 432 pièces en fabrication, ce qui produit 50,000 mètres de tissus par semaine, ou 2,600,000 mètres par année, quantité qui donne près de 1,800,000 paires de bretelles.

Vous savez, Messieurs, que presque toutes les bretelles se font maintenant avec des tissus élastiques, par eux-mêmes, ce qui a permis de supprimer les pattes en élastiques de cuivre, généralement employées il y a quelques années. On obtient ces tissus élastiques en faisant entrer dans la composition de leur chaîne des fils de caoutchou ; dans un tissus pour bretelles, qui a ordinairement 45 millimètres de largeur, on met depuis 7 jusqu'à 45 fils de caoutchou ; une pièce qui contient 20 à 25 de ces fils est bien souple et d'un très-bon usage (1).

Le caoutchou s'use et s'éraille trop facilement dans les lames pour qu'on l'emploie nu ; dans les tissus très-légers en soie, il ne doit pas paraître du tout ; généralement on l'enveloppe de 1, 2, 3, 4 ou 5 fils de coton ou de soie, suivant qu'on veut le recouvrir entièrement, ou en partie seulement ; ce travail se fait sur un petit métier que nous avons vu chez MM. Geuffray et Huet.

Il est des fabricants qui l'emploient quelquefois nu, mais alors ils le graissent avec de l'huile pour que le frottement des lames le fatigue moins ; ce moyen n'est pas aussi bon que l'autre, parce que, dans le rentrage à chaud, la graisse ressort et fait un mauvais effet.

Si l'on employait les tissus caoutchou tels qu'ils sortent du métier, ils auraient fort peu d'élasticité, mais on leur en donne en passant dessus un fer modérément chaud, alors ils se raccourcissent et deviennent élastiques. M. Huet obtient le même résultat en passant les tissus sur un cylindre creux, en cuivre rouge, chauffé intérieurement par de la vapeur d'eau ; c'est la même machine qui sert à sécher les tissus communs et sans caoutchou, qu'on encolle avec une pâte d'amidon cuit, pour leur donner de l'épaisseur et de la main.

Cette machine est un perfectionnement dans la fabrication des tissus à bretelles, car on n'a plus à craindre qu'un fer trop chauffé puisse altérer le tissu ; les couleurs mêmes conservent leur éclat, d'abord, parce que la température ne dépasse pas celle de l'eau bouillante, ensuite, parce que les tissus qu'on veut sécher ou qu'on veut faire rentrer, ne touchent la surface chaude que par leur envers.

On conçoit que, pour obtenir un bon effet par ce rentrage, il faut toujours que le caoutchou puisse dominer dans la chaîne ; ainsi, quand il y a peu de caoutchou , il y a peu de coton aussi, et l'on force en trame, celle-ci ne résistant presque pas à l'action du caoutchou.

Vous voyez, Messieurs, que les établissements dont nous vous entretenons sont d'une grande importance ; d'abord, ils ont concentré dans Rouen la fabrication des tissus à bretelles. A Nîmes, berceau de cette industrie, on y renonce ; les maisons qui continuent encore la confection des bretelles font venir des tissus de Rouen.

M. Capron occupe plus de deux cents personnes dans son tissage, toutes assez bien rétribuées ; en outre, il occupe, tant à Rouen qu'à Darnétal, plus de quatre cents personnes, pour dévider, bobiner du coton et pour coudre les bretelles.

Dans son tissage, M. Huet occupe à Darnétal et à Rouen cent vingt à cent trente personnes ; il en occupe encore trois cents en ville, à la confection des bretelles.

L'un et l'autre de ces fabricants ont encore des métiers à la main pour les articles qui n'offrent pas d'avantages à faire mécaniquement ; ainsi, la bretelle extra-fine (dessin riche) et la belle passementerie sont des objets qu'ils font encore tisser sur des métiers jacquarts menés à bras d'homme.

Les procédés mécaniques employés par ces habiles manufacturiers ont considérablement diminué le prix de revient des tissus à bretelles. M. Capron paie 35 cent, pour façon de 100 mètres de tissus légers et communs ; avant 1838, il payait le même ouvrage 1 fr. 50 cent., c'est-à-dire quatre fois plus ; et avant 1828, il payait encore beaucoup plus cher, parce que les métiers ne faisaient que 80 mètres au lieu de 150.

M. Huet paie de 2 à 5 cent, de façon pour 1 mètre des tissus fins qui se font sur les petits métiers à une pièce, suivant la difficulté de l'exécution. Comme l'ouvrier qui soigne trois métiers peut produire depuis 40 jusqu'à 80 et même 90 mètres, il reçoit encore un assez beau salaire ; mais, quand ces articles se tissaient à la main, et de cela il n'y a pas long-temps, ceux qui se paient maintenant 5 cent, se payaient 30 cent., s'ils se faisaient à une pièce, et 17 cent., s'ils se faisaient à huit.

Sur les métiers à douze pièces, M. Huet paie 10 cent. du mètre pour les douze pièces, lorsque ces articles sont compliqués, ce qui ne fait que 5/6 de centime du mètre.

Un ouvrier soigne deux métiers à quatre pièces, et pour les articles ordinaires, il reçoit 8 cent, du mètre pour les huit pièces ; soit, 1 cent, du mètre. Ainsi, pour tous ces articles, la façon du tissu d'une paire de bretelles ne s'élève qu'à 1 cent. 1/2.

C'est ainsi, Messieurs, que l'on est arrivé à donner des bretelles toutes confectionnées pour 12 cent. 1/2 la paire ; celles-là sont pour l'exportation, et notamment pour les nègres ; mais il en est d'autres qui se vendent jusqu'à 7 fr. la paire ; ce sont des bretelles en soie, avec de riches dessins. Quant aux articles qui se consomment couramment en France, et qui sont de bonne qualité, le prix varie de 1 fr. à 1 fr. 50 cent, la paire.

C'est, sans doute, une très-bonne chose que de créer à bon marché ; c'est le moyen d'augmenter la consommation, de vaincre la concurrence ; aussi, applaudissons-nous de toutes nos forces aux perfectionnements *mécaniques* apportés dans la fabrication des tissus par MM. Capron et Huet ; ceux-là (les procédés mécaniques) ont donné de bons produits, à bon marché, tout en laissant une suffisante rétribution aux ouvriers producteurs ; mais là, Messieurs, s'arrêteront nos éloges, car nous n'appellerons jamais progrès le bon marché qui provient d'un abaissement démesuré des salaires ; c'est ce qui est arrivé pour la confection des bretelles ; les ouvrières y gagnent à peine 60 cent, pour un travail assidu de quatorze à quinze heures.
MM. Capron et Huet font travailler dans les prisons, dans les casernes, dans les communautés ; tous ces ouvriers peuvent se contenter d'un salaire infiniment petit, vu qu'il est pourvu à leur existence par d'autres moyens ; aussi, en est-on venu à ne payer que 25 cent, pour piquer les soixante-douze pattes en peau d'une douzaine de paires de bretelles à la russe, et 20 à 25 cent, pour monter et coudre cette même douzaine de paires (2).

Est-il bien, Messieurs, que les prisonniers et les soldats fassent ainsi concurrence aux ouvriers libres, à ceux dont toute l'existence est dans le salaire ? Cela nous semble appeler l'attention des économistes et des législateurs ; sans doute il faut occuper et les prisonniers et les soldats ; mais il ne faut pas qu'ils causent la misère des autres ; toute organisation sociale où il sera possible d'obtenir un bon travail quotidien d'un ouvrier, pour un prix moindre que celui auquel il peut soutenir son existence, est vicieuse et doit être modifiée. On parle, sans cesse, de moraliser la classe ouvrière ; c'est bien ; c'est très-bien ; mais qu'on n'oublie jamais qu'il n'y a pas de moralisation sans bien-être ; il ne peut y avoir d'hommes probes, de femmes vertueuses, là où le travail ne suffit pas à mettre à l'abri des premières nécessités de la vie. Or, nous vous le

(2) Les bretelles fines et mi-fines se paient plus cher ; les prix pour coudre et monter varient de 12 cent, à 2 fr. la douzaine de paires.

demandons, Messieurs, est-il possible de vivre avec 50 centimes par jour, ce qui fait à peine 120 francs par an, à cause des jours fériés, des maladies, des mortes-saisons ?

Gardons-nous donc d'appeler progrès toute diminution dans le prix d'une marchandise, et distinguons. Cette diminution vient-elle de ce que, par une combinaison mécanique, par l'emploi de la vapeur ou autre force motrice, on est parvenu à produire plus et mieux, nous y applaudissons ? Mais si elle vient de ce que le salaire de l'ouvrier a été réduit déraisonnablement, nous n'applaudissons plus. Il ne sera jamais bien que ceux qui n'ont rien soient sacrifiés pour le plus grand bonheur de ceux qui ont quelque chose !

Ces réflexions, Messieurs, ne diminuent en rien le cas que nous faisons des bons résultats obtenus par MM. Capron et Huet, dans leur fabrication ; ce ne sont pas des reproches que nous leur adressons ; ce sont des considérations générales qui sont pour tous, et, d'ailleurs, nous leur devons la fabrication mécanique des tissus à bretelles ; c'est là une bonne et légitime conquête.

Nous avons voulu étudier quelque peu les machines employées dans l'un et l'autre de ces établissements, afin de vous en signaler le mérite relatif.

Les métiers de M. Capron sont tous semblables, à 8pièces ; quelques-uns cependant sont à 10 pièces ; le nombre de leurs marches varie de 6 à 12 ; vous savez qu'il dépend de la complication des dessins à tisser ; lorsque cette complication est trop grande, il faut renoncer aux marches et recourir à l'invention de Jacquart. Mais, quand les métiers doivent battre vite, l'emploi du jacquart est difficile, et M. Capron préfère les marches pour la sûreté du travail ; il n'a qu'un métier monté d'une mécanique imitée de Jacquart, et ce métier bat plus lentement que ceux à marches qui tissent le même ouvrage.

Nous avons remarqué, chez ce même fabricant, quelques métiers dans lesquels le premier et le dernier des excentriques qui foulent sur les marches, et qui sont tous sur un même arbre, peuvent glisser au long de cet arbre, au moyen de cames ; cet ingénieux moyen, dû à M. Morin, employé de M. Capron, lui donne la possibilité de faire agir le même excentrique sur différentes marches ; on obtient ainsi des variétés de dessin beaucoup plus grandes qu'avec des excentriques fixes.

Chez MM. Huet et Geuffray, les petits métiers à une pièce, destinés à la confection des tissus riches, ont leurs lames mises en mouvement par une mécanique dont l'idée fondamentale vient du jacquart ; mais elle en diffère dans la composition, qui a été appropriée au genre de travail à faire. Les lames des métiers à quatre et à huit pièces sont mues par des marches, et celles des métiers à douze pièces, sur lesquels ont fait aussi des tissus à fleurs, sont mues par une mécanique analogue à celle des petits métiers, et qu'on doit à M. Lucien, jeune homme doué d'une très-grande facilité pour les inventions mécaniques, et qui, ayant présidé à l'organisation de toutes les machines de cet établissement, y a fait preuve de beaucoup d'habileté, ce qui lui a valu la place de directeur dudit établissement.

Un métier à quatre pièces et à double boîte, que nous avons vu chez M. Huet, et qui est destiné à faire des tissus en trame soie et coton, a attiré tout particulièrement notre attention. Déjà il existait des châsses à double boîte, mais dans le métier à bras seulement ; pour les appliquer au tissage mécanique, et surtout pour le déclanchement, il y avait d'assez grandes difficultés à vaincre ; elles l'ont été.

Au moyen de cette double boîte, qu'un excentrique placé sur l'arbre de foulée des marches fait monter et descendre dans la châsse, suivant le besoin, il passe alternativement trois duites en coton, et une en soie, ce qui permet d'établir à bon marché un tissus qui a les apparences de la soie.

Quand cet article se faisait à la main, l'ouvrier pouvait à peine produire 15 mètres par jour ; tandis qu'avec le métier actuel il peut produire 60 à 75 mètres, et satisfaire le goût de ceux qui veulent du brillant pour peu d'argent.

En résumé, Messieurs, les deux établissements dont nous venons de vous entretenir nous ont semblé avoir un égal mérite, quoique dans des conditions différentes. M. Capron est le fondateur du tissage mécanique des bretelles ; il produit des quantités considérables, dont les trois quarts au moins sont destinés à la consommation de la France ; MM. Huet et Geuffray produisent moins, mais leur fabrication s'adresse à une classe plus riche ; les deux tiers au moins de leur production se vendent à l'étranger, et surtout en Amérique, où le luxe des bretelles est poussé fort loin ; ils ne sont arrivés qu'après M. Capron , c'est vrai ; il est même incontestable qu'ils ont dû profiter des expériences de celui qui les avait précédé, car il en est toujours ainsi dans l'industrie ; mais nous vous avons signalé plusieurs perfectionnements dans leurs métiers, qui prouvent qu'ils ont su faire autre chose qu'imiter leur devancier ; en conséquence, la commission vous propose d'accorder à ces deux établissements une même récompense : la grande médaille d'argent.

BRESSON F.

Conclusions adoptées

NOTES :
(1) Une seule maison, à Paris, fournit ce fil de caoutchou ; c'est la maison Ratier et Guibal ; ce qu'on nomme fil ici, c'est du caoutchou découpé.
(2) Les bretelles fines et mi-fines se paient plus cher ; les prix pour coudre et monter varient de 12 cent, à 2 fr. la douzaine de paires.


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