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Ch. Bataillard : L'Oie réhabilitée (1865)
BATAILLARD, Ch. : L'Oie réhabilitée.- Caen : F. Le Blanc-Hardel, 1865.- 40 p. ; 22,5 cm.- (Extrait des Mémoires de l'Académie impériale des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Caen).
Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Bibliothèque Municipale de Lisieux (13.VI.2001)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Bibliothèque municipale, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.66.50.- Minitel : 02.31.48.66.55. - Fax : 02.31.48.66.56
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Diffusion libre et gratuite (freeware)
Texte établi sur l'exemplaire de la bibliothèque municipale (BmLx : br norm 602).
 
L'OIE RÉHABILITÉE
par
Ch. BATAILLARD
AVOCAT, MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ IMPÉRIALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE ET DE LA SOCIÉTÉ PHILOTECHNIQUE DE PARIS, CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE DE CAEN, ETC.

~~~~

 

Victrix causa Diis placuit, sed victa Catoni. LUC.
(RACINE, Les Plaideurs.)

Cardan a dit en ses livres De Sapientia : que les proverbes sont « la sagesse des nations » et Sénecé : « qu'ils contiennent la quintessence du bon sens. » Soit. Il faut cependant convenir que certains proverbes se contredisent entre eux, et que plusieurs sont même tout-à-fait le contre-pied de la vérité. Au nombre de ces derniers, on peut citer celui qui fait de l'oie le synonyme et le symbole de la stupidité. Ce proverbe frappe à faux aussi complètement que possible ; il ne saurait résister au moindre examen ; à plus forte raison devra-t-il être condamné si l'on envisage « la question de l'oie » à tous les points de vue dont elle est susceptible : histoire naturelle, physiologie, sentiment, morale, philosophie, archéologie..... Oui, cette question, si modeste en apparence, comporte, en réalité, tous ces aspects divers ;

« Nous l'allons montrer tout à l'heure. »
 
§ 1er.
 
DE L'INTELLIGENCE DE L'OIE, DE SON CARACTÈRE ET DE SES VERTUS.

Pourquoi dit-on : bête comme une oie ? Rien n'est plus injuste que cette expression proverbiale. L'oie surpasse, au contraire, en intelligence la plupart des autres oiseaux domestiques ; elle ne cherche querelle à aucun d'eux, ni à personne ; elle a l'instinct éminemment sociable et docile ; elle est enfin, comme l'a dit Buffon, « dans le peuple de la basse-cour, un habitant de distinction. »

Quand on la conduit au pâturage, un seul gardien suffit pour toutes les oies du village ; le matin, il les réunit au son de son cornet, et quand il les ramène à l'heure où le jour tombe, chaque bande sait bien retrouver son logis (1). Une oie qu'on emporte dans un panier bien fermé, bien enveloppé, vers une nouvelle habitation, sait parfaitement s'orienter et revenir chez son ancien maître, en dépit des précautions qu'on a prises pour l'empêcher de reconnaître son chemin.

Ni le temps, ni la distance ne lui font perdre le souvenir de ce maître, de sa demeure et de ses bons procédés. Le savant docteur Sanchez raconte que, revenant d'Azof, dans l'automne de 1736, et voyageant à petites journées sur les bords du Don, il prenait gîte, chaque nuit, dans des villages de Cosaques. Tous les jours, au coucher du soleil, des troupes d'oies, arrivant des contrées septentrionales les plus éloignées où elles avaient vécu tout l'été à l'état sauvage, venaient s'abattre dans les habitations qui les avaient reçues et hébergées l'hiver précédent. Elles amenaient avec elles toute leur progéniture de l'année. « J'eus constamment ce spectacle, chaque soir, durant trois semaines, dit-il ; l'air était rempli d'une infinité d'oies, qu'on voyait se partager en bandes. Les filles et les femmes, chacune à la porte de leur maison, les regardant, se disaient : Voilà mes oies, voilà les oies d'un tel ; et chacune de ces bandes mettait, en effet, pied à terre dans la cour où elle avait passé l'hiver précédent (2). »

Chez l'oie, le sentiment de l'amour maternel est développé au plus haut degré. Quoiqu'elle ne doive faire qu'une ponte par an, elle en fait une seconde si ses oeufs lui sont enlevés, et parfois même une troisième. Elle couve si assidûment qu'elle en oublie le boire et le manger. « Elle conduit ses petits avec une sollicitude affectueuse, leur indique avec tendresse et empressement la nourriture de choix, les rappelle au moindre danger et montre une véritable intrépidité quand il s'agit de les défendre contre les oiseaux de proie ou contre toute agression étrangère (3) » Parmi ces bonnes bêtes, pas de mères dénaturées, jamais de petits abandonnés, tandis que chez d'autres bipèdes, les hospices d'enfants-trouvés sont toujours insuffisants.

Nulle sentinelle n'est plus sûre et plus vigilante. Vous ne verrez jamais plusieurs oies réunies dormir toutes à la fois : il y en a toujours une qui, le cou tendu, la tête en l'air, examine, écoute, veille et jette, à la moindre apparence de danger, le cri d'alarme. Une acclamation générale y répond, et le salut de tous est assuré. On a vu des gardes nationaux s'endormir dans une guérite. Jamais une oie en faction n'a commis cette énormité. Aussi, les rondes de jour et de nuit sont-elles inconnues parmi les palmipèdes, tandis qu'elles sont indispensables pour assurer l'insomnie réglementaire de la garde civique et même des meilleures troupes !

L'oie a sur les soldats un autre avantage. Les étapes de ceux-ci ne dépassent guère sept à huit lieues par jour ; l'oie domestique, malgré la lenteur apparente de sa marche, en fait, à pied, jusqu'à douze ou quinze, et même davantage, sans avoir l'air de se presser ; c'est ce qu'atteste Salerne, dans son Histoire des Oiseaux (4).

Tous les naturalistes anciens et modernes ont rendu hommage à la sobriété de l'oie. « Les bonnes ménagères, disait Belon, au XVIe siècle, sachant bien que la nourriture des oies est de moult grand profit, en font une grande estime pour ce qu'elles ne font aucune dépense. » Beaucoup de profit et peu de dépense ! O Harpagon ! combien tu devais en avoir dans ta basse-cour ! O fainéants, qui dépensez beaucoup et ne produisez rien... rougissez ! et n'ayez pas la présomption de vous comparer à l'utile animal, que vous poursuivez aussi de vos sarcasmes !

L'oie est d'une propreté recherchée. Sa toilette n'est pourtant pas compliquée : une petite vésicule de graisse, placée près de la queue, suffit à lustrer tout son plumage ; mais c'est bien d'elle que l'on peut dire, avec le poète latin : Simplex munditiis ! Quelle petite-maîtresse, avec son blanc et son rouge sur les joues, son noir autour des yeux (on revient, hélas ! à ces affreux badigeonnages), avec tous ses cosmétiques, toutes ses pâtes, toutes ses odeurs et tous ses bains parfumés, enfin, avec tout son mundus muliebris, je veux dire avec tout son matériel de toilette et ses atours, approchera jamais de la blancheur irréprochable, simple, unie, virginale et surtout inodore de la robe de notre aimable oiseau ?

Ces détails de coquetterie nous conduisent naturellement à expliquer, ce que l'on entend par la petite oie. Au propre, ce sont les ailerons, le cou, le foie, enfin ce qu'on appelle en langage vulgaire les abatis (5). Au figuré, ce sont les rubans, les gants et les menus accessoires d'un habillement. « Que vous semble de ma petite oie ? » demande le marquis de Mascarille à Cathos et à Madelon, « la trouvez-vous congruente à l'habit ? » Et, pour répondre lui-même à sa question, il vante aux précieuses ridicules la richesse de ses plumes, l'élégance de ses rubans et de ses canons. Il les invite même à « attacher la réflexion de leur odorat » sur ses gants et jusque sur la poudre de sa perruque (6). Cette expression « la petite oie » avait aussi une signification dans le vocabulaire de la galanterie ; mais cette acception est tout-à-fait tombée en désuétude. Quel plus bel hommage pouvait-on rendre, cependant, à la pureté du sentiment des oies que de donner leur nom aux « faveurs légères » (7) par allusion, sans doute, aux gracieuses caresses que se prodiguent nos chers oiseaux dans leurs innocentes tendresses ?

L'oie a le coeur tendre, je viens d'en convenir ; mais il ne faut pas croire qu'elle s'abandonne pour cela aux égarements et aux entraînements instantanés des sens ! Ses moeurs sont pures. Tous ceux qui ont eu le bonheur de fréquenter les bêtes, savent qu'elle connaît la pudeur et ne s'écarte point des lois de la décence. Jamais on ne l'a vue suivre, à cet égard, les déplorables exemples des gallinacées. Ne craignez pas non plus que son heureux vainqueur célèbre impudemment ses succès, comme le coq, par ses chants de victoire ! Non ! Les amours de l'oie sont essentiellement honnêtes et discrètes. Les oies du frère Philippe pourraient-elles toutes en dire autant ?

Si l'amour est commun à tous les hommes et à toutes les bêtes, il n'en est pas de même de la reconnaissance et de l'amitié, sentiments plus élevés et qui n'appartiennent qu'aux espèces d'élite. O ma bonne oie !

Viens, reconnais la voix qui frappe ton oreille....

Oui, tu mériterais, comme Arcas, d'entendre ces paroles du Roi des rois, car tu es, comme lui, fidèle et dévouée. N'en riez pas, Messieurs : l'oie s'attache à son maître, le reconnaît, accourt au son de sa voix, lui témoigne sa joie de le revoir après quelques heures d'absence et le suit comme un chien. « Elle est capable, dit Buffon, d'un attachement personnel très-vif et très-fort, et même d'une amitié passionnée qui la fait languir et dépérir loin de celui qu'elle a choisi pour l'objet de son affection. » En veut-on un exemple ? Le voici : Le concierge du château de Ris, appartenant à M. Anisson-Duperron, avait sauvé des dangers d'un combat inégal, un jars (oie mâle), qui s'en montra profondément reconnaissant. Du plus loin qu'il apercevait son libérateur, Jacquot (c'était le nom du jars) accourait à lui, tendait son cou pour solliciter une caresse et s'en montrait joyeux dès qu'on la lui avait accordée. Le concierge, se rendant un jour aux bois d'Orangis, avait enfermé l'oiseau dans le parc. Jacquot parvint à passer par-dessus les murs, rejoignit son ami qui avait déjà parcouru plus d'un kilomètre, le suivit partie à pied, partie au vol, depuis dix heures du matin jusqu'à huit heures du soir, dans toutes les allées du bois, et dès lors ne voulut plus le quitter, l'accompagnant partout, au point d'en devenir importun, et d'aller, un jour, le rejoindre jusque dans l'église ; puis, un autre jour, dans la chambre de M. le curé où Jacquot, en retrouvant son maître, jeta un cri de joie si bruyant qu'il fit grand peur au pauvre pasteur.

« Je m'afflige, dit une notice du brave concierge, quand je pense que c'est moi qui ai rompu une si belle amitié... Le pauvre Jacquot croyait être libre dans les appartements les plus honnêtes comme dans le sien, et après plusieurs accidents de ce genre, on me l'enferma et je ne le vis plus ; mais son inquiétude a duré plus d'un an, et il en a perdu la vie de chagrin. Il est devenu sec comme un morceau de bois, et l'on m'a caché sa mort jusqu'à plus de deux mois après qu'il a été défunt... Il est mort dans la troisième année de son règne d'amitié ; il avait en tout sept ans et deux mois (8). »

Je pourrais citer d'autres preuves de l'intelligence et de la bonté des oies.

« Le docteur Jonathan Franklin a vu une oie d'Écosse qui suivait son maître comme le chien le plus fidèle, et qui le reconnaissait toujours, quelque travestissement qu'il prît.

Une autre oie (et le fait est plus touchant encore) se voua au service de sa pauvre vieille maîtresse, devenue aveugle, au point de la tirer par la robe avec son bec, pour la conduire sûrement partout où elle voulait aller. C'était en Allemagne. Un jour, dit Franklin, le pasteur alla rendre visite à la dame, qui était sortie ; mais il trouva la fille et lui témoigna quelque surprise de ce qu'elle laissait sa mère s'aventurer ainsi toute seule. - Ah ! Monsieur, répondit-elle, nous ne craignons rien ; ma mère n'est pas seule, puisque le jars est avec elle ! - Les dimanches, l'oiseau conduisait l'aveugle à l'église, puis se retirait dans le cimetière pour brouter l'herbe en attendant l'issue du service divin (9). »

Qu'on m'aille soutenir, après un tel récit,
Que ces bêtes n'ont point d'esprit (10) !

Mais alors, encore une fois, pourquoi dit-on bête comme une oie ? Serait-ce, par hasard, parce qu'elle se dandine un peu en marchant ? Mais le canard, plus bas sur pattes, se dandine bien davantage !..... Et puis, après tout, le dandinement de l'oie n'est pas absolument dépourvu de grâce. Le plus élégant écrivain du siècle dernier a mis au nombre des caractères qui constituent la distinction de cet oiseau « sa contenance, son port droit, sa démarche grave (11). »

Le dandinement appartient, parmi les hommes, à presque tous les gros personnages. Il contribue à leur donner un air d'importance et de gravité en rapport avec leurs fonctions, et peut-être ne faut-il pas chercher d'autre raison du nom de Dandin, donné par Racine à toute une dynastie de respectables magistrats :

Regarde dans ma chambre et dans ma garde-robe,
Les portraits des Dandins ; tous ont porté la robe ! (12).

Plus vous monterez les degrés de l'échelle sociale, plus vous serez frappés de la vérité de l'observation que je viens de vous soumettre. Et s'il vous est jamais arrivé de vous trouver sur le passage d'un roi très-puissant, vous avez dû remarquer qu'il ne marchait pas autrement. Je suis même persuadé qu'à sa cour, le dandinement devait être de très-bon goût, et qu'il n'était pas de courtisan, si maigre fût-il, qui ne marchât en écartant les jambes, et en portant alternativement à droite et à gauche le poids de son corps. Là, tous les gens bien pensant se dandinaient indubitablement, et la démarche sui generis, qu'on reproche chez nous aux palmipèdes, y serait restée en honneur si tous les rois avaient la même corpulence. Malheureusement, il en est des souverains comme des jours de la semaine ; ils se succèdent et ne se ressemblent pas : les uns sont gras, les autres sont maigres, en sorte que la mode la plus élégante n'a le temps de se fixer nulle part.....

Mais encore un coup, me dira-t-on, vous n'avez pas résolu la question posée en tête de ce chapitre : Pourquoi dit-on bête comme une oie ?... - Pourquoi ?... Messieurs, je l'ignore absolument, et si quelqu'un de vous le sait, il me fera plaisir de me l'apprendre.

§ 2.
DES BIENFAITS DE L'OIE ET DE L'INGRATITUDE DES HOMMES À SON ÉGARD.

On peut dire de l'oie, qu'elle comble l'homme de bienfaits, et qu'elle en est fort mal récompensée.

Sa plume, son duvet, sont les éléments les plus doux du lit, qui reçoit l'enfant nouveau-né, les jeunes époux, le voyageur fatigué, le malade, le vieillard, l'homme heureux ou l'infortuné. La chaleur de la plume sur laquelle ils s'étendent, de l'édredon sous lequel ils se glissent, favorise le sommeil réparateur, et l'heureux cortége des songes riants, trop souvent hélas ! la seule trève aux réalités de la misère et de toutes les souffrances physiques et morales dont se compose le tissu de la vie humaine.

Cette plume légère, ce duvet plus léger encore, pour les recueillir, ne suffirait-il pas à l'homme de rendre l'oie prisonnière pendant quelques jours de la mue ? Eh bien ! non. Il la plume vivante trois fois par an, en mai, en juin et en septembre, et calcule qu'une oie de taille ordinaire lui fournit un hectogramme de plume à chacune de ces douloureuses opérations. Ce supplice de l'oie commence pour ainsi dire avec sa vie, six à sept semaines après sa naissance. C'est encore cinq ou six semaines après qu'elle a cessé de couver, que la mère est dépouillée de ce duvet, si nécessaire pour réchauffer ses petits (13) Pauvre mère ! pauvres enfants ! mais qu'importe ? L'avarice seule est écoutée :

La cruelle qu'elle est se bouche les oreilles
Et les laisse crier.... (14)

Les grandes pennes de l'oie étaient un trésor infiniment plus précieux que le reste de son plumage ; ce trésor frappait incessamment nos yeux ; et cependant, combien il a fallu de siècles pour le découvrir ! Les Romains, même sous les empereurs, ne se servaient pour écrire que du calamus. Perse le qualifie nodosa arundo, un roseau noueux. Au 1er siècle de l'ère chrétienne, l'Égypte fournissait beaucoup de ces joncs à écrire, comme le prouve ce vers de Martial :

Dat chartis habiles calamos Memphitica tellus.

On assure qu'au Ve siècle, Théodoric, roi des Ostrogoths, se servit d'une plume pour tracer les quatre premières lettres de son nom ; mais, dans ce fait isolé, il ne faut pas plus voir l'origine des plumes d'oie à écrire, que l'origine des plumes de fer dans cette autre circonstance que les patriarches d'Orient croyaient de leur dignité de signer avec un calamus d'argent. L'examen des monuments de paléographie autorise « à donner les diplômes mérovingiens au calamus, ainsi que les chartes romaines dont l'origine remonte encore plus haut. Au VIIIe siècle, la canne et la plume auraient, en France, écrit tour à tour les diplômes ; mais la plume aurait insensiblement pris le dessus. Au siècle suivant, le roseau n'aurait presque plus été admis à écrire le corps des actes émanés de la puissance royale, quoiqu'il ne fût pas exclu des signatures, et que les bulles des papes et les actes synodaux le préférassent encore à la plume... (15) »

Avec un instrument aussi imparfait que le calamus, l'art d'écrire ne pouvait devenir d'un usage bien général. Y substituer la plume d'oie, c'était faire une véritable révolution. Alors seulement put devenir moins rare

. . . . . . cet art ingénieux
De peindre la parole et de parler aux yeux.

Mais, hélas ! l'homme sait faire tourner à son détriment les plus grands bienfaits de la Providence et des oies. Que de mauvaises pensées et de volumes dangereux sont sortis de ces mêmes plumes, qui n'auraient dû tracer que des écrits destinés à élever le coeur et à procurer à l'esprit les plus pures jouissances ! Ce qui met le comble à l'ingratitude de l'homme, c'est d'avoir employé ses meilleures plumes à écrire toute une série de livres où de nombreuses pages sont invariablement consacrées aux moyens les plus variés, les plus raffinés, d'apprêter l'oie, de l'embrocher, de la rôtir et de la manger !... Voyez plutôt la Cuisinière bourgeoise, le Cordon bleu, l'Art culinaire mis à la portée de toutes les fortunes et autres ouvrages du même genre, qui formeraient à eux seuls une énorme bibliothèque !

Encore si l'homme se contentait de l'oie telle qu'elle lui tombe sous la main !... Car il est admis (par lui, du moins) qu'il lui est permis, ainsi qu'aux loups, de se nourrir de la chair des animaux dont il peut se rendre le maître... Mais, non ! « il ne veut rien tel que l'a fait la nature... (16) » pas même la pauvre bête dont nous défendons la cause. « Par une pratique abominable et que l'on ne saurait trop flétrir, il lui donne une maladie dont l'effet est de grossir prodigieusement son foie. Pour cela, les uns clouent les pattes et crèvent les yeux ou cousent les paupières de ces malheureuses victimes ; ils les gorgent en même temps de boulettes et les empêchent de boire pour les étouffer dans leur graisse. D'autres se contentent de les tenir dans des cages obscures et tellement étroites que le pauvre animal ne peut faire le moindre mouvement. On les gave deux fois par jour, en ajoutant à leur nourriture de l'huile de pavot qui agit comme stupéfiant. Enfin, il y en a qui enferment les oies dans des sacs, de telle sorte qu'elles ne peuvent se mouvoir dans aucun sens ; et ces sacs, on les suspend à la muraille de chambres fortement chauffées. Par suite de ce traitement barbare, le foie prend un développement énorme ; la respiration de la malheureuse bête devient presque impossible. On la tue alors, et c'est ainsi qu'on obtient de ces foies gras dont on fait des pâtés pour les gourmands... (17) » Les fameux pâtés de Strasbourg.

O modernes Apicius ! chaque fois que vous vous rendez complices de ces actes de cruauté, puissent vos estomacs, à défaut de vos consciences, être bouleversés par d'affreux remords qui vous troublent jusqu'au fond des entrailles !

Et cependant, on est allé plus loin encore ! Au XVIe siècle, J. B. Porta, raffinant sur toutes ces horreurs, osa donner la recette de rôtir l'oie toute vive et de la manger membre à membre, tandis que le coeur palpite encore (18) ! Il ne manquait plus que d'obliger une autre oie à tourner la broche... Vous riez ! Vous croyez que je plaisante ? Pas le moins du monde. Avant l'invention des tournebroches, on employait souvent des animaux pour suppléer à la main de l'homme, et, parmi ces animaux, se trouvait l'oie (19) qui était ainsi exposée à faire rôtir le lendemain l'amie pour laquelle son coeur avait battu la veille, ou l'enfant qu'elle avait couvé...

« Triste objet, » que la mort avait défiguré,
« Et que méconnaîtrait l'oeil même de son père !... (20) »

Chez les peuples des régions polaires, où l'ignorance, la barbarie et la pauvreté des ressources, rendraient plus excusable l'industrie des Strasbourgeois, où des myriades d'oies couvrent les mers glaciales, on se contente de prendre de cette manne vivante envoyée par la Providence, ce qu'il en faut absolument pour la subsistance de chaque famille. La chair des oies est un des principaux aliments des habitants du Spitzberg, du Groenland et de la baie d'Hudson ; leur graisse est fondue pour remplacer le beurre, inconnu dans ces contrées ; et les Esquimaux utilisent jusqu'aux déjections des oies, qu'ils font sécher et mettent dans leurs lampes, en guise de mèches de coton (21). Willughby affirme que cette même matière est le remède le plus sûr contre la jaunisse (22). J'ignore si nos médecins nous en font avaler sous un nom scientifique et sous une forme déguisée.

Quand on meurt de faim et de froid, on rit peu, et je doute que les Kamtschadales aient jamais songé à folâtrer dans la neige avec les jeunes oisons ; mais, dans nos climats plus doux, ces aimables oiseaux pourraient être les compagnons des jeux de notre enfance. Un âge moins innocent s'amuse seul des oies, et j'ose à peine expliquer comment...

Il est un jeu barbare auquel j'ai vu souvent des gens du peuple s'exercer autrefois dans les guinguettes et les cabarets du boulevard Mont-Parnasse et de la Banlieue ; c'est ce qu'on appelait le tir à l'oie. On plaçait le cou d'une oie entre deux bâtons assez rapprochés pour empêcher la tête de passer, et le malheureux oiseau se trouvait ainsi suspendu. Les joueurs, dont chacun avait payé une certaine somme au gargotier, se plaçaient à 25 ou 30 pas, armés de longs bâtons qu'ils lançaient à la pauvre bête. Le corps de l'oiseau était préservé par des planches, et sa tête seule pouvait être atteinte. Pour gagner l'enjeu, il fallait que cette tête fût coupée par les bâtons auxquels elle servait de but et que l'oie, tout-à-fait décapitée tombât à terre. Il arrivait le plus souvent que l'oie était touchée vingt fois avant de mourir : plus elle était blessée, saignante, plus le jeu prenait d'intérêt ; les convulsions de son agonie faisaient le bonheur des joueurs, dont elles excitaient l'hilarité. Grâce à la loi Grammont, grâce à la Société protectrice des animaux qui veille à l'exécution de cette loi, le tir à l'oie est devenu rare. Il n'est cependant pas encore aboli partout, mais on se cache pour s'en amuser. Bêtes féroces, à face d'homme, qui vous livrez à ce plaisir avec vos enfants, poursuivez et vous recueillerez ce que vous aurez semé. Vos fils seront dignes de vous... ce bâton teint de sang d'un innocent animal se lèvera peut-être un jour sur votre tête et viendra figurer sur la table d'une Cour d'assises, parmi les pièces à conviction d'une accusation de parricide !...

Détournons nos yeux de ces horreurs, et reportons notre pensée vers de plus douces émotions, qui sont aussi pour nous des souvenirs d'enfance. Je veux parler d'un autre jeu qui porte aussi le nom de l'oie, et que je regarde comme un de ses bienfaits. Il a fait le bonheur de beaucoup de générations, puisqu'il est renouvelé des Grecs, et « l'esprit s'y déploie, » comme l'a judicieusement remarqué un certain Hector (23), qui descendait peut-être des Troyens, puisque rien ne s'oppose à ce qu'il en soit descendu. Le noble Jeu de l'Oie apprend aux enfants à compter jusqu'à 63, à lire des règles mieux retenues que celles du rudiment, et à supporter les coups du sort.

Je ne suis point surpris du succès soutenu de ce jeu philosophique. Il est l'image de la vie : beaucoup d'appelés et peu d'élus. Au point de départ, le nombre des concurrents est illimité. Une fois lancés dans la carrière, c'est à qui devancera les autres ; chacun pour soi ; nulle considération n'arrête ou ne suspend la marche des derniers venus. Tant pis pour les grands-parents s'ils se trouvent sur le chemin de leurs petits-enfants : ceux-ci leur passent sur le corps et peu leur importe, pourvu qu'ils arrivent au but les premiers. C'est en cela que consiste le bien-jouer... mais que d'obstacles sur la route ! Prenez garde au n° 19 ! celui qui entre à l'Hôtellerie y perd son temps, pendant que ses rivaux continuent d'avancer et font leurs affaires à ses dépens. Avis pour le reste de leurs jours à ceux qui seraient tentés de succomber aux séductions du cabaret ou du café. Pour moi, c'est tout un : le café est le cabaret des gentlemen, et le cabaret, le café des pauvres diables. Combien de gens prennent la fâcheuse habitude d'y gaspiller leur argent et leur temps, leurs soirées surtout, au mépris des douceurs du foyer domestique ! Et pourquoi ? Pour n'avoir pas compris, dans leur enfance, le sens profondément moral du ° 19. Ce danger passé, un autre écueil vous attend au n° 31 (le Puits), et vous y restez jusqu'à l'arrivée d'un libérateur qui prend votre place, comme un autre Vincent-de-Paul, moins la charité. Gare au 52 ! c'est la Prison avec laquelle les plus honnêtes gens sont exposés à faire connaissance, dans notre siècle de troubles et de révolutions. Tout cela est-il enfin derrière vous ? Vous approchez... hélas ! La Mort vous attend au n° 58, quand vous n'aviez plus à faire qu'un petit nombre de pas pour arriver au « Jardin de l'Oie », verdoyant, florissant, vrai paradis où sont réunis les enjeux. Un seul y parvient et prend tout ! N'avais-je pas raison de dire que le Jeu de l'Oie est l'image de la vie humaine ?

§ 3.
DE L'OIE AU POINT DE VUE DE L'ARCHÉOLOGIE ET DE L'HISTOIRE.

Un être aussi intéressant que l'oie ne pouvait manquer d'avoir une histoire à lui. J'en ai cherché les traces dans la nuit des temps, et comme, en pareille matière, on ne saurait remonter trop haut, je la commencerai ab ovo.

Aux temps héroïques de la guerre de Troie, c'est-à-dire environ 900 ans avant Jésus-Christ, l'oie était déjà et tout à la fois un objet d'affection et d'utilité. On avait des oies dans les cours, dans les jardins et jusque dans les habitations royales, comme oiseau d'agrément, et dans les basses-cours, comme oiseau comestible. Je ne sache pas qu'il en soit question dans l'Iliade, mais l'Odyssée en parle à deux reprises différentes. Chez Ménélas, Hélène, fille de Jupiter et de Léda, en élevait dans les cours de son palais, et l'une d'elles, ayant été enlevée par un aigle, il s'ensuivit une émotion générale :

Un aigle, paraissant à la droite des cieux,
S'envole en emportant, dans ses serres cruelles,
Loin d'une cour voisine, une oie aux blanches ailes.
Hommes, femmes, chacun à grands cris le poursuit (24).

Dans son petit royaume d'Ithaque, Pénélope en avait aussi et leur témoignait une grande tendresse ; c'est elle-même qui le dit :

Hôtes de mon palais, vingt oisons domestiques,
D'un blé détrempé d'eau, nourris sous les portiques,
Charment mes yeux . . . . . . . (25)

« Un homme, dit Ésope, avait une oie destinée à sa table et un cygne qu'il nourrissait pour la beauté de son chant. Il veut prendre l'oie, dans l'obscurité, pour lui couper le gorge. Il se trompe et prend le cygne ; mais celui-ci chante son chant harmonieux et suprême ; il est reconnu et sauvé. » Si les apologues qu'on attribue à l'illustre Phrygien étaient de lui, ils fourniraient, comme on le voit, une preuve nouvelle de la domestication de l'oie, dans l'Asie-Mineure, 600 ans environ avant notre ère ; mais les fables d'Ésope sont un peu de tout le monde ; Socrate en versifia plusieurs, Démétrius de Phalère en fit un recueil ; Babrius, ou plutôt Babrios, les mit en quatrains (26), et finalement un dernier recueil en fut fait par le moine Planude, au XIVe siècle (27). Toutefois, l'antiquité de cette fable du Cygne et de l'Oie est certaine, et son attribution au Phrygien peut être un indice utile de son origine, surtout si cet indice est confirmé par d'autres, comme on le verra tout à l'heure.

A ces époques et dans ces contrées lointaines où l'homme, moins distrait par les complications de la vie, s'adonnait davantage à l'intimité des êtres vivants dont il était entouré, l'oie était plus qu'un oiseau d'agrément : on utilisait sa vigilance. On lui confiait la garde de la maison, comme on la confie de nos jours au chien. Nous trouvons une preuve de cet usage chez les peuples de l'Asie-Mineure dans la fable de Philémon et Baucis. Le plus ancien récit qui nous en soit parvenu est d'Ovide, écrit, par conséquent, au siècle d'Auguste ; mais son origine orientale n'est pas douteuse. La scène se passe en Phrygie, pays voisin de la Troade ; c'est là que Jupiter et Mercure, repoussés de toutes les riches habitations, sont accueillis avec empressement dans l'hospitalière cabane de Philémon et Baucis. Ceux-ci n'avaient presque rien à offrir ; un prodige leur fait reconnaître les Dieux ; ils veulent leur faire un festin d'une oie, leur seule richesse, leur amie, la gardienne de leur pauvre taudis :

Unicus anser erat, minimæ custodia villæ
Quem Dis hospitibus, domini mactare parabant (28).

On sait le reste : l'oie se réfugie près des Dieux, qui s'opposent à ce qu'on la tue, etc.

La Fontaine a dénaturé ce sujet, en ne précisant pas le pays où la scène se passe ; et, malgré les admirables vers dont il a orné cette fable, j'oserai dire qu'il l'a un peu gâtée en substituant à l'oie, amie des vieillards phrygiens et gardienne de leur modeste habitation, « une perdrix privée, » courant dans le verger, et qui n'eût été qu'un objet de luxe et d'amusement.

L'oie, si douce et si familière, était, chez ces peuples primitifs, la compagne des jeux de l'enfance. Un joli groupe de notre musée des Antiques en porte témoignage : c'est L'Enfant à l'Oie. Ce groupe, en marbre pentélique, et déjà ancien par lui-même, « est la copie d'un groupe semblable dont Pline fait mention, et que Boëthus, statuaire carthaginois, avait exécuté en bronze (29) »

La passion de l'oie pour l'homme, qui répondait à son attachement, était bien connue des anciens.

Dans la ville d'AEgium en Achaïe, près de Sicyone, une oie aimait d'amour un jeune garçon, nommé Amphilochus, natif d'Olène. Cet amour est attesté par Cléarque, par Théophraste, par Athénée. Pline en a rajeuni la mémoire (30) ; le P. Hardouin n'a pas dédaigné d'en vérifier les détails, et Bayle d'en enrichir son Dictionnaire historique (31).

A ce fait, Athénée et Pline en ajoutent un autre, non moins fameux, qui suggère au naturaliste latin cette réflexion, que l'oie paraît apprécier la sagesse et la philosophie (potest et sapientiæ videri intellectus anseribus esse). Tous deux rapportent, en effet, que Lacyde, philosophe grec, natif de Cyrène, disciple d'Arcésilas et son successeur dans l'Académie, était lié de la plus intime amitié avec une oie, qui le suivait dans sa maison et au dehors, le jour et la nuit, en public, au bain, au milieu de ses élèves, partout. Quand la pauvre bête mourut, Lacyde lui fit des funérailles aussi magnifiques que si elle eût été son fils ou son frère (32). Il est douteux que les héritiers de Lacyde lui en aient fait d'aussi belles, lorsqu'il mourut 215 ans avant l'ère nouvelle. Ah ! si son oie avait pu lui fermer les yeux et présider à ses obsèques !... Il ne faudrait pas croire cependant que tous les Grecs aimassent l'oie, seulement à la façon de Lacyde ; beaucoup d'entre eux l'aimaient autrement, les Spartiates surtout : ils s'en régalaient (33).

Je ne voudrais rien dire ici qui fût désagréable aux chiens ; mais je dois à la vérité de déclarer qu'à Rome on leur préférait les oies pour la garde des maisons, des fermes et même des places fortes. AElien remarque en effet, avec raison, qu'en présentant un appât à un chien, on obtient de lui le silence, tandis que l'oie incorruptible crie lorsqu'on lui présente de la nourriture (34). C'est au plus savant agronome de l'antiquité, c'est à Columelle que nous devons de connaître la préférence des cultivateurs romains pour les oies, comme animaux de garde (35). Enfin, Végèce, dans son traité De l'art militaire, n'hésite pas à les donner pour les plus vigilantes sentinelles que l'on puisse poser dans une ville assiégée (36). Virgile a chanté leurs exploits au VIIIe livre de l'Énéide (37).

« Tout le monde sait qu'au Capitole, elles avertirent les Romains de l'assaut que tentaient les Gaulois, et que ce fut le salut de Rome. Aussi, le censeur fixait-il chaque année, une somme pour l'entretien des oies, tandis que le même jour on fouettait les chiens dans une place publique pour les punir de leur coupable silence dans un moment aussi critique (38) ». Il paraîtrait même, d'après le texte de Pline, qu'au jour du triomphe des oies, on crucifiait des chiens vivants, à des troncs de sureaux, dans les carrefours (39). Pauvres bêtes ! était-ce leur faute d'avoir l'oreille moins fine que les palmipèdes ? et n'était-ce pas bouleverser toutes les notions du juste et de l'injuste, que de punir sur des chiens de la 500e génération, la faute d'ancêtres qui pouvaient bien n'être pas les leurs ?

Sept ou huit cents ans après l'exploit qui valut au vainqueur des Gaulois le surnom de Capitolinus, on retrouve les oies en activité de service sur les remparts d'Argentoratum. Elles sauvèrent aussi cette ville des dangers d'un siége, dans la guerre que Julien y soutenait contre les Allemans et les Francs, qu'il battit en 347, sous les murs de cette importante cité (40). Argentoratum est devenu Strasbourg... l'ingrate Strasbourg... où l'on exploite, plus furieusement que partout ailleurs, le commerce des pâtés de foies gras !... Quel rapprochement et quelle dérision du sort !...

Si du moins les soldats romains s'étaient montrés reconnaissants envers les nobles bêtes qui les remplaçaient si bien sur les remparts ! Mais non ! la cupidité étouffait chez eux tout autre sentiment, même celui de la discipline. « Le prix que les Romains mettaient au duvet d'oie, qui leur venait de Germanie, fut plus d'une fois la cause de la négligence des soldats à garder les postes de ce pays ; car ils s'en allaient, par cohortes entières, à la chasse aux oies (41). Ajoutons que ces soldats pouvaient encore tirer bon parti de la graisse : « cette graisse d'oie était très-estimée des anciens, comme topique nerval et comme cosmétique ; ils en conseillent l'usage pour raffermir le sein des femmes nouvellement accouchées, et pour entretenir la netteté et la fraîcheur de la peau ; ils ont vanté comme médicament la graisse d'oie que l'on préparait, à Comagène, avec un mélange d'aromates. Aldrovande donne une liste de recettes où cette graisse entre comme spécifique (42)... »

On voit que, pour les anciens, l'oie était bonne à peu près à tout.

Son foie était particulièrement apprécié des gourmets romains. Pline le constate et agite la question de savoir si c'est à Scipion Métellus, personnage consulaire, ou à M. Sestius, chevalier romain de la même époque, qu'il faut attribuer la découverte d'un tel trésor (43). Martial vante les foies les plus volumineux.

Aspice quam tumeat magno jecur ansere majus (44).

Horace, dans le repas de Nasidienus, fait apporter entre autres mets, par les esclaves, le foie d'une oie blanche nourrie de figues grasses :

. . . . . . . . . . . . Deinde secuti
. . . . pueri . . . . discepta ferentes
Membra gruis . . . . . . . . . . . .
Pinguibus et ficis pastum jecur anseris albi (45).

Columelle, enfin, avait reconnu qu'on favorisait l'engraissement de l'oie et le développement de son foie, en l'enfermant dans l'obscurité ; mais là se bornait, chez les Romains, l'art de se procurer des foies gras ; ce qui n'empêche pas Juvénal, ami de Martial, et sans doute aussi des foies gras, d'affirmer, peut-être avec un peu de cette « mordante hyperbole » à lui reprochée par Boileau, qu'on parvenait à rendre le foie de l'oie aussi gros qu'une oie :

Anseris ante ipsum magni jecur, anseribus par (46).

De cet usage de développer les foies en nourrissant les oies de figues (fica), était né chez les Romains le mot ficatum. Le ficatum était le foie d'une oie engraissée avec des figues. Ce n'était, dans l'origine, qu'un terme de cuisine. Dans la basse-latinité des siècles suivants, le mot propre jecur fut remplacé par ficatum et même par figatum. Les langues romanes, héritières de ce parler populaire, ont tiré de là l'italien fegato, l'espagnol hegado, le portugais figado, le provençal fetge, et enfin le français foie. Ce dernier mot tire donc son origine de l'art culinaire des anciens, et son étymologie est constatée par M. Louis Quicherat dans le savant Dictionnaire à l'usage des érudits, qu'il a publié sous le titre : Addenda lexicis latinis.

Les anciens attribuaient au cygne un chant mélodieux qu'ils refusaient à l'oie. Virgile, dans sa IXe églogue, promet à Varus que les cygnes

Porteront jusqu'au ciel son renom glorieux (47)
Et dans la même pastorale, le berger Lycidas, comparant modestement ses inspirations à celles d'autres poètes, ajoute :
C'est le cri de l'oison près du cygne sonore (48)

Tout cela a longtemps passé pour n'être que mythologie ; mais le siècle du progrès devait amener le jour de la justice. Un de nos contemporains, qui a écrit l'histoire de son pays avec beaucoup d'imagination, et l'histoire naturelle depuis la baleine jusqu'à l'insecte, avec des idées toutes neuves, veut que le chant du cygne soit une vérité. Il a pris Virgile pour un naturaliste d'autrefois, et les cygnes pour des perroquets auxquels on apprenait à répéter un nom propre. Il affirme donc que les cygnes vivaient jadis dans les pays chauds « où », dans leur vol sublime, ils poursuivaient les étoiles d'un chant harmonieux et leur portaient le nom de Varus. » Il se demande sérieusement « si les organes du chant, qu'on trouve si développés chez le cygne, lui furent toujours inutiles, » et il conclut en déclarant que cet oiseau, « refoulé au nord, où ses amours trouvent mystère et repos, a sacrifié son chant et pris l'accent barbare (49). » S'il en est ainsi du cygne, il doit en être de même de l'oie, en vertu des lois d'analogie des espèces. Je demande donc à l'illustre physiologiste de s'assurer, par ces dissections pour lesquelles il professe un goût (auquel je crois qu'il ne s'est jamais laissé entraîner), si les organes du chant sont également développés chez l'oie, et d'étendre, en ce cas, à mes protégées ses savantes assertions. Les oies n'en chanteront pas davantage pour cela ; mais on saura du moins qu'elles pourraient chanter comme des cygnes, si elles n'avaient pas aussi adopté « l'accent barbare. »

Je serais tenté de croire que cette étroite parenté entre les cygnes et les oies avait frappé les Francs ; car, dans cette fameuse Loi Salique dont on parle tant sans la connaître et qui n'est guère qu'un tarif de dommages-intérêts, le voleur d'une oie domestique et le voleur d'un cygne sont également condamnés à payer 120 deniers, qui faisaient trois sous d'or (50) ; assimilation d'autant plus flatteuse pour l'oie, que les Francs étaient meilleurs juges que nous du mérite des animaux qu'ils savaient aussi mieux utiliser (51).

Les Païens avaient consacré l'oie au Dieu des jardins par des raisons qu'il ne serait pas convenable d'expliquer ici (52). Les Chrétiens la placèrent sous le patronage de saint Ferréol (53). Par quel motif ? Je l'ignore ; et de quel saint Ferréol, car il y en a quatre ? Je n'en sais rien. C'est en vain que je l'ai demandé aux Bollandistes et à d'autres hagiographes.

Quoi qu'il en soit, ce patronage atteste l'affection de nos bons aïeux pour l'oie ; et, de fait, elle était pour eux un des mets les plus recherchés. Témoin, la Farce de maître Pathelin. L'oie était l'élément principal des festins bourgeois et rustiques. Au mois d'août, on mangeait solennellement l'oie de la moisson, et l'usage existe encore dans les fermes normandes de régaler d'une oie les moissonneurs au jour de la rentrée des dernières gerbes. L'oie de la St-Martin était plus indispensable encore aux galas de l'arrière-saison. La Mésangère parle de « jetons qui ne paraissent pas être très-anciens et qui certainement font allusion à cet usage, puisqu'ils représentent d'un côté une oie et offrent de l'autre le mot Martinalia (54). »

Le savant Millin, naturaliste, antiquaire et numismate, n'a pas dédaigné de faire de cette médaille le sujet d'une grave dissertation sur les Martinales et l'oie de la St-Martin (55). Il nous apprend qu'elle est d'argent, d'un petit module, et que, d'après la forme des caractères, elle date du commencement de l'avant-dernier siècle. Il est persuadé qu'elle a été frappée à l'occasion des réunions de certaines corporations ou confréries, et des réjouissances auxquelles elles se livraient à l'époque de la St-Martin. J'ajouterai que la médaille en question pourrait bien être un de ces méreaux ou jetons de présence, dont l'usage a été fréquent au moyen-âge, et qu'on distribuait aux moines ou aux confrères, assistant aux offices religieux qui précédaient d'ordinaire les banquets des grandes fêtes. « L'oie, qui est la base de la fête, dit Millin, y figure d'un côté, et le mot Martinalia, inscrit de l'autre, indique l'objet de la réunion. Ce mot Martinalia a été reçu dans l'Église, pour désigner la fête de saint Martin, comme on dit Paschalia, Natalia, parce qu'elle avait une octave. »

Millin constate que l'oie était très-multipliée et appréciée dans les Gaules ; « mais, se demande-t-il, quel rapport peut-elle avoir avec le saint évêque de Tours ? Plusieurs saints ont un oiseau pour attribut : l'aigle accompagne saint Jean ; le corbeau, saint Benoît ; le cygne, saint Hugues. Aucune antique image de saint Martin ne le représente avec une oie. »

Millin réfute successivement toutes les hypothèses proposées par ceux qui, avant lui, avaient examiné la question. Suivant une certaine tradition, on mange une oie le jour de la St-Martin, pour punir cet oiseau d'avoir troublé le célèbre évêque dans une de ses prédications. Suivant les autres, saint Martin, pour se soustraire aux honneurs de l'épiscopat, que les chrétiens voulaient lui décerner, se serait caché dans une caverne profonde, et sa retraite aurait été décelée par les cris d'une oie ; en punition de quoi le Saint aurait maudit cet oiseau à perpétuité et l'aurait voué à la chaleur des fours, à l'ardeur des brasiers et aux broches acérées de fer ou de bois, pour être mangé dans les familles, en redisant, dans les choeurs joyeux, le sujet de la solennité. Cette légende racontée, d'après Bartholin, par Jean Bloy, en fort mauvais vers latins (56), n'est appuyée sur aucune autorité sérieuse.

Frédéric Nauséa, évêque de Vienne (57), dit que l'oie a été consacrée au repas de la St-Martin, parce qu'elle veille et crie pendant la nuit, comme le saint évêque veillait souvent pour rappeler aux fidèles leurs devoirs dans de vives prédications. Cette explication est encore rejetée par Millin. Il est vrai que, dans la symbolique chrétienne, l'oie (qui avait diverses significations) était considérée comme représentant principalement la vigilance, à cause de l'extrême finesse de son ouïe et de l'instinct qui la porte à crier et à signaler, surtout pendant la nuit, l'approche furtive de tout venant. Dans tous les traités à l'usage des cloîtres, écrits par les mystiques, à partir du Xe siècle, et notamment dans ceux de Raban-Maur, l'oie figure le religieux vigilant, prudent, qui, voyant pécher son frère, en quelque sorte endormi dans l'oubli du devoir ou de la règle, l'éveille et l'oblige à se garder des surprises de l'éternel ennemi (hostem antiquum), c'est-à-dire du démon (58). Mais ce symbolisme ne suffit pas pour rattacher au souvenir du saint qui fonda dans les Gaules le premier monastère, l'usage de se régaler d'une oie au jour de sa fête.

Bartholin, qui avait déjà indiqué une origine citée plus haut, en hasarde encore une autre : c'est que les Chrétiens auraient mangé l'oie dans leurs festins du 11 novembre, en mémoire de ce que sa chair trop pesante aurait occasionné des désordres dans l'estomac du Saint et causé sa fin ; à quoi l'on objecte, avec raison, que Sulpice Sevère, ami et biographe de saint Martin, qui fait de sa mort un touchant récit, ne dit rien de ce conte ridicule.

Millin cite encore l'opinion du Père Carmeli (59), qui n'aurait vu dans les Martinalia, que la continuation dans la Gaule, païenne d'abord et ensuite chrétienne, des fêtes de Bacchus, succédant aux vendanges célébrées chez les Grecs, au mois Anthesterion, sous le nom de Pithoegia { grec }, et chez les Romains, sous les noms de Vinalia et de Brumalia. Cette opinion s'appuierait sur divers miracles opérés au tombeau de saint Martin en faveur des buveurs de vin. M. Leber admet sans hésiter cette origine : « C'est en passant par les Brumalia des Romains, dit-il, que les Anthestéries grecques sont venues se mêler au divertissement des Chrétiens, où elles ont usurpé longtemps après le nom de saint Martin (60). »

A cette explication, Millin en préfère une autre qu'il attribue au religieux Camaldule Anselmo Costadini (61), mort vers la fin du siècle dernier, et que celui-ci paraît avoir empruntée au moine français, Gervaise, qui écrivait cent ans auparavant. « L'église grecque, dit Millin, avait d'abord quatre carêmes ; l'église latine en eut trois, et ils furent réduits à deux : l'un appelé le grand carême, précédait Pâques, et l'autre, nommé le petit carême, précédait Noël ; celui-ci reçut aussi le nom de carême de saint Martin, parce qu'il commençait le 12 novembre. La veille, qui était le jour de la fête du Saint, était consacrée, comme la veille des Cendres, c'est-à-dire du grand carême, à des plaisirs et à des festins. L'usage du premier carême a cessé au commencement du XIIIe siècle, et ne s'est plus conservé que dans quelques cloîtres. Il dure encore chez les Camaldules, qui en consacrent la veille, c'est-à-dire le 11 Novembre, à d'innocentes récréations telles qu'une promenade commune au dehors de leur monastère, pendant laquelle ils peuvent rompre le silence rigoureux qui leur est habituellement imposé, tandis que des viandes, qui dans d'autres temps sont toujours proscrites, les attendent au réfectoire..... Quoique le carême de la St-Martin ait été réuni à celui de Pâques et qu'il n'existe plus, le jour de réjouissance a subsisté ; et comme il se lie en quelques lieux aux opérations de la vendange, on l'a regardé comme une fête bachique, et l'on en a cherché l'origine dans les orgies païennes et les Bacchanales (62). »

Mais pourquoi l'oie est-elle, plutôt que tout autre animal domestique, la pièce fondamentale des repas de la St-Martin ? Par la seule raison peut-être qu'elle était, chez les Gaulois et au moyen-âge, le plus gros et le plus estimé des oiseaux de basse-cour, et qu'à ce titre, elle devait être servie de préférence aux autres volailles dans les festins nombreux, et par conséquent aux banquets de confréries ; et cet usage s'est perpétué même après l'extinction des confréries.

Apprêter les oies, les rôtir, les vendre à une fenêtre ouverte sur la rue, était jadis, chez nous, un privilège et presque un sacerdoce. Ceux qui l'exerçaient s'appelaient des "oyers". » Les oyers de la rue aux Oués, qu'on a depuis appelée par corruption rue aux Ours (63), jouissaient surtout d'une réputation d'habileté, ce qui avait donné lieu à cette singulière locution : Vous avez le nez tourné à la friandise comme St-Jacques-L'Hôpital, parce que le portail de cette église était en face de la rue aux Oués. N'entrait pas qui voulait dans la puissante corporation des « oyers et maistres rostisseurs de la ville et faux-bourgs de Paris : » les conditions à remplir étaient nombreuses et rigoureusement exigées. L'art pratiqué par eux fut longtemps protégé, contre empiétements de leurs rivaux, par les plus glorieux d'entre les rois de France. Elle donna lieu à des statuts minutieux de Philippe-le-Bel, en 1298, et à des lettres-patentes de Louis XII, de mars 1509 (64). En vain les « poulaillers » voulurent-ils faire concurrence aux « oyers » : François 1er les repoussa et maintint ceux-ci dans leurs priviléges, par une ordonnance de mars 1526. Henri II se laissa forcer la main ; il admit le premier cette concurrence, tant convoitée par les poulaillers ; mais il mit à ses lettres-patentes du 9 avril 1546 cette condition « qu'ils useroient tous de leurs droits et priviléges, ainsi que leur estoit licite et permis par les ordonnances, sur peine aux délinquans et commettans faultes et abus, pour la première fois d'estre fustigez par les carrefours de la ville de Paris, et de la hart pour la deuxième fois... (65). »

D'autres ordonnances furent rendues sur l'exercice de cette noble profession, par Charles IX, les 4 février 1567 et 14 avril 1578 ; par Louis XIII, en 1610, et par son lieutenant civil, le 30 mars 1635 (66). Ce n'était pas petite affaire de maintenir dans toute sa pureté une industrie de cette importance, surtout à l'époque où tout se gâtait : aussi, trouve-t-on des traces de sa réglementation jusque sous le règne de l'infortuné Louis XVI (67).

Mais, ô anarchie ! tandis que le souverain protégeait les oyers et les rôtisseurs, son parlement persécutait les oies ! Par trois arrêts des 21 mars 1782, 9 décembre 1783 et 20 juin 1785 (68), il accusait les oies d'endommager « par leur fiente.... » (oui, le Parlement

De ce burlesque mot a sali ses arrêts !)

d'endommager, dis-je, par leur fiente, les pâturages des bestiaux... comme s'il était possible d'interdire à de pauvres oiseaux ce dont les conseillers eux-mêmes n'eussent pu se dispenser !... et comme si les bêtes à cornes ne salissaient pas cent fois davantage les herbages des oies !... mais les petits ont toujours tort, et les gros ont toujours raison. Ce n'est pas tout, ces arrêts ordonnaient de restreindre le nombre des oies dans les campagnes ! c'était ordonner le massacre des innocents ! Dans toutes les paroisses, les officiers des justices locales devaient déterminer le nombre d'oies que la paroisse pourrait posséder, et les lieux où il leur serait loisible de paître. Et si quelques-unes dépassaient le nombre permis ou les limites du terrain légal, on mettait à leurs trousses les substituts du procureur-général dans les siéges royaux, les officiers des justices locales, les syndics des paroisses, les officiers et les cavaliers de la maréchaussée, pour assurer l'exécution de ces arrêts, lesquels devaient être imprimés, publiés, affichés et lus chaque année devant toutes les églises, à l'issue des messes paroissiales ! Si le nom de Brid'oye n'eût été depuis longtemps inventé par Rabelais, ces arrêts l'auraient fait trouver ! Et, comme pour ajouter la dérision à la cruauté, le dernier de ces monuments judiciaires était rendu « sur le rapport de maître Lattaignant, conseiller (69), » parent sans doute du jovial abbé dont le nom rappelle la chanson ironique : « J'ai du bon tabac !... Quel emploi de la force armée et de la magistrature elle-même ! Quelle révolution dans les idées ! On le sentait déjà dans l'air, 93 n'était pas loin !...

CONCLUSION.

Respectons le malheur !... Plumons l'oie, sans la faire crier ; tuons-la en lui faisant le moins de mal possible ; enfin, mangeons-la..... il le faut bien, hélas ! puisque la race humaine ne se nourrit plus des doctrines de Pythagore. Mais n'aggravons pas son sort par de barbares tortures, et surtout n'ajoutons pas l'ironie d'une expression proverbiale, dont l'injustice est aujourd'hui démontrée, aux infortunes d'un être innocent, intéressant, intelligent, aimant et... succulent.


Notes :
(1) M. Le Sage ou Entretiens d'un instituteur avec ses élèves sur les animaux utiles, par M. Bourguin. Chap. des Oies.
(2) Relation du docteur Sanchez, citée par Buffon.
(3) M. Lesage, loc. cit.
(4) Page 407.
(5) La Mésangère, Dict. des Proverbes, V° OIE. Boiste, Dict. univ. de la langue française, V° OIE.
(6) Molière ; La Mésangère ; Dict. de Boiste.
(7) Boiste et La Mésangère. - La Fontaine.
(8) Buffon.
(9) M. Oscar Honoré, Le Coeur des bêtes, ch. XLIII.
(10) La Fontaine, livre X, fable I.
(11) Buffon.
(12) Racine, Les Plaideurs.
(13) Buffon, L'Oie.
(14) Malherbe, Stances à Du Perrier.
(15) Nouveau Traité de Diplomatique. V. le Dict. raisonné de Diplomatique chrétienne, par Quantin, INSTRUMENTS DE L'ÉCRIVAIN.
(16) Jean-Jacques Rousseau, Emile, livre 1er.
(17) M. Lesage, Les Oies ; Buffon, L'Oie.
(18) V. Aldrovande, t. III, p. 133.
(19) Nouveau Cours d'agriculture, 1822, t. X, p. 448.
(20) Racine, Phèdre.
(21) Ellis, t. II, p. 171. Olaüs Magnus, Hist. Sept., lib. XIX, cap. VII. Buffon.
(22) Buffon, L'Oie.
(23) Regnard, Le Joueur.
(24) Ch. XV, vers 161, 162, 174, traduct. de M. Bignan. - M. Delorme, Les hommes d'Homère, chap. XI.
(25) Ch. XIX, vers 536, 537. M. Delorme, Ibid.
(26) Il renferme toujours son conte en quatre vers :
Bien ou mal, je le laisse à juger aux experts.
(LA FONTAINE, liv. VI, fable Ire.)
(27) Clavier, V. Ésope, dans la Biogr. univ.
(28) Métamorphoses, liv. VIII.
(29) Manuel de l'Hist. de l'Art chez les anciens, etc., 1re partie, n° 694, par M. de Clarac, membre de l'Institut et conservateur des antiques.
(30) Lib. X, cap. XXII.
(31) V° AMPHILOCHUS.
(32) Athénée, lib. XIII, cap. VIII. Pline, lib. X, cap. XXII. AElian. De natura animal., lib. VII, cap. XLI. Bayle, Dict. hist., V° LACYDE. Biograp. univ., V° LACYDE.
(33) Athénée, lib. XIV, cap. LXXIV.
(34) AElian, lib. XII, cap. XXXIII.
(35) Anser solertiorem custodiam præbet quam canis, VIII, XIII.
(36) De re militari, lib. IV, cap. XXVI.
(37) Description du bouclier d'Énée.
(38) Buffon, L'Oie.
(39) Supplicia annua canes pendunt, vivi in sambuca arbore fixi. Lib. X, cap. XXII.
(40) Bouillet, Dict. d'histoire et de géographie, V° STRASBOURG. M. Oscar Honoré, Le Coeur des bêtes, chap. XLIII. M. Geoffroy-Saint-Hilaire.
(41) Buffon, L'Oie. « Cohortibus totis. » Pline, lib. X, cap. XXII.
(42) Buffon, L'Oie.
(43) « Qui primus tantum bonum invenerit. » Lib. X, cap. XXII.
(44) L. XIII, 58.
(45) Lib. II, Sat. 8.
(46) Juuvénal, Sat. 5, vers 114.
(47) Vare, tuum nomen . . . . . . . . . . .
Cantantes sublime ferent ad sidera cycni.
(Traduction de M. Berville.)
(48) . . . . . . videor . . . . . . . . . .
. . . . argutos inter strepere anser olores
(Même traduction.)
(49) Michelet, L'Oiseau. Décadence de quelques espèces.
(50) « .....CXX denariis, qui faciunt solidos III, culpabilis judicetur.... » Tit. VII. De furtis avium, art 5 et 6. Le sou d'or se divisait en 40 deniers et valait environ 16 fr. de notre monnaie. V. Scaliger, De re nummaria.
(51) Ils dressaient à la chasse non-seulement des chiens, des faucons et des éperviers, mais encore des cerfs. Tit. XXXV De Venationibus, art. 2 et 3.
(52) Buffon, L'Oie.
(53) RABELAISIANA, Jurons, FERRÉOL. On y cite quatre saints de ce nom et l'on y renvoie, pour la justification du patronage des oies, à l'Apologie pour Hérodote, chap. XXXVIII. On ne voit que trois saints Ferréol dans le Catal. alphab. des Saints, donné par la Société de l'Hist. de France dans son Annuaire de 1860, p. 73.
(54) Dict. des proverbes français, OIE DE LA ST-MARTIN.
(55) Collection des meilleures dissertations, notices, etc., relatifs à l'Hist. de France, par M. Leber, t. XX, p. 328.
(56) Johan. Christ. Frohmann, Anser Martinianus, 1683, pars prima.
(57) Cité par Lamarre, Traité de la Police, t. II, p. 735.
(58) « ... Cum igitur anser supervenientis hominis odorem sentit, nocte clamare non desinit, quia cum negligentias ignorantiæ circonspectus frater in aliis videt, clamare debet... a capitulo vero clamor providi fratris hostem repellit antiquum... Divina Providentia naturam volucrum nobis, ut opinor, non proponeret, nisi eos in aliquo nobis prodesse vellet. » Hug. a Sancto Victore, Instit. monast. lib. I, cap. LXVI, t. II, p. 413. - V. aussi Eucher, saint Isidore de Séville, le savant abbé de Fulde Raban-Maur et autres qui ont écrit pour l'instruction des religieux.
(59) Della festa di san Martino. V. Storia di vari costumi sacri e profani, t. II, p. 79.
(60) Collection des meilleures dissertations, notices, etc., relatifs à l'Hist. de France, par C. Leber, t. IX, p. 465.
(61) Ragionamento sopra la recreazione di santo Martino. Cologera, Nuova Raccolta, XX, 143. V. aussi Vie de saint Martin, par Gervaise, p. 162, édit. in-4°, de Tours, 1699.
(62) Collection citée plus haut, t. XX, p. 328.
(63) Félibien, Hist. de Paris, Preuves, Table, RUE AUX OUÉS. Dulaure, Hist. de Paris, V. à la table, RUE AUX OURS.
(64) V. Recueil des anc. lois franç., t. XII, p. 274, notes ; Traité de la Police, II, 1430 ; et Anc. lois franç., t. XI, p. 557.
(65) Anc. lois franç., t. XIII, p. 1.
(66) Voir, à leurs dates, au Recueil des anc. lois franç.
(67) Ord. de police du 22 juillet 1778. Anc. lois fr., t. XXV, p. 365.
(68) Anc. lois franç., t. XXVII, p. 169 et 347, et t. XXVIII, p. 63.
(69) Anc. lois françaises, t. XXVIII, p. 64. - L'abbé Lattaignant, auteur de la chanson, était mort en 1779.


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