La présente édition,
entièrement conforme à la première (1894),
a été faite en mémoire de
l'Auteur décédé le 9 octobre
1906.
L'été attire chaque année sur les côtes du Calvados, et surtout à
Trouville, un grand nombre de baigneurs, de curieux et d'artistes.
La plupart d'entre eux ne se contentent pas d'admirer les splendeurs de
la mer et les élégantes villas qui la bordent, de Cabourg à Honfleur ;
ils veulent connaître le pays où ils viennent chercher le repos et la
santé, admirer ses sites gracieux, ses verdoyants paysages, étudier son
industrie, ses moeurs, ses monuments, son histoire.
Aussi les voyons-nous parcourant en voiture les routes qui sillonnent
la contrée, ou s'égarant à pied dans les sentiers ombreux, en quête de
quelques traces d'un passé qui va chaque jour s'effaçant. Leurs regards
sont particulièrement attirés par ces vieilles maisons en
colombages
dont les formes irrégulières et bizarres, dont les minces murailles de
bois et de terre, dont les toits en tuiles ou en paille forment un si
frappant contraste avec les constructions modernes en pierre et brique
aux formes carrées et solides, à l'intérieur confortable et qui auront
bientôt partout remplacé les habitations originales et traditionnelles
du pays d'Auge. Cette transformation prouve les progrès accomplis par
la richesse publique, le développement du bien-être étendu même à la
classe ouvrière, et réjouit l'économiste et le moraliste. Mais
l'artiste, l'antiquaire, le simple touriste lui-même, gardent au fond
du coeur quelque regret de ce passé si pittoresque et qui semblait
s'adapter si bien à ce cadre de verdure calme, où des boeufs lents et
pesants protestent en quelque sorte contre l'activité, je voudrais
presque dire la
nérvosité moderne.
L'un des restes de cette ancienne architecture normande les plus
faciles à visiter est le vieux
Manoir de Canapville, situé sur le
bord de la grande route de Pont-l'Évêque à Trouville, à peu prés à
égale distance de ces deux villes. Aussi beaucoup de promeneurs
s'arrêtent-ils en passant, les uns pour jeter un coup d'oeil à ces
vieilles murailles branlantes, les autres pour les dessiner, les autres
enfin pour les étudier et en reproduire quelques motifs dans les plans
de villas modernes qu'ils se proposent d'élever plus tard dans nos
élégantes
watering-places.
Ce
Manoir de Canapville date du milieu du XVe siècle. Il en est fait
mention dans les termes suivants dans un acte de vente passé en 1448
entre Benoît de
Launoy et Guillaume de Berteville. « A tous ceux qui ces lettres
verront ou oiront Iehan le Conte vicomte d'Auge salut, savoir faisons
que par devant lehan Mauvoisin clerc tabellion juré et établi en ladite
vicomté et siège du Pont-lévesque ainsi qu'il nous a témoigné fut
présent Benest de Launoy conseiller en cour laye, demeurant à Clermont,
lequel vendit et transporta afin d'héritage à Guillaume de Berteville
demeurant audit lieu de Pont-lévesque, c'est à savoir une franche
vavassorerie séante en la paroisse de Canapville avec l'hostel, la
cousture dauprès ledit hostel et toutes les autres terres labourables,
plantays et pasturages et les preys au-dessous y celui hostel qui
furent appartenant à feu Loys Despassans et qui par ledit Benest ont
été acquis tant par décret que autrement au deça du Moustier dudit lieu
de Canapville au costé devers Pont-lévesque au-dessous du quemin
passant devant le dit Moustier et l'hostel ..., avec toutes autres
dignités, franchises, libertés, rentes, reliefs treisiemes, hommes,
hommaiges et autres revenues à icelle vavassorerie et hostel
appartenant sans aucune réservation et retenue et fut la vente faite
par le prix de deux cent soixante livres tournois.... Ce fut fait et
passé le huitième jour d'avril l'an de grace 1448 avant Pâques Presents
; Guillaume Vipart, écuyer, Estienne du Fossey et maistre Guillaume
Gamare, syrurgien, témoings. »
Deux ans plus tard, le 19e jour d'avril 1450, avant Pâques, Guillaume
de Berteville vendit et transporta à vénérable et discrète personne,
maistre Jehan du Fossey, maistre ès arts et bachelier en laye, tout et
tel droit d'acquisiiion comme il en avait acquis de Benest de Launoy,
de Clermont, de l'hostel, terre, vavassorerie et domaine assis en la
paroisse de Canapville, qui fût et appartint à feu Loys Despassans,
dont plus ample desclaration est faite aux lettres de ce faites et
baillées audit maistre Jehan pour annexer se mestier est. Cette vente
est faite par le prix et somme de 300 livres tournois.
Un peu plus tard, Jehan du Fossey, par suite de lots et arrangements de
famille, céda et abandonna à son frère Estienne, écuyer, la
vavassorerie de Canapville, qualifiée aussi de vavassorerie de
Manneville. Le 26 juin 1484, Estienne du Fossey, âgé de plus de
soixante ans, obtint du roi Charles VIII des lettres patentes pour le
dispenser de venir en personne prêter en ses mains ou en celles de son
chancelier les foi, hommage et serment de fidélité dont il était tenu
pour ladite vavassorerie, et il fut autorisé à prêter ledit serment aux
mains du bailli de Rouen ou de son lieutenant en la vicomté d'Auge. La
vavassorerie, domaine et manoir de Canapville passèrent successivement
à Jean du Fossey, fils d'Estienne ; à Pierre, fils de Jean, et à
Jacques, fils de Pierre.
Le 20 septembre 1565, Jacques du Fossey déposa entre les mains de Jean
Aymar, écuyer, sieur de la Roche, commissaire député par monseigneur le
duc de Montpensier, pair de France, pour recevoir les foi, hommage et
serment de fidélité des seigneurs, gentilshommes et autres tenants de
la vicomté d'Auge, son aveu signé et scellé du scel de ses armes pour
la noble et franche vavassorerie de Canapville, mais ledit aveu ne fut
reçu que sous réserve et à charge, par ledit Jacques du Fossey,
d'apporter le dénombrement et les preuves de ses prétentions. Or, le 12
septembre, aux assises tenues à Pont-l'évesque par le Doulcet,
lieutenant du bailly de Rouen en ladite vicomté pour le Roy, et pour
monseigneur le duc de Montpensier, propriétaire de la vicomté d'Auge,
lesdites preuves furent apportées tant par titres que par témoins, et,
après une longue et minutieuse enquête, l'aveu de Jacques du Fossey fut
reconnu bon et valable, et toutes ses prétentions furent admises et
tenues pour justifiées.
Entre autres choses, il est établi par l'enquête que les du Fossey de
père en fils habitaient leur manoir de Canapville, et se faisaient
enterrer dans l'église de la paroisse. On cite même cette particularité
que Pierre du Fossey et sa femme Marie Pierre de Montpongnant
décédèrent et furent inhumés le même jour et mis dans la même fosse. Il
est établi aussi qu'ils jouissaient de droits importants dans la forêt
de Touques, qu'ils acquittaient de nombreuses charges et impositions,
et notamment qu'ils durent payer la redevance d'un dixième de leur
revenu pour la délivrance du roi François Ier ; enfin que la
vavassorerie de Canapville avait toujours été appelée noble.
Jacques du Fossey agrandit considérablement le domaine que son père
avait laissé dépérir. Son fils Daniel lui succéda et continua à
arrondir son domaine, notamment par l'achat de l'aînesse de la
vavassorerie de la Fosse Monfort qui, depuis lors, n'a cessé
d'appartenir aux seigneurs de Canapville ou à leurs cohéritiers.
A Daniel succéda son fils Jean, dont la veuve, Esther du Quesnoy,
vendit en 1648 pour le prix de 22.000 livres à François de Bailleul,
sieur de Bellengreville, le domaine du Vey, propriété de feu son mari.
Je cite ce détail pour montrer l'importance et l'opulence même des
châtelains de Canapville, qui ne dédaignaient pas depuis deux siècles
d'habiter un manoir dont se contente à peine aujourd'hui un gardien
d'herbages. Déjà auparavant, le 8 juillet 1635, le capitaine Jehan du
Fossey avait reçu du roi une commission pour lever et mettre sur pied
cent hommes de guerre et les conduire au duc d'Epernon. Dans un acte du
17 novembre 1660, Esther du Quesnoy, dame de Canapville, se qualifie de
veuve de Jean du Fossey, chevalier, seigneur de Canapville, et elle
continue à agrandir ce domaine par des acquisitions tant en son nom
qu'au nom de son fils Henri.
Mais avec Henri du Fossey s'éteint cette famille, ou du moins la
branche des seigneurs de Canapville. Il laisse, en effet, en 1677, pour
seuls héritiers ses soeurs : 1° Esther, épouse de Louis le Cloustier,
sieur de Bouthemont, et leurs enfants ; 2° Catherine, épouse d'Isaac de
Varignon, écuyer, sieur de Grées, et leurs enfants ; 3° Judith, épouse
de Nicolas de Carel, écuyer, sieur de Cresseveuilles ; 4° Jeanne,
lesquelles acceptent, pour le règlement de leurs droits dans la
succession d'Henri du Fossey, l'arbitrage de Daniel de Bras de Fer,
écuyer, sieur de Fontenelle, et du sieur de Prétot, écuyer.
Malgré cette convention, un accord parfait ne semble pas avoir régné
dans la famille, et nous voyons les nombreux neveux de Henri du Fossey
se partager et se repartager la succession de leur oncle jusqu'à ce
qu'enfin le domaine de Canapville soit attribué pour une partie aux
sieurs et demoiselle de Mathan, descendants de Catherine du Fossey,
dame de Varignon, et, pour l'autre partie, à Nicolas-François de
Costart, seigneur de la Chapelle et patron de Mery, descendant de
Judith du Fossey, dame de Carel et de Cresseveuilles.
En 1738, au mois de décembre, MM. Gabriel-Auguste de Mathan, chevalier,
et Joseph de Mathan, écuyer, tant en leur nom qu'au nom de leur sieur,
cédèrent à Nicolas-François de Costart tout ce qui leur était dévolu du
domaine de Canapville. De la sorte, le domaine entier se trouva réuni
dans la même main et demeura la propriété de M. de Costart, qui en
bailla aveu le 5 mars 1749 au duc d'Orléans, et reconnut tenir de son
Altesse Sérénissime une vavassorerie qui relève de plein relief par dix
sols, nommée la vavassorerie de Canapville. Depuis lors, ce domaine est
passé successivement par héritages, partages et rachats entre
cohéritiers, dans les familles de Tesson, Subtil de Franqueville et Le
Courtois du Manoir. Il appartient maintenant à Charles-Gaston Le
Courtois du Manoir, treizième descendant d'Estienne du Fossey, frère de
Jean du Fossey, l'acquéreur primitif de 1450.
Après avoir passé en revue les propriétaires, que dirons-nous de
l'habitation elle-même?
Un dessin la fera mieux connaître que n'importe quelle description ;
essayons cependant d'en dire quelques mots : le corps principal de
logis se compose de deux bâtiments élevés à droite et à gauche d'une
masse considérable de maçonnerie en pierre, qui consiste en trois
cheminées colossales accolées les unes aux autres et en une tourelle
d'escalier. A gauche de ce noyau central se trouve, au rez-de-chaussée,
une cuisine avec ses dépendances et une de ces larges cheminées dans
l'intérieur desquelles on s'assoit pour se chauffer. A droite, et
légèrement en contre-bas du sol de la cour, se voit une cave spacieuse.
Les murs de la cuisine en colombages s'appuient sur des fondations en
pierre, élevées jusqu'à un mètre environ au-dessus du sol. Les murs de
la cave, au contraire, sont en pierre jusqu'à la hauteur du premier
étage, et présentent à leur partie supérieure cette particularité
qu'ils sont formés d'un carrelage de carreaux blancs et rouges,
disposés en damier. La cuisine et la cave sont surmontées chacune d'une
grande chambre dont les murs sont en colombages. Ces deux chambres sont
pourvues chacune de sa vaste cheminée, semblable à celle de la cuisine
et s'y adossant. Au-dessus de la cave et de la chambre qui la surmonte,
on remarque un second étage éclairé par une large lucarne formant
fronton. Un grenier règne d'ailleurs sur tout l'édifice, à droite comme
à gauche du noyau central de maçonnerie, mais à des hauteurs inégales.
Cette partie de l'édifice me semble la plus ancienne, et doit remonter
à la première moitié du XVe siècle. Ce doit être là l'hostel dont il
est parlé dans l'acte de 1448.
A ce logis primitif, du côté de la route (du quemin, comme on écrivait
alors et comme on prononce encore aujourd'hui dans nos villages) se
trouvait un pressoir ou du moins un bâtiment qui sert aujourd'hui de
pressoir. Quel pouvait être l'usage de ce bâtiment à l'origine ? Je ne
le sais. Ce qui est certain, c'est que l'édifice actuel, malgré son
aspect si pittoresque et si original, est de date plus récente que la
construction primitive. Avant la restauration que j'ai dû entreprendre
il y a quatre ou cinq ans, il était facile, en regardant la charpente,
de constater que le bâtiment primitif était beaucoup plus étroit que
celui qui lui avait succédé, et qu'à une époque, que j'essaierai tout à
l'heure de préciser, on avait remplacé l'ancienne façade par une
nouvelle. On avait reporté celle-ci près de deux mètres en avant dans
la cour, en raccordant tant bien que mal l'ancienne charpente avec la
nouvelle, ce qui donnait à la toiture une forme étrange et curieuse.
Dans la restauration rendue nécessaire par l'état de vétusté de la
charpente, j'ai pu conserver la forme extérieure absolument intacte. La
façade est identiquement la même que l'ancienne ; les quelques parties
qu'il a fallu démonter, pour remplacer les tenons et les chevilles
pourries, ont été replacées telles qu'elles étaient. A peine deux ou
trois pièces importantes ont-elles été remplacées par des bois neufs
taillés et moulés d'après les anciens, avec la plus grande exactitude.
J'ai eu la chance de trouver dans la localité même, pour exécuter ce
travail, un habile charpentier, M. Léon Moutier, qui a compris
l'intérêt archéologique qui s'attachait à ce vieux reste de l'ancienne
architecture locale. Malheureusement, ce qui a pu être fait pour la
façade ne pouvait l'être pour la charpente intérieure. Les bois étaient
tellement vermoulus et pourris qu'il était impossible de les conserver.
On a dû faire une charpente neuve, en ayant soin toutefois de
reproduire exactement la forme de l'ancien toit.
A quelle époque ce pressoir a-t-il été construit avec son aspect et ses
dimensions actuelles ? J'inclinerais à croire qu'il fut l'oeuvre de
Jacques du Fossey, ou de son fils Daniel, qui travaillèrent avec
persévérance à reconstituer un domaine que la négligence de Pierre du
Fossey, faible d'esprit, dit-on, avait laissé dépérir. Cela ferait
remonter cet édifice à la seconde moitié du XVIe siècle. Ce qui me le
ferait croire encore, c'est le soin que mit Jacques du Fossey à faire
valoir et reconnaître le droit qu'il avait de prendre, dans la forêt de
Touques, du bois pour l'entretien de son domaine. Cela d'ailleurs ne
s'accorderait-il pas avec la tradition qui fait remonter à cette époque
le grand développement de la culture du pommier à cidre en Normandie.
L'ensemble des bâtiments que nous venons de décrire présente une longue
façade dont l'aspect a quelque chose de bizarre et d'étrange, surtout à
raison des trois corps avancés qui en coupent la ligne droite à
intervalles inégaux : la tourelle d'escalier en pierre, le porche en
colombages qui donne accès dans la cave, et l'escalier en bois qui
monte au grenier du pressoir. En face de ces bâtiments s'étend une cour
carrée, défigurée aujourd'hui, malheureusement, par des constructions
modernes qui lui ont enlevé beaucoup de l'intérêt qu'elle présentait
encore dans mon enfance.
Le long de la route et du côté du jardin, il ne reste presque plus rien
d'ancien, si ce n'est dix ou douze mètres de cette singulière suite de
logettes à volailles et à lapins qui jadis régnait sur tout un côté de
la cour, le long du mur qui la séparait du jardin. Ces logettes, hautes
de deux pieds environ, sont surmontées d'une sorte d'abri ou hangar
dont l'épaisseur ne dépasse pas un mètre, et qui est supporté par une
charpente assez prétentieusement travaillée, soutenue elle-même par une
véritable colonnade en bois, formée de piliers s'espaçant à une
distance irrégulière de un à deux mètres. Les quelques mètres qui
restent encore de cette singulière construction permettent de se rendre
compte de l'effet que produisait la colonnade entière.
Le côté de la cour opposé à la route a conservé, au contraire, sa
physionomie ancienne.
A gauche, se voit encore une vieille grange sans caractère particulier
; mais, à droite de la barrière qui donne accès aux herbages, s'élève
un bâtiment qui n'a qu'un rez-de-chaussée et un grenier. Celui-ci est
éclairé par une lucarne formée de quatre baies ou fenêtres étroites,
dont les parties supérieures sont à jour, mais dont les parties
inférieures sont fermées par une sorte de croisillon en forme d'X qui
donne à l'édifice un aspect relativement élégant.
Aussi les gens du pays appellent-ils ce bâtiment la
Vieille Maison.
J'ai cependant beaucoup de peine à croire que ce soit la partie la plus
ancienne du Manoir ; d'abord cela ne pouvait pas constituer une maison
d'habitation à cause de son exiguïté : le grenier, malgré sa lucarne
prétentieuse, n'a jamais pu être autre chose qu'un grenier fort étroit
et sans accès ; enfin l'élégance même de la lucarne me porterait à lui
attribuer plutôt une date postérieure.
Quoi qu'il en soit de l'âge exact de la
Vieille Maison, ce qui est
certain, c'est qu'à une époque relativement récente, au XVIIe siècle je
crois, les propriétaires y aménagèrent pour leur usage une petite salle
ou salon avec une cheminée dont la décoration de bon goût a été
conservée ou plutôt reproduite lors de la dernière restauration.
Il ne me reste plus à parler que du colombier qui s'élève au milieu de
la cour. Celui-ci est carré, les murs jusqu'à deux mètres et demi du
sol sont en pierre, mais la partie supérieure est en colombages. Le
toit, élevé et pointu, était naguère encore surmonté de deux élégants
épis en faïence. M. de Franqueville les a enlevés il y a une quinzaine
d'années, et les garde comme un souvenir de ce vieux domaine de ses
aïeux dont il m'a abandonné sa part presque en totalité. Ce colombier
ne doit pas remonter au delà du XVIe siècle.
M. de Caumont s'est occupé, en passant, du
Manoir de Canapville. Il
ne lui attribue pas de date précise, que je sache, mais il le cite
comme un type curieux des habitations rurales en Normandie aux XVe et
XVIe siècles. L'artiste anglais qui en a publié une esquisse dans le n°
du 22 mars 1890 de The Illustrated London News le considère également
comme un spécimen caractéristique des manoirs franco-normands du XVIe
siècle.
C'est en somme à cette date qu'il faut, je crois, rapporter la
construction de la presque totalité de cette résidence jadis
seigneuriale, si l'on en excepte le corps principal de logis groupé
autour du noyau central de maçonnerie comprenant la triple cheminée et
la tourelle de l'escalier, qui existait déjà en 1448.
Cette notice, beaucoup trop longue pour les curieux qui ne veulent que
jeter un coup d'oeil rapide sur le pays à travers lequel ils passent,
pour les artistes qui ne veulent que croquer un joli motif d'aquarelle
ou d'eau-forte, intéressera peut-être quelque bon Normand du pays
d'Auge qui, dans ses longs loisirs, au milieu du calme des champs et
des prairies, voudra connaître ce que furent pendant quatre siècles la
vie et des habitants et des habitations de son pays.