BEAUGRAND,
Nicolas.- Le Maréchal expert, traitant du naturel
et des marques des beaux et bons Chevaux, de leurs maladies, et remèdes
d'icelles ; avec un examen en forme de l'état du Maréchal, et une
description de toutes les parties et ossemens du Cheval [suivi
de] Le Maréchal expert,
contenant plusieurs recettes approuvées du sieur de L'Epinet,
Gentilhomme Périgourdin, pour toutes les maladies et accidens qui
arrivent aux Chevaux .- A Neac : chez P. Nipolach, [s.d.]
[A Caen : chez P. Chalopin, (ca 1800)].- 68 + 60 p. ; 18 cm.
Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (21.VI.2006) Relecture : A. Guézou. Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex -Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01 Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] obogros@ville-lisieux.fr http://www.bmlisieux.com/ Diffusion libre et gratuite (freeware) Orthographe et graphie conservées. Texte établi sur l'exemplaire de la médiathèque (Bm Lx : norm 1469). LE MARÉCHAL EXPERT, CONTENANT PLUSIEURS RECETTES Approuvées du sieur DE L’ÉPINET, Gentilhomme Périgourdin, pour toutes les maladies et accidens qui arrivent aux Chevaux. SECONDE PARTIE. DERNIÈRE ÉDITION ______________________
Autre signes et marques pour connoître les chevaux, leur âge, leurs qualités bonnes et mauvaises, et suivant ce qu’a écrit un des premiers écuyers de ce tems.
POUR
l’âge des chevaux, presque toutes bêtes
qui n’ont point la corne du
pied fendue (dite vulgairement la rale du pied) se peut
connoître par
les enseignemens présentement déclarés. Quand un cheval est âgé de trente mois, il jette ses dents du milieu, à savoir, les deux de dessus et les deux de dessous. Quant le cheval vient à son quatrième an, il perd encore autant de dents comme il en a déjà perdu, lesquelles étoient proches de celles qu’il avoit premièrement perdues. Et alors les dents mâchelières commenceront à lui venir. Quant un cheval vient à sa cinquième année, il jette encore deux dents qu’on appelle dents caniques, lesquelles reviennent en la sixième année. Et en la septième, toutes les dents susdites sont revenues en leur juste grandeur. Les chevaux qui ont plus de sept ans ne marquent plus leur âge, sinon que leurs dents s’avancent en sortant de leur bouche, ou bien qu’ils ont leurs sourcils gris blancs, et aussi de grosses fosses auprès des sourcils, ce qui leur vient au sixième an de leur âge ou environ. Quelle est l’excellence d’un cheval ? Marc Xarron approuve un cheval qui a la tête courte, les yeux noirs, les membres non confus, ni les narines étroites, ni les oreilles couchées. Mais bien celui qui a le crin épais, noirâtre, crêpu et bien garni de poil, pendant sur le côté droit qui est du côté de la lance. Icelui cheval ayant la poitrine large et charnue, les épaules larges, le ventre médiocre, le rable s’inclinant en bas de l’épine du dos, vulgairement l’échine, comme étant doublé, la queue bien garnie de poil, les jambes droites et égales, les genoux ronds et courts, la corne du pied ronde et dure, le corps plein de muscles et veines, lesquelles soient bien apparentes. Au surplus, il convient savoir qu’un cheval a ordinairement quarante dents, et que les jumens en ont moins de quarante. Et faut savoir semblablement que les chevaux qui ont moins de quarante dents ne sont pas si bons comme ceux qui en ont quarante. Davantage, Pladien dit, quand il est gaillard et assuré, ne s’efforçant point pour voir ou ouïr quelque chose qu’il n’a pas appris d’ouïr ou de voir. S’il court gaiement avec alégresse, devant la troupe des autres chevaux où il est, et s’il devance à la course ses compagnons à lui égaux. S’il saute sans peur par dessus un fossé, s’il passe hardiment une rivière ou pont. La forme ou figure d’un cheval est très-bonne, quand il a la tête petite, les yeux noirs, les naseaux ouverts, les oreilles courtes, le col souple, gros et long, les épaules grandes et droites, les côtés pleins, le ventre étroit, les testicules ou génitoires petits et égaux, la queue longue et crêpue, les jambes hautes, droites et souples, les jointures rondes et courtes, ne se retirant point par le dedans de la jambe, les fesses amples, pleines et rondes, les cuisses potelées, la corne des pieds dure et concave en rondeur, au-dessus desquels il y ait une couronne médiocre. Il convient aussi que son corps composé soit grand, haut et droit, et qu’il se montre agile, et de long comme tout rond, autant comme sa figure le permet. Finalement j’ai bien voulu ajouter aux qualités que j’ai trouvées en un plaisant livre, auquel il est écrit, qu’un bon cheval doit ressembler, en trois qualités, à un cerf, à un boeuf, à un renard et à une femme ; car il doit avoir jambes, tête et cornes de jointure, boyaux et yeux de boeuf, oreilles, queue et galop du renard : finalement il doit avoir belle poitrine, léger courage, et être doux au montoir, lesquelles qualités doivent être en un bon cheval. Quant à la couleur du poil des chevaux, il convient d’en connoître la différence suivant qu’il s’ensuit, afin de mieux remarquer la bonté d’iceux. Le bai obscur de couleur de châtaignes. Le grison pommelé. Le gris obscur tirant sur le noir. Le crin comme tête de more, c’est à savoir, que l’alezan obcur démontre que les chevaux ayant tel poil sont meilleurs et de plus gentille nature. Ainsi les autres, dont la couleur du poil approche plus les susdits, sont meilleurs que ceux qui l’ont plus différent.
************************* RECETTES TRÈS-SOUVERAINES, Approuvées du sieur DE L’ESPINET, Gentilhomme périgourdin, pour toutes les maladies et accidens qui peuvent arriver aux chevaux.
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CHAPITRE PREMIER.
*Onguent pour faire dévaler faux quartier ou seime.
PRENEZ
une livre d’huile d’olive, une livre de sain de
porc, une livre de suif
de mouton, quatre onces de mastic, deux onces de myrrhe, deux onces
d’aloës, qu’il faut faire fondre avec
l’huile, la graisse et le suif,
faites dissoudre à part du galbanum ; puis y jettez les
poudres
susdites, et mêlez le tout ensemble, puis quand le tout sera
bien
incorporé, il faut le tirer hors du feu et y ajouter quatre
onces de
poix noire pour lui faire prendre corps, et bien remuer le tout hors de
dessus le feu, jusqu’à ce que le tout soit bien
incorporé, puis vous en
frotterez la corne du Cheval.
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CHAPITRE II.
Pour un Cheval qui a faux quartier.
FAITES
lui faire un fer qui ne porte point sur la partie
intéressée du pied,
puis prenez de l’huile d’olive, faites-la bouillir
dans un pot de terre
neuf, et faites-la chauffer jusqu’à ce que le feu
prenne dedans ; ayez
un morceau de sublimé dans une pièce de linge
neuf, mettez-le tremper
dans ladite huile bouillante et en frottez le quartier ou seime, puis
emplissez le pied du Cheval de fiente de boeuf, et prenez
garde qu’il
n’y mette les dents, lui laissant le fer, il
guérira, et ne cessera pas
de travailler ; il faut aussi lui graisser les pieds de cet onguent, et
il lui fera avaler le pied en peu de temps.
________________________ CHAPITRE III.
Pour un Cheval qui a la corne du pied foible.
PRENEZ de l’herbe appellée bouillon blanc,
faites-la piler, et la mettez dans le pied du Cheval, cela lui
affermira.
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CHAPITRE IV.
Remède pour un Cheval qui est encloué, quoique l’apostume soit jusqu’au poil.
VOUS
prendrez l’herbe appellée Dormante, autrement
mille feuilles, faites-la
piler, puis déferrez le Cheval, et mettez du jus de cette
herbe dans le
trou du clou ; si l’apostume alloit jusqu’au poil,
il faut tâcher de
faire entrer du jus de ladite herbe dans l’apostume, et en
mettre le
marc dessus le clou, il guérira.
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CHAPITRE V. Pour un Cheval qui sent des douleurs aux pieds, même à cause de son travail.
PRENEZ
des oeufs et les faites cuire, puis les rompez dans le pied du
Cheval
avec la coque, et quand vous aurez ôté cela et
bien nétoyé ses pieds,
il faudra prendre de la fiente de pourceau ou de boeuf, la
détremper
avec bon vinaigre, et lui mettre dans le pied.
________________________ CHAPITRE VI. De l’ordre qu’on doit tenir pour dessoler un Cheval.
ON
dessole ordinairement un Cheval, pour quelque matière
retenue sous la
solle qui n’a pu avoir cours, à cause de
l’enclouure par foulement de
fer, ou par l’ignorance du Maréchal, ou par
quelque pierre ou caillou
qui lui auroit offensé la solle : Premièrement,
vous la ferez décharner
tout autour avec la rognette, et lorsqu’elle sera bien
déracinée, vous
pourrez la tirer avec des tenailles, et y mettre le défensif
qui suit.
Prenez bol en poudre et suie de cheminée, le tout
broyé bien menu, avec
vin, blanc d’oeuf, alun de glace et
vitriol, et de cela vous ferez
un défensif avec bonne compresse que vous banderez fort sur
le pied du
Cheval, de peur que la corne ne surmonte. Il faut bien faire votre
défensif, et pour cela il faut faire des petits tortillons
de la
grosseur du pouce, que vous tremperez dans ledit défensif,
et les bien
mettre dans la solle sur le champ avec bonne compresse, comme il est
dit, vous y laisserez cet appareil l’espace de vingt-quatre
heures,
l’arrosant néanmoins avec du vinaigre, puis au
bout des vingt-quatre
heures vous y en remetterez un autre ; après cela, vous
mettrez, pour
la troisième fois, sur ladite solle, du sel
d’orties fait avec miel,
alun et un peu de vitriol que vous ferez bouillir dans du vin, puis
vous l’appliquerez sur le mal.
________________________ CHAPITRE VII. Pour consolider les pieds étonnés.
IL
faut fricasser de la fiente de pourceau avec bon vinaigre, les faire
bouillir ensemble, et mettre le tout chaudement dans les pieds du
Cheval, cela lui consolidera les pieds.
________________________ CHAPITRE VIII. Pour crapauds et poireaux qui viennent sur la corne des Chevaux.
PRENEZ
un gros de souffre vert et un gros de vif argent avec un pot de
lessive, faites bouillir le tout, et faites-le tiédir pour
vous en
servir.
________________________ CHAPITRE IX. Pour faire venir le poil aux Chevaux, et leur adoucir la corne.
PRENEZ
la seconde pelure des feuilles de sureau, les pilez et en tirez plein
une écuelle de jus ; prenez une douzaine de vieux ognons, de
l’onguent
rosat, et deux fois autant de sain de porc, faites bien piler ensemble
le tout jusqu’à ce qu’il soit
incorporé, et sans le faire passer
aucunement sur le feu ; puis il faut prendre une bande
d’étoupes, et la
frotter dudit onguent ; ensuite appliquez-la sur les pieds du Cheval,
et la liez fort entre le poil et la corne avec une bande de grosse
toile par-dessus ; il faut bander tout cela sans l’envoyer
à l’eau
pendant qu’on lui fera ce remède ; puis il faut
mettre de cet onguent
tous les vingt-quatre heures sur les bandes.
________________________ CHAPITRE X. Des réparties qui se font de travers.
CES
réparties se guérissent difficilement par
médicament, c’est pourquoi il
faut y ajouter les cautères. Il faut donc quelles soient
cuites avec un
fer rond ou autre : car par le secours du feu elles
n’augmentent plus,
puis prenez térébenthine trois onces, cire
blanche trois onces, mettez
le tout sur le feu dans un vaisseau d’étain net,
jusqu’à ce qu’il soit
détrempé, puis ôtez-le du feu et remuez
le tout jusqu’à ce qu’il
blanchisse, puis y ajoutez une demi-once de gomme de pin, trois
drachmes de bétoine consommée, et quatre drachmes
de lait de Femme ;
cet onguent est très-bon aux percussions, soit à
homme ou à bête, et
sert à toutes réparties, javars et goisannes.
________________________ CHAPITRE XI. Recette pour le susdit quartier.
FAITES
déferrer le Cheval et lui faites bien parer le pied
jusqu’au vif, puis
le faites ferrer, comme j’ai dit ci-dessus ; ensuite prenez
des oeufs
frais, et en tirez les blancs, battez-les fort dans un plat avec de la
chaux vive bien déliée, et en faites un onguent,
duquel vous
envelopperez le pied du Cheval ; vous mettrez du poivre bien
délié dans
le trou du quartier, puis y mettrez l’emplâtre et
l’y laisserez quatre
jours ; après il faut lui frotter le pied de
l’onguent pour la corne.
________________________ CHAPITRE XII. Pour douleur de pieds d’un Cheval causée par la débilité de la corne.
LES
Chevaux qui sont débiles de la corne, en temps
d’été, le travail leur
est insupportable à cause de la dureté de la
terre ; il faut, quand
vous ferez ferrer votre Cheval, ne lui guères parer le pied
et surtout
ne lui guères ouvrir les talons et laisser la fourchette
forte, puis
user de l’onguent qui suit : Prenez une livre de cire neuve,
demi-livre
d’huile d’olive, quatre onces de
térébenthine et deux onces de galbanum
avec vinaigre, puis mêlez le tout, et en faites un onguent,
duquel
frotterez les pieds du Cheval une fois le jour, et il ne cessera pas de
travailler.
________________________ CHAPITRE XIII. Pour assurer les pieds d’un Cheval en travaillant.
PRENEZ
térébenthine et suif de mouton et les faites
fondre ensemble, puis
mettez le tout chaud dans les pieds du Cheval, et étant
rassis, mettez
de la fiente par-dessus, et les laissez poser sur la litière.
________________________ CHAPITRE XIV. Pour enclouures.
SI
le Cheval est resté long-temps encloué et
qu’il y ait apostume, il faut
ouvrir le pied et tirer l’apostume, et après il
faut mettre un anchois
dans la fente du mal, et si vous avez le temps il faut faire faire un
bon restraintif et le bien serrer.
________________________ CHAPITRE XV. Autre recette pour enclouure.
APRÈS
avoir fait sortir l’apostume du pied du Cheval
encloué, prenez de la
térébenthine et du galbanum avec du sucre que
vous ferez fondre
ensemble, et le mettrez dans le mal ; si vous êtes
pressé de faire
voyage, vous pourrez vous en servir à l’instant. Si le Cheval a eu le pied serré d’un clou, tirez le clou sans déferrer, et par le même trou du clou passez-y un bout de ligneul à coudre des souliers, et faites un noeud à chaque bout de peur qu’il ne sorte.
________________________ CHAPITRE XVI. Pour un Cheval qui est enchevestré.
SI
l’enchevestrure n’est pas trop
invétérée, prenez de la laine et en
faites un bouchon qui comprenne tout le mal, mettez-y de la graisse de
mouton sans être fondue, et serrez bien la laine sur le mal.
________________________ CHAPITRE XVII. Pour guérir les crevasses et teignes, et pour l’enchevestrure.
PRENEZ
huile d’olive une drachme, et trois drachmes de
térébenthine, détrempez
le tout ensemble au feu, puis y ajoutez un peu de cire neuve, faites
tout incorporer ensemble, et oignez-en le mal.
________________________ CHAPITRE XVIII. Pour le ver volant.
QUAND
vous verrez le mal en forme de glande, et qu’elle augmente
plus que de
coutume, il faut saigner le Cheval de la veine du col et des flancs,
jusqu’à ce qu’il reste
entièrement foible ; puis il faut lui lier les
cuisses un peu fort, afin que les humeurs découlent par le
serrement
des cordes ; ensuite il faut le cautériser bien avant, et
mettre dessus
des étoupes bien trempées dans du blanc
d’oeuf, et le laisser trois
jours à l’écurie ; puis
après il faut bien l’exercer, soir et matin,
tous les jours, pour faire dissoudre l’humeur, et ce
jusqu’à ce que la
jambe soit désenflée, que les plaies commencent
à sécher, et que la
couleur qui paroît jaune et noire, soit blanche ; pour les
plaies il
faut prendre chaux vive, poivre et lait d’anubula, et
mêler le tout
ensemble avec huile commune ; cet onguent desséche bien les
plaies et
les consolide. Il faut mettre à toutes les plaies poix et
graisse
fondue, et mettre dessus cautère, et au bout du mois il faut
le saigner.
________________________ CHAPITRE XIX. Pour les étranguillons.
IL
y a une glande qui vient autour du col du Cheval, qui semble
être de
chair, que quelques-uns nomment branche, d’autres
étranguillons, elle
ébranle la bouche et les mandibules, de sorte
qu’à peine le Cheval
peut-il avoir son haleine, avaler sa mangeaille, et porter la
tête
droite, de manière que l’inflammation
paroît clairement, les conduits
du gossier sont si fort enflés et restraints,
qu’à peine il peut
respirer, manger et boire ; cette fluxion est occasionnée
par la
passion des humeurs venant de la tête desdites glandes. On la
guérit
ainsi : si l’âge du Cheval le permet il faut le
saigner de la veine
organe, car cette passion arrive souvent aux jeunes Chevaux, dont
l’humeur est coulante ; cette saignée faite, vous
ferez un emplâtre
pour mûrir et dissoudre, comme il suit. Prenez mauves et semence de lin, thym, ache, et lierre terrestre, de toutes ces choses faites-en arrosement, puis mêlez avec huile laurin bouillie et althea, près du feu ; il faut que le Cheval boive de l’eau tiéde mêlée avec de la farine, puis faire l’emplâtre ci-dessus, détrempé avec du vin et le mettre sous la gorge du Cheval ; quand elle amolira il faut la piquer avec la lancette, donner au Cheval un exercice modéré, avec les liens sous la gorge, le conduisant, soir et matin, comme vous verrez qu’il sera convenable, il faut couvrir le Cheval, oindre souvent la gorge et tout le lieu des étranguillons de beurre frais, et le tenir en lieu chaud.
________________________ CHAPITRE XX. Des veules des Chevaux.
LES
veules sont des petites glandes qui viennent entre le col et la
tête du
Cheval, lesquelles sont quelquefois si fort augmentées par
l’extravasion des humeurs superflues du flegme, que le
passage du
gosier est très-restraint, c’est pourquoi si le
Cheval n’est secouru
promptement, les arrières du gosier se serrent, et le
suffoquent
tellement qu’il est contraint de se laisser tomber, frappant
si fort de
la tête en terre qu’à peine peut-il se
relever ; ce mal est appellé
morbile, autrement veules ; les signes pour les connoître
sont, que le
Cheval serre continuellement les oreilles et ne veut aucunement
être
touché, les glandes paroissent quelquefois à la
vue, ils endurent
grande soif, et ne veulent pas manger, léchant tout ce
qu’on leur met,
ils souffrent quelquefois aussi de grands tremblemens avec chaleur
universelle. Remède audit mal. Quand les veules commencent à enfler comme un oeuf plus ou moins ; elles doivent être brûlées avec un fer ardent jusqu’à la racine, et étant extirpées comme le ver, autant d’un côté que de l’autre, selon que vous verrez être expédient, les veules étant arrachées, il faut saigner le Cheval de la veine du col, et de celle de dessous la langue, puis mettre dessus un emplâtre fait de mauves et semence de lin, oignez le lien avec du beurre frais et onguent d’althea, puis quand elles commencent à venir, prenez une éguille d’argent chaude et la mettez à chaque pertuis.
________________________ CHAPITRE XXI. Pour les avives et tranchées au ventre du Cheval.
LES
avives ne sont autre chose qu’un vrai catarre qui par sa
malice émeut
les flegmes du cerveau du Cheval, même en telle abondance que
leurs
humeurs tombant sur les glandes jugulaires qui sont le long du col,
tenant les racines des oreilles jusqu’au gosier, sont
apparentes à
pleine main aux glandes jugulaires : ce rhume suffoque, serre et
restreint le gosier, et sans un prompt secours, le Cheval est en danger
de mort : cette maladie vient aux Chevaux souvent, pour,
après un grand
travail, leur avoir laissé prendre trop de repos,
étant encore en
sueur, sans les promener, ou bien pour avoir été
abreuvés étant en
chaleur, cela leur engendre des tranchées, qui tourmentent
si rudement
le Cheval, que le phlegme en étant ému, et par le
catarre envoyé aux
glandes jugulaires du gosier, cause les avives : les
tranchées
saisissent aussi quelquefois le Cheval pour avoir pris trop
à coup de
viande, et en si grande abondance, que l’estomac et foie ne
peuvent
faire office, de sorte que la viande demeure indigeste et amene grande
douleur au ventre du Cheval ; il est aussi sujet à la
colique venteuse,
dont il souffre un extrême tourment, ne pouvant uriner, ou
aussi pour
avoir trop long-temps porté son urine, qui cause
l’inflammation des
conduits, et donne aussi grandes douleurs au Cheval : les signes se
connoissent ainsi qu’il suit ; et puisque les
ventrées sont la cause et
le motif des avives, nous parlerons premièrement
d’elles. Le Cheval qui a ventrée perd tout à coup l’appétit, il ne peut rester en repos, tantôt couché, tantôt debout, il se débat de fureur, donnant de la tête et du pied en terre. Les avives se connoissent lorsque le Cheval a les glandes jugulaires grosses à pleine main, et en les prenant il craint comme si on le battoit, il faut coucher l’oreille du Cheval sur lesdites glandes, et remarquer le lieu ou ira le bout de l’oreille, et à cet endroit prendre le poil avec deux doigts, lequel s’arrachera légèrement, et la peau où le poil aura été arraché, sera comme grisâtre tirant sur le bleu. Alors, les avives sont prêtes à tirer et il ne faut plus attendre ; le Cheval aura la racine de l’oreille froide, le vent qui sort des naseaux sera froid, il aura aussi la fièvre, et si les ventrées accompagnent les avives, le Cheval sera toujours couché et ne prendra aucun repos. Remède. Aussitôt que vous vous appercevrez que le Cheval aura des ventrées ou tranchées, il ne faut pas le sortir de l’écurie, mais le faire saigner, tant au palais qu’aux naseaux, et de la veine de dessous la langue : puis le couvrir, et le promener jusqu’à ce que l’on voie du soulagement ; s’il a froid, tant aux oreilles qu’au corps, il le faut faire trotter jusqu’à ce que la chaleur lui revienne, et étant revenue, faites-le encore promener au petit pas jusqu’à ce qu’il ait fienté, puis le remettez à l’écurie et lui donnez à manger ; si le Cheval n’étoit pas guéri, il faut bien prendre garde que des avives ne soient descendues, et s’il y a apparence des avives, vous le saignerez de la veine des flancs, puis les ferez encore bien promener ; s’il fait sa fiente c’est bon signe, et alors il faut le mettre en repos et le laisser demi-heure avec la bride, pourvu qu’il demeure paisible sans se coucher ; s’il arrivoit que le mal continue, prenez des mauves ou guimauves, de la pariétaire, feuilles de choux et mercuriale, de chacune une bonne poignée, faites-les bouillir avec de l’eau jusqu’à la réduction des deux tiers, puis pressez lesdites herbes, et en tirez toute la substance, après prenez quatre têtes d’ail, et les ayant bien pilées, tirez-en le jus que vous mettrez dans la décoction, en y ajoutant six onces de bon miel, et demi-livre d’huile d’olive, puis faites rebouillir le tout ensemble un bouillon, et étant encore un peu tiède vous le ferez prendre au Cheval avec la seringue, en observant, lorsque vous voudrez lui donner, de mettre le Cheval dans un endroit où il ait le devant plus bas que le derrière ; il est bon aussi de lui frotter les raies du ventre de cette décoction, et lui en laver les génitoires, et s’il est besoin, de réitérer, car ce clystère est bon à toutes douleurs de ventre. Si vous n’avez pas le moyen et la commodité de faire ce que dessus, vous en pouvez faire un autre comme il suit. Prenez de la casse préparée, que vous mêlerez avec un pot de vin blanc, détrempez-la jusqu’à ce qu’elle soit liquide comme eau, puis prenez ognons blancs et les pilez en un mortier, tirez-en le jus avec du vin blanc, que vous mêlerez avec ce qui est dit : prenez aussi une livre de miel avec autant d’huile d’olive, et faites bouillir le tout un peu ensemble, puis le donnez un peu tiède au Cheval, et le promenez, s’il est possible, en lieu de vallée environ demi-heure, après remettez-le à l’écurie et le tenez au filet demi-heure, puis lui donnez à manger, et ne l’abreuvez pas que les douleurs ne soient passées ; quand vous l’abreuverez, donnez-lui de l’eau tiède et de la farine dedans ; pendant que vous travaillerez à la guérison des ventrées, il faut toujours avoir l’oeil aux avives, car elles paroissent en peu de temps, et s’il arrive qu’elles soient descendues aux glandes jugulaires, ce que vous connoîtrez par les signes susdits, alors il faut promptement les lever avec la lancette et mettre dans le trou du sel, par-dessus un emplâtre avec du papier, de peur que le vent n’y entre : il ne faut pas laisser le Cheval en repos, jusqu’à ce que vous connoissiez son soulagement ; alors il ne faudra promener le Cheval que le petit pas, et trois jours après il faut graisser les endroits où ont été ôtées les avives avec vieux-oing.
________________________ CHAPITRE XXII. Autre recette pour les avives.
PRENEZ
l’oreille du Cheval, la couchez le long du col, et au bout de
l’oreille
vous trouverez les avives qu’il faut prendre avec des
tenailles et
fendre l’endroit au bout de l’oreille, puis en
faire sortir lesdites
avives, qu’il faut premièrement abattre les tenant
avec les tenailles,
puis mettre du sel dans le trou.
________________________ CHAPITRE XXIII. Recette pour les Grapes.
FAUT
prendre une once de litarge d’or, une once de vitriol vert,
une once de
soufre vif, une once de soufre mortifié en huile
d’amande douce, une
once de vieux lard, et deux onces de sain de porc avec le fiel
d’un
boeuf ou d’une vache, pulvérisez et
mêlez le tout ensemble, et vous en
servez pour les grapes.
________________________ CHAPITRE XXIV. Pour galle et crevasses qui viennent aux pâturons.
PRENEZ
du gras de lard avec du vert-de-gris, fondez le tout ensemble, et
frottez en les crevasses et galles ; et quand elles seront
sèches, il
faut les laver avec de la lessive, qui ne soit pas trop forte, et du
savon noir.
________________________ CHAPITRE XXV. Autre pour la galle.
PRENEZ
demi-livre de vieux-oing, une once de salpêtre, demi-once de
couperose,
demi-quarteron de savon noir, deux onces de poix blanche, deux onces
d’alun de glace, deux onces de vert-de-gris, et deux onces
d’huile
d’olive ; incorporez ensemble toutes ces choses, et en faites
un
onguent duquel vous frotterez la galle.
________________________ CHAPITRE XXVI. Pour malandres et mules traversines.
PRENEZ
deux onces d’huile de chènevis, deux onces de
miel, deux onces de
vieux-oing, une once de vert-de-gris, deux onces de poix noire, deux
onces de soufre vif, une once et demie de vif argent, deux onces et
demie de couperose, deux onces d’orpin, deux onces et demie
d’alun de
glace, mettez le tout sur le feu, jusqu’à ce
qu’il bouille, quand il
aura un peu bouilli, mettez-le dans une boîte et en oignez le
mal du
Cheval jusqu’à ce qu’il soit
guéri.
________________________ CHAPITRE XXVII. Pour un Cheval qui a le genou enflé, pour empêcher que la courbe n’y naisse.
FAUT
prendre de la suie de cheminée, de la plus dure, et la
mettre en
poudre, puis la détremper avec huile d’olive et la
pêtrir avec un peu
de pâte, et de cela vous ferez un emplâtre que vous
lierez sur
l’enflure.
________________________ CHAPITRE XXVIII. Pour guérir les courbes quand elles naissent, ou quand elles sont formées.
PRENEZ
de la sauge, de la salamandre, broyez-les bien ensemble, et les
détrempez en bon vinaigre, puis prenez de la folle farine,
la pilez
avec lesdites herbes, puis les faites un peu bouillir ensemble, et liez
cela tout chaudement sur la courbe.
________________________ CHAPITRE XXIX. Pour flux de sang des plaies du Cheval, et l’Hémoragie qui s’ensuit.
SI le sang coule des plaies du Cheval, prenez du feutre et le
brûlez, puis mettez du jus d’orties et liez pendant
trois jours.
Autrement. Si la veine est tranchée de travers, de manière qu’il s’ensuive hémoragie, mettez dessus poudre de pin, et brûlez la.
Autre.
Pour
restreindre le sang coulant, faites un emplâtre comme il suit
: prenez
encens deux parties, aloès parthique une tierce partie,
pulvérisez le
tout ensemble, et le battez fort avec blanc d’oeuf,
melez-le avec bonne
quantité de poil de Liévre, et le mettez sur la
plaie.
Autre. Faites un emplâtre avec de la chaux vive, et des petits grains de raisine bien broyés.
________________________ CHAPITRE XXX. Pour les larmes aux yeux des Chevaux.
SOUVENT
il vient aux Chevaux effusion de larmes, tant qu’à
peine peuvent-ils
ouvrir les yeux, ou pour avoir été
frappés, ou pour s’être trop
frottés. Remède. Faites un restraintif au front du Cheval, de galbanum, mastic pulvérisé, et poix avec blanc d’oeuf, battez le tout bien fort ensemble, puis mettez-le sur une peau large de quatre doigts, qui aille depuis un des tempes jusqu’à l’autre, par le milieu du front : puis il faut l’ôter avec de l’eau chaude et l’huile doucement ; il faut aussi laver les yeux du Cheval deux fois le jour avec vin blanc chaud. Il est bon de jeter dans l’oeil de la poudre de tartre et d’os secs : il est bon aussi de faire un emplâtre de lierre terrestre avec cire. Il est aussi à propos pour ôter la blancheur de l’oeil quand elle vient d’un coup, de prendre une couenne de lard, la faire bien brûler presque en charbon, puis la piler dans un mortier, et en faire de la poudre bien subtile, que vous soufflerez dans l’oeil deux fois le jour.
________________________ CHAPITRE XXXI. Pour le cartilage onglé.
PRENEZ
un sol et le mettez dans l’oeil du Cheval, puis ayez
une aiguille avec
du fil toute prête, dont vous percerez l’ongle,
puis le couperez avec
des ciseaux. On y met aussi une lézarde
pulvérisée. Cela sert
grandement contre le blanc de l’oeil, et mange
l’ongle.
Contre la macule dans l’oeil du Cheval.
Prenez
os secs, tartre et sel également, avec poivre ;
pulvérisez le tout
ensemble et le mettez avec miel dans une coque
d’oeuf que vous mettrez
sur les cendres chaudes, puis frottez-en l’oeil du Cheval. Quand le Cheval s’est trop frotté l’oeil, il le faut saigner de la veine de l’oeil, laver ledit oeil avec eau froide et savon, et lui mettre estellette à l’oeil.
________________________ CHAPITRE XXXII. De la taie ou dragon à l’oeil du Cheval.
IL
n’y a point de remède qui puisse guérir
ce mal ; ainsi il n’est pas
besoin de travailler à guérir le Cheval du dragon
; il est de couleur
blanche, couvrant la prunelle de l’oeil. Quelquefois le Cheval reçoit à l’oeil un coup si violent que par négligence il se fait un trou dans l’oeil. Remède. Prenez miel rosat ; et le mêlez avec sel de verre en poudre, et mettez-en soir et matin dans l’oeil jusqu’à ce que le trou soit rempli ; puis vous y mettrez de la poudre indiquée pour guérir la taie : il ne faut pas que le Cheval mange de l’avoine tant qu’il aura mal aux yeux.
Autre remède pour la taie dans l’oeil et
l’onglée.
Prenez
un oeuf qui soit fait du jour même et le rompez par
le milieu, ôtez-en
le blanc, et laissez le jaune que vous envelopperez
d’étoupes avec le
coque et les couvrez de cendres chaudes, puis mettez de bon brasier
par-dessus les cendres, laissez-le tout en cet état une nuit
entière,
puis prenez l’oeuf avec la coque, et de ce faites-en
de la poudre bien
subtile que vous soufflerez soir et matin dans
l’oeil ; il guérira et
même fera jeter l’onglée.
________________________ CHAPITRE XXXIII. Recette pour le mal des yeux des Chevaux.
LE
mal des yeux des Chevaux provient d’une
super-fluité d’eau qui empêche
l’esprit visuel, principalement aux Chevaux qui ont la
tête grosse.
Cela vient de la grande froidure du cerveau ; quelquefois au
défaut de
la lune, une autre fois au plein, l’oeil sera
à moitié couvert de taches
jaunes, blanches ou rouges, et par fois enflé. Cette maladie
s’appelle
descente d’humeurs, ou autrement lunatique ; les
remèdes doivent être
doux et non violens, saignant le Cheval de temps en temps, vous vous
servirez de racines de fenouil, des herbes de célidoine, de
lière et de
rue, de toutes une poignée, avec trois onces de miel, faites
bouillir
le tout ensemble, avec eau de rivière
jusqu’à réduction de la
moitié,
puis un peu tiéde mettez-en dans les yeux avec un
éclissoire, et lavez
de cette décoction tout l’oeil malade,
matin et soir, jusqu’à ce qu’il
soit guéri ; si vous ne pouvez faire ce remède,
usez des collyres qui
suivent. Prenez miel rosat deux onces, eau rose deux onces, tartre
préparé demi-once, sel de verre deux gros, et le
tout étant bien
incorporé ensemble, mettez-en, soir et matin, dans
l’oeil malade : et
parce que cette descente d’humeurs vient ordinairement
à tous les
défauts de lune, pour l’empêcher, il
sera bon de faire saigner le
Cheval à tous les défauts de lune, et avant que
ses yeux soient
troublés, il le faut saigner des tempes, et les quatre jours
suivans il
mangera bien peu d’avoine, et mouillée dans de
l’eau. Les orties dessus
les yeux sont bonnes à tels Chevaux, quatre doigts
près de l’oeil, et en
la peau descendues, il faut y mettre du beurre frais une fois
seulement, et vous mettrez de l’ortie avec un tuyau de plume
d’oie
graissé de beurre frais ; il seroit bon de lui laisser deux
ou trois
mois, car plus il portera ce tuyau, mieux il se portera : il faut
nettoyer tous les jours l’apostume qui sera dans le trou
ouvert, et
bien presser les humeurs qui sont dans l’ortie. Si
l’oeil du Cheval
paroît rouge, prenez blanc d’oeuf avec eau
rose et deux ou trois gouttes
de vinaigre, battez le tout ensemble avec une spatule,
jusqu’à ce qu’il
soit tout en mousse, puis y trempez un drapeau blanc, couvrez
l’oeil
rouge et la moitié du trou ; faites cela deux ou trois jours.
________________________ CHAPITRE XXXIV. Pour Cheval qui a la toux sèche et qui est dégoûté.
PRENEZ
du genièvre qui ait la graine fort mûre, coupez-le
bien menu et le bois
aussi, puis mettez-le dans une grande chaudière, faites-le
bouillir
dans l’eau jusqu’à ce que
l’herbe ait perdu sa verdure, et l’eau
restera rousse, alors vous la donnerez à boire au Cheval, et
ne lui en
donnerez point d’autre, quoiqu’il fasse
difficulté au commencement ;
car après en avoir goûté il
l’aimera mieux que l’autre, cela fera
qu’il
mangera mieux et s’engraissera. Il faut continuer de lui en
donner
l’espace de trois semaines, et jusqu’à
parfaite guérison ; il est à
noter que ce remède n’est pas bon en
Été à cause de la chaleur.
________________________ CHAPITRE XXXV. Autre remède pour la toux, vieille ou autre.
PRENEZ
douze onces de réglisse, douze onces de chardon
bénit, six onces de
gentiane, douze onces d’anis, deux onces de diagalanga,
quatre onces de
noix muscade, quatre onces de scammonée, douze onces
d’agaric, deux
onces de sénegré, le tout bien
pulvérisé et incorporé ensemble, que
vous mettrez dans une boîte, et chaque fois que vous donnerez
l’avoine
au Cheval, vous en mêlerez une poignée parmi.
________________________ CHAPITRE XXXVI. Pour morfondure.
SI
le Cheval est morfondu, mouillez-le tout d’eau froide, puis
le couvrez
d’un drap que vous mouillerez aussi d’eau, puis le
couvrez bien
par-dessus d’autres couvertures ; faites saigner trois ou
quatre
gouttes de sang des gencives de dessous, et lui faites boire le sang
avec l’eau de laquelle vous l’aurez
mouillé.
Autre recette.
Prenez deux plumes d’oie et les frottez par la pointe
d’huile laurin, puis les mettez dans les naseaux du Cheval.
________________________ CHAPITRE XXXVII. Recette pour le mal de tête venant du rhume du Cheval.
LE
rhume est une maladie naturelle venant ordinairement aux Chevaux, du
trop grand travail, et après les laissant en repos avec la
sueur sans
les promener ni essuyer, ce qui est cause qu’ils prennent le
rhume au
cerveau étant morfondus tout à coup. Les signes
sont, qu’ils toussent
fort, et jettent des humeurs par les naseaux, grosses, blanches et fort
épaisses ; il porte la vue basse, la tête
penchée, et a la peau cousue
sur les côtes, tellement qu’on ne la peut prendre
avec les doigts. Remède. Quand le Cheval sera en cet état, il faut le saigner de la veine du col, puis le lendemain avant que de l’abreuver, il faut lui donner le breuvage qui suit. Prenez poivre en poudre deux onces, poudre assortie de toutes sortes d’épiceries demi-once, de ripigia une once, agaric en poudre une once, les jaunes d’une douzaine d’oeufs, mêlez tout ceci avec trois chopines de vin blanc, faites-le avaler au Cheval, et le faites promener une heure le petit pas, puis remettez-le à l’écurie et le couvrez, le laissant deux heures bridé et couvert ; ensuite donnez-lui à manger l’espace d’une heure, et à la fin l’abreuvez d’eau tiède avec de la farine, il faut que le Cheval ne mange point d’avoine de vingt-quatre heures, ou jusqu’à ce qu’il soit guéri. Puis il faut lui donner des parfums le matin, une heure avant que de l’abreuver : pour ce faire, prenez graine de genièvre concassée demi-livre, sinabrium en poudre demi-once, une poignée de queue d’ail haché menu, rue deux onces, storax et calmire concassé demi-once, mêlez toutes ces choses ensemble, puis en faites recevoir le parfum au Cheval, et après lui en mettez dans les naseaux avec une plume d’oie graissée d’huile laurin ; vous continuerez dix ou douze jours, et il faut que le Cheval boive toujours de l’eau tiède durant sa maladie.
________________________ CHAPITRE XXXVIII. Pour les Javars.
LES
Javars viennent aux Chevaux dans les pâturons, et sont
engendrés
d’humeurs corrompues venant de morfondure, qui, quelquefois
pour n’être
pas bien pansés, se jettent aux jambes, à cause
du fréquent mouvement
que le Cheval fait ; et si elles descendent jusqu’aux
pâturons, alors
se fait un Javars, qui fait enfler les jambes, et finalement forme un
carbouche. Remède. Prenez une tête d’ail et la pilez, puis prenez du vieux-oing deux fois la grosseur de l’ail, mêlez le tout ensemble, et en faites un cataplasme sur des étoupes que vous mettrez tous les jours sur le Javars, jusqu’à ce qu’il soit tombé ; puis après pansez le Cheval avec unguentum sanctum, et il guérira : servez-vous aussi sur la fin de la poudre à dessécher ; si le Javars est sur le talon, à l’entrée de la corne, il sera de plus longue guérison, à cela il faut mettre poudre de carquentum.
________________________ CHAPITRE XXXIX. Pour Cheval poussif.
PRENEZ
deux ou trois sceaux d’eau, avec de l’urine de
petits enfans au-dessous
de sept ans, le plus que vous en pourrez trouver, faites-la bien
bouillir, avec deux ou trois livres de gras de lard, puis mettez du son
de froment dans cette eau, et faites bouillir le tout ensemble, et
après qu’il aura bien bouilli, il en faut faire de
grosses pelottes, et
en donner au Cheval, soir et matin ; vous lui donnerez dans son avoine
des petites fèves noires et sèches que vous ferez
bouillir jusqu’à ce
que la peau soit ôtée, ensuite sécher
au soleil et mises en poudre ;
vous continuerez cela quinze jours au moins.
________________________ CHAPITRE XL. Autre pour le même.
PRENEZ
une livre d’huile et lui donnez un
clystère, puis au bout de huit
jours la septième partie d’une once
d‘antimoine, mettez la dans du
beurre, faites-en une pilule et la mettez au bout d’un
bâton, puis lui
faites avaler avec vin blanc, et laissez le Cheval
jusqu’à midi sans
boire ni manger. Observez qu’il le faut promener au bout de
huit autres
jours, et lui faire avaler une livre d’huile
d’olive avec vin blanc, et
au bout d’un mois réitérer la
même chose.
________________________ CHAPITRE XLI. Autre pour empêcher que la pousse ne paroisse à un Cheval poussif qu’on veut vendre.
PRENEZ
du genêt, et l’ayant haché bien menu,
mettez-le avec l’avoine de votre
Cheval arrosée d’eau, et ne lui donnez
d’autre fourrage que de la
paille : faites cela l’espace de huit jours ; et le jour que
vous
voudrez le vendre, mettez-le dans l’eau le plus avant que
vous pourrez
sans l’abreuver, puis montez dessus et galopez fort,
après cela
montez-le hardiment.
________________________ CHAPITRE XLII. Pour empêcher que les molettes ne paroissent au Cheval qu’on veut vendre.
IL
faut amasser de l’écloi pendant cinq ou six jours,
et faire cuire des
mauves dedans, puis mettez-les dessus les mollettes le plus chaud que
le Cheval les pourra endurer, et les liez bien, les y laissant toutes
les nuits, et les molettes rentreront dans la jambe sans
qu’on s’en
apperçoive, jusqu’à ce que le Cheval
travaille.
________________________ CHAPITRE XLIII. Recette pour un Cheval qui a trop travaillé, et bat des flancs, et pour lui faire corps neuf.
IL
faut que le Cheval ne travaille point depuis le matin
jusqu’au soir que
vous voudrez l’abreuver ; ensuite faites chauffer de
l’eau plus que
tiède, puis y mettez deux bonnes mesures de son de froment
quand l’eau
sera hors de dessus le feu, et y ajoutez une demi-livre de miel que
vous mêlerez avec le son et l’eau, puis vous en
ferez des pelottes que
vous donnerez à manger au Cheval, étant encore un
peu chaudes, et de
l’eau qui restera vous l’en abreuverez, et y en
mêlerez d’autre, s’il
n’y en avoit pas assez, et qu’elle soit
tiède ; un quart-d’heure après
que le Cheval aura bu, donnez-lui deux mesures d’avoine bien
criblée et
frottée d’un quarteron de miel, vous continuerez
douze jours ; et
après, pendant six jours, vous mettrez demi-livre de miel
parmi son
avoine à chaque repas sans l’abreuver : il faut
toujours mener le
Cheval à la rivière, puis lui donner les poudres
qui suivent avec son
avoine, une poignée à chaque fois. Prenez deux
onces d’aristoloche,
deux onces d’anis, deux onces de graine de laurier, et deux
onces de
gentiane, que vous mêlerez ensemble, pour vous en servir.
________________________ CHAPITRE XLIV. Poudre pour tenir la bouche du Cheval fraîche.
PRENEZ
deux onces de pilettes, demi-once de canelle, demi-once de poivre long
et demi-once de saxifrage, trois muscades, trois onces de sucre et deux
onces de baie de laurier, le tout en poudre, dont vous mettrez dans la
bouche du Cheval que vous voudrez vendre. ________________________ CHAPITRE XLV. Pour trois maladies qui viennent à la tête des Chevaux, qui, quoiqu’elles soient différentes, sont guéries par le même remède.
LA
frénésie est accompagnée
d’une grosse fièvre, le Cheval qui en est
atteint recule en arrière, gratte des pieds de devant,
donnant de la
poitrine contre la mangeoire ; il ne mange nullement, il prend le foin,
le mâche un peu, puis le rejette tout baveux. Il y a une autre maladie qui s’appelle capogato, le Cheval qui en est malade tient la tête basse, s’appuyant les épaules contre la mangeoire, et se tient tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, comme un homme que la fièvre veut prendre. La troisième s’appelle capostrice, et vient d’une autre façon, le Cheval ne veut connoître personne, s’il est détaché il va comme un ivrogne, croisant les jambes. Ces maladies viennent ordinairement aux Chevaux sanguins, et faute d’exercice pour la trop grande abondance de sang ; dans ces maladies il faut saigner le Cheval de la langue, et au palais d’un coup de corne ; au col, du côté droit, et au bout de la queue, qu’il faut couper en croix avec un couteau, et la laisser saigner ; après vous lui ferez un chargement frais sur le front et les joues ; puis prenez une bonne poignée de chicorée sauvage avec la racine, une poignée d’endives, une poignée de bétoine, une poignée de scabieuse, mettez le tout ensemble et le faites bien bouillir, de sorte qu’il demeure de la décoction pour trois prises que vous donnerez au Cheval pendant trois jours le matin.
________________________ CHAPITRE XLVI. Pour Cheval cousu.
PRENEZ
un pot de lait, deux onces d’huile d’olive avec
sucre et canelle, et
lui faites boire à jeun, et qu’il ne mange que
deux heures après.
________________________ CHAPITRE XLVII. Pour ôter en peu de temps le feu des plaies du Cheval. PRENEZ de la terre nommée argile, la détrempez dans de bon vinaigre, et en frottez les plaies cuites du Cheval.
________________________ CHAPITRE XLVIII. Pour Cheval blessé sur le garrot.
PRENEZ
d’une herbe nommée trèfle, la pilez
dans un mortier, puis la mettez sur
le mal avec des étoupes, les liez avec ladite herbe, et lui
laissez
l’espace de vingt-quatre heures.
________________________ CHAPITRE XLIX. Recette pour le flux de ventre.
IL
faut prendre de la fleur de farine de fèves, que vous
mettrez dans
l’eau, dont vous abreuverez votre Cheval, le laissant reposer
du soir
au lendemain, et s’il ne guérit pas il faut faire
tiédir ladite eau
avant que de lui donner.
________________________ CHAPITRE L. Du Cheval fourbu et des signes.
LE
Cheval est quelquefois fourbu de trop grande
réplétion provenant de
trop manger d’avoine, comme quand il se trouve à
même, et qu’il en
mange excessivement : cela émeut les humeurs de son corps,
et ainsi le
Cheval demeure fourbu : ou bien quand après un grand
travail, étant
tout en sueur, on le laisse en cet état au vent et au froid,
la sueur
rentre dans son corps, et les humeurs, étant
émues de son grand
travail, sont pressées par le froid, et étant
poussées aux parties
nobles et robustes, sont envoyées aux jambes du Cheval qui
en reste
fourbu ; le Cheval devient également très-souvent
fourbu, quand il
passe près ou dans l’eau, étant
altéré, et qu’on le fait passer outre,
ne lui permettant point de boire : vous le connoîtrez
à ces signes : le
Cheval est pesant de tout son corps, il tient la tête basse,
et veut
toujours être couché ; quand il marche, on diroit
qu’il marche sur des
épines, les nerfs lui tremblent, tenant les jambes de
derrière larges,
afin de porter le devant de son corps, il mange sûrement et
boit plus
que de coutume ; cet humeur descend principalement aux jambes de
devant, parce qu’elles sont plus proches du coeur et
de la chaleur
naturelle. Remède. Il faut donner le clystère que nous avons dit pour les avives ou tranchées ; en outre il faut saigner le Cheval des veines jugulaires et des deux cotés des flancs, puis prendre le sang et le mêler avec farine de froment, le blanc de deux douzaines d’oeufs, bol d’Armenie en poudre, demi-livre de sang de dragon en poudre, quatre onces de rue aussi en poudre, et du vinaigre le plus fort, autant que vous verrez être nécessaire ; toutes ces choses étant bien mêlées ensemble, faites charger les jambes du Cheval, mettez une bande en forme de jarretière sur le genou et jarret des quatre jambes, et les serrez bien. Cela empêchera les humeurs de descendre sur les jambes, et quand la charge sera sèche, il la faudra arroser, ainsi que les bandes, de vinaigre pendant quatre jours. Il sera bon aussi de mettre quantité de pierres rondes et bâtons ronds sous le Cheval, afin que ne pouvant se tenir sur ces pierres, il soit contraint de remuer, par ce moyen il fera évacuer et sortir les humeurs. Il faut tenir le Cheval dans un endroit qui ne soit ni trop chaud ni trop froid, et au bout de huit jours il faut le mener à la rivière, le mettre en eau courante et le laisser laver demi-quart-d’heure à chaque fois. Il est aussi bon de mettre dans les pieds du Cheval de l’orge cuite, et la renouveler tous les jours et même d’en faire manger au Cheval au lieu d’avoine. Si vous faites ce remède avant que les humeurs soient descendues dans les pieds du Cheval, il guérira : mais si vous attendez qu’elles y soient descendues, il aura toujours les pieds comblés, et ne guérira jamais.
Autrement.
AUSSITÔT
que l’on s’apperçoit que le Cheval est
fourbu, il faut tirer du sang du
cou ou des quatre jambes, ou de l’un et de l’autre
ensemble, puis faire
une charge de son sang, y ajoutant une livre de bol
d’Arménie,
demi-livre de sang de dragon, demi-livre de farine de froment et une
douzaine d’oeufs avec la coque ; puis il faut lui
donner le clystère qui
suit. Prenez mauves ou guimauves, pariétaire, violettes,
mercuriale,
bourrache, bettes ou poirée, de chacune trois
poignées, fleurs de
camomille et de mélilot, de chacune deux
poignées, d’anis, de fenouil,
sénegré, graine de lin et sileris montani, de
chacune une poignée, une
once de polipode, quercum deux onces et demie, de solinets et une
petite branche de chacune deux poignées ; de tout cela vous
en ferez
décoction avec eau, jusqu’à ce que le
tout vienne à deux livres, puis
vous dissoudrez dans cette décoction quatre onces de sucre
rouge, casse
récente trois onces, diaphoenic deux onces, garapia
deux onces, d’huile
de noix, de chènevis et d’ortie, de chacune quatre
onces, et y
ajouterez un peu de sel bien menu ; puis vous donnerez le
clystère
tiède au Cheval, et le jour suivant à jeun le
breuvage qui suit. Prenez
six gros ognons, tirez-en le jus et le mettez dans une pinte de vin
blanc que vous ferez prendre au Cheval. Il ne faut donner à boire et à manger au Cheval fourbu, que quinze ou vingt heures après les remèdes ; et qu’il ne se couche point, le promenant souvent ; si on s’est apperçu du mal le matin, il faut le promener tout le jour : si c’est au soir, toute la nuit ou fort souvent ; si c’est dans le printems, il sera bon de lui donner des bourgeons de vigne sauvage, et au lieu d’avoine il faut lui donner du son de froment, lui faire boire de l’eau blanche et qu’il boive peu ; il faut mettre sur la corne du pied des défensifs qui seront faits avec vinaigre, blanc d’oeufs, bol d’Arménie, sang de dragon et sel bien menu. Si les jarrets et les nerfs se fendent de la maladie, vous y appliquerez une emmiellure.
________________________ CHAPITRE LI. De la difficulté d’uriner.
LE
Cheval est quelquefois sujet à la difficulté
d’uriner, qui provient
d’une grande chaleur de reins ; on le connoît
à ces signes : quand le
Cheval pense uriner il sent grande douleur,
s’étend et ouvre les jambes
de derrière, baisse la croupe, et met la queue en terre,
lève la tête
et ne peut uriner ; il demeure triste et se regarde les flancs,
à cause
de la douleur, qui est une espèce de colique. Qui pourroit trouver promptement de l’yomonol, il seroit bon d‘en piler, le mettre avec de bon vin blanc ; et l’ayant fait tremper deux heures, le couler et en donner une chopine au Cheval, en peu de temps il pisseroit ; mais au défaut de cette herbe, l’on pourra user d’un clystère, comme il suit. Prenez des feuilles de violette de Mars, une poignée d’endives, une poignée de mauves, une poignée de mercuriale, une poignée de bettes, faites-en décoction, où vous ajouterez une poignée de son froment, puis y mettrez de l’huile d’olive, demi-verre de bon vin et un peu de miel ; en outre faites-lui fondre du beurre frais tout le long de la verge et des génitoires, il guérira.
Autre remède pour faire pisser un Cheval.
FAUT
prendre deux ou trois têtes d’ail avec leur peau et
les piler avec
huile d’olive jusqu’à ce
qu’elles viennent comme un onguent, puis vous
en frotterez toute la verge et les génitoires du Cheval, et
il pissera.
________________________ CHAPITRE LII. Du contre-coeur ou averty-coeur.
CONTRE-coeur
est une maladie qui est dangereuse et souvent mortelle ; elle est
engendrée quelquefois par trop grand repos donné
au cheval étant trop
nourri, et sans le faire saigner en temps opportun ; le cheval
étant
sujet à de grosses humeurs corrompues, lesquelles
étant en grande
quantité, se retirent aux parties nobles et
auprès du coeur, qui fait
tous ses efforts pour les repousser, et dont une partie vient
paroître
à l’estomac ; c’est alors que cette
humeur corrompue est auprès du
coeur. Cette maladie se connoît ainsi : le cheval ne
peut porter la
tête, il tient toujours baissée, il mange
lentement, et a une enflure
extérieure à l’estomac ; si cette
enflure saisit le col du cheval et
qu’il perde l’appétit, c’est
signe de mort. Remède. Quand vous verrez l’enflure à l’estomac du cheval, vous prendrez un fer tranchant et chaud, et ouvrirez l’enflure, la fendant en croix, puis mettrez dans la plaie de l’opobaume avec des plumasseaux d’étoupes et panserez la plaie soir et matin : il faut garder le cheval de l’air et du froid. Ayant pansé cette plaie cinq ou six jours, appliquez-y poudre pour dessécher, jusqu’à guérison : ce mal de contre-coeur paroît quelquefois sur la croupe du cheval, qui se trouve si grosse et si large que c’est chose étrange. Lorsque vous verrez le cheval en cet état, prenez une jarretière de soie ou de laine, avec laquelle vous lierez les bourses ou génitoires du cheval, afin que l’humeur ne descende pas ; puis faites trois incisions de trois doigts de long au devant du cheval ; mettez dans ces incisions de la tige d’ellébore noir, puis faites un point d’aiguille, crainte que la tige ne tombe, et après graissez les incisions de graisse de porc ; si vous ne pouvez trouver de la tige d’ellébore, il faut y mettre de la racine, et vous verrez sortir par les incisions une grande abondance d’humeurs, et en moins de six heures, vous verrez descendre l’enflure de la croupe devant l’estomac. Quelquefois cette maladie est longue, et se convertit en grand apostume ou farcin, alors il faut user des remèdes du farcin.
________________________ CHAPITRE LIII. Pour blessure sur les rognons.
SI
le cheval est blessé sur les rognons, et que sur
l’épine du dos il
paroisse une peau noire avec enflure, vous la laverez et panserez de
même que la plaie du garrot, et avec les mêmes
médicamens ; il faut
faire l’ouverture de la plaie en travers du dos, crainte que
l’apostume
n’y fasse séjour.
________________________ CHAPITRE LIV. Pour fièvres et maux de coeur.
QUOIQU’IL
y ait plusieurs sortes de fièvre, j’ai
néanmoins souvent expérimenté ce
remède, même aux chevaux fourbus pendant les
grandes chaleurs, et aussi
pour le battement de coeur : prenez julep rosat et julep
violat, quatre
onces ou de chacun un verre, et considérez la
qualité du cheval ; eau
de plantin, eau rose, eau de chicorée, environ quatre onces,
eau de
pourpier trois onces, miel rosat six onces, conserve de rose six onces,
demi-livre de bonne casse, et six onces de sucre rouge, faites bouillir
le tout ensemble, et en donnez le matin un breuvage à votre
cheval, il
guérira ; et le soir du jour que vous lui aurez
donné ce breuvage,
donnez-lui le clystère qui suit. Prenez mauves, guimauves,
pariétaire,
violette de Mars, bourrache, bottes, laitue et mercuriale, de chacune
une poignée, anis concassé deux onces, faites une
décoction du tout
ensemble, et lui faites prendre : puis le frottez
jusqu’à ce qu’il
commence à suer, et s’il est en voyage il ne lui
faut faire faire que
trois ou quatre lieues, et s’arrêter souvent afin
de le faire pisser,
et même l’y provoquer, par le moyen de
l’ensorbe que vous lui
soufflerez dans les naseaux, lui mettant aussi des plumes
d’oies
frottées d’huile laurin, avec la palire ; il est
bon aussi de lui
percer les naseaux avec une alène, ou le saigner de la veine
de dessous
la langue.
________________________ CHAPITRE LV. Médecine pour un Cheval malade.
FAUT
prendre racine de gentiane, aristoloche, graine de laurier, graine
d’anis, graine de fenouil, graine de fougère,
l’eptuni, ou en son lieu,
poli ou rosat, de chacune deux onces.
________________________ CHAPITRE LVI. Onguent pour mûrir tous les apostumes.
IL
faut prendre une poignée ou deux d’ache, pilez-la
avec un ognon de lis
ou deux, puis en tirez le jus, le mêlez avec vieux-oing
fondu, et le
battez bien, afin qu’il se mêle mieux ; il sera bon
d’y ajouter un peu
d’huile laurin, et ne point mettre cet onguent sur le feu ;
graissez-en
l’apostume ; il est bon aussi pour les enflures
causées par le farcin,
et pour celles qui proviennent des gourmes.
________________________ CHAPITRE LVII. Pour suros.
PRENEZ
cinq ou six têtes d’ail et les pilez dans un
mortier, puis les mettez
dans un linge neuf ; ensuite prenez de l’huile de noix toute
bouillante, et trempez le linge et ail dedans, puis touchez les suros
quinze ou vingt fois, jusqu’à ce que le poil tombe
: cela fera un
escarre, mais le poil reviendra.
________________________ CHAPITRE LVIII. Bonne emmiellure pour épaules, jambes ou jarets des Chevaux.
FAUT
prendre huit onces de sénegré en poudre, huit
onces de semence de lin
en poudre, huit onces de cumin en poudre, quatre onces de graine de
laurier en poudre, quatre onces de pastium, six onces de cire neuve,
quatre livres de miel commun, une livre de
térébenthine commune, deux
onces de poudre de rose, une once de millet en poudre, une once de
calamonde, quatre onces de beurre frais, une once d’althea,
une once de
martiarum, deux onces d’agrippa, huit onces de fleur de
froment ;
quatre onces de poix grasse, deux onces de poix noire ;
détrempez le
tout avec vin vermeil, le faites cuire en décoction, et vous
en servez
quand vous en aurez besoin.
________________________ CHAPITRE LIX. Cataplasme pour mollifier les enflures.
FAUT
prendre une poignée de lierre terrestre, d’althea,
de rue, et de mauve,
une écuellée de semence de lin, force vieux-oing
et un peu de beurre
frais, faites bien bouillir le tout, puis l’appliquez sur
l’enflure.
________________________
CHAPITRE LX. Pour la bosse qui vient sous la gorge du Cheval.
FAUT
prendre le l’ache et de l’alluine, broyez le tout
ensemble, et le mêlez
avec vieux-oing de porc, faites-en un onguent et en oignez la bosse du
Cheval.
________________________ CHAPITRE LXI. Pour faire croître le crin.
PRENEZ
des racines de roseaux ou cannes, faites-les bien bouillir, et de cette
décoction lavez les crins et la queue du cheval, ils
croîtront en peu
de temps. Pour faire mourir les citrons qui leur mangent la queue, il
faut faire tremper des feuilles de noyer dans de l’eau
pendant
ving-quatre heures, et de cette eau laver les crins et la queue.
________________________ CHAPITRE LXII. Pour farcin cordé, recette du sieur Hypolite.
VOUS
prendrez un picotin de ces pommes qui viennent sur les rosiers ou
églantiers sauvages, faites-les sécher, et en
faites de la poudre, dont
vous donnerez quatre fois le jour au cheval parmi son avoine ; savoir :
le matin quand on se lève, à midi, à
cinq heures du soir, et l’autre
quand on va se coucher ; il lui en faut donner chaque fois demi plein
la coque d’un oeuf, et continuer neuf jours.
________________________ CHAPITRE LXIII. Autre remède pour le farcin.
FAUT
prendre un pot de terre neuf, tenant trois pots, et l’emplir
du
meilleur vin blanc que vous pourrez trouver, puis mêlez-y
dessus une
poignée de lierre qui monte aux murailles, deux
poignées de sauge
fraîche, deux poignées de bétoine et
une poignée de sel, faites
bouillir le tout dans le pot, jusqu’à ce
qu’il soit réduit aux deux
tiers ; il faut donner le feu au cheval sur le farcin
légèrement, puis
laver les plaies de la décoction ci-dessus, qui soit
tiède, en bassiner
les plaies quatre fois le jour, et continuer
jusqu’à ce qu’elles soient
sèches. Cette eau fait sécher, purger, et fait
aussi revenir le poil.
________________________ CHAPITRE LXIV. Du farcin et de ses signes.
LE
farcin est une maladie contagieuse aux chevaux qui vient quelquefois
d’humeurs longuement corrompues, et de la chaleur universelle
de tout
le corps, laquelle se congelant, entre cuir et chair, fait
paroître le
mal par croûtes et ulcères en plusieurs endroits
du corps, s’arrêtant
quelquefois à la tête et aux jambes, aux
épaules et aux cuisses : cette
maladie vient aussi aux chevaux pour s’être
reposés en lieu sale, comme
là où les pourceaux fréquentent, ou si
le cheval se couche sur la
fiente humaine, ou fréquente un autre cheval farcineux, ou
le lieu de
son séjour, il est en danger de gagner le mal. Les signes de
cette
maladie se connoissent ainsi : le farcin se manifeste quelquefois aux
parties supérieurs, comme à la tête par
petits boutons et ulcères,
alors on l’appelle farcin volant ; mais s’il
paroît une corde,
accompagnée de boutons, en forme de patenôtres au
corps, ventre,
épaules et cuisses, cela est appelé farcin. Le cheval devient maigre et pesant de tout son corps, il paroît des enflures en certains lieux, puis soudain elles changent et se montrent dans d’autres. Il est besoin de remédier promptement à ce mal ; car étant négligé il viendroit aux parties inférieures, et causeroit la mort du cheval. Les Italiens appellent cette maladie Vermica, parce qu’elle fait un trou à la peau comme le ver fait en terre. Remède. Aussitôt que vous verrez les ulcères à la tête du cheval, il ne faut pas attendre qu’elle en soit toute couverte : car quand il n’y en auroit qu’un seul bouton, on ne doit pas le négliger ; il faut faire un cercle assez fort tout autour, puis avec un fer pointu et chaud, percez ce bouton jusqu’au fond et mettrz du soufre dans le trou, puis le feu, avec ce seul remède il guérira. Mais si toute la tête étoit pleine de boutons ou en partie, vous ferez un cercle tout autour, le mieux que vous pourrez, et donnerez un bouton de feu à chacun des boutons, et ainsi aux autres parties du corps ; pour breuvage, prenez une pinte de vin blanc ou clairet, dans lequel vous mettrez une livre de racine d’hièbles, mettez le tout sur les cendres chaudes l’espace de trois jours ; et le tout étant rassis, ajoutez-y demi-once d’aloès, chicotin l’entare en poudre une once, mêlez tout ensemble avec le vin et infusion de racine d’hièbles, et en faites prendre au cheval avec une corne trois jours de suite, le matin à chaque fois une chopine, et si la boisson n’est pas suffisante, vous la réitérerez en pareille quantité que ci-dessus, il faut que le cheval ne mange que trois heures après qu’il aura pris ce breuvage, et une heure apres qu’il aura mangé, vous le ferez boire, cela fera dissiper et sortir l’humeur : Voilà pour le farcin volant, et s’il est en quelqu’autre endroit du corps, il faut l’enclore d’un cercle comme ci-dessus, le percer, et y mettre du soufre, puis faire ce qui est dit. Mais s’il en étoit couvert de manière qu’il n’y eût point de moyen de l’enclore, prenez arsenic deux onces, ellébore blanc deux onces, que vous mettrez en poudre, mêlez-les avec deux onces d’huile laurin, et le tout étant bien incorporé ensemble, vous en mettrez avec du coton dans le trou que vous ferez à chaque bouton avec une lancette ; cela s’appelle cautère potentiel. Pour la corde du farcin, il faut découper la peau sur icelle, comme des ventouses, puis la graisser dudit cautère seulement deux fois ; il s’y fera de grandes escarres, que vous guérirez avec de la poudre à dessécher. Et pour les jambes et couronnes des pieds, comme il est difficile d’y donner le feu sans offenser les nerfs, il faut faire comme il suit. Prenez une once de sublimé, demi-once d’huile laurin, et le tout étant bien incorporé ensemble, mettez-en, comme il est dit ci-dessus, dans les trous avec du coton, puis les escarres étant tombées, vous mettrez le cheval en eau courante deux fois le jour, si c’est en été ; mais si c’est en hiver, prenez de l’herbe appellée bouillon blanc, faites-la bouillir avec du vinaigre, et en lavez tous les jours les jambes du cheval, et si elles demeurent grosses comme il arrive souvent, prenez de l’aloès, du vinaigre, avec de la fleur de farine de forment, chargez bien les jambes du cheval le soir après qu’il sera revenu de l’eau. Observez surtout de faire saigner le cheval de la veine du col des airs, ou de la veine la plus proche du farcin, au commencement, lorsque le farcin ne fait que paroître ; ou bien quand il est presque guéri ; car si vous le faites saigner lorsque le farcin est dans sa force, la veine étant ouverte, le sang corrompu se mêle avec le bon, et se retirant pêle-mêle, cela augmente le farcin, et en remplit tout le corps du cheval ; j’ai vu arriver cela plusieurs fois.
________________________ CHAPITRE LXV. Pour les vessignons.
IL
faut faire serrer la veine un peu plus bas que les vessignons, puis
faites-y un petit trou, où vous ferez passer le manche
d’une spatule
entre la chair et la peau, jusqu’à ce que vous
ayez trouvé le
vessignon, et il sortira une humeur jaune comme la bave de
limaçon ;
ensuite prenez un lardon de bon vieux lard que vous mettrez dans ledit
trou, et prenez garde qu’il ne sorte : puis faites-lui un
chargement
avec des oeufs, bol d’arménie, sang de
dragon et un peu de farine de
fèves ou d’orge, laissez-lui deux ou trois jours
ce chargement. Puis après prenez esquilia, autrement appelé ognons marins, racine de brusc, petit oubilane sauvage ; mettez premièrement la racine de brusc dans un mortier, puis coupez l’ésquilia, les pilez ensemble, et y ajoutez quatre onces de feuilles de pelicon : faites de tout ensemble un emplâtre que vous y appliquerez trois fois ; la première, vous lui laisserez vingt-quatre heures ; la seconde et la troisième, du soir au matin. Elle fera une grande escarre, dont le cheval ne souffrira point ; laquelle escarre étant faite, il faudra la graisser tous les jours une fois de beurre frais sans y donner le feu, il guérira. Ce même remède est bon aussi pour les courbes.
________________________ CHAPITRE LXVI. Onguent pour toutes plaies.
PRENEZ
gomi et flétis quatre onces, raisins de pin deux onces,
aristoloche
longue une once et demie, faites bouillir le tout ensemble, et passer
par le tamis, puis incorporez-le dans douze onces de
térébenthine de la
plus claire et de la meilleure, et faites fondre dedans une casse
à
petit feu de charbon sans flamme, remuant toujours avec une spatule de
bois, y ajoutant aloès pulvérisé et
myrrhe , de chaque demi-once, et
demi-once d’huile de baume, qui est difficile à
trouver ; il faut
mettre l’aristoloche avec sang de dragon ; quand tout sera
à demi
fondu, faites bien incorporer le tout ensemble, le remuant à
petit feu
; plus cet onguent est gardé, meilleur il est.
Propriété dudit Onguent.
IL
guérit le mal noli me tangere, soit au visage ou en
quelqu’autre
lieu, amortit la chaleur et le feu qui pourroit être
à la plaie en
moins de vingt-quatre heures, et la guérit : il
étanche le sang de
toutes les plaies, les garde de pourriture et les guérit
incontinent :
il fait sortir les os et esquilles ; il est bon pour blessures
d’oiseaux ; il est aussi très-bon pour les
enclouures des chevaux, le
faisant fondre et dégoutter dans le trou du clou.
________________________ CHAPITRE LXVII. Eau pour guérir toutes plaies.
PRENEZ
de l’aristoloche ronde deux onces, sucre en poudre deux
onces, et les
enveloppez dans un petit linge, puis mettez-les bouillir dans un petit
pot de terre neuf, avec une pinte de vin blanc, et le faites
réduire à
moitié ; ensuite mettez-le dans une bouteille de verre pour
en user
quand vous en aurez besoin. Il faut faire chauffer cette eau, en laver
la plaie, et mettre sur la plaie une feuille de chou rouge que vous
tremperez dans ladite eau ; vous panserez la plaie au moins deux fois
le jour, parce qu’elle attire une grande quantité
d’humeurs, et vous
aurez le soin de renouveler ladite eau, car elle ne se garde que cinq
ou six jours en Été, et huit en Hiver.
________________________ CHAPITRE LXVIII. De toutes les plaies en général, et du Cheval blessé.
DE
toutes les blessures causées par la pression de la selle, il
n’y en a
point de pire que celle de dessus le garrot et de dessus les rognons,
c’est pourquoi aussitôt que vous verrez le cheval
blessé sur le garrot,
il faut tondre le poil sur l’enflure, puis prendre trois
ognons, les
faire bouillir dans de l’eau, en faire un cataplasme sur des
étoupes,
ensuite le mettre sur l’enflure le plus chaud que le cheval
le pourra
endurer, le bien bander et l’y laisser pendant vingt-quatre
heures,
puis vous le renouvellerez, et au second appareil l’enflure
s’en ira,
s’il n’y a point d’apostume ; et si
après avoir appliqué ledit
cataplasme, l’enflure s’en étant
allée, il demeure quelque humeur
claire dedans, comme de l’eau rousse, prenez un fer pointu,
et percez
la peau au dessus de l’enflure ; et si l’enflure
s’étend des deux
côtés, il faut aussi faire une ouverture des deux
côtés, puis avec une
plume prenez de l’huile d’olive, dont vous mettrez
dans les trous que
vous avez faits, tenant le trou ouvert jusqu’à ce
que l’escarre tombe,
y mettant de la poudre de carquentum, qui est du vitriol
calciné, une
fois le jour avec des étoupes ; mais si la peau de dessus le
garrot est
morte au lieu où est l’enflure, il ne faut pas
faire d’ouverture, parce
que dans cet endroit il y a un apostume avec quantité de
matière et de
chair pourie jusqu’à l’os, qui se trouve
quelquefois si offensé, qu’il
faut en tirer une partie, ou du moins certaines esquilles qui se
peuvent ôter sans faire grande ouverture que vous ferez ainsi
; vous
donnerez un coup de rasoir au-dessous de l’enflure et peau
morte, puis
avec le doigt vous sonderez la plaie du Spondus que
l’apostume aura
fait ; car toutes les choses qui peuvent se sonder avec le doigt, il
n’y faut point mettre de ferrement, d’autant plus
qu’avec le doigt on
sera plus certain de son jugement ; ayant bien observé le
lieu où est
l’apostume, vous ferez une ouverture avec un rasoir de long
et de
travers, de sorte que l’apostume ne puisse
séjourner dans la plaie,
vous remplirez la plaie de poudre de carquentum, avec des
étoupes de
chanvre coupées menues en façon de charpie, puis
vous mettrez
par-dessus un drapeau bien lié, afin que le cheval en se
secouant ne
fasse pas tomber l’appareil, ou ce que vous avez mis dans la
plaie. Il
faut laisser le premier appareil vingt-quatre heures, ensuite le lever
doucement, et avec du vin chaud laver la plaie, ou avec de
l’urine
fraîchement faite ; puis vous remplirez encore une fois la
plaie dudit
carquentum et d’étoupes, comme ci-dessus, et lui
laisserez encore
vingt-quatre heures ; puis vous ferez comme il est dit
ci-après. Mais
pendant que l’occasion se présente, je veux vous
enseigner comment vous
ferez calciner le vitriol, lequel étant calciné
s’appelle carquentum.
Prenez une cuiller de fer et la faites chauffer toute rouge, puis peu
à
peu vous emplirez la cuiller de vitriol, qui fondra aussitôt,
et se
congélera ; étant congélé,
vous remettrez la cuiller avec le vitriol
dans le feu, et l’y laisserez toute la nuit ; ensuite
prenez-le et en
faites de la poudre bien subtile, qui sera la poudre de carquentum ; le
vitriol étant rouge ou noir, ce sera lorsqu’il
sera calciné. Or, pour
revenir à notre premier discours, les vingt-quatre heures
étant
passées, il faut lever le second appareil, et
après bien frotter la
plaie de beurre frais, et d’huile d’olive
mêlée et incorporée ensemble,
jusqu’à ce que l’escarre et la chair
morte soit tombée : puis si vous
voyez que dans cette plaie il y ait quelque bouillon de chair en
façon
de cul de poule, il le faut sonder avec
l’éprouvette ; si c’est de la
chair morte, vous y trouverez une concavité, alors il faut
mettre
dedans de ladite poudre de carquentum avec des étoupes,
jusqu’à ce que
vous puissiez voir le fond net, couvert d’une chair rouge et
vive, et
sans bouillon. Quelquefois l’os de dessus les
épaules a été tellement
offensé de la selle ou autres choses dures, que vous verrez
une chair
morte et nerveuse au dessus du dos, laquelle chair provient du nerf
poulumier, qui nourrit les crins du cheval ; cela ne se peut manger que
par le vitriol, et il faut, pour lever la chair de ce lieu, couper peu
à peu avec le rasoir cette chair morte
jusqu’à l’os, et ratisser l’os
jusqu’au vif, puis mettre dessus de l’onguent
guitatum avec plumasseau
d’étoupes ; et si dans huit jours cette
carnosité nerveuse ne se lève
pas, c’est signe que l’os est cassé.
Alors il faut prendre un crochet
de fer, et avec ce crochet, enlever cet os par petites esquilles, qui
en sortant emporteront avec elles cette chair pourrie et nerveuse,
tenant du nerf poulumier. Après cela vous prendrez de la cire neuve, suif de cerf, rue en poudre, térébenthine et poix raisine, avec trois onces de miel, et trois onces d’huile d’olive ; de tout cela vous ferez un onguent, dont vous mettrez sur la plaie, soir et matin, avec des plumasseaux, comme il a été dit, l’espace de quatre ou cinq jours, et si vous voyez au bout de ce temps, que la chair soit belle et vive, et qu’il ne sorte plus d’apostume de la plaie, vous y mettrez de la poudre de dessécher, ou de la suie de cheminée pulvérisée avec vinaigre en forme d’onguent ; ce qui est bon pour toutes plaies où il ne reste plus qu’à les dessécher. Il faut tenir les plaies le plus nettement que faire se peut, pour empêcher que le cheval ne se frotte, ce qui lui seroit très-nuisible.
________________________ CHAPITRE LXIX. Pour faire la poudre à dessécher.
VOUS
prendrez des coquilles d’oeufs, coquilles
d’escargots, coquilles
d’avelines, noyaux de dattes, ou de la tête du
cheval, vieux cuir de
souliers, rognures de drap bleu, sel, miel, fèves et pois,
de chacun
une poignée, mettez le tout dans un pot de terre bien
couvert et luté
tout autour de la terre grasse ; et au-dessus du couvercle faites un
petit trou qui servira de soupirail, puis mettez ledit pot dans un bon
feu jusqu’à ce qu’il soit bien
brûlé et mis en cendres. Cette poudre
est fort bonne à dessécher les plaies.
Autre.
PRENEZ chaux
vive et miel, de chacun quatre onces, mêlez-les ensemble, et
les mettez
dans un pot de terre neuf bien couvert et luté comme
ci-dessus, puis le
mettez au feu jusqu’à ce qu’il soit
réduit en cendre, et que vous en
puissiez faire de la poudre, dont vous vous servirez au besoin, comme
il est dit ci-dessus.
________________________ CHAPITRE LXX. Pour mondifier une plaie.
PRENEZ
ungnentum arcum trois onces, jus d’Aprum une once, myrrhe et
aloès une
once, miel rosat, une once, miel mercurial une once, aristoloche ronde
demi-once, farine d’orge demi-once, et de tout cela faites-en
un
onguent.
________________________ CHAPITRE LXXI. Pour un Cheval qui a des ventrées ou tranchées qui prennent à l’étable, faute d’être exercé.
CES
douleurs s’appellent coliques, et viennent volontiers
à un cheval qui
mange beaucoup, et ne mâche pas bien la pâture ;
quand ces douleurs
prennent au cheval, il s’étend et met sa
tête devant sa mangeoire, il
se couche et se débat comme s’il avoit les avives. Remède. Il faut promptement le saigner des flancs, et lui donner un breuvage avec du vin blanc, dans lequel vous mettrez deux onces de cumin, et autant de fenouil fort, sans autre chose ; puis lui faire un clystère avec mauves, mercuriale, feuilles de laitues et de bettes, et un peu de son de froment, faites bouillir le tout ensemble, et y ajoutez un peu de sel, demi-livre d’huile d’olive, et une livre de vin clairet ; si les douleurs ne cessent pas avec le premier clystère, vous lui en donnerez deux ou trois.
________________________ CHAPITRE LXXII. Pour la gourme des Chevaux. LA gourme est une maladie fort commune aux jeunes chevaux, quoique tous y soient sujets. Cette maladie provient d’une grande abondance d’humeurs descendant du cerveau, qui s’arrêtent au-dessous de la gorge, rendant par le nez apostume blanc. Remède. Si la gourme vient au-dessous de la gorge, vous verrez à son commencement une glande ; il faut bien se garder de graisser cette glande, qu’elle ne soit grosse comme une pomme, car si on la graisse avant que les humeurs soient assemblées, elle ne purgera pas bien ; mais lorsqu’elle sera grosse et enflée, il faut la graisser de vieux-oing avec des étoupes, et prendre garde que lesdites étoupes ne tombent ; vous tâterez avec les doigts pour voir quand l’apostume sera mou, car, quand il le sera, c’est signe que l’humeur est toute assemblée, alors il faudra y donner un coup de lancette, afin d’en faire sortir l’apostume, ensuite vous y mettrez une tente saupoudrée de vitriol calciné, que vous renouvellerez deux fois le jour, jusqu’à ce que l’escarre soit tombée, ce qui tiendra le trou ouvert, et quand il n’y sortira plus d’apostume, vous pourrez reboucher le trou sans danger : si l’humeur prend son cours par les naseaux, et ne paroît point au-dessus de la gorge, il faudra donner un parfum tous les matins au cheval, indiqué au Chapitre du mal de tête venant des rhumes, et lui graisser le gosier de vieux-oing ; il faut que le cheval boive de l’eau blanche.
________________________ CHAPITRE LXXIII. Pour la Morve
LA
morve est une maladie contagieuse qui vient aux chevaux ; elle est
engendrée d’un vieux rhume causé par le
froid qui pénètre jusqu’au
milieu du cerveau, et les conduits en étant gros et larges,
il reçoit
une grande abondance de vent et de froid qui empêche la
chaleur
naturelle de résister contre le rhume qui le rend morfondu,
lequel
rhume se multipliant, se saisit des parties nobles, et le corps est
infecté de cet humeur, alors le cerveau en recevant les
vapeurs, elles
contraignent la cervelle de leur faire place, puis se
congèlent
ensemble, de telle sorte que le cheval ne peut respirer, et devient
poussif, alors la nature étant en défaut, oppose
toutes ses forces pour
la repousser, ce qui est cause de la langueur du cheval. Les signes
sont que le cheval perd peu à peu ses forces, il a la
tête pesante et
la tient presque toujours baissée, il ronfle fort, mange
pue, et il a
une glande sous le gosier sans enflure ; si vous prenez ladite glande,
il n’en ressent pas de douleur ; il jette une humeur jaune
par les
naseaux, quelquefois épaisse, et d’autres fois
liquide et froide ;
quand l’humeur paroît rougeâtre
c’est quelque présage de mort. Remède. Il faut saigner le cheval de la veine du col, selon son âge et sa force, et le jour suivant lui donner le breuvage qui suit. Prenez poivre, muscade, clou de girofle, canelle et gingembre, autant de l’un que de l’autre, le tout jusqu’à une once et demie, réduisez le tout en poudre et le mêlez dans un pot de vin blanc, avec six jaunes d’oeufs, faites avaler le tout au cheval de bon matin, et ne lui donnez à manger et à boire que trois heures après, puis lui donnez à boire de l’eau chaude le tenant bien chaudement : vous le ferez manger en bas, afin que les humeurs aient leurs cours ; et les autres jours suivans, il faut donner des parfums au cheval avant que de l’abreuver, qui sera orpin, soufre vif, opopanax, bourrache, viviers, diares, cumin, de chacun trois onces ; il en faut prendre à chaque fois plein l’écale d’une noix, le faire prendre au cheval tous les matins, et de deux en deux jours en graisser un drapeau que vous mettrez dans les naseaux du cheval, et le tirerez doucement peu de temps après, et le jour que vous lui mettrez il faut lui donner du parfum.
Autrement.
Prenez
une bonne quantité de genêt et le coupez bien
menu, puis le mettez
bouillir sur le feu dans une poële avec des
limaçons dans de l’eau et
du vin, vous en donnez à boire au cheval, étant
tiède, pendant trois ou
quatre jours, et il guérira.
________________________ CHAPITRE LXXIV. Pour un Cheval qui a la langue entamée.
PRENEZ miel, arment et froment, avec du vinaigre bien fort, et en lavez
la bouche du cheval.
________________________ CHAPITRE LXXV. Pour le chancre qui vient à la langue et à la bouche du Cheval.
LE
chancre vient à la bouche des chevaux quelquefois
à cause de leurs
Maîtres trop rudes, pour avoir été trop
souvent maltraités ; mais
quelquefois aussi pour avoir mangé quelque bête
venimeuse, laquelle par
son venin échauffe si fort la bouche du cheval
qu’elle en devient
enflée avec la langue, et la différence des
plaies chancreuses est que
celles qui se font quelquefois à cause du sang corrompu, les
peaux
d’autour sont blanchâtre et la plaie ronde ; mais
si la plaie est
longue avec la peau blanchâtre autour, se tenant
relevée par-dessus la
plaie, comme si on l’avoit minée par-dessous, vous
pourrez à ces signes
connoître les plaies chancreuses, il se fera plusieurs
ulcères dans la
bouche du cheval qui le perdroient. Ainsi quand vous verrez des plaies
et écorchures, il les faut laver deux fois le jour avec
vinaigre et
sel. Mais si le chancre y est, il faut prendre demi-livre de miel, une
once d’alun de glace en poudre, demi-once de poivre en poudre
et deux
gros de sel : faites bouillir toutes ces choses ensemble dans une
chopine de vinaigre, jusqu’à la
réduction de la moitié, tenant le pot
bien couvert, puis vous en laverez les plaies, soir et matin, avec un
drapeau blanc, lorsque le cheval aura été
abreuvé, ayant soin de
prendre de cette eau à part dans qui vous tremperez le
drapeau, et ne
point remêler le reste avec l’autre, de peur
qu’il ne le gâte. Si la
langue du cheval étoit coupée, il est bon
d’y faire une couture avec du
fil de plomb, ou autrement, et si le chancre avoit tout
mangé, il
faudroit la faire couper plus haut que le chancre, puis continuer ledit
lavement et le cheval guérira. Mais s’il
n’y a eu qu’une plaie, chair
morte et bave, il ne faut point mettre de choses corrosives
à la bouche
du cheval, de peur qu’en les avalant elles ne lui fassent mal
; prenez
seulement alun de glace que vous brûlerez à demi
et mettrez dans la
plaie, s’il y a de la chair morte, cette poudre la mangera.
________________________ CHAPITRE LXXVI. Pour faire jeter la gourme à un jeune Cheval.
PRENEZ
une livre de bon beurre frais, deux onces de Thériaque fine,
deux onces
d’huile laurin, une livre de miel, demi-once de clou de
girofle, une
noix muscade, deux onces de cumin, demi-once de poivre et deux onces de
réglisse, le tout étant bien
pulvérisé, pilé et
incorporé avec le
beurre et l’huile, vous en ferez un onguent sans le faire
chauffer,
puis le mettrez dans un pot de terre neuf ; ensuite prenez un vieux
mors ou filet que vous envelopperez avec des étoupes par
l’embouchure
seulement ; et le matin quand on voudra panser le cheval, mettez dudit
onguent sur lesdites embouchures et étoupes, et les lui
mettez dans la
bouche, les lui laissant mâcher l’espace de deux
bonnes heures, après
vous le ferez débrider, et lui donnerez à manger
; et quand on voudra
abreuver ledit cheval, faites-lui mettre ledit mors ou filet avec ledit
onguent, toutes les fois qu’on l’abreuvera, car
outre qu’il fera jeter
la gourme, cet onguent est encore fort bon pour un Cheval morfondu.
________________________ CHAPITRE LXXVII. Pour enflures des génitoires.
PRENEZ
du vin avec bonne quantité de cumin, et des fèves
fort cuites, dont il
faut ôter les écorces, mêlez tout
ensemble, puis le mettez en vinaigre
dans un sac de toile que vous lierez sur les génitoires du
cheval le
plus chaud qu’il pourra endurer, et faisant cela, soir et
matin, ils
désenfleront.
________________________ CHAPITRE LXXVIII. Pour faire mourir les fils à un Cheval.
IL
vient quelquefois des fils à un cheval à la
poitrine, aux naseaux ou
aux génitoires ; pour les faire tomber, il faut prendre le
poids d’un
écu de sublimé, et le mêler avec une
once d’Égyptiaque ; puis prenez du
vieux drapeau et en faites un cordon gros comme celui que
l’on met aux
fouliers ; trempez-le dans ledit onguent et attachez les fils ; il faut
prendre garde que le cheval n’y puisse mettre les dents
à cause du
sublimé ; et s’ils sont en lieu qu’ils
puissent être baignés, il
faudra, après que les fils seront tombés, laisser
le cheval une heure
en eau courante ; s’ils étoient au col
qu’ils ne puissent être baignés,
vous userez d’huile d’olive battue avec eau rose ;
et pour consolider
les plaies, prenez miel, gale et couperose, et en faites un onguent
noir dont vous vous servirez pour les plaies, et elles ne
paroîtront
plus.
________________________ CHAPITRE LXXIX. Pour douleurs de reins, et pour Cheval ébranlé.
QUAND
le cheval aura des douleurs aux reins, vous le connoîtrez par
ce moyen
: le cheval aura son allure autre que de coutume ; et les pieds de
derrière n’avanceront pas comme à
l’ordinaire, faisant les pas trop
petits. Le cheval qui a mal aux hanches fait aussi la même
chose,
quelquefois son urine ou sa fiente est rouge, et il laisse
traîner la
queue sans la remuer. Le cheval ébranlé est presque la même chose, et vous le connoîtrez encore davantage à ce qu’il a le train de derrière pesant, s’en va remuant et branlant la croupe et les hanches, et son allure est fort débile. Ce mal vient d’un grand effort, ou pour avoir été trop chargé, étant en quelque bourbier profond et mauvais, et ayant fait un effort pour s’en tirer, duquel effort le cheval est quelquefois grandement offensé, tant aux hanches et croupe qu’aux rognons et muscles, qui, parce qu’ils sont proches de cette partie en sont offensés et malades. Remède. Quand le cheval aura reçu pareil effort, et que les signes ci-dessus se manifesteront, si le mal est nouvellement venu, vous ferez saigner le cheval des veines fontanelles qui sont au plat de la cuisse, et mêlerez son sang avec fleur de froment, quatre onces de térébenthine, quatre onces de bol d‘arménie en poudre, deux onces de sang de dragon aussi en poudre, deux onces de rue en poudre, et huit oeufs, avec un demi-verre de vinaigre, et le tout étant bien incorporé ensemble faites-en charger les reins et la croupe du cheval malade, puis couvrez ladite charge de papier, la lui laissant huit jours dessus, lequel temps passé, si le cheval est presque guéri, vous acheverez de le panser comme il suit. Prenez demi-livre de farine de froment, avec laquelle vous mêlerez peu à peu trois chopines du plus gros vin, et du plus fort que vous pourrez trouver, puis vous le ferez bouillir jusqu’à ce qu’il commence à s’épaissir, alors vous l’ôterez du feu, et y ajouterez les jaunes de huit oeufs, six onces de térébenthine, six onces de miel, six onces de sang de dragon, six onces de bol d’arménie, et le tout étant incorporé et mêlé ensemble, vous le ferez bouillir, puis en couvrirez les reins et la croupe du cheval el plus chaud qu’il le pourra endurer, frottant à contre poil, à cette fin que la charge pénètre mieux : et si en mettant la charge sur le feu elle devenoit dure, vous pourrez y remettre du vin autant que vous jugerez être nécessaire. S’il arrive que le cheval soit bien guéri, faites-lui un cataplasme comme il suit. Prenez une livre de benjoin : avec un demi-verre de vinaigre, faites fondre cela ensemble dans un plat de terre, et étant fondu vous y ajouterez cire neuve deux onces, storax deux onces, galbanum deux onces, poix noire une once, et poix raisine deux onces, faites bien bouillir toutes ces choses ensemble, jusqu’à la consommation du vinaigre, puis faites-en un cataplasme, que vous appliquerez bien chaud sur la partie malade : mais si cette maladie est invétérée depuis long-temps, la saignée et les charges y profiteront fort peu, il faudra vous servir dudit cataplasme sur la partie malade, l’espace de quinze jours, si vous y voyez de l’allégement, réitérez ledit cataplasme encore une fois, et si le mal continue, faites-lui donner un cautère actuel et commencerez le cautère, sans l’imprimer sur le dos et à main legère sans le faire trop profond : cela fait, prenez de la poix noire et un peu de graisse de porc seulement la dixième partie de la poix, que vous mettrez avec deux oeufs, faites fondre le tout ensemble, puis vous en couvrirez toutes les ouvertures, et appliquerez par-dessus de la bourre de drap, ou au défaut de celle d’étoupes ; faites cela jusqu’à ce que l’escarre soit tombée, et ladite escarre étant levée de la croupe et bien nétoyée, vous graisserez les cicatrices des reins et de la croupe, de dialthée deux ou trois fois, de deux jours en deux jours ; cela fait, mettez sur les cicatrices de la suie de cheminée mise en charbon, puis pilez et mêlez avec du vinaigre, dont vous userez sur les coutures avec de la poudre à dessécher, jusqu’à ce que lesdites plaies soient guéries. Il faut observer que pour le cheval ébranlé et offensé des reins, il faut faire les cautères en plus grand nombre et leur donner plus d’étendue.
________________________ CHAPITRE LXXX. Du mal des hanches et des cuisses.
LE
cheval se trouve blessé aux hanches ou aux cuisses
quelquefois par
l’effort qu’il fait pour sortir d’un
bourbier ou lieu fangeux, ou bien
lorsque pour se tirer d’un trou profond, il employe toutes
ses forces,
et que malgré son adresse et promptitude, l’une
des jambes se trouve
engagée, tellement qu’il redouble ses forces, se
remuant, et tournant
la cuisse à droite et à gauche pour la sortir, et
par ce moyen en
demeure boiteux. Quelquefois aussi pour avoir reçu un grand
coup sur
l’os de dessus la hanche, ou bien à l’os
qui est au-dessous de la
cuisse approchant du ventre, qu’on appelle les trullons, le
cheval
demeure boiteux : ou ayant chevauché quelque barre, dont la
fontanelle,
maîtresse veine de la cuisse, devient grosse et fort
enflée : ou s’il
est saisi du farcin à la cuisse, il en souffre des douleurs
qui peuvent
le rendre boiteux. Quelquefois aussi le cheval devient boiteux pour lui avoir fait sauter un fossé, lorsque les pieds de derrière viennent à lui manquer, et que les hanches sont contraintes de recevoir toute la charge, étant relevé il se trouve boiteux ; ou bien quand le Cavalier est maladroit, et pousse le cheval à toute bride, puis sans aucune considération, l’arrête d’une main rude de toute sa force tout-à-coup, de sorte que le cheval met les hanches en terre et se trouve blessé. Remède. Si le cheval est blessé à la hanche, pour avoir été dans un bourbier et fait effort, ou bien pour avoir glissé, alors il le faut saigner du plat des cuisses, et du sang qui en sortira, faire une charge comme il est dit au Chapitre précédent, et la réitérer le quatrième jour suivant, puis après vous la graisserez d’onguent d’agrippa et dialthée, en égale quantité, vous laisserez le cheval en repos, et il guérira. S’il est boiteux pour avoir reçu quelque rude coup sur l’os de la hanche ou cuisse, vous ferez raser le poil qui couvre l’os, puis lui appliquerez le cataplasme que nous avons indiqué au Chapitre précédent pour douleur de reins ; et s’il est boiteux pour avoir chevauché une barre, il le faut étuver avec de bon vin chaud, puis le graisser d’agrippa et de dialthée seulement de deux en deux jours, et il guérira en continuant l’espace de huit jours. Si le cheval a reçu quelque coup sur l’os qui est près des flancs, appellé trullons, laquelle partie est délicate, prenez de la graine de lin en poudre, de la térébenthine et du miel, autant de l’un que de l’autre, faites bouillir le tout ensemble avec du vin , et de ce couvrez toute l’enflure, s’il y a une plaie mettez-y de l’Egyptiacum, que vous renouvellerez tous les jours, tant que le trou sera ouvert. Si le cheval est boiteux à cause du farcin, il faudra le panser avec les remèdes indiqués pour le farcin ; et si le cheval est boiteux pour être tombé en le voulant faire sauter, ou pour s’être acculé comme il est dit, il faut lui appliquer les deux sortes de charges indiquées au Chapitre précédent ; si le mal est récent en lui appliquant toute suite ces remèdes il guérira : mais si la maladie est invétérée, il faudra user du cataplasme ci-dessus désigné, et en outre ce lui faire donner un séton, afin de purger les os de dessus la cuisse ; faisant faire l’entrée dudit séton demi-pied au-dessus dudit os, et sa sortie le plus adroitement que faire se pourra sur la jointure dudit- os ; vous graisserez tous les jours ledit séton de vieux-oing, vous laisserez le cataplasme sur la croisée de la croupe, pendant que ledit séton fera son opération, et le cheval guérira, quoique le mal soit vieux. Et pour le cheval boiteux de la cuisse sans enflure, il faut user des saignées déclarées au Chapitre précédent. Il est bon aussi de lui faire donner une ortie au milieu de la cuisse, et détacher la peau d’avec la chair avec une spatule de la longueur de la main, poussant ladite spatule jusques sur l’os, puis il y faut mettre un séton graissé de vieux-oing, et faire frotter la cuisse du cheval des cinq onguents chauds, ainsi que la hanche jusqu’au milieu du dos.
________________________ CHAPITRE LXXXI. Du Cheval épaulé, ouvert ou entr’ouvert, et la différence des cures.
IL
y a bien de la différence entre un cheval
épaulé ou ouvert, et celui
qui est seulement entr’ouvert ; afin que vous ne vous
trompiez point
dans la cure de cette maladie, il faut noter que quand le cheval est
épaulé, c’est quand il a l’os
de l’épaule hors de son lieu, ce qui se
doit appeler ouvert, et non pas épaulé. Et quand
le cheval est
entr’ouvert, c’est quand ledit os n’est
pas du tout hors de sa place ;
toutes ces choses lui viennent de quelque violent effort. Quelquefois
aussi le cheval en s’abattant à terre se met ledit
os hors de son lieu,
ou par quelque coup de pied qu’il pourroit recevoir
d’un autre
cheval. Il peut aussi être entr’ouvert en galopant
ou trottant. Tels
sont les signes : le cheval qui a l’os brisé ou
rompu ne mettra point
le pied à terre, son allure sera comme s’il
étoit entravé, et la jambe
de l’épaule malade se laissera aller comme morte.
Le cheval ouvert ou
dénoué ne posera pas non plus le pied par terre,
mais il aura la jambe
plus forte que le cheval épaulé ; et si vous le
voulez faire passer
par-dessus une barre de la hauteur d’un pied et demi
seulement, il ne
passera point sans sauter. Le cheval seulement entr’ouvert
sera
boiteux, et le faisant passer par-dessus ladite barre, il jettera en
passant la jambe de l’épaule malade en dehors. Remède. S’il le cheval est épaulé, il ne faut chercher aucun remède, comme il a été dit, puisqu’il est incurable. S’il est ouvert il faut faire remettre l’os qui est sorti de son lieu naturel, et faute d’un maître Maréchal assez expert, vous ferez nager le cheval au travers de l’eau, jusqu’à ce qu’il soit presque las, puis à l’instant le ferez saigner de la veine des airs qui est dessous les épaules, la partie malade ; ensuite vous mêlerez le sang qui en sortira avec de la semence de lin commun et fenouil, trois onces de mastic et deux de rue, mettant le tout en poudre, e y ajoutant poix raisine, térébenthine et miel quatre onces, vous mettrez toutes ces choses avec le plus gros et fort vin que vous pourrez trouver, et les ferez bien cuire à petit feu, jusqu’à ce qu’elles soient comme une charge, que vous mettrez sur l’épaule malade le plus chaud que le cheval la pourra endurer, et le couvrez bien ; il faut entraver ce cheval des deux jambes de devant, l’une près de l’autre, et le laisser douze jours en repos sans le changer de place, puis au bout de ce temps vous le ferez promener tout doucement peu à peu, et mettrez le reste de la charge dessus l’épaule le plus chaudement que le cheval la pourra endurer, sans ôter la précédente, vous le laisserez ainsi huit jours étant toujours entravé, et les huit jours étant passés, vous prendrez de l’eau avec de l’huile d’olive que vous ferez chauffer prête à bouillir, vous en laverez l’épaule et la déchargerez, puis après vous graisserez le lieu malade, de deux jours en deux jours, des quatre onguents chauds, et ferez tous les jours promener le cheval une petite heure, continuant jusqu’à fin de guérison. S’il arrive qu’après l’opération desdites charges le cheval ne se trouve pas mieux, ce sera mauvais signe, et en ce cas il faudra faire un séton à ladite épaule, que la sortie en vienne à la jointure de l’épauleton offensé, afin qu’il puisse librement purger ; vous graisserez ledit séton de vieux-oing de porc, le remuant bien tous les jours afin de faire partir l’humeur enclose, et vous lui ferez donner une ortie au plat de l’épaule de cette façon. Il faut faire une petite incision au bas du plat de l’épaule, et séparer la peau d’avec la chair, puis remplir le lieu de petits morceaux d’étoupes graissés de vieu-oing, et le panser ainsi tous les jours une fois, jusqu’à ce qu’il n’en sorte plus d’apostume. Pour remédier au cheval entr’ouvert, il faut semblablement aussitôt le faire nager au travers de l’eau, comme il est dit, mais pas autant que le cheval ouvert, après il faudra le saigner des airs, et mêler le sang avec gros vin, huile d’olive et du sel, faire bouillir le tout ensemble, puis en frotter la plaie ; après cela il faut entraver le cheval, le laisser six jours en repos, puis au bout des six jours il faut prendre la peau, tant que vous pourrez sur la jointure de l’épauleron, et la percer avec une alêne, puis mettre dans le trou de la racine d’ellébore noire, qui passera des deux côtés comme un lardon, et en faire autant à deux ou trois endroits autour dudit épauleron, puis vous oindrez les lieux, étant lavés, d’un peu de beurre frais, pour une fois seulement, et il s’y fera une inflammation, puis dans cinq ou six jours tomberont des escarres de la largeur d’un sol, cela causera la purgation de l’os offensé ; lesdites escarres étant tombées, vous graisserez l’épaule toute entière de l’onguent de dialthée et d’agrippa, autant d’un que d’autre, et continuerez de deux en deux jours, jusqu’à ce qu’il soit guéri.
________________________ CHAPITRE LXXXII. Pour savoir si le Cheval malade des avives guérira ou mourra.
UN
cheval étant malade des avives, s’il a les
oreilles chaudes et les
naseaux, si le vent qui en sort est chaud et sec, s’il a les
génitoires
chaudes, la langue fraîche et non aride, si le ventre fait
bien son
office, qu’il urine et qu’il ait la vue
alègre, quoiqu’il ne mange pas
si bien qu’à l’ordinaire, il est
néanmoins hors de danger de mort. Mais
le cheval malade, de quelque maladie que ce soit, s’il a la
vue triste,
les oreilles froides et lentes, les naseaux et le vent qui en sort
froid, la langue sèche et aride, et de couleur comme
demi-morte, la
laissant pendre et ayant peine à la mettre dans sa bouche,
les
génitoires froides et humides, c’est un
très-mauvais signe, et qui
indique que le cheval est près de sa fin.
________________________ CHAPITRE LXXXIII. Des vers qui tourmentent le Cheval.
LE
cheval qui est tourmenté des vers, lorsqu’ils sont
en grande abondance,
il ne peut pas vivre long-temps avec cette vermine, car ils le font
mourir si l’on n’y remédie. Il y a deux
sortes de vers ; les uns sont
longs et gros, et se trouvent au siége de la
matière fécale,
quelquefois il s’en trouve deux ou trois attachés
autour du fondement.
Ceux-là ne sont pas si mauvais que les autres, et les
chevaux qui vont
à l’herbe sont sujets à en avoir ; en
voilà les signes : le cheval
maigrit, il se mord les côtés, se frappe les flans
avec les pieds de
derrière, le poil lui hérisse, il se frotte la
queue, et par fois l’on
diroit qu’il a une colique tant il se tourmente. Remède. Faites bouillir environ demi-quart-d’heure à gros bouillon un boisseau de seigle dans de l’eau de rivière, puis ôtez le seigle de dedans l’eau et le faites sécher au soleil ; ensuite faites-le manger au cheval, soir et matin, en lui en donnant autant que vous avez coutume de lui donner d’avoine ; quand il aura mangé tout ce seigle, mettez-lui dans son avoine, toutes les fois que vous lui en donnerez, plein la coque d’un oeuf de soufre jaune bien pulvérisé. Si cela ne le guérit pas assez promptement, donnez lui le breuvage qui suit. Prenez une once d’aloès cicotrin, saulive, feuilles et graine en poudre deux onces, corne de cerf en poudre fort subtile une once, miel une once, huile de cyprès six onces, mêlez le tout avec du vin blanc environ un pot, faites-le boire au cheval à jeun et de bon matin, puis laissez-le bridé sans manger ni boire l’espace de trois heures, et après donnez-lui à manger et à boire ; le jour suivant il faut lui donner un clystère composé comme il suit. Prenez de la rue, de l’absinthe et de l’ail, autant de l’un que de l’autre, faites bien bouillir le tout ensemble, et de la décoction faites un clystère, y ajoutant six onces d’huile d’absinthe, et le ferez prendre au cheval, ce qui fera sortir cette vilaine et mauvaise humeur.
________________________ CHAPITRE LXXXIV. Du Cheval qui ne peut retenir le sperme.
IL
se trouve des chevaux qui ont une si grande abondance de sperme, qui
est près de la vessie, et qui sont si débiles
qu’ils ne peuvent le
retenir, de sorte qu’ils le rendent jour et nuit,
qu’ils se gâtent tout
le ventre et se dégoûtent. Remède. Il faut saigner le cheval du plat des cuisses, et si c’est en Été, il le faut baigner en eau courante et l’y mettre jusqu’au ventre, puis vous lui ferez une charge sur les reins, comme il suit : prenez le blanc de quatre oeufs, avec un peu de farine de froment, et quatre onces de bol d’arménie en poudre, mêlez le tout ensemble avec bon vinaigre, puis lui mettez cette charge sur les reins, et la lui laissez deux jours ; s’il est besoin vous la réitérerez ; il faudra mettre le cheval tous les jours une fois à l’eau, et si avec ce remède il ne guérit pas entièrement, prenez eau de plantin, eau rose, eau de fumeterre et de pourpier, du jus de laitue, de chacune un petit verre, et un verre de vin clairet, mêlez le tout ensemble, le faites boire le matin au cheval, et qu’il ne mange que trois heures après ; puis donnez-lui du foin et lui faites boire eau tiède : si c’est l’hyver il ne le faut pas mettre à la rivière, et ne plus lui donner d’avoine qu’il ne soit guéri.
________________________ CHAPITRE LXXXV. Pour un Cheval qui a mangé l’escargot.
L’ESCARGOT
naît dans le vieux fumier, est de couleur
rougeâtre, et va à reculons
comme l’écrevisse, tâche toujours de
gagner la mangeoire des chevaux,
et quelquefois le cheval le mange ; on le connoit par ce signe : le
cheval après avoir mangé l’escargot
aura le membre toujours roide et
tendu, comme s’il vouloit hanter les juments. Remède. Prenez poivre long, pyrethre, stafi aigre, de chacun une once, le tout mis en poudre, mêlez-le avec deux verres de vin vermeil, et le faites boire au cheval.
________________________ CHAPITRE LXXXVI. Pour un Cheval qui a mangé l’araignée.
UN
cheval qui a mangé l’araignée est en
danger de mort, s’il n’est secouru
: les signes sont, que dans un moment vous verrez les airs du cheval
enflés jusqu’aux yeux. Remède. Il faut promptement saigner le cheval du palais, mêler le sang avec vinaigre et sel, et de ce lui en faire charge, puis couvrir le cheval ; pour breuvage vous prendrez deux onces de mithridate, que vous mêlerez avec un peu de bon vin blanc, et le ferez boire au cheval avec une corne. Il ne doit point manger que deux heures après.
________________________ CHAPITRE LXXXVII. Pour un Cheval qui a le flux de ventre et des signes mortels.
LA
Nature, qui toujours travaille pour la santé du corps, purge
quelquefois par le flux de ventre, ce qui est bon pour la
santé du
cheval ; mais il y a un autre flux de ventre qui s’engendre
de crudité
et de débilité d’estomac, provenant de
la malice des humeurs, ce qui se
connoît lorsque le cheval rend la viande indigeste ou
demi-digérée, ou
par suppuration ; et si le sang paroît aux indigestions,
c’est
dissenterie, et le cheval est en danger de mort ; les signes mortels
sont, si le cheval refuse le manger, si ses yeux pleurent, et
s’il
regarde derrière. Remède. Il faut laisser le cheval trois jours en repos, ne lui donnant que la nourriture ordinaire ; si le flux vient de nature, le cheval guérira en peu de temps, et s’il est dégoûté, au quatrième jour, vous lui donnerez le breuvage suivant. Prenez sang de dragon en poudre une once, galle en poudre deux onces, farine d’amidon quatre onces, et le jaune de six oeufs : détrempez le tout avec un pot de gros et fort vin, puis de bon matin vous le ferez boire au cheval ; il faut qu’il ne mange que deux heures après, et lui donner de l’eau tiède à boire : s’il est besoin, vous pourrez reitérer encore une fois ledit breuvage. Mais si l’excrément du cheval est trop liquide, et qu’il y paroisse du sang, il faut user après le breuvage d’un clystère comme il suit : Prenez bouillon-blanc et genièvre, de chacun deux poignées, faites-en décoction avec miel, dans laquelle vous ajouterez du suif de bouc ou graisse de canard, vin vermeil et huile de rue, avec le jaune de trois oeufs, puis un peu tiède, vous le ferez prendre au cheval avec la séringue, et lui graisserez le ventre et le nombril d’huile laurin un peu tiède pendant trois jours, si le cheval est dégoûté, vous prendrez douze grains de poivre avec un peu de gingembre, vous mettrez le tout en poudre, le mêlerez avec un pot de vin rouge, et le faites boire au cheval : si par ce remède le flux ne cesse point, ce sera un mauvais signe, et vous lui ferez des pilules comme il suit : Prenez deux onces de sang de dragon, rue en larmes, et en faites de la poudre, dont vous prendrez avec du cotignac, et en ferez trois pilules que vous poudrerez de fleur d’amidon, puis les ferez avaler au cheval le matin ; il faut qu’il ne mange ni ne boive que trois heures après.
________________________ CHAPITRE LXXXVIII. Pour les afflictions du cheval, même pour le cerveau troublé et le mal de tête.
LA
trop grande quantité de sang qui est dans les veines du
cheval, ou bien
la crudité et l’indigestion de la viande
reçue par l’estomac et le
foie, est la cause de la corruption du sang, qui est envoyé
partout le
corps, et principalement aux parties nobles ; la tête en
reçoit une
grande abondance, et les sens naturels qui sont dans la tête,
étant par
tel sang corrompus et altérés, ils communiquent
plusieurs maux aux
membres et aux nerfs, ce qui est la cause de plusieurs maladies, et
même par cette grande réplétion de
sang, le cerveau est tellement
troublé, que le cheval marche quelquefois de travers et sans
mesure,
chopant et étant tout tremblant. Remède. Il faut saigner le cheval au col et en tirer une assez bonne quantité de sang que vous mêlerez avec vinaigre et huile d’olive, puis après vous le ferez bouillir, et étant un peu tiède, vous bassinerez tout le reste du cheval, puis vous lui couvrirez la tête d’un drapeau pas trop pesant ; il faut que le cheval boive peu, mettre dans son eau de la farine de seigle, et qu’il ne mange point d’avoine pendant quelque temps : vous lui ferez des parfums avec des feuilles de marjolaine et de souci, que vous ferez un peu sécher, et mettrez en poudre pas trop menue ; laquelle poudre vous mettrez, avec un peu de son de froment nouvellement tiré, et demi-once de mastic rouge en poudre, le tout bien incorporé, vous le ferez recevoir le matin au cheval, une heure avant que de l’abreuver ; ensuite vous lui mettrez dans les naseaux des plumes graissées de beurre frais, avec poudre d’ellebore blanc, et continuerez cinq ou six jours.
________________________ CHAPITRE LXXXIX. Onguent utile quand on doute que balle ou autre chose soit empoisonnée.
SI
la plaie est empoisonnée, vous le connoîtrez ainsi
; le cheval sera
dégoûté, triste et pensant, et tous les
remèdes accoutumés seront
inutiles, la plaie paroîtra violette, tirant sur le noir :
quand vous
appercevrez ces choses, faites boire au cheval, avec une corne, trois
onces de mithridate ou thériaque dans un pot de vin, puis
faites
l’onguent qui suit. Unguentum macedonium deux onces, olei myrrha et térébenthine deux onces, butini recentis douze onces, olei antimonii trois onces, faites de tout un onguent, dont vous panserez la plaie tous les jours jusqu’à ce qu’elle n’enfle plus.
________________________ CHAPITRE XC. Pour les rognons offensés.
FAUT
donner au cheval le clystère qui a été
dit au Chapitre des ventrées, où
il y entre de la casse, etc. Puis saigner le cheval du plat des cuisses
ou des flancs ; le jour suivant lui donner un breuvage de ce qui suit :
Prenez demi livre de miel et de bonne huile d’olive, avec une
once
d’aloès cicotrin, le tout étant bien
remué et mêlé ensemble, vous le
mettrez dans un pot de vin blanc que vous ferez boire au cheval de bon
matin ; il faut qu’il ne mange que deux heures
après qu’il aura pris ce
breuvage, l’abreuver d’eau tiède et
blanche, le tenir en repos et le
bien traiter.
________________________ CHAPITRE XCI. Des fusées ou épinelles.
LES
fusées ou épinelles sont au-dessus du genou,
quelquefois en dedans, et
quelquefois en dehors de la jambe : cela fait grande douleur aux
chevaux et leur fait tenir la jambe roide ; elle est comme
liée ou
chevillée avec le genou : cela serre si fort la jointure,
que le cheval
est contraint de boiter, et souvent broncher. Cela provient quelquefois
d’un coup qui lui amène une douleur, laquelle
étant négligé s’endurcit,
et fait un calus dur comme l’os, qui va toujours en
augmentant, jusqu’à
ce qu’il soit formé avec quelque jointure ;
quelquefois aussi cela est
engendré d’humeur vicieuse, comme aux chevaux de
Flandres et
d’Allemagne, qui ont les jambes grosses et charnues. Remède. Aussitôt que vous verrez quelqu’enflure près du genou et jaret, et qu’en la maniant le cheval y sente de la douleur, c’est signe que le mal est encore récent ; alors vous ferez un cataplasme de poix blanche, que nous appellons benjoin, deux onces, de florax liquide demi-once, avec une pinte de vinaigre ; vous ferez fondre le tout dans un pot de terre à petit feu, puis vous le mettrez aussi chaud que le cheval le pourra endurer sur le mal, sans le remuer pendant cinq jours, lesquels étant passés, vous y mettrez un autre emplâtre, tel que le précédent ; si le mal est récent , le cheval sera guéri au troisième emplâtre : mais s’il est vieux, il ne guérira pas ; il faudra que les coutures ne passent pas l’enflure, puis vous mettrez par-dessus les coutures la grosseur d’un oeuf de poix noire, le jaune d’un oeuf, et gros comme une petite noix de graisse de porc, que vous ferez fondre à petit feu, puis le mettrez sur le lieu le plus chaud que le cheval pourra l’endurer, de la boure de drap par-dessus, et le laisserez en cet état deux jours, et étant passés prenez cire neuve, suif de cerf ou de veau, térébenthine et miel, de chacun trois onces, faites fondre le tout à petit feu, puis y ajoutez six onces d’huile d’olive, et le remettez sur le feu, le remuant avec une spatule, jusqu’à ce que l’huile soit incorporée ; de ce faites graisser l’enflure, et continuez jusqu’à ce qu’il soit guéri ; il faut se garder de le faire travailler ni mener dans la boue, que la plaie et couture ne soient entièrement guéries.
________________________ CHAPITRE XCII. Des atteintes aux nerfs des jambes.
LES
atteintes aux nerfs viennent de ce que quelquefois le cheval se donne
de la pince du pied de derrière sur la jambe de devant, de
sorte qu’il
en devient quelquefois boiteux, étant
négligé. Remède. Aussitôt que vous verrez le cheval s’être donné telle atteinte, vous prendrez promptement un coq vif, que vous fendrez par le milieu du corps, et tout chaud vous le mettrez avec toutes ses tripes sur l’atteinte, et le banderez si bien, qu’il ne tombe point de vingt-quatre heures ; lesquelles étant passées vous le leverez et graisserez le nerf de dialthée ; mais si l’atteinte est faite depuis huit ou dix jours, rasez le poil, puis avec la pointe du rasoir découpez doucement la peau, puis vous ferez un cataplasme avec lin en poudre, térébenthine et miel en égale quantité, que vous mêlerez avec du vin blanc, faites bouillir le tout ensemble, jusqu’à ce qu’il soit fort épais, puis l’appliquez le plus chaud que le cheval le pourra souffrir sur le mal, le lui mettant sur des étoupes tous les jours jusqu’à ce qu’il soit guéri.
________________________ CHAPITRE XCIII. Pour un Cheval qui a le talon bas et le pied comble.
UN
cheval qui a le pied comble, s’il a été
ferré d’un fer vouté, il faut
le déferrer et lui ouvrir fort les talons avec le boutoir,
puis après
le ferrer avec un fer plat que vous ferez attacher avec quatre clous ;
ensuite le laisser reposer environ trois semaines, et au bout dudit
temps déferrez-le, vous trouverez que la solle sera toute
pourrie et
cassée, ce que vous ferez enlever avec le boutoir, puis vous
prendrez
poix raisine et cire neuve, vous les ferez fondre ensemble, et tout
chaud, avec la penne d’une plume, vous en couvrirez la solle,
et lui
remettrez un fer encore plus plat, afin qu’il puisse achever
de casser
la solle, vous le laisserez ainsi deux jours ; ensuite le
déferrez et
leverez la solle cassée, puis y mettrez ensuite de la cire
et poix
raisine, comme ci-dessus ; ensuite ferrez le fer à plat,
qu’il embrasse
tout le reste de la solle, et le laissez ainsi quinze jours ou plus,
afin que les talons croissent, les graissant deux fois la semaine au
moins de l’onguent ci-dessus.
________________________ CHAPITRE XCIV. De l’os de graisse, et de la différence.
L’Os
de graisse sur la couronne du pied vient quelquefois d’une
enclouure
mal pansée et négligée, et comme ce
noeud est nerveux, l’apostume
pourrit la chair et partie du nerf, rend le mal incurable, et se change
en fistule que nous appelons os de graisse, et coule sans cesse,
jusqu’à ce qu’il soit
ôté. Prenez rameaux de sabine et en faites une
demi-once de poudre, sublimé en poudre une once,
mêlez le tout
ensemble, et en remplissez la plaie, mettez un peu de coton dessus,
puis le bandez et le laissez ainsi trois jours ; ensuite ôtez
l’emplâtre, et si vous ne pouvez
aisément faire tomber l’escarre, il
faut la graisser de beurre frais jusqu’à ce
qu’elle tombe : si l’os de
graisse ne vient pas avec l’escarre, remplissez-le encore une
fois
comme il est dit, et il pourra venir au second appareil avec
l’escarre,
sinon vous continuerez de remettre encore la même chose
jusqu’à ce que
la fistule ou os de graisse soit dehors : et lorsque vous verrez la
plaie nette, mettez-y de la poudre de carquentum, puis de
l’onguent
fait de térébenthine et huile avec petit morceau
d’éponge, comme il a
été dit au Chapitre des enclouures.
________________________ CHAPITRE XCV. D’une entorse ou contorsion de nerfs.
LA
contorsion de nerfs se fait quand le cheval est dans un bourbier
profond et étroit et qu’une de ses jambes se
trouve plus pressée que
l’autre, le cheval en tirant de toute sa force se tord la
jointure et
demeure boiteux. Remède. Quand vous reconnoîtrez l’entorse, si vous craignez qu’il y ait quelque chose de démis, menez le cheval hors de la Ville, et si vous trouvez un petit et jeune arbre d’aubépine, attachez-le avec une corde au pâturon de la jambe malade, et le faites arracher par le cheval ; par cet effort la chose qui étoit hors de son lieu se remettra au naturel. Cela fait, prenez semence de lin en poudre, miel et térébenthine, autant de l’un que de l’autre, faites bouillir le tout ensemble avec du bon vin jusqu’à ce qu’il soit fort épais, puis vous en mettrez sur des étoupes, dont vous couvrirez bien chaud toute la jointure et la banderez très-bien : vous laisserez reposer le cheval deux jours, puis vous remettrez un semblable appareil, et continuerez jusqu’au quatrième appareil : Dieu aidant le cheval guérira.
________________________ CHAPITRE XCVI. Pour le nerf d’un Cheval piqué d’une épine.
QUAND
la jambe ou le nerf aura été piqué
d’une épine, il faut tondre le poil,
mettre sur la piquure le jaune d’un oeuf battu avec
fleur de farine de
fèves, et s’il est besoin
réitérer : si l’épine est
rompue dans le nerf
et que vous ne la puissiez faire sortir, il faut fondre et incorporer
le tout ensemble, puis le mettre tout chaud sur la piquure, et
l’y
laisser vingt-quatre heures, et si l’épine ne sort
pas, il faut mettre
encore un semblable cataplasme, et elle sortira en peu de temps.
Autrement pour tirer le venin d’une épine,
quelque-uns font un emplâtre
de Gratia Dei, et le mettent sur la piquure, ce qui a grande vertu,
même pour les personnes qui seroient piquées de
quelque épine.
________________________ CHAPITRE XCVII. Séton pour adoucir le nerf d’un Cheval.
SI
le cheval a les nerfs roides et les jointures enflées,
faites un
onguent de ce qui suit, duquel vous graisserez les nerfs et les
jointures de deux jours en deux jours, jusqu’à ce
que le cheval soit
guéri. Prenez huile laurin, huile rosat, huile de camomille
et cumin,
autant de l’un que de l’autre, huile
d’olive et graisse de porc
demi-livre, térébenthine et huile
d’aspic de chacune une once, faites
fondre le tout à petit feu, le remuant et le
mêlant très-bien, puis
vous en graisserez les nerfs et les jointures, comme il est dit.
FIN. |