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H. Moisy : Notes pour servir à l'histoire de Lisieux au XVe siècle (1875)
MOISY, Henri (1815-1886) : Notes pour servir à l'histoire de Lisieux au XVe siècle.- Lisieux : Typographie de Mme Veuve Emile Piel, 1875.- 58 p. ; 25 cm.
Saisie du texte : O. Bogros pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (28.I.2016)
[Ce texte n'ayant pas fait l'objet d'une seconde lecture contient immanquablement des fautes non corrigées].
Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Courriel : mediatheque@lintercom.fr, [Olivier Bogros] obogros@lintercom.fr
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Diffusion libre et gratuite (freeware)
Texte établi sur l'exemplaire de la Médiathèque (Bm Lx : Norm 1969).  Tiré à part du Bulletin de la Société historique de Lisieux, année 1874, n°5.


NOTES
POUR SERVIR
A L'HISTOIRE DE LISIEUX
AU XVe SIECLE

par

Henri Moisy


~ * ~

AVANT-PROPOS

Un précieux document d'histoire locale, appartenant à la ville de Lisieux — le cartulaire de Thomas Bazin, évêque de Lisieux — est rentré, il y a quelques mois, en la possession de la ville, qui s'en trouvait régulièrement dessaisie depuis de longues années. Beaucoup de personnes s'intéressant à l'histoire de notre antique cité et qui eussent été heureuses de pouvoir le consulter, n'en soupçonnaient même pas l'existence. C'est dans cet intéressant recueil qu'ont été puisées, à peu près toutes les notes qui suivent. Les actes, sentences, contrats et autres titres de même espèce, que l'on y rencontre, n'ont trait généralement qu'à des intérêts privés. Pour dégager de ces actes, de nature si diverse, les trop rares notions historiques qui s'y trouvent éparses, nous avons dû nous livrer à un travail de dépouillement qui, bien que très-consciencieux, est loin sans doute d'avoir révélé tous les faits intéressants que renferme notre cartulaire. Autant que nous l'avons pu, nous avons cherché à contrôler les unes par les autres, les indications semblables reproduites dans plusieurs titres. Ces rapprochements nous ont permis parfois d'être affirmatifs dans l'énoncé de l'opinion produite par nous. Mais trop souvent ce moyen de vérification nous a fait défaut. Dans ce cas, il a pu nous arriver de proposer des solutions que nous n'avons garde de considérer comme indiscutables. D'autres chercheurs, plus instruits et plus heureux, rectifieront les erreurs que nous n'aurons pas su éviter. Quoi qu'il arrive, ce sera pour nous une réelle satisfaction d'avoir provoqué à ce sujet, le contrôle d'hommes plus compétents et d'avoir pu, ainsi, contribuer indirectement à élucider des questions qui, pour être des questions d'histoire locale, n'en offrent pas moins, par certains côtés, un intérêt général, souvent très-réel.

SOMMAIRE

I. Cour spirituelle ou Officialité ; chapelle et celliers en dépendant ; leur situation ; prison de l'Officialité ; sa situation. — II. Cour temporelle ou Cohue ; prison de cette cour ; leur situation. — III. Porches. —  IV. L'établissement des fortifications, entourant la cathédrale et le palais épiscopal, compromet la solidité de l'église. Travaux de consolidation. Exhaussement considérable du sol à l'extérieur d'une partie de l'édifice. — V. Voie longeant une partie du côté méridional de la cathédrale et reliant à la Grande-Rue le Manoir épiscopal et le Doyenné. — VI. Cloître Saint-Pierre ; cimetière du clergé ; leur emplacement.  — VII. Halles et marchés: 1. la Blarie ou Halle aux blés, 2. la Poissonnerie, 3. le Marché aux fruits, 4. le Marché du Croquet, 5. la Halle de la cordonnerie, 6. la Peuferie ou Halle des fripiers. Droits de Coutume perçus sur les marchandises exposées en vente. — VIII. Droits de ville : 1. Fenestrage , 2. Havage, 3. Tavernage , 4. Masurage , 5. Fumage, 6. Corbillonnage, 7. Préage, 8. Asnage. — IX. Rentes épiscopales ; leur origine ; leur nature. Difficulté de les servir résultant des guerres. Leur réduction volontaire. Reprise de possession du gage ou substitution d'un nouveau débiteur. — X. Procédures suivies tant à ce sujet que pour le recouvrement des droits de ville. — XI. Jury de douze veours. — XII. Coopération des conseillers en Cour-laie et des sages assistants à l'administration de la justice. — XIII. Jurés de ville. — XIV. Serments contractuels. — XV. Qualifications en usage dans les actes. — XVI. 11e Saint-Ursin  ; son emplacement. — XVII. Déplacement du lit de la rivière de Touques. — XVIII. Tuilerie de l'évêque. — XIX. Maisons de Lisieux appartenant à des établissements religieux du voisinage et à des ecclésiastiques n'habitant pas la ville. — XX. Fontaines. — XXI. Rues. — XXII. Eclaircissements souhaités.

~ * ~

I

Tout le monde sait que l’évêque de Lisieux, à son titre ecclésiastique, joignait, depuis le XI° siècle, celui de comte de Lisieux ; de là, une double juridiction, celle de l'évêque et celle du comte.

Comme évêque, il exerçait une juridiction ecclésiastique dans toute l'étendue du diocèse (1). Le siège de cette juridiction était établi au XVe siècle, rue Cadoc, aujourd'hui rue au Char, non loin de la Grande-Rue ; c'était ce que l'on appelait alors la Court espirituelle ou le Manoir official (2).

Les bâtiments affectés à ce tribunal ecclésiastique, au nombre desquels se trouvait une chapelle, avaient une importance notable, en rapport avec l'étendue de la juridiction spirituelle de l'évêque ; ils occupaient le fond d'une vaste cour dont l'accès était par la rue au Char, et dont quelques dépendances confinaient probablement à la Grande-Rue.

A l'appui de cette assertion, nous invoquerons d'abord un acte d'échange du 21 juillet 1321 (f° 16 du Cartulaire), renfermant le passage suivant : « In manerio et curia officiali lexoviensi, in vico Cadoc. » L'on y rencontre en outre deux contrats, qui vont encore mieux préciser la situation du manoir official. L'un, est un acte du 18 février 1431 (f° 48), suivant lequel Zanon de Castiglione, évêque de Lisieux, fieffe à Anthoine de Castillon, seigneur du Besnerey, « certaines places vuides contenantes environ vingt trois perques de terre, avecques les « murailles et vieux ediffices dessus estans... assis en la parroesse Saint Jaque dudit lieu de Lisieux, jouxte la rue Cadoc d'un costé, d'autre costé aux maisons et terres de la haulte rue de la Boucherie, aboutant d'un bout à Guilbert Piel, à cause de sa femme, et d'autre bout au pignon de la maison de la Court espirituelle de mondit sgr l'evesque... Ainsy comme le tout se pourporte en longc et en lay, par les enseignemens des murailles anciennes d'environ les dictes places, avec les entrées d'icelle places et autres ediffices qui sont soubz la chappelle de la dicte court. »

Comme l'on voit, Antoine de Castillon achetait ainsi de l'évêque, outre le terrain de vingt-trois perches dont on vient de parler, l'édifice existant sous la chapelle de l'Officialité. Or, cet édifice souterrain, l'acte de fieffé indique sa destination : c'était un cellier, ou plutôt une partie des celliers que l'évêque possédait dans le sous-sol du manoir official, ce que démontre le second acte dont nous allons parler. Cette aliénation restreinte eut naturellement pour condition, que l'acquéreur maintiendrait ce cellier dans un état tel que la solidité de la chapelle se trouvant au-dessus et qui restait la propriété de l'évêque, ne fut pas compromise, et que, de son côté, celui-ci ne ferait rien au-dessus du cellier qui pût nuire à l'acquéreur.

On vient de voir que le pignon du grand bâtiment de l'Officialité confinait au terrain acquis par Anthoine de Castillon ; et, comme dans ce mur était pratiquée une porte par laquelle on descendait dans les celliers, il fut encore convenu que cette porte serait murée : « Et pour ce que eu dit pignon, par bas, a certaines entrées pour aller es celliers dessoubz la dicte court, ilz seront condempnées et closes, affin qu'ilz ne portent prejudice à l'un ne à l'autre. »

Le second acte dont nous avons parlé, porte la date du 13 juillet 1445 (f° 47) ; c'est une autre fieffe faite par Pasquier de Vaux, successeur de Zanon de Castiglione au siège épiscopal de Lisieux, à Jehan le Muet, écuyer et à Guillot Guibert, bourgeois de Lisieux, « des scelliers qui sont en l'ostel de mondit  « seigneur l'evesque, de soubz où l'en tient de présent la court  et juridiction espirituelle de mondit seigneur, assis en la  parroesse Saint Jaque en la rue Cadoc ;  ainsi que le tout embas se pourporte en lonc et en lay, depuis les fondemens de terre jusques aux sommiers et planchiés du sollier d'icelle maison, qui jouxte d'un costé au pavement d'icelle rue Cadoc, d'autre costé etc. » — Cet acte, comme celui de 1431, renferme l'engagement réciproque des parties, de ne rien faire au-dessus comme au-dessous du sol du manoir officiai, qui puisse porter atteinte à leurs droits respectifs.

Peut-être est-ce un des celliers de ce manoir que nous avons retrouvé sous une maison en bois, dont la construction parait remonter à la fin du XVe siècle, située dans la Grande-Rue, n° 35, du côté et à peu de distance de l'Hôtel-de-Ville. C'est une vaste cave, d'une conservation parfaite, aux voûtes ogivales, soutenue sur des piliers ronds, et qui offre, dans tous les cas, un spécimen fort curieux des constructions civiles au XIIIe siècle. Il ne paraît pas impossible en effet que les dépendances, certainement considérables, du manoir official, se soient étendues, par derrière, jusqu'à la Grande-Rue.

La Cour spirituelle de l'évêque de Lisieux, comme sa Cour temporelle, dont nous allons maintenant parler, avait ses prisons particulières. L'on a supposé que ces prisons étaient dans  une antique construction qui subsiste encore à l'encoignure de la place Hennuyer et de la rue de la Chaussée. Nous ne connaissons toutefois aucun titre établissant ce fait. M. le vicomte Louis de Neuville, qui a fait une étude très-approfondie de notre vieux Lisieux, pense que cette maison n'a jamais eu la destination qui vient d'être indiquée : il la considère comme une dépendance d'un manoir canonial.


II

Comme comte de Lisieux, et en vertu des privilèges attachés à la suzeraineté féodale, l'évêque exerçait encore dans la ville et sa banlieue, une juridiction de police ; il avait même dans le ressort de cette seconde juridiction, ce que l'on appelait alors la haulte justice , c'est-à-dire le droit de connaître de toutes les causes criminelles et civiles qui pouvaient s'y produire.

Au XVe siècle, la juridiction civile et criminelle de l'évêque avait son siège dans un local désigné alors sous le nom de Court temporelle (3) et plus souvent sous celui de Cohue, situé à droite d'un passage dit la Venelle de la Ronce, servant d'accès à une propriété assez importante appelée le Manoir de la Ronce. Ce manoir se trouvait sur le derrière de la Grande- Rue, entre cette rue et la cathédrale, non loin du cimetière Saint-Pierre. La Cohue, dont les dépendances étaient beaucoup  moins importantes que celles de la Cour spirituelle, était bâtie à peu près sur l'emplacement de la maison qui forme actuellement l'encoignure de la Grande-Rue et de la place Saint-Pierre. Au nord de cette maison existe encore l'ancienne Venelle de la Ronce, convertie en passage couvert, connu maintenant sous le nom de Allée de la Ronce.

Aujourd'hui encore, dans les anciennes îles normandes de Jersey et de Guernesey, l'on désigne sous le nom de Cohue, le Palais ou la Cour de Justice.

C'était du reste, au moyen âge, la dénomination sous laquelle on désignait, en Normandie, le local dans lequel siégeait le juge du premier degré de juridiction.

On trouve, en effet, dans une ordonnance de l'Echiquier de Normandie, de l'année 1383, la disposition suivante :

« Item, que les Baillifs et Vicomtes soient diligens d'aller en Cohue dedans prime le premier jour de leur auditoire, et aux « autres jours subsequens, continuellement dedans sept heures du matin et dedans deux heures de relevée, afin que le peuple puisse estre mieux et plustost expédié. »

La situation du bâtiment dans lequel était établi la Cohue de l'évêché, est déterminée dans plusieurs actes du cartulaire de Lisieux ; nous nous bornerons à en citer trois.

Les deux premiers sont des contrats de fieffe du Manoir de la Ronce. Dans l'un, portant la date du 30 mars 1412 (f° 78), les immeubles vendus sont ainsi désignés : « Certain héritage ...  avec les maisons et ediffices estans sur iceluy, le tout assis es parroesses de Saint Germain dudit lieu et de Saint Jaque de Lisieux ; jouxte certain héritage... appartenant au dit Richard du Boulay, d'un costé, et d'autre costé à la saillie monseigneur de Lisieux (la sortie du manoir épiscopal) (4), où l'en a acoustumé vendre les fruitages ; aboute d'un bout à l'eritage du chappitre et à certaine venelle estant auprès la cohue monseigneur de Lisiex, en laquelle l'en a acoustumé tenir la juridicion temporelle d'iceluy seigneur, etc. » — Dans l'autre, daté du 7 avril 1421 (f° 80), se trouve la désignation suivante : « Certaines maisons et héritages et pourpris, tieulx que ilz sont et ainxi comme ilz se pourportent en longe et en lay, assis en la dicte parroesse de Saint Germain et en celle de Saint Jaque au dit lieu de Lisieux, en la bourgoisie d'icelle ville, jouxte la cohue où l'en tient les plès ordinaires  dudit lieu de Lisieux. »

Le troisième acte est une transaction en date du 13 janvier 1458 (f° 72), entre Thomas Bazin, évêque de Lisieux et Jehan Leudes, bourgeois de cette ville, statuant « tant sur le degout de la maison que ledit Leudes a de nouvel fait ediffier jouxte la petite venelle à la quelle aboute la cohue ou auditore de la juridicion temporelle de mondit sgr l'evesque, que de certaine huisserie et yessue que iceluy Leudes voulloit faire en sa dicte maison sur icelle venelle et avoir dalles en icelle pour esgouter les eaues de ladicte maison. »

De même que l'Officialité avait ses prisons spéciales, la Cohue avait aussi les siennes. Elles se trouvaient à peu de distance de ce tribunal, proche le cimetière de l'église Saint-Germain. Adossées aux fortifications du palais épiscopal (dans l'enceinte des quelles était la cathédrale), elles occupaient une partie de l'emplacement des anciens fossés de ces fortifications. C'est du moins ce qui parait résulter d'une transaction datée du 27 novembre 1442 (f° 73), où se trouve le passage suivant : « Comme Pierres le Crosnier deffant eust en son vivant prins à fieffe de révérend père en Dieu, monsgr Pierres (Cauchon), par la permission divine evesque et comte de Lisieux, certaines places vuides assises en la ville de Lisieux, en la parroesse Saint Germain dudit lieu, auprès et joignant des murs de la closture de l'ostel épiscopal de mondit sgr , où soulloient estre les fossés de la fortitfication dudit hostel, au bout de devers le cimitière de la dicte église de Saint Germain, à l'endroit des prisons de mondit sgr l'evesque. »


III

Les maisons comprises entre le bâtiment où siégeait la Cohue et les fortifications du manoir épiscopal, étaient pourvues de porches ; elles avaient leurs façades à l'ouest, du côté de la place, où existait ce que l'on appelait au xv° siècle, la saillie monseigneur, c'est-à-dire la sortie de ce manoir. C'est sur l'emplacement de ces maisons qu'ont été depuis édifiées celles qui se trouvent actuellement entre la cathédrale et l'allée de la Ronce, et qui limitent la majeure partie du côté est de la place Saint-Pierre.

Les anciennes maisons dont il est question, étaient construites en bois et avaient leurs pignons tournés vers la place ; leurs porches étaient soutenus par des poteaux massifs, régulièrement espacés, auxquels on donnait et l'on a conservé le nom de pots. Des constructions semblables se rencontraient en d'autres quartiers de la ville (5). Il en existe encore de pareilles dans plusieurs localités de la Normandie, notamment dans une ville voisine, Bernay.

Les porches des maisons avoisinant la Cohue de Lisieux, avaient une largeur de six pieds ; le sol qu'ils occupaient faisait partie de la voie publique et, à ce titre, appartenait à l'évêque. Aussi, les propriétaires des maisons au-devant desquelles ils étaient établis, n'avaient-ils le droit d'y déposer aucune marchandise ou autre chose, encore moins de se les approprier sous une forme quelconque.

En 1458, l'un d'eux, Jehan Leudes, bourgeois de Lisieux, désirant réédifier celle qu'il possédait sur la place de la cathédrale et supprimer, à cette occasion, le porche régnant au-devant, demanda à Thomas Bazin, évêque de Lisieux, d'acheter le sol de ce porche, afin de pouvoir avancer le rez-de-chaussée de sa nouvelle construction sur la même ligne que la partie supérieure. Sa requête fut favorablement accueillie, et il intervint, à ce sujet, entre lui et l'évêque , un marché dont les conditions furent réglées par un acte en date du 22 septembre 1458 (f° 39). « Comme Jehan Leudes, bourgois de Lisieux, est-il dit en cet acte, feust en volenté de faire construire et ediffier de nouvel, le devant de la maison en la quelle il demeure pour le présent, assis ès parroesses de Saint Jaque et Saint Germain de Lisieux, jouxte d'un costé la place de devant l'église cathedral de Saint Pierre de Lisieux, en la quelle on vent les fruitages, d'autre costé les hoirs de Colin du Boullay, d'un bout les hoirs Jehan Verel et d'autre bout une venelle estant entre la maison dudit Leudes et la maison de la court temporelle du révérend père en Dieu monseigneur l'evesque et comte Je Lisieux et le cimitière de la dicte église de Saint Pierre de Lisieux. En la quelle ediffice ledit Leudes eust vollentiers comprins et emply l'eritage wy (vide) estant soubz le porche de sa dicte maison, pourveu qu'il pleust à mondit seigneur lui baillier et fieffer à rente. Pour la quelle cause feust tourné devers mondit seigneur et lui eust remonstré que ledit héritage vuy ne luy valloit riens et que trop mieulx lui valloit baillier et fieffer à rente, à fin de eslargir et croistre sondit ediffise. A quoy mondit seigneur eust eu sur ce advis et deliberacion et après esté content et d'acord de baillier et fieffer audit Leudes ledit héritage wy, contenant six pies de lay et trente pies de lonc, etc.

« Et euquel ediffice ledit Leudes pourra faire assoir le post de sa dicte maison, qui sera le bout d'icelle par devers la maison de la court temporelle de mondit seigneur, tout à la ligue et au droit du post du dehors de la maison de la dicte court de mondit sgr . »


IV

Au moyen âge, la cathédrale et le palais épiscopal étaient, comme on le sait, entourés de fortifications, flanquées de tours et protégées par des fossés profonds. C'était dans cette enceinte que les habitants de la ville et des environs, alors que la contrée était pillée et ravagée par les Anglais, venaient mettre leurs personnes et les objets les plus précieux qu'ils pouvaient emporter, à l'abri des atteintes de l'ennemi (6). La muraille d'enceinte était à une faible distance de la cathédrale, du côté méridional de l'édifice (7). Lorsque, vers le XIVe siècle, cette muraille fut établie et surtout lorsque l'on creusa les fossés, en défendant l'accès, on compromit gravement la solidité de la cathédrale, dans sa partie la plus rapprochée. De là, la nécessité d'y faire des travaux de consolidation importants ; les piliers de la tour centrale avaient fléchi et le portail méridional menaçait ruine. L'évêque Alphonse Chevrier, prétendit alors que c'était le Chapitre qui était obligé de faire faire à ses frais les réparations ; de son côté, le Chapitre soutint que c'était une charge qui incombait à l'évêque seul. Pour le règlement de ce différend, on résolut de recourir au pape. Mais, comme en attendant, la situation périclitait , il fut convenu que provisoirement une somme de 2,000 livres, allait être affectée à ces réparations, à raison de 500 livres par an, durant quatre ans, et que l'évêque et le chapitre avanceraient chacun moitié de ces annuités , sauf à se régler ultérieurement à ce sujet.

Ce fut vraisemblablement à cette époque que durent être établis les deux immenses contre-forts qui soutiennent le portail du transept sud de la cathédrale et que fut détruite la partie des fortifications du manoir épiscopal faisant face au côté méridional de cet édifice.

Comme on avait pensé que c'était en faisant les fondations des fortifications et en creusant les vastes fossés régnant au pied des murailles, que l'on avait mis en péril la solidité de l'église, on s'empressa de combler les fossés vers ce côté de l'édifice. On fit plus : on y amoncela une grande quantité de terres, de manière à exhausser notablement le sol primitif de la place, sur laquelle s'avançait alors le transept sud de la cathédrale, place qui portait alors le nom de Place Saint-Pierre. La rue du Paradis actuelle occupe une partie de son emplacement. Cette rue a conservé jusqu'à la Révolution de 1789, son ancien nom de Place Saint-Pierre, comme le prouvent les plans de Lisieux, faits en 1783 et 1785.

Avant ces travaux d'exhaussement, le niveau du sol extérieur du transept sud de la cathédrale, ne devait pas, selon toute vraisemblance, dépasser celui actuel du transept nord ; en sorte qu'au lieu de descendre plusieurs degrés, comme on le fait maintenant, pour entrer dans l'église par le portail sud, on y pénétrait à l'époque dont il est question, en gravissant une dizaine de marches au moins.

Non-seulement ce portail a été enfoui, mais encore la majeure partie du côté méridional de l'édifice, comprise entre la rue du Paradis et la grande place, à laquelle on a récemment donné l'ancien nom de cette rue, celui de Place Saint-Pierre. L'on remarque, en effet, que le niveau du jardin qui longe ce côté de l'église, est beaucoup plus élevé que le sol de cet édifice ; et personne n'ignore cependant que le pavage de la nef et de ses collatéraux a été surélevé de 80 centimètres environ. Or il serait contraire aux règles les plus élémentaires de l'art architectural, d'admettre que, dans l'origine, alors d'ailleurs qu'aucune nécessité n'existait d'agir ainsi, on ait souffert que le sol extérieur de cette partie de la cathédrale, contigu aux murs, restât en contre-haut de plusieurs mètres, du pavage intérieur de l'édifice.

Outre cette première raison de fait, il en est une autre que nous allons exposer et qui nous parait plus décisive encore.

Nous trouvons cette preuve dans la disposition des ouvertures d'une construction souterraine, remontant au XIII e siècle, établie à 30 mètres environ de la cathédrale, sous le rez-de-chaussée d'une maison, située à l'encoignure de la rue du Paradis et de la Grande-Rue, actuellement occupée par M. Mignot. Or, cette construction fort curieuse, dont les voûtes sont du style ogival primitif, avait vers l'est, du côté de la rue du Paradis (anciennement Place Saint-Pierre), des fenêtres grillées, qui originairement se trouvaient au rez-de-chaussée de cette rue et qui aujourd'hui, bouchées dans presque toute leur hauteur, ne forment plus que des soupiraux de cave. Les trous dans lesquels était scellée la grille verticale qui protégeait chacune de ces ouvertures, sont encore parfaitement visibles. Le sol actuel de cette construction, qui a dû être lui-même exhaussé d'environ 3 mètres, se trouve cependant aussi d'environ 3 mètres en contre-bas du niveau actuel de la rue ; ce qui démontre encore quelle énorme surélévation a été donnée au sol, en cet endroit et dans le voisinage.

 
V

De temps immémorial, un chemin public, large de 12 pieds, ayant son point de départ au bas de la rue du Paradis, avait existé contre la cathédrale, au sud de cet édifice, en face du chœur. Ce chemin était destiné à mettre en communication avec la Grande-Rue, d'une part, le palais épiscopal et ses dépendances, en contournant la chapelle de la Vierge, et, d'autre part, le Doyenné, en se prolongeant directement vers ce manoir. Au XVe siècle, le Chapitre se plaignit que des empiétements eussent été commis sur cette voie par l'évêque Pierre Cauchon. Dans le but de prévenir toute difficulté à ce sujet, l'évêque passa avec le Chapitre un arrangement que nous trouvons relaté en ces termes, dans un acte postérieur à son décès, en date du 13 septembre 1448 (f° 32) : « Et depuis nagueres par certain appointement fait par entre feu monsgr Pierre Cauchon en son vivant et pour lors evesque dudit lieu de Lisieux, d'une part, et les doyen et chappitre de la dicte église de Saint Pierre, d'autre, certaine partie d'icelles places, montant douze pies de lay et tout au lonc d'icelles places de la dicte largeur, eust été ordonnée, entre aultres choses, estre et demourer, à tous jours maiz, en chemin, pour servira aller deladicte grant rue, par derrière la dicte église de Saint Pierre à l'ostel episcopal de mondit sgr l'evesque et en pluseurs autres heritages appartenans à mondit sgr l'evesque et aus dis de chappitre, assis en derrière de ladicte église et du pourprins dudit hostel episcopal. »

Il est encore fait mention du même chemin, dans les termes suivants, en l'acte du 13 septembre 1448, cité plus haut : « Certaines places et masures assises en la ville et cité dudit lieu de Lisieux, en la parroesse de Saint Jaque... aboute d'un bout au pavement de la grant rue et d'autre bout au chemin qui tend de l'église de Saint Pierre, par auprès de la chappelle nostre dame, à l'ostel du doien dudit lieu de Lisieux. »


VI

Du même côté de la cathédrale, en face de la nef, derrière la ligne de maisons qui s'étend de la rue du Paradis à la place Saint-Pierre, se trouvait le Cloître Saint-Pierre. Ce fait est constaté dans un acte du 9 septembre 1436 (f° 46), contenant fieffe de « deux maisons... assises en la dicte parroesse de Saint Jaque en la grant rue... jouxte d'un bout aux murs de la closture du clouaistre Saint Pierre de Lisieux et d'autre bout à la dicte grant rue. » Une annotation mise sur cet acte au XVIIe siècle, précise la situation de ces maisons et est ainsi conçue : « Pour deux maisons rue Estroicte. » — Or nous verrons plus bas que la rue Etroite formait au XVe siècle, un tronçon de de la rue que, dans toute son étendue, de la Porte de Paris à la Porte de Caen, l'on appelait alors, comme on l'appelle encore aujourd'hui, la Grande-Rue.

Dans l'espace qui vient d'être déterminé, devait aussi se trouver, suivant M. Louis de Neuville, le cimetière réservé au clergé.


VII

L'indication de l'emplacement qu'occupaient au moyen âge, les halles et marchés de Lisieux, peut offrir un certain intérêt ; nous allons donc donner, au moins pour quelques-uns, les renseignements qu'il nous a été possible de recueillir.

1. — La Halle au blé ou, comme on l'appelait alors, la Blarie se trouvait au XIVe siècle, rue du Moulin-à-Tan ; mais vers la fin de ce siècle, elle dut être reportée ailleurs. Ces deux faits semblent établis par un acte d'adjudication du 7 mars 1387 (f° 94), dans lequel l'immeuble vendu est ainsi désigné : « Une « place vuide séante en la parroesse Saint Germain de Lisieux, contenant trente et quatre pies de lonc et autant de lay, jouxte le bout de l'éritage où souloit seer la blarie, par les bournes mises, d'un costé ; et la rivière du moulin à tan, d'autre costé ; haboute à Jehannin de la Porte, d'un bout, et au chemin passant devant ledit moulin, d'autre bout. »

Le 23 avril 1433 l'évêque P. Cauchon fit dresser un Coustumier ou Livre de Taxe des redevances et droits seigneuriaux dus au comté de Lisieux, sur toutes marchandises exposées en vente à Lisieux (8). Ce Coustumier, qui fut confirmé par Henri VI, roi d'Angleterre le 14 décemdre 1437, fixe sous l'art. II, les droits afférents à la Coustume de la blarye.

2. — La Poissonnerie était rue Cadoc, aujourd'hui rue au Char, probablement sur une des places souvent mentionnées, mais sans indication de nom, dans le Cartulaire de Lisieux, lesquelles se trouvaient vers l'extrémité de cette rue, du côté de la Grande-Rue (9).

En tous cas, il n'est pas douteux que la halle au poisson était bien dans la rue Cadoc : les deux actes que nous allons indiquer, l'établissent d'une façon précise.

Dans l'un, en date du 11 février 1292 (f° 40), contenant fieffe d'un manoir situé rue au Char, connu au moyen âge et aujourd'hui encore sous le nom de Manoir de la Licorne, cet immeuble est désigné de la manière suivante : « Unum manerium cum omnibus edificiis ejusdem...  situm in parrochia sancti Jacobi Lexoviensis, inter vicum per quem itur depiscioneria apud ecclesiam sancti Jacobi Lexoviensis, ex uno capite, et vicum qui nuncupatur Baallie (autrefois rue du Bailli, maintenant rue de la Paix), ex altero. »

Dans l'autre, qui est un contrat d'échange, en date du 21 juillet 1321 (ibid. f° 16), on lit : «In manerio heredum Auberedœ la Seynière, ante piscinariam juxta donium Guillermi de Bosco. »

Cette dernière citation, à elle seule, ne prouverait rien, mais, par sa corrélation avec d'autres passages du même acte d'échange, elle va nous permettre d'établir que la maison de Guillaume du Bosc, voisine de la Poissonnerie, se trouvait bien dans la rue Cadoc. Il est dit, en effet, dans l'acte en question, d'une part, que cette maison était contigüe à celle des héritiers de Durand Baudri (10) ; en second lieu que l'héritage Baudri se trouvait devant le manoir de l'Officialité (11) ; enfin que l'Officialité avait son siège rue Cadoc (12).

La Coustume de la Poissonnerie fait l'objet de l'art. 17 du Coustumier de P. Cauchon.

3. — Le marché aux fruits et aux légumes, se tenait proche le parvis de la cathédrale, à l'entrée du manoir épiscopal, dans le voisinage de la Cohue. On lit en effet dans deux actes déjà cités, l'un portant la date du 30 mars 1412 (f° 78) : « Jouxte « d'un costé... d'autre costé à la saillie monseigneur de Lisieux, où l'en a acoustumé vendre les fruitages ; aboute d'un bout à l'eritage du chappitre et à certaine venelle estant auprès de la Cohue monseigneur de Lisiex » ; et dans l'autre, en date du 22 septembre 1458 (Ibid, f° 39) : « Jouxte d'un costé la place de devant l'église cathédral de Saint Pierre de Lisieux, en laquelle on vent les fruitages. »

La Coustume des fruitages est réglée sous l'article 7 du Coustumier de P. Cauchon.

4. — Le Marché du Croquet, l'un des plus importants de la cité, se tenait en face du cimetière Saint-Jacques, sur une place qui portait le nom de Place du Croquet et que l'on désignait encore en 1785 sous celui de Place du Crochet. Cette place avait pour limites : d'un côté, le mur de soutènement des terres du cimetière, desquelles le niveau était alors surélevé d'environ quatre mètres (13) ; en face, le côté ouest de la place du Marché-aux-Bœufs ; d'un bout, le perron de l'église Saint-Jacques, et d'autre bout, l'entrée de la rue du Marché-aux-Bœufs, à sa jonction avec la rue d'Ouville.

La situation de ce marché est clairement déterminée dans une sentence du 21 juin 1451 (f° 45), où l'on parle de « la rue tendant de la porte d'Orbec à la rue Cadot (rue au Char), en passant parmy la place où siet de présent le marchiè du Croqet. »

Les marchandises mises en vente sur le Marché du Croquet étaient le lin, le chanvre, le fil, la laine en suint, la laine filée, le saindoux, les peaux vertes, les cuirs, le beurre, le fromage, etc.

Presque toutes ces marchandises étaient vendues au poids et pesées au moyen de balances à bras inégaux, appelées plommées. Au bras le plus court était suspendue, au moyen d'un crochet (en idiome normand croquet), la marchandise à livrer. Delà, parait-il, la dénomination de Marché du Croquet.

Le Coustumier de P. Cauchon détermine (art. 2) la quotité des droits dus à la Coustume du Croquet, suivant la nature des marchandises qu'elle comprend.

Le droit de percevoir les redevances auxquelles les marchandises exposées en vente sur chaque marché, se trouvaient assujetties, était habituellement affermé par l'évêque. Il n'était permis d'en vendre aucune en ville, ailleurs qu'aux marché ou halles spécialement désignés pour chacune d'elles. On voit dans une sentence rendue par le sous-sénéchal de Lisieux, le 8 janvier 1456 (f° 82), que Jehan Hellouin et Jehan Guillart, fermiers de la Coutume du Croquet, s'étaient plaint que Perrin de Rivière , bourgeois de Lisieux , eût indûment vendu et livré « ung millier de camvre » en l'hôtel de Guillaume Martin, situé dans la Grande-Rue, et qu'ils se fussent ainsi exonérés de la taxe de 40 deniers, à laquelle cette quantité de chanvre eût été assujettie, si elle eût été vendue sur le Marché du Croquet. Et il résulte de cette sentence que de Riviers acquiesça à la réclamation des fermiers de la Coutume ; qu'il leur paya la redevance de 40 deniers et que de plus, il dut prendre l'engagement de verser à l'évêque une amende de 12 sous tournois pour la contravention.

5. — La Halle de la Cordonnerie était située à l'extrémité sud de la rue des Boucheries, au milieu de cette rue, proche la rue aux Fèvres. C'est ce que constate un acte de fieffe du 31 janvier 1454 (f° 58), où le terrain vendu est ainsi désigné : « Certaine place et masure wyde, contenant trente trois pies de long et vingt trois pies de ley, assise en la ville et cité dudit Lisieux, devant le bout de la Halle de la Cordonnerie dudit lieu, en la parroesse Saint Jaque ; jouxte, d'un costé, à certaine maison et héritage qui fut et appartint à messire Laurens Menart, en son vivant prestre, et depuis à Taillefer de la Remonnerie ; d'autre costé, à la rue tendant de la rue de la Boucherie à l'ostel Robin Hamel ; aboute, d'un bout, à la voie par où l'en va à l'ostel qui fut Veteuil , que tient à présent Jehan Brunet, à cause de sa femme, et, d'autre bout, à la rue tendant de la rue aux Fèvres au Marchié du Croquet (14). »

Les droits dus à la Coustume de la Cordonnerie sont réglés dans le Coustumier de P. Cauchon (art. 13).

6. — Dans un acte du 21 juillet 1321 (f° 18), il est encore question d'une autre halle, se trouvant sur la paroisse Saint-Germain, mais dont la situation précise nous est inconnue : c'est celle désignée sous le nom de halla ou hallœ pannorum, que nous croyons être la Halle des Fripiers, appelée Peuferie dans le Coustumier (art. 19).


VIII

Les redevances imposées par ce Coustumier aux marchands exposant leurs marchandises en vente sur les marchés ou dans les foires se tenant en ville, n'étaient pas les seules que ceux-ci eussent à payer aux évêques de Lisieux.

D'autres taxes féodales, comprises sous la dénomination générale de droits de ville, et dont la nomenclature se trouve fréquemment donnée dans le Cartulaire de Thomas Bazin (15), étaient encore mises, d'une façon permanente, à la charge, les unes, des marchands seuls, et les autres, de tous les bourgeois marchands ou non marchands.

Ces taxes étaient le fenestrage, le havage, le tavernage, le masurage, le fumage, le corbillonnage, le préage et l'asnage.

Les trois premières étaient des redevances que les marchands seuls devaient à l'évêque, indépendamment des droits de Coutume, suivant la nature du commerce qu'ils exerçaient.

1. — Le fenestrage était l'impôt dû pour l'étalage. Fenestre se disait alors pour étal : témoin ces vers de Villon :

Et les aucuns sont devenuz
Dieu mercy ! grans seigneurs et maistrea,
Les autres mendient tous nudz
Et pain ne voient qu'aux fenestres.

Grand Testament, xxx.

On donnait aussi quelquefois à cet impôt le nom de denier de sepmaine (16) ou de denier soursepmaine (17), attendu qu'il était d'un denier par semaine.

2, — Le havage était le droit de prendre des grains, des haricots, des fruits, etc., exposés en vente sur les marchés ou sous les halles, autant que la main pouvait en contenir.

A Paris, le droit de havage était attribué à l'exécuteur des hautes œuvres. Au moment où ils venaient de s'en libérer, les marchands étaient marqués au dos ou sur le bras avec de la craie. Cette coutume amena des désordres, à la suite desquels le havage fut supprimé.

Le droit seigneurial de havage ou dehaverie était appliqué en Normandie, non-seulement aux marchandises exposées en vente, mais encore, si ce n'est partout, au moins dans certaines parties de la province, à celles transportées par eau. C'est ainsi, par exemple, que le seigneur de Château-sur-Epte avait droit de haverie et de chaussée, sur toutes celles transportées sur l'Epte et passant par la chaussée des Bordeaux (V. la Vicomté de l'Eau de Rouen, de M. Ch. de Beaurepaire, p. 222).

3. — Le tavernage était imposé aux hôteliers, cabaretiers, etc., comme prix de la concession qui leur était accordée, de vendre des boissons. Cette taxe était de 38 deniers ou 19 manceis ; elle était due, dit un acte du 20 décembre 1456 (f° 39), « pour chacune personne vendant es dictes maisons et masures taverne de vin, de sidre et autre beraige. » Y étaient seuls assujettis, les débitants qui achetaient des boissons pour les revendre ; ceux qui se bornaient à vendre les boissons provenant de leurs récoltes dans le comté de Lisieux, en étaient exempts. C'est du moins ce que parait établir un acte du 10 juillet 1450 (f° 26), suivant lequel un nommé Jehan Robillart, reconnaît que, comme détenteur d'un hôtel situé dans la Grande-Rue, il doit à l'évêque Thomas Bazin, entre autres droits de ville, celui de tavernage, « se ainsy est, ajoute l'acte dont s'agit, que ledit Robillart, ses hoirs ou ayans cause, vendent ou facent taverne en la dicte maison, d'autre sydre ou beraige que de leur creu en la dicte ville et banlieue d'icelle. »

Les autres droits de ville desquels il nous reste à parler, étaient dus par les habitants, commerçants ou non commerçants, auxquels ils étaient applicables.

4. — Le masurage (18) était un cens de cinq deniers, dû pour chaque maison.

5. — Lefumage était une redevance de quatre deniers, due « pour chacune personne faisant feu et tenant lieu. » (Acte du 20 décembre 1456, (f° 40).

Les censitaires de l'abbaye Sainte-Trinité de Caen ne payaient à l'abbesse que deux deniers pour droit de fumage (V. cartul. de cette abbaye f° 61 v°) ; quelquefois aussi ils acquittaient cette redevance en nature : Et a quaqua domo, (ex qua) exit fumus, dabunt unam gallinam contra Natale et v ova contra Pascha. (Ibid. f° 59 v°)

Dans certaines localités, ce droit était connu sous le nom de fouage ; il était dû sur chaque cheminée, qu'on en fit usage ou non.

6. — Le corbillonnage était, pensons-nous, la charge imposée à chaque habitant de donner, à son tour de rôle, le pain bénit. Cette dénomination de corbillonnage, semble en effet se rattacher au mot corbillon, nom du panier dans lequel on a l'habitude de l'offrir.

Dans le diocèse de Coutances, l'on déniait la qualité de paroissien à ceux qui refusaient de donner le pain bénit. « Familiares dicti prioratus (de Sautbenon) non reputantur parrochiani curati dicte ecclesie, neque faciunt panem benedictum diebus dominicis, ut alii parrochiani, nec solvunt angarias seu onera ibidem imposita. » — (Cartul. de S.-Lô, p. 897).

7. — Le préage était un cens dû sur les prés ; sa quotité était vraisemblablement proportionnelle à la contenance du fonds. Il en est fait mention, sous le nom de praage , dans le Livre des jurés de S.-Ouen de Rouen, f° xx v° : « Item ledit Robert...  deit... iiij deniers et maale (maille, petite pièce de monnaie « valant la moitié d'un denier) deu praageet montonnage (droit sur les moutons) et demi boisseau de forment, etc » ; et sous la dénomination de pratagium, dans le Cartul. de l'abb. Ste Trinité de Caen, f° 21 : « In Carpichet (Carpiquet, commune des environs de Caen), habemus xij. vilanos et dimidium ; quisque eorum reddit ij. solidos de pratagio aut facit dimidiam acram prati. »

8. — Enfin, l’asnage (19) était probablement la redevance due par les meuniers qui reportaient sur des ânes, la farine à ceux à qui elle appartenait (20). Nous n'avons vu indiqué nulle part le chiffre de cette taxe.

Les droits de tavernage, masurage et fumage étaient acquittables en un seul terme , dont l'échéance était à la Saint-Michel (29 septembre).

Quelquefois l'évêque exemptait certains héritages des droits de ville et de Coutume ; mais ce n'était jamais gratuitement. Ainsi l'on trouve dans un acte du 22 septembre 1458 (f° 39), que Jehan Leudes, bourgeois de Lisieux, en achetant à l'évêque un terrain proche la cathédrale, se rédima des droits dont il s'agit, en lui constituant une rente de 10 sous et à condition que si l'acquéreur ou ses successeurs faisaient porter quelques denrées ou marchandises hors de la ville ou de la banlieue, ils en paieraient l'yessue (le droit de sortie). On voit encore dans un autre acte du 28 mars 1459 (f° 94), que Jehan le Roux, feron(féronnier), libéra des mêmes droits, une maison qu'il possédait dans la Grand-Rue, moyennant une rente de sept sous six deniers. Toutefois l'évêque mit pour condition à cette exemption, d'abord qu'elle ne serait acquise qu'aux « derrées et marchandises que le Roux, ses hoirs ou aians cause vendroient on distribueroient d'eulx mêmes ou dit hostel, sans fraude et sans estre facteurs ne marchans pour aultruy. » De plus, il stipula une clause ainsi conçue : « Et sy sera tenu ledit le Roux, ses hoirs ou aians cause, aller vendre et repparer les halles ou marchié de mondit seigneur des derrées ou marchandises dont ilz useront ou dit hostel, par quatre fois l'an. C'est assavoir à la fere des Saintes Cendres, à la Penthecouste, à la Saint Pierre et Saint Pol et à la Saint Pierre aux lians ; et à chacune d'icelles feres, paier estai et coustume, comme les autres marchans, selon les marchandises qu'ilz vendront et sans que ledit le Roux puisse estre contraint par mondit sgr ou ses fermiers d'aller estaller ses dictes derrées, s'il ne luy plest, à jour de marchié es halles. En quel cas qu'il yroit, il paieroit coustume et estai comme dessus.»


IX

Les droits de Coustume et les droits de ville n'étaient pas les seules charges qu'eussent à supporter les détenteurs de fonds situés dans le comté de Lisieux : il y avait encore les rentes perpétuelles.

Comme l'évêque et le Chapitre n'avaient que la jouissance des biens compris dans les menses épiscopale et capitulaire, quand il leur arrivait d'aliéner un immeuble qui en dépendait, ne pouvant recevoir le prix en capital de la vente, ils le convertissaient en une rente perpétuelle (21), qu'ils transmettaient à leurs successeurs.
 
Presque tous les héritages étaient grevés de ces rentes. Il n'était pas rare que d'autres vinssent s'y ajouter : c'étaient, par exemple, celles que les possesseurs des fonds fieffés, avaient dû constituer dans le but de se procurer l'argent nécessaire pour faire élever des constructions sur ces fonds, ce qui était parfois une condition de la vente ( 22 ) .

Ces diverses rentes, ajoutées aux redevances féodales, représentaient, en temps prospères, pour la plupart d'entre eux, une charge assez lourde. Mais, à la suite de nos guerres avec l'Angleterre, des dévastations et des pillages qui en furent la triste conséquence, cette charge finit par devenir tellement onéreuse, que beaucoup de propriétaires se virent dans la nécessité de demander à l'évêque de les exonérer d'une partie des rentes qu'ils lui devaient.

D’autres, sans lui demander une réduction des redevances qu'ils ne pouvaient plus acquitter, même partiellement, cessèrent de cultiver leurs champs et laissèrent leurs maisons tomber en ruine. Leurs héritages, délaissés par leurs héritiers, furent appréhendés par l'évêque, à droit de déshérence.

Quelques-uns enfin quittèrent la contrée, laissant leurs biens à l'abandon.

Tous ces faits résultent d'un certain nombre d'actes du cartulaire de Thomas Bazin, que nous allons indiquer.

C'est ainsi, en premier lieu, que l'on voit Robin Surtouque et Jehan Cardine, propriétaires d'un pré de trois vergées, situé à Saint-Germain-de-Livet, et débiteurs, à ce titre, d'une rente seigneuriale de trente sous et deux chapons, alors qu'ils étaient sous le coup d'une éviction motivée par le non-paiement des arrérages de cette rente, exposer à l'évêque, « iceluy héritage... estre trop chargé de tant d'icelle rente que de plusieurs autres choses, se par mondit seigneur ne leur estoit faicte aucune relâche de partie d'iceulx trente soulz tournois de rente et deulx cappons. Pour la quelle relâche avoir, iceulx de Surtourque et Jehan Cardine, se feussent tournés devers mondit seigneur en luy remonstrant la grant charge en quoy ilz estoient à cause des rentes d'icelle pièce de terre en prey, et icelle estre subgecte et obligié tant envers luy que à aultres personnes. » Sur quoi, l'évêque consentit, par acte du 7 août 1456 (f° 80), à réduire sa rente de moitié.

De même, on voit, dans un acte du 3 février 1451 (f° 24), qu'un nommé Robin Heulte, créancier d'une rente de 35 sous et la façon d'un pâté par semaine, sur une maison rue des Boucheries, « tournée et venue en grant ruine, » ayant appartenu en dernier lieu à Jehan Baudouin et déjà grevée d'une rente seigneuriale de 60 sous, due à l'évêque, exposa à ce dernier que cette maison « ne pourroit pas porter sy grant charge et nombre de rente que celle de mondit seigneur et la sienne. » Il fut, en effet, rapporté à l'évêque par les officiers de sa maison, qu'il avait chargés de prendre des informations à ce sujet, « que la dicte maison estoit prees que au cheoir et venir en démolition...  et ne pouvoit l'en trouver qui icelle voulsit prendre ne recuillir, à la charge des dictes rentes, obstant que on en eust fait grant devoir et diligence. » Dans cette situation, l'évêque consentit à réduire à 35 sous, la rente de 60 sous, et, sous cette condition, elle fut acquise à Robin Gringues.

Un acte de fieffe du 9 juin 1449 (f° 43) constate encore ce qui suit. L'évêque de Lisieux était devenu propriétaire, par droit de déshérence, d'un jardin situé en la paroisse S. -Jacques, hors la Porte de Paris et longeant le chemin de la Croix S. Ursin. Ce jardin avait été fieffé antérieurement par Guillaume le Tousey, curé de Notre-Dame-de-Courson à Guillaume Viel, moyennant une rente de 12 sous, que celui-ci avait affectée depuis, par testament, à la fondation d'un obit en son église, pour lui et pour sa famille. Son successeur, Henry le Nouvel, informa l'évêque que « ce jardin feust tourné en ruyne et en non valloir, tant parce que aucune personne ne s'estoit, en ce regart voulu porter pour héritier dudit Viel, que parce que, à l'occasion de la guerre, les arbres fruit portans, qui estoient sur la dicte pièce de terre, avoient esté abatus, demolys et couppés, pour ce que l'en disoit qu'ilz pnvoient nuyre à la deffence... dudit Lisieux. » Comme, dans ces circonstances, le service de la rente avait cessé, il demandait à reprendre l'héritage, et il déclarait que, dans ce cas, il s'obligerait à continuer le service, non-seulement de cette rente, mais encore d'une rente seigneuriale de 8 sous, due à l'évêque lui-même. Cette offre fut agréée et sa réalisation devint l'objet de l'acte du 9 juin 1449 précité (23).

Assez souvent cependant il arrivait que l'évêque ne jugeait pas à propos de se remettre purement et simplement en possession d'un héritage abandonné par le propriétaire ou par ses héritiers.

Généralement il ordonnait alors que la vente en eût lieu aux enchères publiques, en imposant à l'adjudicataire le service des rentes affectées sur le fonds. C'est ainsi, par exemple, qu'un héritage situé sur la paroisse Saint-Désir, contenant 9 acres 38 perches, ayant en dernier lieu appartenu à un nommé le Cangeur, fut mis en vente aux assises de la Cour temporelle et adjugé à Guillaume du Bosc, à raison de six sous huit deniers de rente par acre, comme le constate un acte du 11 novembre 1453 (f° 111) ; dans lequel il est dit que ces héritages étaient « venus et escheuz en la main de mondit sgr et de ses prédécesseurs par deffault d'omme et parce que en temps passé aucune personne ne s'estoit en ce regart voullu porter pour heritier dudit le Cangeur, ne iceulx héritages recuillir à la charge des rentes de ce deubz, mais estoient iceulx héritages demourés en bois et buissons et ainxi comme du tout à non valloir. »


X

Diverses formalités, desquelles on trouve l'indication dans un acte du 4 mars 1421 (f° 52), étaient, dans ce cas, préalablement remplies. Il n'est peut-être pas sans intérêt de les faire connaître.

Lorsqu'on ignorait le domicile du propriétaire du fonds délaissé ou de ses représentants, le sergent de la Sénéchaussée se rendait à la maison qu'ils avaient habitée en dernier lieu. Là il appelait, par exploit préalable, un certain nombre de personnes choisies particulièrement parmi les voisins, et il les sommait de faire savoir aux intéressés, si ils les connaissaient, que ceux-ci étaient cités pour un jour qu'il indiquait, aux plaids de la Cour temporelle de l'évoque, à l'effet de payer à ce dernier les arrérages échus des rentes et redevances grevant l'héritage délaissé. Si, ce qui arrivait presque toujours, les voisins répondaient qu'il n'était pas à leur connaissance que les propriétaires de l'héritage habitassent la Normandie ou qu'ils l'eussent habitée depuis un an et un jour, il faisait pareille sommation, le dimanche suivant, à l'issue de la messe paroissiale à « grant quantité de bonnes gens, » comme le dit l'acte auquel ces détails de procédure sont empruntés ; et ceux-ci, le plus souvent, lui faisaient semblable réponse. Après quarante jours écoulés depuis la première sommation, si les intéressés faisaient défaut, douze hommes habitant la paroisse « et trouvés sans saon, » c'est-à-dire contre lesquels il n'existait aucun motif de suspicion (24), étaient cités, à la requête de l'évêque, devant la Cour temporelle, à l'effet de statuer, comme jurés, sur la demande intentée aux défaillants. Là ils prenaient connaissance de l'affaire et, après une délibération prise en secret, ils faisaient leur rapport au sénéchal. S'ils reconnaissaient le bien-fondé de la réclamation de l'évêque, celui-ci par son procureur, demandait à être renvoyé en possession de l'héritage abandonné, en ajoutant toutefois qu'il consentirait à le céder à un nouvel acheteur, qui prendrait à sa charge les rentes et les relevances échues et à échoir. Pendant un délai déterminé, tout acheteur pouvait se présenter, et, s'il était agréé par l'évêque, il devait, pour garantie de l'offre qu'il faisait, de reprendre aux conditions imposées, l'héritage délaissé, verser un « denier Dieu ». Cette offre toutefois n'était définitivement acceptée qu'autant qu'après trois publications faites à huit jours d'intervalle, le dimanche, et annonçant la mise en vente de l'héritage, aucun enchérisseur ne s'était présenté.

Les adjudications étaient faites en la salle des plaids de la Cour temporelle ou Cohue. L'on voit dans un acte du 12 juin 1436 (f° 94), qu'elles étaient aussi précédées de publications faites « à l'ouie de la parroesse... par trois dymenches tous continués au devant desdis plès, en la présence de grant foueson de bonnes gens dignes de foy, » Cet acte rend compte en outre, du mode de procéder à l'adjudication, dans les termes suivants :

« Ausquelz cris aucun ne aucune n'estoit venu... fors tant « seulement Robert Saffrey qui le dit bail avoit enchiery et mis à dix soulz de rente par an ; de quoy il avoit de rechief fait cry, en gêneral demandant à tous que s'il estoit aucun ou aucune qui plus voulsist donner, vensist avant et il y seroit ouy et receu selon la coustume. Au quel cry aucun et aucune n'estoit venu... Après lequel record ainsi fait nous feismes d'abondant crier à l'us de la cohue que s'il estoit aucun ou aucune qui ledit bail voulsist enchérir... il vensist avant...  Au quel cri se comparut le dit de la Porte qui le mist à unze soulz de rente par an. De quoy nous feismes faire semblablement les criés à l'us de la cohue, en nommant icelui bail par bous et par costés et le pris d'icelui. Ausquelz cris aucun ne aucune ne vint ni ne s'opposa pour contredire ledit bail ne icelui enchierir. Pourquoy icelui bail... demourra à tousjours« mais, affin de héritage, passé en décret au dit de la Porte, etc.»

Lorsqu'un héritage était vendu par adjudication, le sénéchal, comme on vient de le voir, ne se bornait pas à recevoir les enchères des personnes présentes : il faisait inviter à surenchérir celles qui se trouvaient en dehors et aux abords de la salle d'audience, par des criées « à l'us (la porte) de la Cohue. > Il faisait plus : pour couvrir encore sa responsabilité , il ne prononçait définitivement l'adjudication au profit du dernier enchérisseur qu'après avoir consulté à ce sujet les personnes notables présentes à l'audience, ainsi qu'on le verra plus loin.


XI

Nous avons vu que lorsqu'un bien, grevé de rentes épiscopales et délaissé par les propriétaires, était mis en vente aux enchères, l'adjudication était faite à la Cohue, en la présence et avec le concours de « douze hommes trouvés sans saon »

Il en était de même dans toutes les affaires litigieuses où l'évêque avait un intérêt quelconque, direct ou indirect. Ces douze jurés ou veours, présidés par le sénéchal, étaient alors les véritables juges du débat. Il était difficile, en effet, que, dans ce cas, le magistrat nommé par l'évêque et par cela même, placé sous sa dépendance, put régulièrement trancher seul le différend.

Les procès intentés par l'évêque aux habitants de la ville et de la banlieue avaient généralement pour cause le refus de paiement des rentes seigneuriales et des droits de ville.

Et d'abord, quant au rentes, l'on trouve, d'une part, dans une sentence du 7 janvier 1451 (f° 118), qu'une rente de deux sous était due à l'évêque par Thomas Hellouyn, comme détenteur d'un jardin, situé en la paroisse Saint-Désir, rue aux Becquée, aujourd'hui rue de la Barre, et que ce jardin ayant été vendu par Hellouyn aux chapelains du Petit Chœur de la cathédrale, ceux-ci, invités par l'évêque à se libérer de la rente, prétendirent qu'ils ne la lui devaient pas. De là procès. Les parties convinrent alors devant le sénéchal, qu'elles soumettraient le différend à douze hommes, passés sans saon (sans reproche) entre elles et qu'elles s'en rapporteraient à leur décision. Après avoir indiqué dans l'acte précité, les moyens invoqués de part et d'autre, le sénéchal enregistre en ces termes, l'appréciation des jurés : « Sur les quieux faiz actenduz de partie adverse, nous eussions fait jurer les dis veours cy dessus nommés, pour raporter vérité de ce qu'ilz en savoient ou creoient, et sur ce les envoiés conseillier et parler ensemble sur ledit cas. En retour du quel conseil, ilz distrent et raporterent tous acordablement et sans aucune division ou difficulté que, veuz les tiltres et drois de mondit sgr l'evesque et ses registres, qui leuz avoient esté en jugement, ilz creoient fermement que lesdis deulx soulz tournois de rente feussent deubz à mondit sgr l'evesque, par raison de sa dicte seigneurie sur les lieux veuz et monstrés ; et que mondit sgr l'evesque ou ses predecesseurs evesques audit lieu, eu avoient eu possession et poiement puis quarante ans, par pluseurs années, sur ledit héritage ou sur les tenans proprietairement d'icelui. Veu le quel rapport le procureur de mondit sgr ... requist et callenga avoir attaint à bonne cause, la dicte justice avoir esté faicte... et le dit héritage... estre et demouter à tous jours mès subget à mondit sgr l'evesque et à ses successeurs en poiement et faisan ce d'iceulx deulx soulz tournois de rente... Laquelle requeste lui fut accordée, etc. »

D'un autre côté, on voit encore dans une autre sentence du 3 décembre 1443 (f ° 115), qu'une rente de vingt sous tournois était due à l'évêque sur un héritage situé aussi en la paroisse Saint-Désir, dans la Grande-Rue, entre les deux ponts ; et que Binot Carrey, détenteur de l'immeuble et à qui la rente était réclamée, sans dénier la dette, appela en garantie Richart Baudry. Comme l'intérêt de l'évêque se trouvait engagé dans le débat, la question fut soumise à un jury de douze hommes, « presens en jugement et passés sans saon entre les parties ; » et, conformément à leur décision, Carrey fut condamné à servir la rente, sauf son recours contre Baudry.

En ce qui touche les droits de ville, l'on rencontre de même, dans le Cartulaire de Lisieux, un certain nombre de sentences du sénéchal, par les quelles ce magistrat entérine des décisions du jury de douze hommes et condamne divers bourgeois à payer les droits de masurage, de fumage, de tavernage, de fenestrage, etc., qui leur étaient réclamés par l'évêque et desquels ils refusaient de se libérer. Nous pouvons citer, entre autres, deux sentences, l'une du 21 juin 1451 (f° 45) et l'autre du 8 octobre 1453 (f° 28).


XII

Bien que le sénéchal et le sous-sénéchal, exerçassent seuls à Lisieux, au XVe siècle, la juridiction temporelle de l'évêque, ils avaient l'habitude de soumettre, à l'audience même, les questions  sur lesquelles ils étaient appelés à statuer, à l'appréciation d'anciens jurisconsultes, qui portaient le titre honorifique de Conseillers en Cour laie (25).

De plus, l'on voit souvent qu'avant de rendre une sentence, le sénéchal consulte les personnes notables présentes à l'audience (conseillers ou non conseillers) et qu'il appelle les sages assistants ou simplement les sages.

Ainsi l'on remarque d'abord une sentence d'adjudication du 10 décembre 1443 (f° 142), terminée de la manière suivante : « Nous, par l'advis et la deliberacion des conseilliers de mondit-sgr l'evesque et des sages assistens en la dite court, et de l'accord et consentement de vénérable personne maistre Pierre Pinguernon, receveur et mesnagier de monditseigneur et de Jehan le Monnier procureur général d'icelui sg  , passasmes et adjugeâmes, et, par la teneur de ces présentes, passons et adjugeons audit Ursin Morisset, etc. »

On trouve, d'un autre côté, dans une sentence du 12 décembre 1443 (f°50), qu'un nommé Perrin Henry, condamné à payer certaine somme qu'il devait à l'évêque, avait chargé Jehan Carrey de se présenter à sa place devant le sénéchal, pour obtenir de ce magistrat une prorogation de délai. La mission de Carrey est exposée en ces termes dans la sentence : « A quoy se présenta Jehan Carrey, disant que ledit Henry luy avoit, au jour d'ier, dit que sa dicte femme s'estoit acouchée d'un enffant dont elle gesoit de gesine et que, avesques la maladie d'enffantement, aultre maladie luy estoit sourvenue ; tellement que on n'y attendoit vie, et que par ce, il n'avoit peu faire le garnissement de l'argent dudit marchié, ne sy ne se povoit comparer au jour duy en ceste court. Et que ledit Henry l'avoit chargié de l'excuser en ceste dicte court pour les causes dessus dictes. »

Malgré l'opposition du procureur de l’évêque, le lieutenant du sous-sénéchal admit l'excuse du débiteur et statua à ce sujet, dans les termes qui suivent : « Surquoy nous eusmes l'avis des saiges estans en la dicte court, savoir se la dicte excusation estoit raisonnable ou non ; par les quieux nous eussions trouvé icelle excusation estre raisonnable, pourquoy nous differasrnes audit procureur sa requeste, jusques aux prouchains plès. »


XIII

Indépendamment des jurés appelés à statuer dans les litiges judiciaires intéressant l'évêque, il y avait encore à Lisieux d'autres jurés, dits Jurés de la ville. C'était probablement eux que l'évêque consultait dans toutes les questions d'administration proprement dite, notamment en ce qui touchait la voirie, le service des eaux, etc. On est du moins autorisé à le supposer, en lisant un acte du 13 juillet 1453 (f° 74), suivant lequel Jehan le Roux constitue une rente d'un chapon et d'une poule au profit de l'évêque, à raison de l'empiétement fait par lui sur la Grande-Rue, en faisant reconstruire sa maison ; et dans lequel il est dit que « pour laquelle cause les jurés de  la ville eussent esté fait venir pour veoir et visiter ledit ediffice, affin de le recuider ou autrement en ordonner et appoincter, selon raison, à leurs advis et consciences en raison, et que la chose le requiert. »


XIV

Le formalisme judiciaire et les qualifications en usage au moyen âge, offrent aussi quelques particularités qu'il peut être intéressant de signaler.

Nous nous occuperons en premier lieu des serments, prêtés comme garantie de l'exécution des actes volontaires. On les faisait de deux manières, tantôt en touchant la main du tabellion, tantôt en jurant sur les évangiles.

Le premier mode de serment est indiqué dans la formule suivante, qu'on lit à la fin d'un acte de vente du 18 novembre 1442 (f° 38) : « Promectant par la foy et serement de son corps pour ce corporellement baillé et touché en la main dudit tabellion, que luy ne ses diz frères ne aultres à leur droit, jamais rien ne demanderont, etc. »

Le second est constaté en ces termes, dans une fieffé du 1 er avril 1445 (Ibid. f° 56) : « Et sy jura aux saints evangilles de Dieu à non jamais venir ne faire venir contre la teneur de ses dictes présentes lectres. »

Les serments sur les évangiles étaient devenus tellement bannals et la cause de tant de parjures, que le concile tenu à Bordeaux en 1255, les interdit d'une manière absolue, depuis la Septuagésime jusqu'après l'octave de Pâques , depuis l'Avent jusqu'après l'octave de l'Epiphanie et les jours de jeune et des Rogations.

Nous devons à l'obligeance de M. L. de Neuville, l'indication d'un troisième mode de serment, qu'il a rencontré dans un acte du 8 janvier l452 (f° 15), et qui est ainsi formulée : « Tous les quieulx, sur ce jurés à dire et rapporter vérité ; c'est assavoir lesdis gens d'église, la main mise à la petrine (26), et les autres , sur leurs seremens et loyaultés, ont rapporté,  etc. »


XV

A l'égard des qualifications usitées au XVe siècle, voici celles que l'on rencontre dans le Cartulaire de Thomas Bazin.

Un cardinal est appelé « très révérend père en Dieu, monseigneur... » (22 avril 1442, f° 53) ;

L'évêque de Lisieux « révérend père en Dieu, monseigneur...   « evesque et comte de Lisieux » (8 janvier 1452 f° 15 et passim) ;

Un archidiacre, vicaire général, « vénérable et circunspecte personne, maistre... » (11 décembre 1518, f" 59) ;

Les membres du Chapitre, pris collectivement « les seigneurs du Chappitre » (27 décembre 1398, f° 48) et individuellement « vénérable personne et discrète, maistre... » (11 décembre 1453, f° 71) ou quelquefois simplement « maistre. » (15 mars 1454, f° 93) ;

Les chapelains de la cathédrale « vénérables personnes et  discrès messires. » (6 novembre 1450, f° 118) ;

Un curé « vénérable homme et discret missire » (11 juin 1452 f° 37) ou simplement « messire » (9 juin 1449, f° 27) ;

Le receveur et menagier de l'évêque « vénérable personne,  maistre... » (10 décembre 1443, f" 44) ;

Le receveur et le procureur de l'évêque « honnoré homme et sage. » (31 juillet 1459, f° 36) ;

Le receveur général du même « honnorable homme, maistre... » (11 décembre 1518, f° 59) ;

Un simple prêtre « messire » (4 mai 1435, f" 56), ou « maistre » (31 juillet 1459, f° 36), ou « monsr » (22 juillet 1452, f° 34) ;

Le sénéchal « honnorable homme pourveu et sage » (16 avril 1452, f° 114), ou « honnorable homme et sage. » (20 décembre 1456, f« 40) ;

Le sous-sénéchal est aussi qualifié, comme le sénéchal, de « honnorable homme pourveu et sage. » (28 novembre 1443, f° 50)

Gires le Corp, maitre-ès-arts et licencié en l'un et l'autre droit, est qualifié « vénérable homme et discret maistre.» (7 mars 1430, f° 35) ;

Pierre Moulin, qui est seulement maitre-ès-arts, reçoit aussi cette qualification. (9 septembre 1436, f° 46)

La qualification de « maistre » était appliquée aux licenciés et aux docteurs en droit civil ou en droit canon, en médecine, etc.

L'on donnait le titre de demoiselle aux femmes mariées, appartenant à la noblesse, quelle que fût la qualité de leurs maris. C'est ainsi qu'on trouve une série d'actes, f s 48, 49 et 50, dans lesquels intervient « demoiselle Marie Baudry, femme de Pierre Henry, escuier. » Cette dame était noble, en effet, comme fille de Richard Baudry, écuyer, seigneur de Piencourt. Dans le principe, ce titre ne pouvait être porté que par les filles et les femmes nées de parents appartenant à la haute noblesse ; on le contestait à celles qui appartenaient à la noblesse inférieure. Comme il fut même usurpé par des femmes qui n'étaient pas nobles (27), la noblesse demanda aux Etats généraux d'Orléans, en 1560, qu'il fût défendu à tout anobli, jusqu'à la quatrième génération, de porter vêtements de velours ou aucun ornement d'or à son chapeau, ainsi qu'à sa femme de s'intitulerdamoiselle ou demoiselle, ni de porter robe de velours ou bordure d'or à son chaperon.


XVI

Quelques indications nous restent à donner touchant divers lieux de la ville et de sa banlieue, au XVe siècle.

L'ile Saint-Ursin se trouvait au sud de la ville, sur la paroisse Saint-Désir. Nous pensons qu'elle avait pour limites, à l'ouest, la rivière de Touque, au nord, le canal de décharge, et au sud, le ruisseau Graindin. C'était là plutôt une presqu'île qu'une île, car, à l'est, l'on ne voit aucun cours d'eau pouvant former le quatrième coté, à moins que ce ne soit la rivière d'Orbec ; et encore, dans ce cas, ne pourrait-on arriver à former une île complète, puisque cette rivière ne communique pas avec le ruisseau Graindin. En admettant que vers l'est, un cours d'eau ait dû, il y a plusieurs siècles, relier le canal de décharge au ruisseau Graindin, l'on doit supposer qu'il se trouvait à l'ouest de la rue d'Alençon et de la route de Livarot.

L'ile Saint-Ursin comprenait ainsi les quartiers de Lisieux et de la commune Saint-Jacques, connus aujourd'hui sous les noms de Prairie Fleuriot et de Prairie Gaudien.

Si l'on ne peut affirmer que l'ile eût exactement les limites qui viennent d'être indiquées, l'on peut dire au moins avec certitude, qu'elle avait l'une de ses extrémités, celle vers l'ouest, au confluent de la Touque et du canal de décharge (28). La preuve de ce fait, se rencontre dans une sentence du sous-sénéchal de Lisieux, en date du 7 janvier 1451 (f° 118), où il est question d'un jardin, dont les abornements sont ainsi indiqués : « Jouxte d'un costé au cours de la rivière de Touque et d'autre costé à une sente ou voie tendant de la rue aux Becquès (aujourd'hui rue de la Barre), à l'ille Saint Ursin ; aboutaut d'un bout au dit ylle... et d'autre bout à la dicte rue aux Becquès. » — Si, comme il parait probable, le sentier dont il vient d'être parlé, longeait le fossé des fortifications de la ville, le jardin, objet de la désignation qui précède, devait occuper tout l'espace aujourd'hui compris entre le boulevard Sainte-Anne et la rivière, des deux côtés ; la rue de la Barre et le canal, des deux bouts.

Au XVIIe siècle, le territoire qui nous occupe, devait avoir perdu son importance primitive et il ne s'appelait plus que le Prey S. Ursin, comme l'indique une note de cette époque, ajoutée à une attournée (procuration) du novembre 1450 (f° 118).


XVII

Le lit primitif de la rivière de Touque, au nord de la ville, se trouvait vers le milieu de l'herbage dit le Grand-Jardin. Au commencement du XVe siècle, on le reporta à l'ouest de cet herbage, au bas du coteau, en ouvrant un nouveau cours à la rivière, à l'endroit du Boulevard des Bains où elle s'éloigne de ce boulevard, pour traverser, un peu plus bas, la rue de la Sous-Préfecture et se diriger vers l'ouest, par un brusque détour, à cinquante mètres environ au nord du pont qui traverse cette rue.

Autrefois, longeant dans toute son étendue la ligne des fortifications comprise entre la Porte de Caen et la Porte de la Chaussée, la Touque arrivait à la rue de la Chaussée, traversait cette rue, à peu de distance au nord de la Porte de la Chaussée, et, entrant dans l'herbage du Grand-Jardin, se dirigeait vers le centre de la vallée entre la rue Basse-Navarin et la rue Sainte-Marie. Dans la région est de cette dernière rue, en creusant les fondations de deux maisons, on a rencontré l'ancien lit de la rivière.

Dans un acte du 15 mars 1454 (f° 93), contenant fieffe d'un terrain situé à l'encoignure du Boulevard des Bains et de la rue de la Chaussée, l'on voit que ce terrain était alors traversé par l'ancien lit de la Touque. La désignation de l'héritage vendu y est en effet ainsi donnée : « Une place vuide... séante en la parroesse Saint Germain de Lisieux, en la rue de la Cauchie,  avec l'ancien cours de la rivière de la Touque, en tant qu'il « y en a au droit de la dicte place et héritage... Icelle place jouxte,  d'un costé, une autre place ou jardin appartenant aux chappelains de la chappelle de la Magdalene fondée en l'église de Lisieux ; d'autre costé, le chemin ou allée des fossés de la ville ; d'un bout, à l'eritage dudit Pymont... et d'autre bout, à la rue de la Cauchie. »

L'on peut encore noter les indications que renferme à ce sujet une autre fieffe du 16 février 1454 (f° 76), par laquelle l'évêque vend à Gervais Toustain « cinq acres vergée et demie de terre, en trois pièces... nommées le Fief au Gros, assis en la dicte parroesse Saint Germain de Lisieux. La première pièce jouxte, d'un costé, l'ancien cours de la rivière de Touque ; d'autre costé, la rue Gauthier Marie ; d'un bout, le nouveau cours de la dicte rivière et d'autre bout, la rue à la Prevosté. La seconde pièce jouxte d'un costé, ledit nouvel cours de la dicte rivière ; d'autre costé, l'ancien cours d'icelle ; d'un bout, la dicte rue Gauthier Marie et d'autre bout, Jehan Le Gros. La tierce jouxte, d'un costé, la dicte neufve rivière, etc. »

Il y a lieu de penser que le changement apporté au cours de la Touque, aux portes de la ville, s'étendit dans la vallée, jusqu'au territoire de la commune d'Ouillie-le-Vicomte, car l'on trouve dans divers contrats et entre autres, dans une fieffedu 24 février 1454 (f° 131) et dans une cession du 10 mai 1455 (f° 135), que les héritages vendus par ces actes, ont pour abornement « la neufve rivière. »


XVIII

L'évêque Thomas Bazin possédait en la paroisse Saint-Désir, proche le chemin tendant de Lisieux à Manerbe, dit le chemin de la Cavée, et à côté d'un bois qu'il avait là, connu encore aujourd'hui sous le nom de Bois l’Evêque, une propriété nommée « la Grande Couture de la Tuillerie de monseigneur. » (Acte du 23 janvier 1455, f° 114).

Cette propriété, qui contenait « dix acres trois vergiés et quatorze perques, non comprins certain cornet (coin, pointe) de terre estant au bout... contenant trois vergiés ou environ, » avait été affermée à Jehan Levesque, moyennant la prestation de six milliers de tuiles. (Acte du 13 juin 1456, f° 113).

Thomas Bazin la vendit au fermier, avec une autre pièce voisine, d'à peu près même contenance, située sur les paroisses St-Desir et Ouillie-le-Vicomte, moyennant une rente perpétuelle de « quatre milliers et demy de tuille, neuf festiers et vingt sept corniers , le tout bon et souffisant , loyal et marchant, du moulle accoustumé d'icelle tieullerie. » Cette vente fut l'objet d'un contrat de fieffe, en date du 17 février 1459 (f° 116), par lequel il fut convenu, d'une part, que l'évêque se réservait la faculté d'établir une autre tuilerie où bon lui semblerait, et, d'autre part, que la propriété ne pourrait jamais être morcelée soit par vente soit par partage et qu'elle ne pourrait être hypothéquée. Cette double interdiction avait pour but d'empêcher que le privilège appartenant à l'évêque sur la propriété, à raison de sa rente, ne -vint à péricliter.

La prestation de tuiles dont on vient de parler, n'était pas la seule qui fût due à l'évêque : on voit dans l'acte du 13 juin 1456 cité plus haut, que des nommés Farain père et fils, détenteurs d'un fonds contenant treize acres, qu'ils avaient acquis de lui moyennant une rente foncière de quatre livres, furent autorisés par Thomas Bazin à y faire construire un four à tuiles , « au quel four, dit cet acte, ilz pourront faire et cuire de la tuille jusques à tel temps qu'il leur plaira, sans contredit de mondit sgr, par en poiant et livrant ou dit four à mondit sgr ung millier de tuille par chacun an. » C'était une compensatien du risque que faisait courir à l'évêque l'amoindrissement de son gage, résultant de l'établissement d'une tuilerie sur le fonds, déjà affecté à sa rente de quatre livres.


XIX

Plusieurs maisons de la ville appartenaient à des établissements religieux du voisinage et à des ecclésiastiques de diverses parties du diocèse.

Ainsi l'abbaye du Val-Richer, qui dépendait du diocèse de Bayeux, possédait une maison qui confinait, d'un bout, à la Grande-Rue et d'autre bout, à la rue du Bouteiller.

L'évêque, ayant prétendu que les moines du Val-Richer ne pouvaient détenir dans le comté de Lisieux, une propriété exempte de ses droits seigneuriaux, sans justifier comment ils en étaient devenus acquéreurs, réclama des locataires de leur maison, le paiement à son profit, des loyers qu'ils devaient. L'abbé du Val-Richer adressa à cette occasion, à Thomas Bazin une demande, suivie d'une reconnaissance, que l'on trouve formulées de la manière suivante, dans un acte du 14 mars 1451
(f° 82) :

« Pourquoy nous abbé dessus dit, feusseons tournés devers mondit sgr l'evesque et conte, suppliant qu'il luy pleust consentir l'amortissement de la dicte place et maison, et d'icelle nous lesser jouir comme ses prédécesseurs avoient fait ou temps passé. Et sur ce mondit sgr l'evesque et conte, en faveur de nostre dicte église et abbaie, considérant qu'elle est assise en plat pais, village et que c'est la plus prochaine ville où nous puissons avoir refuge que la dicte ville de Lisieux, eust esté d'acord et nous eust octroié l'appointement qui ensuit : Savoir faisons, nous abbé et couvent dessusdiz, tous d'une mesme vollonté et consentement, pour ce que mondit sgr l'evesque et conte nous a octroié, accordé et consentu, en la faveur de nostre dicte église, en tant qu'il le peult de droit, que nous et nos successeurs tenons, possédons et jouisseons de la dicte place, masure et maison, le temps advenir, comme tenu en sa haulte justice soit neument ou par moien et subgecte en sa dicte justice, court et juridicion, en tous exploiz justiciaires, comme elle estoit ou paravant de nostre dicte acquisition. Sommes et serons, nous et nos successeurs, pour recongnoissance de seignourie et pour les drois de ville, faisances et autres deubz et devoirs seigneuriaux, qui de la dicte place et maison pourroient ou devroient appartenir à ladicte conté et eveschié, tenus faire, rendre et poier à mondit sgr l'evesque et conte et ses successeurs, deulx soulz tournois de rente au terme Saint Michiel et ung chappon, chacun an, au terme de Noël, etc. »

De même, on voit, dans un acte du 8 octobre 1457 (f° 58), qu'un jardin situé entre la rue du Bailly (aujourd'hui rue de la Paix) et les fortifications de la ville, avait pour abornement, d'un côté, une maison « appartenant aux religieux, abbé et « couvent de Cormeille. » Dans sa Statistique monumentale de l’arrondissement de Lisieux, p. 271, M. de Caumont parle d'une maison appartenant à la famille de Semilly, située rue de la Paix, et qui, à la fin du XVIIe siècle, était encore connue sous le nom de Manoir de Cormeilles. Cette maison, que notre savant archéologue a vainement cherché à retrouver dans la rue de la Paix, est très-probablement celle mentionnée dans l'acte de 1457, cité plus haut.

Enfin l'on trouve encore dans le Cartulaire de Thomas Bazin, que les curés de Saint-Victor-de-Chrétienville, de Notre-Dame-de-Courson et de Goupillères, possédaient, soit privativement, soit comme dépendance de leurs bénéfices, savoir : le premier, deux maisons situées entre le mur des fortifications et la rue qui passait derrière le cimetière de l'église Saint-Jacques, qu'on appelait à la fin du XVIIIe siècle, la rue du Mouton-Blanc (Acte du 11 janvier 1552, f° 37) ; — le second, une place, masure « ou gardin... séant hors la Porte de Paris » (Acte du 28 février 1454, f° 57) — et le troisième, « certaines places, maisons et masures, assises en la rue de la petite coulture. » (Acte du 11
décembre 1453, f° 71.)


XX

La plupart des fontaines dont Lisieux est pourvu, durent être établies vers le XIVe siècle ; l'on sait qu'elles sont alimentées par des sources existant sur le versant des coteaux qui dominent la ville à l'est, au lieu-dit les Rouges-Fontaines et au village de Cavaudon.

Nous allons voir qu'il y en avait au moins une, dès le commencement du XIVe siècle ; elle était établie rue au Char. L'eau y arrivait de la source des Rouges-Fontaines. Quant à celle fournie par le ruisseau de Cavaudon, elle ne dut être utilisée en ville, que vers le milieu du siècle suivant, après l'acquisition que l'évêque Thomas Bazin fit du domaine de Cavaudon, suivant acte du 28 mai 1451 (f° 22).

Voici celles dont il est fait mention dans le Cartulaire.

1. Fontaine de la ville.

Cette fontaine se trouvait rue Cadoc, aujourd'hui rue au Char ; on lit en effet dans l'acte d'échange déjà cité, du 21 juillet 1321 (f° 17), l'indication suivante : « In domo Guillermi de Fonte,  juxta fontem civitatis. » Or il résulte du même acte que la maison de Guillaume de la Fontaine, voisine de la fontaine de la cité, était contiguë à l'héritage de Guillaume Baston, le quel était situé rue Cadoc : « In domo magistri Guillermi Baston in vico Cadoc, juxta domum seu plateam Guillermi de Fonte. »

2. Fontaine de la Cohue.

Elle était érigée en face de l'allée de la Ronce et de la porte principale du manoir épiscopal.

Dans un acte de fieffe du 30 mars 1412 (f° 78), à la suite de la désignation de l'immeuble vendu, le quel était borné notamment par « la saillie monseigneur de Lisieux » (29) et par « certaine venelle estant auprès de la Cohue » (30), l'on trouve ce qui suit : « Sauf que l'alée qui vient de la maison ancienne qui fut feu Pierres du Boulay, en venant icelle saillie, au droit de la fontaine, de l'estente et ediffice, etc. »

Il y a quinze ans seulement que cette fontaine a été démolie ; elle a été remplacée par une borne-fontaine, qui se trouve en face de la rue Pont-Mortain. Sa forme avait été modifiée bien des fois depuis le XVe siècle ; la date de sa dernière reconstruction remontait à la fin du XVII° siècle.

3. Fontaine du palais épiscopal.

L'usage de cette fontaine n'appartenait pas au public : placée à l'intérieur du manoir de l'évêque, elle était exclusivement réservée aux besoins de sa maison.

Dans un acte d'adjudication du 10 décembre 1443 (f° 34), il est dit que la propriété qui avait été mise en vente, était « une place vuide assise en la dicte parroesse (Saint-Jacques), entre la chappelle Notre Dame et les murs de la fortification de la ville de Lisieux... par laquelle place le cours de la fontaine qui va à l'ostel épiscopal de mondit sgr, passe parmy icelle place »

4. Fontaine du faubourg de la Porte de Paris.

Un contrat de fieffe du 2 février 1459 (f° 28), l'appelle « la « fontaine des faubours de la porte dicte de Paris. »

Ce doit être celle qui se trouve à l'angle de l'ancienne route de Paris et de la nouvelle ; sa reconstruction date de 1813.

5. Fontaine Saint-Pierre.

Cette fontaine est celle qui existe à l'extrémité sud de la rue du Paradis (autrefois Place Saint Pierre), à la jonction de cette rue avec la Grande-Rue.

Si, au XV e siècle, la dénomination de Fontaine Saint Pierre n'était point encore appliquée à cette fontaine, il est certain qu'au XVIIe siècle, elle était connue sous ce nom, comme l'établit une annotation ajoutée à cette époque, à un acte de vente du 27 décembre 1398 (f° 47) .


XXI

Nous avons vu qu'au xv° siècle, la rue au Char était appelée rue Cadoc. Il est probable toutefois que cette dénomination ne s'appliquait qu'à la partie de la rue où se trouvaient l'Officialité et la Fontaine de la ville, c'est-à-dire au bout vers le nord, et que l'autre partie, aboutissant à l'église Saint-Jacques, portait à cette époque le nom de rue de l'Ormerie. Ce qui nous porte à le penser, c'est que l'on trouve dans un acte du 20 décembre 1456 (f° 40), que l’hôtel de la Rose était situé rue de l'Ormaerie. Cet acte, en effet, a pour objet « deulx. masures et deulx maisons joignantes ensemble... dont l'une d'icelles maisons est nommée l’ostel de la Rose, assises en la ville et bourgoisie de Lisieux, en la parroesse Saint Jaque, en la rue de l'Ormaerie. (31). »

Or il est de notoriété publique à Lisieux, que l'ancien hôtel de la Rose, aujourd'hui démoli, occupait l'emplacement de l'hôtel pour voyageurs, situé rue au Char, désigné sous le nom d'Hotel de Normandie, que beaucoup de personnes appellent encore actuellement Hôtel la Rose. Le soubassement en pierres de taille de cet hôtel, paraît être celui de l'ancien Hôtel de la Rose et remonter au XIIIe siècle.

Le nom moderne de rue au Char est une corruption de l'une des anciennes dénominations de cette rue, qui en effet a été appelée au XVII siècle, rue au Chat, comme l'établit l'annotation mise à cette époque sur un acte du 13 juillet 1445 (f° 47) et de laquelle il résulte que cette rue portait alors les noms de rue au Chat ou de rue Cadot. Une autre annotation, du même temps, mise sur un acte de fieffe du 11 février 1292 (f° 40), relatif au Manoir de la Licorne, situé rue au Char, en face des bureaux du télégraphe, est ainsi conçu : « Fieffe de la maison de la Licorne rue au chat, par Jehan le Vicomte seigneur. »

C'est donc à tort, selon nous, que M. Louis Dubois a écrit dans son Histoire de Lisieux, II, 316 : « La rue au Char tire son nom de l'enseigne d'une ancienne auberge qui depuis long« temps a disparu et qui n'avait rien de commun avec l'hôtel de la Rose, établi il y a 40 ans environ dans la maison du chanoine de la Varende, vendue comme bien d'émigré, »

Dans sa Notice sur les rues de Lisieux, p. 6, M. Dingremont dit que cette rue, appelée d'abord rue Cadoc, porta depuis le nom de rue au Chapt. Chapt était, dit-il, le nom de l'un de ses notables habitants en 1492 ; mais il n'indique, à l'appui de cette assertion, aucun document ; il ajoute qu'en 1775, lorsqu'on fit le recensement des habitants pour le logement des militaires, elle portait le nom de rue au Chat.

Au moyen âge, la rue formant l'artère principale de la ville, était désignée, dans toute son étendue, sous le nom qu'elle porte encore aujourd'hui, celui de Grande rue. La dénomination de rue Etroite, donnée à la partie de cette rue s'étendant de la rue des Boucheries à la place Saint-Pierre, dénomination qui subsistait encore au commencement de ce siècle, ne remonte guères au-delà du XVI e ou du XVIIe siècles.

Un acte du 9 septembre 1436 (f° 46), suivant lequel des héritiers Moulin fieffent à Pierre le Maignen et à Pierre Gravoys, bourgeois de Lisieux « deulx maisons... lesquelles sont joignantes l'une de l'autre... assises en la dicte parroesse de Saint Jaque en la grant rue, » porte en effet la note suivante, ajoutée à l'acte, au XVIIe siècle : « Pour deux maisons rue Estroicte. » Ce qui prouve bien qu'à cette époque la Grande-Rue, au moins quant à la partie qui vient d'être déterminée, avait échangé son nom primitif contre celui de rue Etroite.

A ses deux extrémités, vers la Porte de Paris et vers celle de Caen, comme au milieu, elle conservait ce nom. Ainsi, d'une part, dans une sentence du 8 octobre 1453 (f° 28), il est question « d'ung manoir... assis en la bourgoisie de Lisieux, en la parroesse de Saint Jaque, auprès de la Porte de Paris ; jouxte d'un costé aux murs de la fortiffication de la dicte ville, d'autre costé à Guillemot du Manoir, d'un bout au doyen de Lisieux et d'autre bout au pavement de la grant rue dudit Lisieux. » — D'autre part, on trouve dans un acte du 14 mars 1451 (f° 84), que l'immeuble auquel cet acte se rapporte était une « maison assise en la parroesse Saint Germain de Lisieux... jouxte d'un bout la grant rue et pavement, d'autre bout la rue au Boutellier. »

Le nom de Grande Rue était même donné à cette voie, dans une partie de son prolongement au-delà de l'enceinte fortifiée, c'est-à-dire en dehors de la ville proprement dite : c'est ce qui résulte d'une sentence du 3 décembre 1453 (f° 115), relative à « plusieurs maisons tenans et joignans ensemble... le tout assis eu territore et haulte justice de mondit seigneur l'evesque, en la parroesse de Saint Désir dudit Lisieux, entre les deulx pons ; jouxte d'un costé la voie ou sente par où l'en va du Bourg l'Abbesse aux bayes ou esseaulx dudit moulin, d'autre costé à Guillaume le Mareschal, d'un bout à l'eau des dictes bayes et d'autre bout au pavement de la grant rue (aujourd'hui rue de Caen). »


XXII.

En parlant plus haut du changement du cours de la Touque, nous avons rencontré l'indication de deux rues : la rue Gautier Marie et la rue de la Prevosté. Nous ne saurions dire quelles sont celles des rues de la ville auxquelles ces noms s'appliquaient au XVe siècle, si tant est toutefois qu'elles subsistent encore. Il est certain cependant que ces rues existaient à cette époque, au nord de la Porte de la Chaussée, soit dans le quartier dit de la Chaussée, soit dans celui désigné sous le nom du Bouloir. Nous avions pensé d'abord que la rue Gautier Marie devait être celle qui formait le prolongement de la me de la Chaussée, au-delà des fortifications et que la rue de la Prévôté se trouvait à peu près dans la direction de celle désignée sous le nom de rue Labbey, ouverte il y a environ trente ans ; mais le rapprochement que nous avons fait de plusieurs désignations d'immeubles avoisinant ces rues, relevées dans le Cartulaire de Lisieux, nous porte à penser que ce ne doit être ni l'une ni l'autre. Nous espérons que des chercheurs plus heureux élucideront cette question.

Nous n'avons pu déterminer non plus la situation du Cloître du Chapitre (Echange de 1321 précité, f° 21) : à moins que ce ne soit le même que celui désigné sous le nom de Cloître Saint Pierre, dans l'acte du 9 septembre 1436, mentionné plus haut p. 13, hypothèse d'autant plus admissible que ce cloître situé entre la cathédrale et le côté septentrional de la rue Etroite, aujourd'hui Grande-Rue, devait se trouver contigu à la salle capitulaire.

Enfin il y avait aussi sur le territoire d'Ouillie-le-Vicomte, une chapelle appartenant au curé de Saint - Germain (Fieffe du 17 octobre 1455, f° 76), dont nous ignorons l'emplacement. Peut-être est-ce celle dont les ruines se sont rencontrées il y a soixante ans, sur la propriété que M. Groult possède en cette commune.

Henri MOISY.


NOTES :
(1) Cependant, le Chapitre éleva maintes fois la prétention d'avoir seul la juridiction spirituelle dans la cathédrale et sur les chanoines, et de son côté aussi le doyen du Chapitre soutint souvent que pareille juridiction lui appartenait dans la ville et dans la banlieue de Lisieux, et ce en vertu d'une bulle d’exemption, dont l'évêque contestait l'existence.  Delà des luttes qui se prolongèrent durant plusieurs siècles, avec des alternatives diverses.
(2) Le Chapitre avait aussi son officialité, pour juger les causes ecclésiastiques de la ville et de la banlieue. Cette autre Cour spirituelle siégeait probablement en la salle capitulaire.
(3) On le trouve indique sous cette dénomination dans plusieurs titres de l'époque, notamment dans un acte de fieffé du 22 septembre 1458 (f° 39), cité plus bas.  Au XVIIe siècle, ce tribunal s'appelait simplement la Juridiction.  Voir au cartulaire, une note remontant à cette époque, ajoutée à un acte de fieffe du 25 mars 1446 (f° 87).
(4) A cette époque, comme nous allons le voir plus bas, la cathédrale et le palais épiscopal étaient entourés de fortifications, indépendantes de celles de la ville, alors inachevées. L'entrée de cette enceinte fortifiée, dont il est ici question, devait se trouver au sud du parvis de l'église.
(5) Rue des Boucheries notamment, il y avait « les porches de la « Paticerie » V. acte du 11 mai 1453 (f°25).
(6) « Ou quel chastel le peuple de la ville de Lisieux et d'environ a acoustumé soy retraire et avoir son refuge en cas de nécessité et « péril. » — Lett. pat. de Charles VI, roi de France, du 9 oct. 1400 (Cartul. de Lis. f° 6).
(7) En ce moment (Mars 1874), en faisant le nivellement des terrains qui se trouvent en face ce côté de la cathédrale, à quinze mètres de cet édifice et à cinq mètres vers l'est de l'emplacement de la sacristie démolie il y a trois ans, on retrouve les fondations de l'ancien mur du manoir épiscopal.
(8) L'original de cet intéressant document historique se trouve aux Archives de la ville de Lisieux.
(9) Peut-être ces places étaient-elles celles qu'on désigne sous le nom de Places à la Coudraie, dans un acte du 31 août 1399 (f° 30), contenant la fieffe de « une maison avecques le fons de l'eritage et le gardin derrière... assis en ladicte parroesse (Saint Jacques)... aboute d'un bout à la rue de la Boucherie et d'autre bout aux Places à la Coudraie. »
(10) In domo qui fuit Durandi Baudri, juxta domum qui fuit Guillermi de Bosco.
(11)In domo heredum Durandi Baudri, sito ante curiam officiaient lexoviensem.
(12) In manerio et curia officiali, in vico Cadoc.
(13) Ce mur a été démoli à la fin du siècle dernier ; il maintenait à un niveau supérieur les terres du cimetière, non-seulement à l'ouest du côté de la place, mais encore au sud du côté d'une rue dite la rue du Cuir Verd, dont l'emplacement est occupé aujourd'hui par une partie de la place du Marché-aux-Bœufs ; et à l'est, du côté d'une autre rue, dite la rue du Mouton Blanc. — A l'angle sud-ouest de ce mur, au bas de la rue du Cuir Verd, était pratiqué un escalier par lequel on montait au cimetière.
(14) En 1785, la rue allant de la rue aux Fèvres à ce marché, portait le nom de rue du Tour du Crochet.
(15) Voir notamment actes du 7 mars 1387 (f° 94); du 30 mars 1412 (f° 79) ; du 7 avril 1421 (f° 80) ; du 27 novembre 1442 (f° 73) ; du 13 juillet 1453 (f° 75) ; du 13 janvier 1458 (f°71) ; du 22 septembre 1458 (f° 39).
(16) V. sentence du 16 mars 1453 (f° 95).
(17) V. constitution de rente du 28 mars 1457 (f °94).
(18) M. de Formeville écrit par erreur mesurage (Histoire de l'Evéché-Comté de Lisieux,I, dc).
(19) M. de Formeville écrit à tort alnage. (Hist. de l'Ev.-Comtê de Lis. I, dc.)
(20) Cet impôt doit être le même que celui que l’on désignait, dans l'Ile-de-France, sous le nom de asnerie. « Qua voce, dit Ducange (v° Asinitas), significatur prœstatio quœ pro farina vehenda solvebatur. »
(21) C'est ce que l'on appelait alors fieffer. Ce mode de vente et sa dénomination (fieffe) sont encore fréquemment usités en Normandie, particulièrement dans le Lieuvin. Le chiffre auquel s'élevaient ces rentes peut paraître aujourd'hui fort minime ; cependant, pour l'époque, elles constituaient une dette notable. Un acte d'échange du 21 juillet 1321, (f° 16) renferme la nomenclature de nombreuses rentes dues au Chapitre dans le comté de Lisieux. Celles de ces rentes (rentes en argent), affectées sur les héritages situés paroisse Saint-Jacques, sont au nombre de quarante, donnant une moyenne de 32 sous 6 deniers, pour chacune. Les deux plus fortes sont, l'une de sept livres et l'autre de six, et les deux plus faibles sont de deux sous six deniers chacune, équivalant à ce que l'on appelait encore il y a vingt ans, en Normandie, six-blancs. Outre les rentes en argent, on constituait aussi quelquefois des redevances annuelles en nature, par exemple, en guelines (poules) (Fieffe du 7 octobre 1453, f° 111) ; en cappons, œfs, fourment (chapons, œufs, froment), avoine (Id. du 28 nov. 1453, f°131) ; en oies (Echange du 21 juillet 1321, f° 18); en poivre (Fieffe du 27 décembre 1398, f° 48). Un  autre acte de fieffe du 28 mars 1448, (f° 89) renferme la constitution d'une rente d'une « demie aulne de drap vermeil, du prix de trente soulz tournois. » Deux autres enfin, cités plus bas, stipulent au profit des vendeurs, l'un, une rente d'un pâté par semaine et l'autre, la prestation annuelle d'une certaine quantité de tuiles.
(22) Ainsi, par exemple, en vendant à Anthoine de Castillon un terrain contenant 23 perches, situé à Lisieux, rue Cadoc, par l'acte déjà cité, du 18 février 1431 (f° 48), l'évêque Zanon de Castiglione obligea l'acquéreur à édifier sur ce terrain, une maison du prix de 150 livres tournois. De même, dans un acte du 4 décembre 1518 (f°60), contenant fieffe par Richard le Fèvre à Grégoire Myart, d'un jardin situé sur la paroisse Saint-Jacques, moyennant une rente de 4 livres, l'on rencontre la clause suivante : « Oultre se submist ledit Myart faire faire et ediffier sur ledit héritage, dedens troys ans du jour dhuy, une ou plusieurs maisons, du prix et valleur de trente livres tournois. »  Dans un autre acte du 27 mars 145G (f°75), il est encore stipulé ce qui suit : « Sur le quel tenement le dit preneur sera tenu et promist faire faire ediffice dedens trois ans du jour duy, jusques à la valleur de 25 livres tournois. »
(23) Il est à noter toutefois que l'évêque mit encore à son acquiescement une condition, exprimée en ces termes dans l'acte dont il s'agit : « Et sy feismes retenue de prendre à nostre plaisir et volenté, jusques au terme de sept ans à compter du jour duy, sur icelle pièce de terre, du sablon pour le fait du pavement de nostre dicte ville de Lisieux, seullement au lieu mains dommaigable du lieu, par en recompensant et desdommagant raisonnablement icelui preneur, ses hoirs ou ayans cause, par qui il appartendra et toutesfois que mestier en sera. »
(24) Saonner un témoin, c'était, dans l'ancien droit coutumier normand, le récuser ; de même, dire qu'un témoin était trouvé sans saon, c'était constater qu'il n'était pas récusable : « Et quant il l'en aura ouy leurs dits et mis eu escript, cil qui est en prison doit estre amené devant eux et lui doit on demander s'il en vout aucuns saonner  ; et se il dit sur aucun d'eux suffisant saon, chose que disent ceux qui sont ainsi saonnez, ne doit estre en rien contée ; mais si le saon n'est suffisant, ce qu'il dira sera receu avec les autres. » (Anc. coût, de Norm., ch. 68).
(25) Un acte de désistement reçu par le Masuyer, clerc tabellion de la sénéchaussée de Lisieux, le 20 mars 1454 (f° 81), a lieu « presens Jehan Vippart sous seneschal de Lisieux, Jehan Le Monnier et Jehan Carrey, conseillers en court laye, tesmoings. » La Cour laie ou laïque était la Cour temporelle, ainsi dénommée pour la distinguer de la cour ecclésiastique, appelée Cour spirituelle ou Officialité (V. plus haut).
(26) Le serment des ecclésiastiques ne se prêtait pas en effet en la même forme que celui des laïcs : ceux-ci juraient, le plus souvent, sur les évangiles ; quant aux premiers, ils juraient, la main sur la poitrine. C'est ainsi que dans la fameuse Bulle d'Or de Charles IV, empereur d'Allemagne, ch. II, on lit : « Principes electores ecclesiastici coram evangelio D. Joannis : In principio erat verbum, quod illic ante ipsos poni debebit, manus suas pectori cum reverentia superponant ; sœculares vero principes electores dictum evangelium corporaiter manibus suis tangunt, etc.» D'un autre côté, Math. Paris, parlant de l'engagement pris par Henri III, roi d'Angleterre, d'aller en pèlerinage à Jérusalem, s'exprime à ce sujet en ces termes : « Et, jurans hoc, apposuit manum suam  dexteram ad pectus, more sacerdotis, et posltea supra evangelia apposita, et osculatus est ea, more laici. » Historia major Angliae, anno 1253.
(27) C'était peut-être le cas dans lequel se trouvaient celles dont il est question en ce passage d'un acte du 9 septembre 1436 f u 46) : « Furent presens... maistre Pierre Moulin (le maître-ès-arts duquel il vient « d'être parle) pour luy et soy faisant fort de damoiselle Marguerite Moulin , sa seur, et Richart Le Greslé, escuier, pour en nom et soy faisant fort et establissant de damoiselle Jehanne Moulin , sa femme ; les quieux, etc. »
(28) A ce point se trouve, dans la prairie Fleuriot, une rue portant le nom de rue Saint-Ursin. Seulement nous pouvons affirmer, par des motifs tout personnels, que nous croyons inutile d'indiquer ici, que cette dénomination tout-à-fait moderne, n'a nullement eu pour origine la notion que l'on aurait pu avoir de l'existence en cet endroit, de l'ile St-Ursin.
(29) Nous avons déjà vu que l'on désignait ainsi, la sortie du manoir épiscopal.
(30) Il a été expliqué plus haut que cette venelle servait d'accès au manoir do la Ronce, et qu'aujourd'hui encore, elle est désignée sous le nom d'Allée de la Ronce.
(31) Il y avait aussi dans le Vieux Paris une rue de ce nom. Le commerce de l'ormerie comprenait les petits ustensiles en fer, boucles, mors, éperons, étriers, etc. (Crapelet, Proverbes et Dictons aux XIIIe et XIVe siècles, p. 163, à la note.) Il est arrivé pour le mot ormerie, comme pour un certain nombre d'autres mots, tels que lendemain, loriot, lierre, landier, etc., que l'article la, qui par l'élision de l'a devant ce mot, devait former l'ormerie, s'y est agglutiné et a fini par s'écrire lormerie, sans apostrophe he. Cette forme est reproduite en bas-latin du XIVe° siècle, précisément à propos de notre rue de l'Ormerie, dans l'acte d'échange, déjà cité, du 21 juillet 1321 (Cart. de Lis., f° 16), où elle est désignée sous les noms de Lormeria ou de Vicus Lormeriœ : « In domo Henrici Lisnel... sita in Lormeria... In domo Johannis Fergant in Lormeria.... In domo heredum Johannis Marcadé... in vico Lormeriœ. »

Chandeliers, potiers, lormerie,
Marcheanz de feronerie,
De seles, d'estriers, de poitraus,
De charretes et de borriaux,
Dit des Marcheanz.



[pp. 54-58]

MANUSCRITS AJOUTÉS AU FONDS DE LA SOCIÉTÉ DURANT L'ANNÉE 1874.

Les n° d'ordre, qui précèdent l'indication de chaque pièce, sont ceux donnés à chacune d'elles au moment de son classement dans les Archives.

45. — Mémoire sur Binot Paulmier et Jean Denis, par M. Charles Bréard, offert par l'auteur.
46. — Copie d'une transaction intervenue en 1565 entre le duc de Montpensier et les Usagers de la forêt de Toucques et divers extraits intéressants les droits du fief de Gonneville, donnée par le même.
47. — Table des fiefs des Vicomtés de Falaise et d'Orbec, donnée par M. le vicomte Louis de Neuville.
48. — Aveu rendu pour les terres dépendant de la seigneurie d'Espinay, située à Saint-Thomas de Toucques (1668), donné par M. Charles Bréard.
49. — Aveu rendu pour des maisons situées à Sainte-Catherine de Honfleur (1622), donné par le même.
50. — Notes généalogiques sur la famille Le Doyen d'Ablon et sur Mme Catherine le Jumel de Barneville, comtesse d'Aulnoy, auteur des Contes de Fées, données par le même.
51. — Catalogue de pièces sur les événements de la Révolution, faisant partie de la collection de M. de la Sicotière, donné par ce dernier.
52. — Extrait des Registres des collations de bénéfices de l'évêché de Lisieux (1524-1545), donné par M. Le Métayer des Planches.
53. — Vente par Jean Laché à Martin le Bouchier, de biens sis à Coquainvilliers, ayant appartenu à Constantin de Bouquetot seigneur dudit lieu. (Pièce achetée).
54. — Vingt sentences relatives à divers habitants de Coquainvilliers (de 1526 à 1581) (Pièces achetées).
55. — Vente par Collin Ferry à Jacques de Bouquetot sgr de Coquainvilliers, ler juin 1640 — et remise faite à Collin Ferry par Gaultier Cambremer (1er mai 1561 ). (Pièce achetée.)
56. — Sentence rendue par Guillaume Arthur, sgr d'Amayé, vicomte de Caen, relative au décret des biens de défunt Gabriel Tostain, escuyer, 13 décembre 1579. (Pièce achetée).
57. — Aveu rendu à Jean des Hayes sgr d'Ymes Allain et de Pierrefitte, d'Asnière, 14 juin 1611. (Pièce achetée).
58. — Aveu rendu à Jean de Serres, sgr de Coquainvilliers, 19 octobre 1634. (Pièce achetée).
59. — Aveu rendu à Henri de Saint-Pierre seigneur de Saint-Julien-sur-Calonne, Vassy, Mailloc, Grengues, etc., à cause du fief de Vassy, 17 juillet 1660. (Pièce achetée).
60. — Rôles de la taille de la capitation en la paroisse de Coquainvilliers pour l'année 1746. (Pièce achetée).
61. — Copie de la vente de la seigneurie de Malou par messire François de Montmorency, seigneur de Durieu (3 avril 1570), donnée par M. Alfred Réautey.
62. — Inventaire de documents pouvant servir à l'histoire des communes d'Appeville-Annebaut , Brionne , Calleville, Cormeilles, Equainville, Etreville, Fontaine-la-Louvet, Houlbec-Cocherel , Landepereuse , Lilletot , Morainville , Nassandres , Pont-Audemer, Saint-Maclou , Selles, Saint-Sulpice, Tourville et Valletot. — Cet inventaire comprend en outre l'indication de sept pièces concernant la famille Desperrois : le tout a été déposé par M. Alfred Reautey aux archives de la Société libre de l'Eure. Donné par ce dernier.
63. — Copie de la solennité faite par les F. F Prescheurs de Lisieux en l'octave de la Canonisation de Saint Louys de Bertrand, apôtre des Indes et de Sainte Rose de Sainte-Marie, 18 octobre 1671, donnée par M. E. Groult.
64. — Copie de la fondation d'un service dans l'église de Saint-André-d'Hébertot, par François de Nollent, seigneur de ce lieu, donnée par M. le vicomte Louis de Neuville.       
65. — Registre des minutes de Jacques Leroy et Guillaume Robinet, tabellions à Honfleur, du 2 avril 1567 au 21 décembre même année ; donné par M. Le Metayer des Planches. — Le parchemin servant de couverture à ce registre offre un certain intérêt.       
66. — Copie de l'Etat du fief et seigneurie d'011endon, donnée par M. E. Groult.       
67. — Liasse de six pièces relatives au fief de Criquebeuf, offerte par M. Le Metayer des Planches. — A cette liasse se trouve jointe la copie d'une de ces pièces, avec une note indicative sur les autres, par M. le vicomte Louis de Neuville.       
68. — Registre des déclarations de fiefs de la vicomté de Pont-Audemer, en 1540, manuscrit in-40 de 308 feuillets, offert par M. Le Metayer des Planches.       
69. — Extrait du décret de la terre de Reux (1641), manuscrit in-40 de 28 feuillets d'écriture, offert par le même.       
70. — Inventaire des titres de la terre de Reux, du 12 mai 1600, manuscrit in-4° de 117 feuillets d'écriture, offert par le même.

MANUSCRITS MIS EN DÉPÔT TEMPORAIRE AUX ARCHIVES DE LA SOCIÉTÉ PENDANT L'ANNÉE 1874.

1. — Livre d'heures du XIVe siècle, de 110 feuillets, dont les 34 premiers ont disparu ; communiqué par M. A. Fleuriot.       
2. — Lettre autographe de Mgr de La Ferronnays, évêque de Lisieux, à M. Vergé, receveur des Economats à Lisieux, communiquée par M. Ch. Besnou.       
3. — Expédition d'un jugement rendu à Beaumont-le-Roger, le 16 janvier 1675, communiquée par le même.       
4. — Copie authentique d'un procès-verbal de réception dans l'ordre des Prémontrés, d'un R, P. de Saint-François de l'ordre des Capucins (6 juillet 1686), communiquée par le même.
5. — Requête adressée à Mgr de Levignen, intendant de la Généralité d'Alençon, par Pierre Mérimée, de la paroisse de Saint-Aubin-sur Risle , élection de Bernay, le 13 mars 1749, communiquée par le même.
6. — Contrat de fieffe du 28 décembre 1456, consenti par l'abbé et les religieuses du Bec-Hellouin à un sieur Campion, du Mesnil-Simon, communiqué par le même.
7. — Lettre autographe de M. l'abbé Tyrel de Boismont, de l'Académie française, abbé de Grestain, communiquée par M. l'abbé Loir.
8. — Quatre Actes capitulaires, avec cachet aux armes du Chapitre de Lisieux, communiqués par le même,
9. — Registre manuscrit, intéressant la commune de Coquainvilliers, communiqué par le même.
10. — Manuscrit sur parchemin de 223 pages, relatif à l'état et distribution de deniers provenant de la vente et adjudication de diverses maisons et héritages, sis à Saint-André et Saint-Benoit-d'Hébertot, Fatouville, Honfleur et autres lieux, du 5 décembre 1651, communiqué par M. E. Groult.
11. — Registre des Actes des prises d'habit de la profession des religieuses Ursulines de la ville de Lisieux, depuis le 26 août 1764 jusqu'au 13 mai 1773, communiqué par M. l'abbé Loir.

PRINCIPAUX OUVRAGES IMPRIMÉS AJOUTÉS AU FONDS DE LA SOCIÉTÉ PENDANT L'ANNÉE 1874.

1. — Mémoire pour messire Louis-François Lecomte de Nonant, chevalier seigneur comte de Piercourt, contre messire Jean-François Lecomte de Nouant, chevalier seigneur marquis de Piercourt, donné par M. Alfred Reautey.                               
2. — Recherches sur le commerce et la fabrication des toiles de lin : Rouens, Fleurets, Blancards (1676-1789), par A. Montier. Pont-Audemer, 1874 ; offert par l'auteur.
3. — Essai historique, archéologique et statistique, sur le canton de Routot (Eure), par M. Canel. Paris, 1836; offert par l'auteur.
4. — Essai historique, archéologique et statistique, sur le canton de Monfort (Eure), par le même, Paris, 1836 ; offert par l'auteur,
5, — Notice sur la tour de Thevray (Eure), par M. Henry Quevilly, Evreux, 1874 ; offerte par l'auteur.
6. — Traité sur les Coutumes Anglo-Normandes, par Houard, 4 vol. in, 4., Rouen, 1776,
7. — Anciennes loix des François, par le même, 2 vol, in 4°, Rouen, 1779.
8. — Coutume de Normandie, expliquée par Pesnelle, 2 vol. in. 4°. Rouen, 1771.

PRINCIPAUX OUVRAGES IMPRIMÉS COMMUNIQUÉS TEMPORAIREMENT A LA SOCIÉTÉ PENDANT L'ANNÉE 1874.

1. — Volume de mémoires sur la ville de Lisieux et ses environs, communiqué par M. l'abbé Loir.
2. — Recueil de diverses pièces relatives à l'histoire de Lisieux, communiqué par M. Delarue.
3. — Grande et belle gravure, formant l'illustration d'une thèse latine de philosophie, soutenue par J.-F. Vellainville, de Lisieux (1746), communiquée par M. E. Groult.
4. —Ceremoniale lexoviense. Apud Jacobum, A. du Ronceray, episcopatus typographum, MDCCXLVII ; volume imprimé et relié avec luxe, aux armes de l'évêché, communiqué par M. l'abbé Loir.

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