Dans
les petits théâtres, où le matériel scénique est fatalement
réduit, il est de toute nécessité de posséder des décors susceptibles
de s’adapter aux différentes mises en scène du répertoire classique et
moderne si l’on ne veut pas choquer le bon sens et tomber dans de
risibles erreurs.
Comme avec de faibles ressources on ne peut pourvoir à toutes les
exigences, il faut que le décor appelé à de multiples emplois
satisfasse tout au moins à l’encadrement des œuvres dites du répertoire
et permette également de parer aux éventualités des nouveautés. Car
l’optique, au théâtre, est pour le moins aussi importante que
l’acoustique ; l’œil étant impressionné plus rapidement que l’oreille.
Dès le lever du rideau, avertir le spectateur, à l’aide du décor, de
l’ambiance du sujet, est un puissant facteur du succès.
Le décor qui vient d’être brossé au théâtre de Lisieux par M. Henri
Ottin répond à tous ces désiderata en ce sens – pour les intérieurs
modernes, bien entendu, car il est impossible de transformer le style
d’un décor – qu’il peut prendre différents aspects. D’abord, quatre
plantations distinctes : 1° de face en carré ; 2° de côté à pans coupés
; 3° de biais d’un côté ou d’un autre ; 4° de position oblique.
Ce qui permet déjà de donner un aspect pittoresque, vivant, plus
intéressant en un mot, que celui ordinairement en usage sur les petites
scènes, sempiternellement au point milieu,
en boîte carrée, comme
disent les gens de théâtre.
D’autre part, toutes ces plantations peuvent passer par les
dispositions suivantes : 1° fermé avec portes ; 2° avec fenêtres et
couloirs ; 3° baies ouvertes de côté avec fond de découverte laissant
apercevoir des appartements divers que l’imagination du spectateur peut
de la sorte compléter par la pensée ; 4° le fond ouvert à large baie
découvrant vestibule, grande galerie, fond de parc, de place ou
d’horizon ; 5° avec baie vitrée à caisson formant véranda, où peut se
dérouler des scènes d’arrière-plan, fréquentes dans les comédies
modernes.
A cette
malléabilité, il y a
encore
l’élasticité, si ces
mots scientifiques peuvent définir en l’occurrence les qualités d’une
œuvre conçue dans cet esprit de multiplicité d’emplois tout en
conservant son cachet artistique.
Elasticité, en effet,
puisqu’il peut se rétrécir ou s’étendre de un à trois plans,
c’est-à-dire du tiers au triple de sa surface initiale.
On conçoit aisément quels avantages le régisseur consciencieux ou le
metteur en scène habile peut tirer de cette combinaison lorsque, tel
est fort souvent le cas, l’habitué est appelé à revoir dans les pièces
les plus diverses, les mêmes décorations.