ROBERGE, : Concours de labourage, dans les cantons Est et Ouest de Caen, le 20 Avril 1835.- Caen : Imprimerie de F. Poisson, [1835].- 4 p. ; 21 cm.
Saisie du texte et relecture : O. Bogros pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (22.XII.2003) Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex -Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01 Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] obogros@ville-lisieux.fr http://www.bmlisieux.com/ Diffusion libre et gratuite (freeware) Orthographe et graphie conservées. Texte établi sur l'exemplaire de la médiathèque (BM Lisieux : nc). Concours de labourage, dans les cantons Est et Ouest de Caen, le 20 Avril 1835
par
M. Roberge
~~~~Un spectacle aussi nouveau qu'intéressant avait attiré sur le territoire de Caen une portion considérable de la population de la ville et des campagnes voisines. On voyait de toutes parts se diriger une foule nombreuse vers un champ situé sur le bord de la route départementale de Courseulles à Caen, et sur les limites du territoire de cette ville. Tous les chemins qui y conduisaient présentaient une, suite non interrompue de personnes de tout âge et de toute condition : un empressement extraordinaire, des physionomies sur lesquelles se peignaient l'attente et la curiosité, des carrosses, des cabriolets qui fendaient la foule cheminant à pied, annonçaient que ce qui allait se passer intéressait également, les hommes de toutes les classes. Que se préparait-il ? Etait-ce une fête, était-ce un spectacle qui arrachait ainsi, dès le matin, les uns à leurs plaisirs, les autres à leurs travaux, pour réunir tant d'individus différents, de goûts et d'habitudes, et, que l'inégalité des fortunes et des conditions empêche si souvent de se rencontrer ensemble ? Oui, c'était une fête, et une fête bien digne de ce concours nouveau, de cet empressement général. Oui, c'était un spectacle, et un spectacle bien propre à piquer la curiosité. C'était la fête de l'Agriculture : il s'agissait d'un concours ouvert entre les meilleurs laboureurs des deux cantons de Caen, et de récompenses qui allaient leur être décernées. Jusqu'ici le Calvados avait eu des expositions pour les produits de son industrie manufacturière ; des prix avaient été accordés aux fabricants ; l'industrie agricole était restée en dehors de ces distinctions, et l'art du cultivateur, le premier des arts, puisque c'est celui qui nourrit les hommes, n'avait parmi nous reçu d'encouragements que de lui-même. On a donc voulu faire un essai qui donnât la mesure de ce qui pourrait être tenté dans la suite. Cet essai a complètement réussi. L'honneur doit en être rapporté au conseil d'agriculture du département, à la société royale d'agriculture et de commerce de Caen, et à son secrétaire, le doyen des conseillers de préfecture, M. Lair, qui présidait le concours en l'absence de M. le préfet. A une heure, les six concurrents, les seuls qui se soient présentés, après avoir tiré au sort des numéros d'ordre, ont été prendre leurs places respectives dans le champ, autour duquel se pressait une foule immense. Ils ont tracé chacun deux sillons sous les yeux du jury d'examen et de la multitude, qui, par une attention soutenue et par des observations judicieuses, montrait qu'il y avait là pour elle quelque chose de plus qu'un vain spectacle, et qu'elle s'associait à l'idée du concours. Le travail du labourage a duré une heure, au bout de laquelle le jury, après en avoir examiné avec le plus grand soin et comparé les résultats, s'est retiré pour formuler sa décision. M Lair, président, s'est alors avancé au milieu de l'assemblée, et a prononcé le discours suivant, qui a été écouté dans le plus profond silence : « Messieurs, Depuis longtemps nous attendions le moment où nous pourrions rendre un hommage public à l'agriculture, comme nous l'avons rendu au commerce dans les différentes expositions des produits des arts du Calvados. Après avoir célébré les habitants industrieux des villes, nous étions impatients d'accorder les mêmes honneurs à ceux des campagnes, à ces hommes dont les travaux contribuent à notre existence, et satisfont les besoins les plus urgents de la vie. Nous pouvons jouir enfin de ce bonheur. Il est senti, bien vivement par tous les membres de la Société d'agriculture et par MM. les membres du conseil général du département et du conseil d'arrondissement que nous possédons au milieu de nous. Délégué par M. le préfet, qu'un motif puissant d'intérêt public a forcé de s'absenter, je m'applaudis d'être ici son organe et celui de mes collègues. « C'est un beau jour, Messieurs, que celui où nous pouvons rendre hommage au premier des arts et à ceux qui l'exercent. C'est un spectacle, bien intéressant que cette affluence de personnes de tous les états et de toutes les classes de la société, accourues de la ville et des campagnes voisines, et qui se groupent autour de nous pour assister à cette imposante cérémonie. Des médailles vont être distribuées aux laboureurs qui se sont distingués dans ce concours. Mais ce n'est qu'un essai que nous avons voulu faire ; encouragés par le succès, bientôt nous provoquerons d'autres concours qui mettront en évidence les agriculteurs habiles et zélés que possède le pays. Des prix seront successivement accordés à ceux, qui dirigent leurs exploitations avec le plus d'intelligence, à ceux qui possèdent les chevaux, les taureaux et les vaches de plus belle race, à ceux qui auront introduit et propagé une culture nouvelle ou des instruments utiles au labourage, à ceux enfin qui auront planté en grand la betterave et créé dans nos contrées des raffineries de sucre, sources si abondantes de richesses. « La propagation de la betterave et l'établissement des raffineries de sucre sont devenus une cause de grande prospérité pour l'agriculture et le commerce du nord, de la France. Plus de 300 raffineries sont établies dans les trois départements du Pas de Calais, du Nord et de la Somme. Pas une n'existe encore dans celui du Calvados. « Aucune industrie agricole n'échappera, soyez-en certains, Messieurs, à nos investigations ; toutes ont droit à des encouragements, à des récompenses et à la reconnaissance publique. Que les agriculteurs se livrent donc à la plus noble et à la plus active émulation. Le temps n'est pas loin où le Calvados, déjà si distingué sous tant d'autres rapports, pourra rivaliser avec les départements les mieux cultivés de la France. » M. Lair a proclamé ensuite les noms des quatre laboureurs dont le travail a paru le mieux exécuté à la commission d'examen, et leur a remis les prix, consistant en deux médailles d'argent et deux en bronze. Ce sont MM. Brée, demeurant à Hérouville-saint-Clair, hameau de Lébisey, domestique (N°. 1) ; une médaille en argent ; |