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Jean-Lambert Fournet : Observations sur les chemins de fer vicinaux du Calvados FOURNET, Jean-Lambert (1790-1871) : Observations sur les chemins de fer vicinaux du Calvados.- Lisieux : typogr. E. Piel, [1869].- 27 p.
Saisie du texte : Sylvie Pestel pour la collection électronique de la Bibliothèque Municipale de Lisieux (12.X.1995)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Bibliothèque municipale, B.P. 7216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.66.50.- Minitel : 02.31.48.66.55. - Fax : 02.31.48.66.56.
Mél : bmlisieux@mail.cpod.fr, [Olivier Bogros] bib_lisieux@compuserve.com
http://www.bmlisieux.com/

Diffusion libre et gratuite (freeware)

Observations sur les chemins de fer vicinaux du Calvados
par
Jean-Lambert Fournet
membre du Conseil général

~~~~

 

Mes chers Concitoyens,

Le Conseil général a voté, dans sa dernière session, un grand nombre de Chemins de fer dits vicinaux ou départementaux ; j'ai cru devoir combattre l'extension exagérée qui a été donnée immédiatement à ces voies nouvelles ; je vous dois compte de mon opinion, et, fidèle à mes principes, je viens soumettre à votre appréciation les motifs que j'ai fait valoir au sein du Conseil général.

C'est toujours, je ne l'ignore pas, une tâche ingrate que de s'opposer aux idées et aux inventions nouvelles qui ont en leur faveur les prestiges de la vogue. Il est plus commode d'y céder sans résistance. On peut même se rendre populaire en flattant la manie du jour. Mais j'ai pris au sérieux le mandat que vous m'avez confié, et, connaissant le bon sens pratique qui distingue nos populations, j'espère vous convaincre que, si j'ai repoussé des projets excessifs et tout au moins prématurés, je ne l'ai fait que dans l'intérêt bien entendu de notre Département.

Certes, personne n'admire plus que moi cette belle invention des Chemins de fer, qui a effectué une véritable révolution dans le monde civilisé. Les grandes lignes tracées à travers notre territoire national, en créant des communications rapides et économiques dans l'intérieur de la France et avec l'Etranger, ont produit un développement de richesse inattendu. Le Commerce, l'Industrie, l'Agriculture y ont puisé de nouveaux éléments d'activité. Mais s'ensuit-il cependant qu'on doive établir des Chemins de fer partout où on en demande ? Evidemment non. Les Chemins de fer ne sont au bout du compte que des machines ; or, que diriez-vous d'un manufacturier, qui installerait à grands frais, dans sa fabrique, une machine, excellente je le veux bien, mais qu'il ne pourrait utiliser que quelques instants par jour ?

Ce n'est pas que j'entende me prononcer d'une façon systématique et absolue contre les Chemins de fer d'intérêt local ; telle n'est pas ma pensée ; mais, ce que je veux dire, c'est qu'en semblable matière il faut agir avec la plus grande circonspection ; c'est qu'avant d'autoriser des Chemins dont l'exécution doit peser lourdement sur les finances locales, il faut en étudier le trafic probable avec le plus grand soin ; car leurs produits peuvent seuls justifier leur établissement.

Et qu'on ne m'accuse pas, à ce propos, de pusillanimité. Ces considérations, que j'ai exposées devant le Conseil de notre Département, on les trouvera développées, avec plus de force encore, dans le rapport présenté par la Commission du Corps législatif qui avait été chargée d'examiner la loi relative aux Chemins de fer d'intérêt local. Cela mérite d'autant plus d'être remarqué, que cette loi avait précisément pour but de pousser les départements à entreprendre des lignes secondaires, en leur offrant, pour appât, des subventions de l'Etat qui pouvaient s'élever du tiers à la moitié de la dépense qu'ils prendraient à leur charge. Eh bien, tout en provoquant les Conseils généraux, par cette participation du Trésor, à s'imposer des sacrifices pour l'exécution des Chemins de fer qui pouvaient intéresser leurs circonscriptions territoriales, le Gouvernement et la Chambre sentaient néanmoins qu'il était nécessaire de les prémunir contre de trop faciles entraînements. Voici notamment en quels termes s'exprimait M. Lehon, député, dans le rapport fait au nom de la Commission du Corps législatif :

"Quand, sur les avant-projets, le Conseil général aura pu arrêter la direction d'une ligne, le mode et les conditions de sa construction, il devra porter toute son attention sur les voies et moyens et sur les mesures à prendre pour en assurer l'exploitation. C'est là un point capital. Il sera toujours facile de trouver des lignes utiles, vivement désirées, répondant à des besoins sérieux, de se convaincre même de la possibilité de les établir ; mais combien peu pourront fournir un profit rémunérateur, couvrant l'intérêt de la dépense, ou permettant à une Compagnie de se charger seulement de son exploitation ! Nous ne saurions trop recommander aux Conseils généraux une excessive prudence et un sérieux examen à cet égard. L'espoir d'avoir un Chemin de fer, la pensée si louable de développer la prospérité de telle ou telle contrée, peut produire de ces entraînements auxquels on résiste difficilement, mais auxquels on ne doit céder qu'avec une certitude complète sur la réalisation de l'entreprise. Les Conseils généraux comprendront que, si les pouvoirs qui leur sont donnés sont très-grands, leur responsabilité ne l'est pas moins, et qu'en face du Pays, dont ils sont les mandataires intimes, ils ne peuvent s'engager légèrement."

Ce sont ces principes que j'avais voulu faire prévaloir au sein de notre Conseil général ; je n'ai malheureusement pas eu assez d'éloquence pour y parvenir, et j'ai eu le regret de le voir, lui d'habitude si sage et si réservé, méconnaître dans cette occasion les règles de prudence qui dirigent ordinairement ses résolutions.

Il est juste de dire, cependant, que le Conseil général semble, dans les premiers temps, avoir eu conscience des dangers de la voie dans laquelle on allait l'engager. Il commença, en effet, par montrer de la résistance, et lorsqu'il y a quatre ans on lui proposa d'exécuter un Chemin de fer de Caen à Courseulles, moyennant une subvention de 13,000 fr. par kilomètre, il ne crut pas, à tort peut-être, devoir accueillir cette proposition, malgré la modicité de la somme demandée, ou du moins, s'il ne la repoussa pas directement, il colora son refus en imposant à l'entrepreneur des conditions que celui-ci, à son tour, ne pouvait accepter.

L'année suivante, le Conseil se montra déjà plus facile ; ce n'était plus 13,000 fr. par kilomètre, c'était 30 à 40,000 francs et même davantage qu'on lui demandait. Il en offrit 30,000, y compris la subvention de l'Etat, ce qui mettait celle du Département à 22,500. C'était, comme on voit, entrer assez largement dans la carrière. Toutefois, comme on craignait encore à cette époque de se laisser entraîner trop loin, le Conseil décida, en principe, sur ma proposition, qu'il convenait de ne procéder à l'exécution de nos Chemins de fer que successivement, dans l'ordre de leur utilité relative, et qu'en conséquence, pour atteindre ce but, il ne serait alloué à toutes les demandes faites et à faire qu'une subvention uniforme de 22,500 fr., subvention reconnue suffisante pour les bonnes lignes qui se touvaient ainsi, par cela même, avoir la priorité. Il resta entendu, d'ailleurs, que ce serait seulement après s'être rendu compte par expérience des résultats de ces premières lignes, qu'on verrait ensuite à s'occuper de l'exécution des autres lignes qui, étant placées dans des conditions moins favorables, auraient besoin de subventions plus élevées. Je n'ai pas besoin d'insister sur les avantages de cette mesure, qui était conforme aux vrais principes de la justice distributive, qui ménageait les finances du Département, et qui permettait d'obtenir, avec les mêmes dépenses, une plus grande étendue de Chemins de fer, une plus grande somme d'utilité publique.

Mais, hélas ! tout cela fut bientôt oublié. On se départit de cette règle de conduite si sage, si prudente, et n'ayant plus de point d'appui, on glissa sur la pente fatale. En 1868, le Conseil autorisait M. le Préfet à passer des traités pour trois tronçons de Chemins de fer, et il portait les subventions, par kilomètre, à 50,60 et 80,000 fr., y compris celle de l'Etat, payables, sans intérêt, par annuité de 220,000 fr., à partir de 1872, jusqu'à entière libération. Ce fut là le pas décisif. En effet, du moment qu'on était sorti de cette limite salutaire de 22,500, qui avait été posée comme une barrière aux exagérations des demandes, la porte était ouverte à toutes les prétentions ; chaque canton devait tout naturellement réclamer son tronçon de Chemin de fer ; et voilà comme on a vu une véritable avalanche de demandes s'abattre sur notre malheureux budget.

A peine quelques mois s'étaient-ils écoulés depuis cette session de 1868, qu'on nous demandait, dans la session extraordinaire de janvier 1869, un crédit de 20,000 fr., afin d'étudier plus complètement le réseau entier des Chemins de fer départementaux. Ce crédit fut accordé sans peine ; mais on ne se donna même pas le temps de l'employer ; il eût été trop long de se livrer à une pareille étude, et l'on était pressé.

On vint donc, dans notre session ordinaire de cette année, sans avoir procédé à cet examen préliminaire qu'on avait reconnu indispensable, présenter successivement au Conseil général tout un ensemble de Chemins de fer, divisé en deux réseaux, composés comme suit :

PREMIER RESEAU.

Chemin de fer d'Orléans à la Mer (1)....

800,000

"de Lisieux à Orbec

720,000

"de Courseulles à Caen

864,000

"de Falaise à P.-d'Ouillie

1,620,000

"de Caen à Aunay

1,166,000

"de Dives à Mézidon

840,000

"d'Honfleur à P.-Audemer

100,000

6,110,000

Ce premier réseau a été adopté pour être exécuté immédiatement, moyennant un emprunt d'environ six millions en capital, six millions en intérêts remboursables en trente années à raison de 400,000 fr. par an.

On remarquera combien le Conseil, en votant ce premier réseau, s'est déjà écarté du programme de 1868. Il ne s'agissait alors que de trois Chemins : d'Orbec à Lisieux, de Caen à Courseulles, de Falaise à Pont-d'Ouillie ; et il avait été positivement dit que les subventions seraient payables sans intérêts, à raison de 220,000 fr. par an, et que les frais d'emprunt, si l'on avait recours au crédit, resteraient à la charge des Compagnies aidées au besoin par les parties intéressées.

Mais il est arrivé ceci : c'est que M. le Préfet n'avait pu trouver d'entrepreneur qu'à la condition de payer les subventions après l'exécution des travaux ; de là était résulté la nécessité d'un emprunt qu'on demandera au Crédit foncier, emprunt remboursable en trente années : de telle sorte que la somme à la charge du Département s'est trouvée presque quadruplée. On voulait ne donner que 200,000 fr. par an pendant quinze ans, et, par le fait de l'addition des intérêts et de trois nouveaux chemins, on donne 400,000 fr. pendant trente ans (2).

Ce n'est pas tout, le Conseil, en outre, a voté un second réseau composé des lignes suivantes :

Ligne de Caumont à Bayeux.
- Isigny à la gare de l'Ouest.

Ligne de Bayeux à Port-en-Bessin.
- Grandcamp au Molay
- Aunay à Vire.

Et probablement de Caen à Trouville (3).

Ce second réseau, dans lequel se trouve la ligne très-coûteuse d'Aunay à Vire, doit se monter à bien près d'autant que le premier.

Ainsi, 12 millions environ pour le premier réseau, 12 millions pour le second, c'est 24 millions qu'on met à la charge de l'avenir.

On peut mesurer, d'après ce simple historique, tout le chemin que le Conseil a parcouru depuis le jour où il fut appelé pour la première fois à s'occuper des Chemins de fer départementaux.

En 1865, il refusait de concéder un chemin de fer de Caen à Courseulles, moyennant une subvention de 13,000 fr. par kilomètre.

En 1866, il élevait sa subvention à 30,000 fr., y compris celle de l'Etat, somme reconnue suffisante pour les bonnes lignes.

En 1868, il autorisait M. le Préfet à passer des traités pour trois tronçons, moyennant des subventions de 50,60 et 80,000, mais payables, sans intérets, par annuités de 220,00 fr. à partir de 1872 jusqu'à parfaite libération.

Enfin, en 1869, le Conseil votait l'exécution d'un double réseau, qui doit porter les annuités de 220,000 à près de 800,000 fr. pendant trente ans.

Comment ne pas déplorer cet entraînement, cette précipitation ? Est-ce le propre d'hommes sages, comme le sont les Membres du Conseil, de se lancer dans des dépenses énormes dont les résultats sont tout au moins à l'état d'inconnu ? Pourquoi n'avoir pas attendu que les études préalables, ordonnées par la loi, eûssent été faites ? D'où vient qu'on a cru pouvoir se passer des enseignements qu'on aurait pu en retirer ? Serait-ce que les quelques Chemins de fer vicinaux exécutés jusqu'ici dans quelques départements, auraient donné des produits tels qu'ils doivent être préférés à tous autres travaux ? Pas le moins du monde. Si certains d'entre eux paraissent devoir procurer un léger profit à leurs actionnaires, c'est l'exception. Ils le doivent à des conditions particulières. On a tout naturellement commencé par faire les plus productifs, et encore n'ont-ils réussi que grâce aux fortes subventions dont ils ont été dotés. La plupart couvrent à peine leurs frais d'exploitation. En sorte que le capital employé à leur construction est presqu'entièrement perdu.

Pouvons-nous espérer un meilleur sort pour les nôtres ? Ce serait une illusion que de le croire. Aucun ne présente les conditions exceptionnelles dont je viens de parler. Ils n'effectueront que peu de transports, comme la majeure partie des railways de ce genre, et l'on aurait pu s'en convaincre facilement, pour peu qu'on eût voulu se donner la peine de réfléchir sur la nature de la circulation qu'alimentent les Chemins vicinaux.

Lorsqu'on veut se rendre compte des services que peut rendre un Chemin de fer en projet, on compte habituellement les colliers qui circulent dans cette direction. Mais cette manière de calculer, qui peut être bonne pour les grandes lignes, est singulièrement défectueuse pour les petites. En effet, nos Chemins de fer départementaux serviront généralement à relier nos chefs-lieux de canton à leur chef-lieu d'arrondissement ou de département avec lequel ils ont leurs principales affaires, leurs principales relations établies depuis longtemps ; et bien qu'ils expédient ou qu'ils reçoivent quelques produits des points plus éloignés, leur circulation est presqu'entièrement alimentée par des relations d'intérêt local. Or, les marchandises, qu'elles viennent de l'atelier ou de la ferme, n'empruntent pas les voies ferrées pour des distances aussi faibles. Il y a deux raisons pour cela. La première, c'est que le double camionage, nécessaire pour amener les marchandises à la gare de départ, et de la gare d'arrivée au lieu de destination, renchérirait et en même temps ralentirait le transport. La seconde, c'est qu'en effectuant ce service eux-mêmes, les expéditeurs, fermiers ou usiniers, trouvent l'avantage d'utiliser leurs moyens de transport qu'ils sont toujours obligés d'avoir pour les besoins de leurs affaires courantes. On voit donc que la majeure partie des marchandises échappe aux tronçons de Chemins de fer, et on sait que les marchandises constituent le principal produit des voies ferrées.

Restent les voyageurs. Outre qu'ils ne sont pas très nombreux, beaucoup leur échapperont également. En effet, pour économiser les frais journaliers, ces Chemins ne devront être exploités qu'à petite vitesse, avec un petit nombre de trains, ne marchant que le jour, et s'arrêtant à chaque village. Mais, si l'on rend ainsi l'exploitation moins coûteuse, d'un autre côté le peu de fréquence et le peu de vitesse des trains tendent à éloigner la clientèle. Or, voyez ce qui arrive : on fait de grands frais pour diminuer les pentes, les courbes, afin de marcher vite. Le temps est de l'argent ; dépense perdue : on ne profite pas, on ne peut pas profiter de cet immense avantage. Mais, dans ces conditions, il vaudrait bien mieux établir des Chemins de Fer américains le long de la grande route, avec laquelle chaque maison, chaque usine importantes ont leurs tenants et aboutissants, ils rendraient beaucoup plus de services et coûteraient beaucoup moins.

Certes, si le Conseil général eût possédé tous les renseignements de nature à l'éclairer, il eût mis moins d'empressement à accueillir les projets qu'on lui présentait ; il se serait contenté, comme cela avait été décidé en principe, d'autoriser quelques lignes à titre d'essai, il aurait calculé si elles valaient ce qu'elles coûtaient, et il aurait pu, dans tous les cas, profiter des efforts qui sont tentés dans divers départements pour résoudre le difficile problème des Chemins de fer à bon marché. Je lisais, il y a peu de temps, dans le Journal Officiel du 5 octobre, un rapport intéressant, présenté au Conseil général du département de l'Yonne, par M. Belgrand, inspecteur général des ponts-et-chaussées, un de nos ingénieurs les plus distingués. On s'occupe d'établir dans ce département, sur l'accotement d'une des routes départementales, une ligne de Chemin de fer d'après un système de M. Larmanjat, déjà expérimenté dans les environs de Paris entre le Raincy et Montfermeil. La voie ferrée se compose d'un seul rail et d'un rail bien léger, puisqu'il ne pèse q'un peu plus de douze kilogrammes par mètre courant. Eh bien, suivant les déclarations de M. Belgrand, sur ce rail une petite locomotive de 4 à 5 tonnes seulement produit une puissance suffisante pour franchir les rampes, non pas de 20, mais de 40 à 50 millimètres par mètre, avec un convoi de 15 à 20 tonnes. Le convoi peut d'ailleurs passer sur des courbes de 5 mètres de rayon, c'est-à-dire contourner le carrefour de deux routes qui se coupent à angle droit. Voilà, certes, des résultats assez remarquables. Aussi M. Belgrand n'hésite pas à dire que, si l'expérience ne fait pas découvrir quelque inconvénient pratique, cette invention doit conduire à la véritable solution des Chemins de fer vicinaux.

Il ne m'appartient pas de juger du mérite de cette invention ; mais elle se présente sous le patronnage d'un homme dont l'opinion fait autorité dans la science du génie civil, et ce que je tiens surtout à signaler, c'est que le département de l'Yonne va en faire l'essai sur une des routes départementales, en n'accordant pour sa part, au moins sur la portion de route qui ne présentera pas plus de 50 centimètres de pente, d'autre subvention que le droit de poser la voie sur le sol même de l'accotement de la route.

Quel regret pour nous, si cet essai répond aux espérances annoncées, d'avoir accordé des subventions si énormes, que nous aurions pu éviter en agissant avec moins de précipitation et plus de maturité ! (4)

On aurait encore pu, à la rigueur, comprendre cette hâte, si nous avions eu les fonds disponibles. Mais il n'en est rien. C'est au crédit et par conséquent à l'impôt qu'il faut demander le montant de ces subventions si facilement votées. Comment, en effet, paierons-nous la somme affectée au premier réseau ? On contracte un emprunt remboursable en trente années. Mais nous ne pouvons faire face à cet emprunt qu'au moyen d'une imposition extraordinaire de 6 95. Ainsi il faudra, rien que pour subvenir aux engagements contractés pour le premier réseau, faire supporter aux contribuables cette charge de 6 95 pendant trente années.

Je sais bien qu'on fait valoir, à titre de circonstances atténuantes, que ce ne sera que la continuation d'un impôt extraordinaire, existant déjà, et affecté au remboursement de dépenses et emprunts divers qui seront éteints en 1872. Mais peu importe. Que ce soit un impôt créé à nouveau, ou un impôt continué, la chargé n'en reste pas moins la même pour les contribuables. Et encore n'est-il pas bien certain que ces 6 95 soient suffisants. Si notre Commission des Chemins de fer a été de cet avis, notre Commission des Finances a été d'un avis contraire, et, suivant elle, la création du premier réseau seul devra entraîner tôt ou tard une nouvelle augmentation d'impôt.

Maintenant, aux douze millions que coûtera le premier réseau, ajoutez douze millions pour le second ; ce sera un nouvel impôt extraordinaire de 7 centimes qu'il faudra établir ; de telle sorte que nous arriverons, pour les deux réseaux, au chiffre exorbitant d'environ 14 centimes d'impôt extraordinaire pendant trente années !

Est-ce là, je le demande, gérer les afffaires publiques en bon père de famille ! Les Conseils généraux et municipaux réunis sont armés d'un grand pouvoir en matière de finances. Ils peuvent élever les centimes ordinaires et extraordinaires jusqu'au chiffre de 97 centimes ; c'est-à-dire qu'ils peuvent presque doubler le montant des impositions établies et perçues au nom de l'Etat (5). Ce sont là, on ne peut se le dissimuler, de très larges attributions. Mais plus elles sont étendues, plus est grave la responsabilité qui pèse sur eux, et plus il est de leur devoir d'user avec réserve de ce droit d'impôt qui leur est confié.

A-t-on bien sérieusement réfléchi à ce que représentent, dans l'état actuel de nos finances, les 24 millions qu'on vient de voter pour les chemins de fer vicinaux ? C'est près de douze fois notre budget départemental ordinaire ! On dirait vraiment, à voir la facilité avec laquelle on a aliéné notre avenir, que nous avons donné satisfaction à tous les besoins départementaux, et qu'il ne nous reste plus rien à faire, et cependant que de choses qui réclament encore notre sollicitude ! Ne sommes-nous pas obligés chaque année de laisser des services sans des crédits suffisants, de différer certaines améliorations, d'ajouter des travaux utiles que les Chemins de fer vicinaux ? Eh bien, tous ces besoins, qui se révèlent incessamment, qui se développent en même temps que la richesse publique, il nous deviendra presque impossible d'y satisfaire. Aux demandes pressantes qui viendront nous assaillir, nous ne pourrons que répondre uniformément : "Les Chemins de fer vicinaux nous ont tout pris".

Mais, n'eussions-nous pas prélevé ces 24 millions pour nos nouvelles voies ferrées, croit-on qu'ils n'avaient pas été employés d'une manière plus fructueuse, si on les avait laissés entre les mains des contribuables. Au lieu d'être enfouis dans les constructions de Chemins de fer, qui ne produiront rien, ils auraient servi à des opérations agricoles, industrielles ou commerciales. Et, comme on ne peut évaluer à moins de 10 p. 100 en moyenne le revenu des capitaux employés dans des opérations de cette nature, ces 24 millions auraient rapporté quelque chose comme 2,400,000 fr. par année : c'est donc comme si nous eussions privé notre Département d'un revenu annuel de 2,400,000 fr. !

Et la perte ne doit pas s'arrêter là. En effet, nos subventions, réunies à celles de l'Etat, ne représentent qu'une partie de ce que coûtera l'exécution des chemins de fer. Les entrepreneurs devront y ajouter au moins 16 millions. C'est, par conséquent, une somme totale de 40 millions qui aura été absorbée dans la construction de ces Chemins improductifs. D'où il résulte qu'en réalité le revenu annuel enlevé aux affaires se montera à 4 millions, et cela sans compensation aucune.

Dira-t-on, comme on n'a pas craint de l'avancer au Conseil général, que nous n'avons pas à nous préoccuper de l'intérêt des Compagnies soumissionnaires ? C'est une erreur. Toute entreprise qui réussit enrichit le pays de ce qu'elle gagne ; toute entreprise qui se ruine appauvrit le pays de ce qu'elle perd : dès l'instant où nous échangeoons, tous, nos services les uns avec les autres, nous sommes intéressés à ce que chacun de nous ait beaucoup de services à nous donner en échange des nôtres. Cela est incontestable. Mais nous avons un intérêt bien autrement grave à nous préoccuper du résultat de nos voies ferrées.

En effet, quels sont ceux qui souscriront les sommes que vont appeler les soumissionnaires à l'aide d'annonces, de réclames, de prospectus ronflants dans lesquels on promettra monts et merveilles ? Ce ne seront pas les capitalistes, les gens d'affaires, parce qu'ils sauront calculer les chances de l'opération. Il y aura bien quelques entrepreneurs, quelques fournisseurs qui rentreront dans leur argent par d'autres voies, quelques gens riches qui se résigneront à un sacrifice, quelques autres qui voudront faire de la popularité ; mais toutes ces souscriptions seront loin de suffire. Savez-vous quelles seront les principales victimes de cette opération ? Ce seront les petits industriels, les petits marchands, les domestiques, les ouvriers, tous gens peu familiarisés avec les affaires financières et qui s'imagineront qu'une entreprise subventionnée, patronnée par le Département, doit nécessairement leur fournir un placement assuré, et qui iront engloutir dans le gouffre béant de nos voies ferrées l'épargne de toute leur vie, la réserve sur laquelle ils comptaient pour vivre tranquillement pendant leurs vieux jours. Le Conseil général ne me paraît pas avoir suffisamment apprécié la responsabilité morale que ce patronnage d'entreprises aussi hasardeuses fait peser sur lui, et, pour ma part, je crois qu'il est de notre devoir de prémunir les populations contre les dangers qu'elles peuvent présenter.

Pourrons-nous du moins, fermant les yeux sur tous ces mécomptes, nous consoler en voyant le sort de nos Chemins de fer assuré ? Hélas ! non ; cette consolation doit encore nous échapper. Sans doute, les entrepreneurs qui, attirés par le chiffre élevé de nos subventions, sont venus soumissionner nos Chemins, les exécuteront conformément au cahier de charges. Ce sont, je le reconnais, des hommes honorables et entendus qui tiendront leurs engagements. Mais lorsque, la construction achevée, ils auront retiré leur cautionnement et encaissé le prix de leurs travaux, quelle sera notre situation ? Le Département sera en possession de ses Chemins de fer ; soit. Vous croyez bonnement que tout sera fini. C'est alors, au contraire, que commenceront les difficultés.

Vous avez bien pu, en élevant le chiffre de vos subventions, assurer la construction des Chemins ; mais vous n'avez pu en assurer l'exploitation. Quand les Compagnies auront dépensé le capital dont elles disposent à exécuter les Chemins et à former leur fonds mouvant, elles ne pourront les maintenir en activité qu'à une condition, c'est que les frais d'exploitation et d'entretien soient au moins couverts par les produits : autrement, si le trafic n'est pas assez considérable pour couvrir les frais généraux, elles ne s'entêteront pas à continuer un service impossible, et, plutôt que d'accumuler des pertes sur des pertes, elles préféreront purement et simplement abandonner l'entreprise en faisant le sacrifice de leur capital.

Telle sera, il n'y a pas à se le dissimuler, la destinée d'une partie de nos Chemins. On admet généralement que le minimum des frais généraux des Chemins de fer à faible trafic s'élève à 6,000 fr. par kilomètre. C'est le chiffre posé par l'Administration des ponts-et-chaussées et admis dans l'exposé des motifs de la loi sur les Chemins de fer d'intérêt local. Or, qui oserait affirmer que la recette atteindra, sur la plupart des lignes que nous allons construire, ce minimum indispensable ? Aucun Membre du Conseil général n'oserait prendre sur lui de le soutenir.

Ainsi, les Compagnies subventionnées, renonçant à exploiter des Chemins d'un traficc insuffisant, se retireront en faisant abandon de leur capital. Le Département, il est vrai, restera propriétaire des voies ferrées ; mais, qu'en fera-t-il ? il lui faudra de deux choses l'une : ou laisser inexploitées ces chemins pour lesquels nous avons fait de si grands sacrifices, auquel cas nos 40 millions seront perdus ; ou bien accorder aux Compagnies ruinées des subventions nouvelles qui viendront s'ajouter successivement au capital englouti.

Voilà l'alternative dans laquelle nous nous trouverons infailliblement : perte sèche, absolue, sans retour, de tout ou partie d'une dépense de 40 millions ; ou sacrifices nouveaux, incessants, dont on ne peut prévoir la fin.

J'ai tenu, mes chers Concitoyens, à vous soumettre ces considérations que j'ai développées au sein du Conseil général. Si elles n'ont pas été accueillies par mes Collègues, dont je suis loin de méconnaître les bonnes intentions, j'ai pensé qu'elles pourraient obtenir plus de faveur auprès des contribuables, qui doivent supporter les frais de tous ces projets. Il m'importerait de décliner, vis-à-vis de vous, toute espèce de responsabilité dans une entreprise que je regarde comme funeste au point de vue des intérêts privés, aussi bien que des intérêts publics. Vous savez maintenant que j'ai fait tout ce que j'ai pu pour l'empêcher. Vous vous en souviendrez quand les conséquences apparaîtront dans leur triste réalité.

Il me reste d'ailleurs une dernière espérance qui m'a décidé à écrire ces quelques lignes. Il n'y a encore rien de fait pour le second réseau. Le Conseil général a bien arrêté que les lignes du second réseau seront admises, comme les autres, au bénéfice d'une subvention kilométrique au fur et à mesure qu'une demande de concession sera présentée ; que cette subvention sera proportionnée aux difficultés de chaque ligne et aux intérêts à desservir, etc. Mais, en dépit, ou plutôt en raison de l'élasticité de ce vote, si le Conseil général daigne examiner attentivement les raisons que j'ai déjà fait valoir et que je viens de développer d'une façon plus complète, je ne doute pas que, revenu d'un premier entraînement, il ne se trouve plus à la session prochaine dans les mêmes dispositions qu'à la session dernière. L'exécution simultanée de six chemins de fer, et même de sept, en y comprenant celui d'Orléans, avec des subventions montant à 12 millions, est, ce me semble, un début assez important pour satisfaire l'impatience des plus chauds partisans des voies ferrées. Après avoir pourvu à une pareille entreprise, on peut faire une pause et se donner le loisir de respirer. Qu'on attende que le premier réseau ait montré ce que nos Chemins de fer vicinaux sont susceptibles de produire, et l'on pourra prendre alors un parti en parfaite connaissance de cause ; car l'expérience, ce juge suprême, aura prononcé en dernier ressort.

Lisieux, 15 Novembre 1869.

FOURNET,
Membre du Conseil général.


Notes :
(1) Le Chemin de fer d'Orléans à la mer n'est pas départemental, c'est une grande ligne en projet que le Conseil a cru devoir subventionner en raison de l'utilité bien reconnue qu'elle présente pour le Département ; et, dans la crainte qu'elle ne prenne une autre direction, la subvention ne sera payable qu'à l'époque de l'exécution de ce Chemin : elle a été votée à l'unanimité.

(2) Il est juste de dire que, dans ce dernier compte, le Chemin d'Orléans à la mer se trouve compris.

(3) Ce Chemin a été classé dans le troisième réseau ; mais, comme il présente autant et peut-être plus d'utilité qu'aucun de ceux qui ont été votés, il est probable qu'il sera reporté au second réseau.

(4) MM. Sée et Brion nous ont proposé de se charger de l'exécution et de l'exploitation du premier réseau, moyennant une subvention inférieure d'environ un million à celle offerte par le Conseil. Cette proposition a été rejetée. On a fait valoir plusieurs raisons à l'appui de ce refus ; mais la véritable, c'est que MM. Sée et Brion, plus prudents que leurs concurrents, demandaient huit mois pour réaliser le capital nécessaire à leur engagement, et qu'on ne voulait pas accorder ce délai. Cependant la perspective de pouvoir économiser un million en capital, un million en intérêt et le grand avantage de n'avoir affaire qu'à une seule compagnie, valait bien la peine qu'on retardât de quelques mois une concession aussi importante.

(5) Le Conseil général a le droit d'imposer le Département, savoir :
Centimes ordinaires pour dépenses ordinaires (existant aujourd'hui) 0 26 c.
Centimes spéciaux pour la vicinalité et l'instruction (existant aujourd'hui) 0 10
Centimes extraordinaires, loi de 1866 et 1867 (il en existe 6 95 aujourd'hui). 0 20
Total des centimes imposables par le Conseil général 0 56 c.

Le Conseil général a fixé jusqu'ici le nombre
minimum de centimes extraordinaires dont les
Conseils municipaux peuvent grever leurs communes à.
0 20 c.
Centimes spéciaux pour la vicinalité 5 et 3 cent 0 08
Centimes pour l'instruction publique 0 03
Centimes pour la prestation évaluée à 0 10 0 41 c.
Total des centimes imposables par les deux Conseils réunis 0 97 c.


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