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E. Travers : Les Normands, la chicane et la potence d’après les dictons populaires (1882)
TRAVERS, Émile (1840-1913) : Les Normands, la chicane et la potence d’après les dictons populaires.- Caen : F. Le Blanc-Hardel, 1882.- 31 p. ; 22,5 cm.- (Extrait du Bulletin de la Société des Antiquaires de Normandie)
Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (02.X.2009)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] obogros@ville-lisieux.fr
http://www.bmlisieux.com/

Diffusion libre et gratuite (freeware)

Orthographe (même fautive) et graphie conservées
Texte établi sur l'exemplaire de la médiathèque (Bm Lx : Norm br C30).

 
LES NORMANDS
LA
CHICANE ET LA POTENCE
D’APRÈS LES DICTONS POPULAIRES
PAR
ÉMILE TRAVERS

ARCHIVISTE PALÉOGRAPHE
MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ DES ANTIQUAIRES DE NORMANDIE
DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES, ARTS ET BELLES-LETTRES DE CAEN, ETC.

~*~


MESSIEURS (*),

On a dit et on répète chaque jour que les proverbes sont « la sagesse des Nations. » Cet aphorisme nous semble manquer d’exactitude. En effet, pour peu que l’on jette les yeux sur un recueil parémiographique, on est frappé du nombre des dictons qui se contredisent. Si l’un dit : Pauvreté n’est pas vice, un autre répondra : C’est bien pis ! (1) et tandis qu’un sage soutiendra avec La Fontaine que

Il ne faut pas juger des gens sur l’apparence,

on objectera que jadis nos pères voulaient juger les gens sur la mine, et que, bien longtemps avant les Lavater, les Gall et autres faiseurs de systèmes, ils avaient cherché les rapports des passions avec les traits du visage, les lignes de la main, la couleur des yeux, de la peau, des cheveux ou de la barbe.

Nous pensons donc qu’il serait préférable d’appeler les proverbes « l’esprit des Nations » (2), ou mieux « l’esprit de Tout-le-Monde (3). » Tout-le-Monde, cet être impersonnel, celui qui à lui seul a plus d’esprit que M. de Voltaire ! disait feu M. le prince de Talleyrand.

Tout-le-Monde, c’est l’humanité tout entière, c’est-à-dire un composé de bonnes et de mauvaises qualités, de vertus et de vices ; et, si nous prenons les proverbes comme critérium des tendances de l’esprit de M. Tout-le-Monde, nous verrons que M. Tout-le-Monde, en tous les temps, sous tous les climats, à tous les âges, est enclin à la malignité et à la médisance envers autrui, qu’il blasonne volontiers son prochain, et que, comme son prochain lui-même, ses fâcheuses habitudes l’amènent à débiter beaucoup de mal sur son propre compte. Homo quisque sibi inimicus !

Étant données ces prédispositions du coeur humain et ces tendances de l’esprit de M. Tout-le-Monde, on ne s’étonnera pas si, en parlant des proverbes relatifs à la Normandie et à ses habitants, nous avons à citer plus de dictons défavorables à nos compatriotes que d’apophthegmes élogieux à leur adresse. Ne nous en fâchons point et soyons les premiers à en rire. Rappelons-nous d’ailleurs que, si l’on reproche aux enfants de la Normandie de nombreux défauts et de sérieuses imperfections, les citoyens des autres provinces de la France et des cinq parties du monde ne sont pas plus épargnés que nous par la langue envenimée du prochain (4).

Tous ces sobriquets que se jettent réciproquement à la tête les nations ou les cités voisines ont le plus souvent leur origine dans de vieilles rancunes, dans des rivalités séculaires, que le temps n’effacera peut-être jamais. Ce blason populaire explique parfois l’histoire et en confirme les données ; aussi, les écrivains les plus sérieux se sont-ils livrés à des recherches approfondies sur ces traditions orales de faits parfois oubliés (5).

Il faut bien reconnaître que nos ancêtres, les pirates du Nord, qui pendant si longtemps ravagèrent les côtes de l’Occident, méritèrent quelque peu les épithètes malsonnantes que les chroniqueurs du moyen âge accolaient à leur nom. Les moines du XIe siècle, qui inscrivaient sur les marges d’un missel les évènements les plus mémorables de chaque année, n’avaient que trop souvent à enregistrer les invasions de ces fléaux de Dieu, - les rois de la mer partageaient alors cette appellation avec les hordes d’Attila (6), – invasions toujours suivies de massacres, d’enlèvements de femmes et d’esclaves, d’incendies, de destructions d’églises et de monastères.

Rapacitas Northmannorum, crudelitas Hunnorum, ferocitas Francorum, slultitia Saxonum, voilà ce qu’on lit dans un manuscrit du XIe siècle de la Bibliothèque de Rouen, contenant une longue et peu édifiante nomenclature des défauts reprochés aux différents peuples (7).

« A furore Normannorum libera nos, Domine ! » s’écriait-on dans les monastères à la fin des litanies. Et la crainte de la fureur des Normands était bien profonde, la mémoire de leurs sanglants exploits et de leur audacieuse tentative sur la capitale du royaume de France était bien vivace, puisque, sept cents ans après le siège de Paris, cette naïve invocation se répétait encore à Ste-Geneviève. Un auteur du XVIIe siècle, Jacques de Charron, nous l’affirme en ces termes : « Néanmoins, dit-il, les Normands, avant que de partir, saccagèrent et brûlèrent le monastère de Sainct Germain des Prez et celui de Saincte Geneviefve qui n’estoient encore lors enfermez dans la ville, qui est cause que les religieux de Saincte Geneviefve n’ont jamais voulu depuis recevoir en leur compagnie aucunes gens de cette nation (ce qui s’entend des Normands septentrionaux et non de ceux qui sont de présent naturalisez François), et entre leurs prières ecclésiastiques continuent encore de dire celle-ci : « A furore Normannorum libera nos, Domine ! (8. »

Wace rapporte que, dans son temps, les Français avaient un certain nombre de reproviers, c’est-à-dire de proverbes assez méchants, à débiter sur le compte de nos ancêtres :

        Mult ont Franceiz Normanz laidiz
        E de mefaiz è de mediz ;
        Sovent lors dient reproviers (9).

Plus tard, Estienne Pasquier constatait cette tendance, tout en faisant un aveu que nous enregistrons précieusement : « A la vérité, dit-il, encore qu’il semble que nous autres François (piquez des anciennes querelles qu’eusmes avec les Normans) leur voulions naturellement mal ; et qu’en commun propos mesmement nous détestions ceux qui leur ont succédé, si faut-il que je reconnoisse franchement, qu’entre toutes les nations du Ponant depuis que les autres demeurent calmes et tranquilles, cette-cy principalement s’adonna d’un coeur gay et magnanime, à nouvelles conquestes (10). »

Prenons acte de ces mauvaises dispositions du peuple parisien à notre égard et nous ne serons plus surpris si un soi-disant « docteur de Paris » prétendait, dans un petit livre de la Bibliothèque bleue, le Catéchisme des Normands (11), que les oeuvres de miséricorde de nos compatriotes sont : trahison, flatterie, gourmandise, larcin, mensonge, envie et imposture ; et si l’auteur des Illustres proverbes (12) disait en parlant de certain personnage : « Il estoit de Caen en France (comme parlent ceux du païs), c’est-à-dire franc Normand et vray traiflagoulamen, estant doué de toutes les rares qualités que tout le monde attribue aux Normands, épiloguées en ce mot et désignées par les cinq syllabes de traiflagoulamen, car il estoit traistre, flatteur, gourmand, larron et menteur. »

Voilà les brillantes qualités qu’on nous prêtait, vers 1650, à la porte du Louvre.

En Bretagne, c’était encore bien pis ! Si les Normands disaient : Les plus sots en Bretagne ; ou bien : Qui fit Breton, il fit larron, et autres gentillesses du même genre, un Breton trouva moyen d’accumuler en quelques pages une série de calomnies contre notre province. Citons quelques passages du Catéchisme d’un Normand qui quitte son pays pour venir s’établir en Bretagne (13) :

« Demande. Savez-vous quelque chose de l’histoire des Normands ?
« Réponse. Oui, je sais qu’autrefois notre province portait dans ses armes trois faulx, qui signifiaient qu’il se trouve parmi nous trois sortes de personnes, savoir : faux témoins, faux sauniers et faux monnayeurs.
« D. N’y a-t-il pas autre chose de remarquable dans l’histoire de votre province ?
« R. Notre province est si ancienne qu’elle a eu l’honneur de donner naissance au treizième apôtre de Jésus-Christ.
« D. D’où était-il ?
« R. De la Haie-Pesnel.
« D. Comment avait-il nom ?
« R. Judas Iscariot. Le vendredi-saint on chante en son honneur cette épître : Il y avait un homme de la Haie-Pesnel, capitaine de bandouliers. Il s’en fut dans le jardin des Olives, où il trouva Notre-Seigneur J.-C., à qui il dit : « Bonjour, mon doux maître... »

Plus loin, nous trouvons :

« D. Qui est celui que l’on doit appeler Normand ?
« R. C’est celui qui fait profession de s’enrichir à droite et à gauche, et de prendre à toutes mains.
« D. Quel est le signe du Normand ?
« R. C’est d’avoir la main au-dessus de la tête, prête à faire un faux serment (14).
« D. Combien y a-t-il de commandements en cette nation ?
« R. Sept.
« D. Dites-les.
« R.    Dieu en vain jurer tu pourras,
    Pour affirmer un faux serment.
    Père et mère morts désireras,
    Pour avoir leur bien promptement.
    L’argent d’autrui n’épargneras,
    Ni son bien aucunement.
    Faux témoignage tu feras
    Et maintiendras adroitement.
    L’oeuvre de la main n’oublieras,
    Pour attraper incessamment.
    Grand favori tu te feras,
    Pour te conserver longuement.
    Le bien d’autrui tu ne rendras,
    Mais retiendras à ton escient. »

Enfin, notre pauvre compatriote, auquel on demandait s’il savait son Pater, disait :

« Seigneur, je ne vous demande point d’argent ni de biens, mais qu’il vous plaise de me mettre où il y en a, me préserver de la goutte des mains et des jambes, mais que je les aie libres, soit pour atteindre en haut, soit pour fouiller en bas, et m’enfuir promptement ensuite. »

Tout cela n’est que le résumé des mille brocards qui se répètent depuis dix siècles par toute la France sur le compte des Normands, et que ceux-ci se renvoient entre eux de village à village.

Nous ne pouvons entrer ici dans des détails sur tous ces dictons. M. Canel les a recueillis dans son Blason populaire de la Normandie (15) et en a donné de piquantes explications, assaisonnées de sel gaulois et de malice normande. De son côté, M. Georges Garnier a commenté, avec une érudition du meilleur aloi, les Origines de quelques coutumes anciennes et de plusieurs façons de parler triviales, de Moisant de Brieux (16). Nous ferons de nombreux emprunts à ces deux ouvrages, au premier surtout, et nous nous occuperons spécialement des expressions proverbiales qui ont trait aux habitudes processives des Normands et à leurs relations jadis trop fréquentes avec la potence.

Dès le XIIIe siècle, il était question des juréor de Baiex (17), et, depuis, vingt localités de la province ont vu adresser à leurs habitants l’épithète de faux témoins. Ne connaît-on pas les parjures de Vouilly (18), les témoigneurs de Montgaroult (19) et ceux de Survie (20), les faux témoins de Bretoncelles (21) et ceux de St-Jean-des-Baisans (22), dont les paroissiens, interrogés sur leur profession, répondaient naïvement : « Je témoigne, » de même que les citoyens de Tinchebray (23), caverne de voleurs ?

Si la légende répandue dans le département de l’Orne était vraie, cette appellation de « caverne de voleurs », appliquée à la ville de Tinchebray, serait la plus ancienne de toutes celles du blason populaire normand. César aurait écrit : « Tandem advenimus Tinchebraium speluncam latronum ! Inutile de dire que cette phrase ne se trouve pas dans les Commentaires du conquérant des Gaules ; mais elle n’en est pas moins historique, et c’est Henri Ier, roi d’Angleterre et duc de Normandie, qui, selon Orderic Vital, dit au pape Calixte II, dans une conférence à Gisors, en 1119 : « Tandem Tenerchebraïum speluncam doemonum obsedi (24). » Il y a une variante dans le texte du chroniqueur ; mais, voleur ou démon, l’épithète est toujours peu flatteuse.

Nos compatriotes méritent-ils le reproche qu’on leur fait d’aimer trop la chicane ? Quoique en Normandie, tout Normand et très-Normand que nous sommes, nous n’oserons affirmer le contraire. D’ailleurs, notre réputation de plaideurs infatigables est fortement enracinée dans l’opinion publique ; elle est passée à l’état de chose jugée. Nous n’avons qu’à nous incliner devant cette sentence, car l’appel nous semblerait téméraire. Et pourtant le verdict qui nous condamne est bien sévère, et l’on a omis de nous accorder le bénéfice des circonstances atténuantes.

N’est-ce point l’esprit d’ordre, d’économie, d’épargne, encore caractéristique des sages populations de nos campagnes, qui a fait si longtemps de notre province la terre classique de la chicane et par suite le paradis des procureurs ? Quand on a pendant de longues années énergiquement travaillé, ahané sans cesse, pour nous servir d’un mot de terroir, afin d’acquérir le champ qu’on laissera à ses fils, n’est-on pas disposé à défendre son bien unguibus et rostro contre les empiètements d’un voisin ? Ce qui nous a coûté le plus de peines et de labeurs nous est toujours le plus cher.

Au moyen âge, la Normandie était, de toutes les contrées de la France, celle où relativement le paysan était le plus heureux (25). Il y devenait facilement propriétaire. Qui terre a, guerre a. Il n’y a donc pas lieu de s’étonner si La Roche-Flavin classait notre province parmi « les plus contentieuses et litigieuses de France. » Aussi, les poëtes et les auteurs dramatiques sont-ils venus chercher chez nous les types des plaideurs les plus intrépides.

C’est Boileau qui, dans le Lutrin, nous dépeint les Normands assiégeant sans cesse le Palais.

    Entre ces vieux appuis dont l’affreuse grand’salle
    Soutient l’énorme poids de sa voûte infernale,
    Est un pilier fameux des plaideurs respecté
    Et toujours des Normands à midi fréquenté.

C’est Racine, plaçant la scène des Plaideurs dans une ville de Basse-Normandie. Oui, Mme la comtesse de Pimbesche, Chicaneau et Dandin sont nos compatriotes, grâce à leur immortel créateur, et peut-être la fameuse enquête sur

    Le foin que peut manger une poule en un jour,

a-t-elle été inspirée par le grand prochez meu pour un nid de pie, cité par David Ferrand, le poëte purin, compilateur de l’Inventaire de la Muse normande (26).

A l’envi, les auteurs comiques ont imité Boileau et Racine, et depuis trois siècles c’est toujours un Normand qu’ils mettent sur la scène dès qu’ils veulent peindre quelque chicaneur endurci.

Les poëtes nous ont fait au loin cette réputation, mais ils ne sont pas les seuls.

Un des anciens directeurs de la Société des Antiquaires de Normandie, le savant et regretté M. Floquet, qui a si patiemment fouillé les papiers du greffe de la Cour d’appel de Rouen, nous a révélé bien des faits curieux sur l’esprit processif de nos pères. Dans les liasses poudreuses qui se sont accumulées pendant des siècles aux archives du Parlement de Normandie, il a saisi sur le vif nos plaideurs acharnés.

« En ce temps-là, dit-il (au XVIIe siècle), un vrai et bon Normand ne mourait pas sans avoir son petit procès au Parlement. Plus tôt, plus tard, il fallait de toute nécessité en passer par là ; c’était, voyez-vous, comme le voyage de la Mecque, où tout musulman fidèle doit aller une fois en sa vie. »

« Ah ! dit plus loin M. Floquet, qu’il connaissait bien les besoins de son époque, ce bon curé d’Avranches, Maître Jacques de Camprond, qui, en 1597, mit en lumière et dédia au Parlement de Rouen le Psautier du juste Plaideur, contenant, pour chaque jour de la semaine, un cantique de sa façon et quatre psaumes arrangés par lui, que l’honnête plaideur devait réciter exactement pour gagner son procès. Il ne manquait pas, dans ses prônes, d’en recommander la lecture à ses paroissiens, et il prêchait d’exemple, car il plaidait sans cesse, le bon curé, et sans cesse il récitait son Psautier du juste Plaideur ; ce qui (soit dit sans blasphème) ne l’empêchait point de perdre, çà et là, quelques procès sur la quantité (27).

Jacques de Camprond n’était pas le seul des ecclésiastiques normands à plaider avec acharnement et à se mêler sans cesse des contestations de ses paroissiens. Le mal était général (28).

Les évêques d’Avranches Roger d’Aumont, en 1646, et Gabriel-Philippe de Froulay de Tessé, en 1682, défendirent sous peine de suspense ipso facto aux curés de quitter leurs presbytères pour s’occuper « à la sollicitation des procès. »

Le second de ces prélats, dans ses Statuts synodaux, après avoir défendu aux ecclésiastiques de se faire solliciteurs de procès pour autrui, ajoutait : « La défense qui a été faite aux prêtres et aux ministres de l’Église... d’entreprendre aucune chose que par le conseil et consentement de leur évêque, nous met en droit d’employer notre autorité pour donner des bornes à l’humeur inquiète de quelques prêtres et autres ecclésiastiques de notre diocèse, qui aiment tellement les procès qu’ils en entreprennent pour des choses de peu de conséquence et les poursuivent avec une opiniâtreté insurmontable... Nous leur défendons... d’entreprendre, à l’avenir, aucun procès, sans nous avoir auparavant informé, ou nos doyens ruraux de la matière desdits procès... prétendant seulement empêcher qu’ils ne plaident sans une extrême nécessité et ne s’exposent aux reproches qu’on leur fait dans les tribunaux, d’être des plaideurs et même des chicaneurs. »

Ces défenses restèrent vaines et, quelques années plus tard, Pierre-Daniel Huet, dans ses Statuts synodaux de  l’an 1693, était obligé de dire (art.III) :

« Quelque prudent que soit l’ancien statut de ce diocèse qui défend aux ecclésiastiques, sous peine de suspense, d’entreprendre ou de poursuivre aucun procès sans nous en avoir informé..... nous les révoquons toutefois, non que notre intention soit d’autoriser l’esprit de chicane et de contention, qui ne règne que trop parmi les ecclésiastiques de ce diocèse, mais aimant moins les retirer de cette malheureuse disposition par la terreur de la peine, qu’en leur remettant devant les yeux les avis salutaires de saint Paul..... Nous avertissons ceux qui se rendent coupables de ce vice, et qui sont notés et diffamés dans ce diocèse par leur perverse inclination aux procès, que, s’ils ne s’en corrigent pas, nous les ferons connaître publiquement pour tels qu’ils sont, par les reproches que nous leur ferons devant toutes personnes et en toutes rencontres, afin de les faire regarder avec horreur comme l’opprobre de leur ordre (29). »

Hélas ! Huet, en édictant ces sages prescriptions, voyait la paille dans l’oeil de son clergé, il oubliait la poutre qui l’aveuglait. Ne sait-on pas, en effet, quel batailleur c’était que notre savant compatriote ? Ses Mémoires et sa volumineuse correspondance sont là pour en témoigner. Des procès, il en a eu toute son existence, et il a dépensé un temps incalculable à plaider contre ses moines de l’abbaye d’Aunay et de celle de Fontenay, contre ses voisins, contre ses amis, contre ses parents. Il s’est plaint, à la vérité, « de la pluie de procès », qui a été, dit-il, « l’affliction d’une partie de sa vie » ; mais, si Daniel Huet a été un érudit profond et un prélat recommandable par sa piété et la pureté de ses moeurs, son amour extrême des contestations n’en reste pas moins péremptoirement établi.

Si tel était l’esprit du clergé, quel était celui des fidèles ?

Ce n’est qu’en Normandie que l’on pouvait concevoir l’idée de translater la Coutume en vers, comme l’ont fait un rimeur du XIIIe siècle et un avocat du siècle dernier (30).

Nous pourrions citer mille exemples de procès interminables à la fin desquels vainqueurs et vaincus se trouvaient presque toujours ruinés. Deux nous suffiront ;

Voici d’abord une querelle de trois cents ans entre deux famille nobles des environs de Vire, les La Rivière et les du Rosel de Saint-Germain, au sujet de droits honorifiques. Outre les amours-propres en jeu, il y avait à trancher un point de liturgie, celui de savoir ce qu’on doit entendre par le côté droit et le côté gauche d’une église, et la question est plus délicate à résoudre qu’on ne le croirait au premier abord. « La justice prit son temps, dit notre savant confrère, M. Gaston Le Hardy, et les péripéties du procès furent telles qu’il s’écoula plus de deux siècles et que, de chaque côté, on dépensa plus de cent mille livres avant que le jugement définitif fût rendu. Ceux qui avaient entamé l’affaire étaient en parfait repos bien avant l’issue de cette interminable procédure ; elle avait tant impatienté les parties que ces gentilshommes, trop faciles à tirer l’épée, avaient eu recours maintes et maintes fois à l’argument du duel, et cinq ou six d’entre eux y avaient trouvé la mort (31). »

Second exemple, révélé récemment par un autre de nos confrères, M. le comte Gérard de Contades. En 1732, se terminait un procès relatif au compte de tutelle des enfants de messire Jacques-René de Montpinçon, baron de Lougé. Il y avait trente ans que l’on plaidait, et c’est quand les frais dépassaient plus de dix fois les sommes en litige que les parties avaient songé à un accord. Il ne fallut pas moins de dix journées pour examiner le compte et les pièces du dossier. Tout cela, pour 833 livres 19 sous (32) !

Après le clergé et la noblesse, passons au tiers-état et continuons à enregistrer les observations de nos devanciers, ne voulant pas nous exposer pour notre propre compte à un bel et bon procès que voudrait peut-être nous intenter un des représentants actuels des familles Pimbesche ou Chicaneau.

Selon MM. Galeron, Pluquet, Canel et vingt autres (33), la passion de la chicane règne en souveraine dans les campagnes de la Basse-Normandie. C’est là que M. Pluquet a rencontré les hommes les plus processifs qu’il y ait au monde. « Pour une vétille, dit-il, pour la plus légère discussion, ils vous menacent du sergent, et il faut, disent-ils, que la gueule du juge en pette. Ces hommes, simples en apparence, sont familiarisés avec les termes les plus ardus de la chicane ; ils parlent de pétitoire, de possessoire, de déclinatoire, d’action récursoire et de référés, aussi bien qu’un vieil huissier. » Mais si le Normand aime encore trop la procédure, si les familles se poursuivent de leur haine devant les tribunaux pendant plusieurs générations, au moins nous n’avons plus à déplorer dans notre province ces violences contre les personnes, qui, ailleurs, n’ont trop souvent de fin qu’avec l’extinction des races rivales. « Dans certains pays, dit M. Émile de La Bédollière, on s’égorge ; en Normandie, on plaide. On y combat à coups d’assignation, comme en Italie à coups de stylet. Le mot vendetta s’y traduit par procès (34). » N’est-ce pas préférable ?

Ne nous fâchons donc point quand on nous dira : Normand, j’y mangerai plutôt ma dernière chemise, et plaidons, si le coeur nous en dit.

    Soutenons bien nos droits : sot est celui qui donne,
    C’est ainsi devers Caen que tout Normand raisonne.
    Ce sont là les leçons dont un père Manceau
    Instruit son fils novice au sortir du berceau.

Ainsi parle Boileau, et il savait à quoi s’en tenir sur la chicane et les chicaneurs, lui,

    Fils, frère, oncle, cousin, beau-frère de greffier.

Ne nous ruinons pas cependant en papier timbré ; mais, si parfois nous payons des frais de procédure, du moins nous n’aurons pas les mains rouges du meurtre de l’adversaire et nous n’aurons pas à racheter le « prix du sang. » La justice paix est moins dangereuse à fréquenter que la cour d’assises.

Au temps jadis, lorsqu’une législation beaucoup moins douce usait et abusait de la potence, les prêtres normands, disait-on, et en particulier ceux de Domfront, faisaient payer l’enterrement en même temps que le baptême parce que leurs ouailles avaient l’habitude de se faire pendre. Hâtons-nous d’ajouter qu’on se faisait pendre bien ailleurs qu’en Normandie. A Paris, il n’était pas de jour où les habitués de la place de Grève chômassent de spectacle. La corde, ce supplice des roturiers, avait même été ennoblie par d’éclatantes infortunes. Samblançay, dont l’innocence fut bientôt reconnue, n’avait-il pas été pendu, victime de l’ingratitude de François Ier et de la reine-mère ? Et, au siècle dernier, un gentilhomme de grande maison ne disait-il pas un jour : « Qui est-ce qui n’a pas un pendu dans sa famille ? »

Les Normands se trouvaient donc parfois en honnête compagnie quand ils

    Dansaient la sarabande à cinq pieds du pavé,

comme dit Regnard, et lorsque

    Le privilège des Normands
    Était de mourir hauts et grands.
    Quelqu’un venait à disparaître ?
    Le chien quêtait en l’air son maître (35).

Voilà pourquoi, en prévision de leur destinée, les Normands naissaient avec un grain de chènevis dans une main et un gland dans l’autre. Le chènevis se transformait en chanvre, et le chanvre devenait corde ; du gland naissant un chêne, et du chêne on faisait une potence.

Et le chanvre s’appelait alors la salade normande. « Queu chienne de salade, s’écriait un Bas-Normand !

Elle a étranglé mon père, et mon grand-père, sans parler des oncles et des cousins ! »

Et l’on chantait sur l’air de Geneviève de Brabant :

    Or, écoutez, petits et grands,
    Le catéchisme des Normands,
    Peuple connu dans notre France
    Par la chicane et la potence.
    C’est la double inclination
    De cette noble nation.

La Révolution, tout en laissant aux coupables la liberté de se faire condamner, leur imposa l’égalité devant le supplice. On peut bien dire encore de quelqu’un, et même d’un Normand : « Qu’il aille se faire pendre ! – C’est un homme à pendre ! – Il ne vaut pas la corde pour le pendre ! » Il n’y a plus de gibets, et, de nos jours, quand on veut avoir de la corde de pendu, ce n’est plus à Montfaucon qu’il en faut aller chercher. On doit se mettre à la piste des suicidés pour posséder cet incomparable talisman, qui assure la chance au jeu. Le meilleur est, comme chacun sait, la corde qui a fait passer de vie à trépas les amoureux désespérés.

On ne peut donc plus dire : N’allez pas à Domfront, parce qu’à Domfront on pend les gens sur la mine, ni reprocher aux juges de pendre par provision, comme à Vire, nonobstant appel, ainsi que cela arriva aux magistrats de cette ville, le 20 janvier 1606, pour un nommé Guillaume Le Coix, de la paroisse de Caligny, qu’un puissant complice, le sieur de Crux de Bellefontaine, voulait arracher par la violence aux griffes de la justice (36).

Cependant, Domfront restera éternellement célèbre par ce dicton si connu :

       Domfront, ville de malheur,
    Arrivé à midi, pendu à une heure,

Dicton qui offre plusieurs variantes. On ajoute parfois :

    Pas seulement le temps de dîner.

Ce qui justifierait cet autre proverbe :

    Qui a fait Normand
    A fait gourmand.

Il est difficile de préciser aujourd’hui le fait qui donna naissance à ce brocard sur Domfront. L’opinion la plus vraisemblable est qu’il date des guerres de religion. Toutefois, une variante très-répandue de ce proverbe semble lui donner une autre origine. C’est :

        Domfront, ville de malheur,
            Arrivé à midi, pendu à une heure.
    Quoi donc qu’il avait fait ? – Il avait volé un licou.
    Il n’avait fait qu’çà ? – La vaque était au bout.

Cette circonstance aggravante excuse la sévérité de la sentence.

Ne restons pas sur ces impressions défavorables. Malgré les baratteurs (trompeurs) de Pommainville (37), de La Selle (38) et de dix autres villages de la Normandie, haute et basse, malgré les fraudeurs de Saint-Germain d’Aunay (39), malgré les pipeurs de Saint-André-de-Briouze (40), malgré les fripons de la Trinité (41) et de Vrigny (42), et cent dictons injurieux de même nature, et, quoique on répète encore :

        Qui fit Normand
        Il fit truand,

rappelons-nous qu’on dit aussi :

    Les francs et loyaux Sagiens
    On tous le coeur sur les mains, (43)

et :

        A Lengronne,
            Tout le monde donne ; (44)

car il y a de bonnes gens partout, comme dit le Normand.

Et, d’ailleurs,

    Si bonne n’estoit Normandie,
    Saint Michel n’y seroit mie.

N’appelle-t-on pas encore notre province : Normandie, pays de sapience ? Cela efface bien l’épithète de pays d’empoigne, qu’on lui donne si souvent. Oui, Messieurs, nos pères ont toujours aimé la science ; aussi sommes-nous, pour notre part, disposé à leur pardonner bien des défauts.

Au XIIIe siècle, on lisait dans le Dit de l’Apostoile : Li plus enquerant en Normandie : où aliax ? que queriax ? d’où veniax ? Laissez-nous croire que cette curiosité, déjà signalée chez les Gaulois par Diodore de Sicile (45) et par César (46), était uniquement inspirée par un louable désir de s’instruire.

Enfin, n’oublions pas que notre chère et bonne cité de Caen s’appelle encore l’Athènes normande, la Ville de sapience.

Messieurs, il n’est pas permis de douter de l’exactitude de ce dicton populaire, quand on se trouve au milieu de vous, dans l’enceinte de cette Université de Caen, quatre fois séculaire et illustrée par tant de générations de maîtres érudits et de disciples distingués, dans cette salle de la Faculté de Droit, rendue célèbre entre toutes par l’enseignement de M. Demolombe, l’éminent jurisconsulte qui est l’une des gloires de notre France moderne.


NOTES :
() Ce travail a été lu dans la séance publique tenue, le 16 décembre 1880, par la Société des Antiquaires de Normandie.
(1) Le mot fut dit par Dufresny et ne tarda pas à devenir proverbe. On sait que cet auteur épousa en secondes noces sa blanchisseuse pour s’acquitter de trente pistoles qu’il lui devait, trait que Lesage a rapporté dans son Diable boiteux. Du reste, l’infortune de Dufresny venait de sa mauvaise conduite et Voltaire a eu raison de dire de lui :

    Et Dufresny plus sage et moins dissipateur
    Ne fût pas mort de faim, digne mort d’un auteur.

Louis XIV, au récit des prodigalités de l’arrière-petit-fils de la Belle Jardinière d’Anet et de Henri IV, disait : « Il y a deux hommes que je n’enrichirai jamais, Bontems et Dufresny. »
(2) Il existe un recueil de proverbes intitulé : Le Brahme voyageur ou la Sagesse populaire de toutes les nations, par Ferdinand Denis ; Paris, 1832, in-18, de 108 pages. Ce recueil avait d’abord paru avec un Essai sur la philosophie de Sancho, qui a été reproduit dans les pièces préliminaires de la première édition du Livre des proverbes français, de M. Le Roux de Lincy, p. vij-xxvij.
(3) Sur un personnage proverbial nommé Tout-le-Monde, vacquier de Chauny, V. M. l’abbé Jules Corblet, Glossaire étymologique et comparatif du patois picard ancien et moderne ; Paris, 1851, in-8°, p. 186-187, et le très-intéressant livre de M. Édouard Fleury, Origines et développements de l’art théâtral dans la province ecclésiastique de Reims ; Laon, 1881, p. 244-261.
(4) V. à ce sujet les nombreux recueils parémiographiques et notamment Le Livre des proverbes français précédé de recherches historiques sur les proverbes français et leur emploi dans la littérature du moyen âge et de la renaissance, par Le Roux de Lincy ; Paris, A. Delahays, 1859, 2e édit., 2 vol. gr. in-16.
(5) On trouve la description de la plupart des collections de proverbes dans la Bibliographie parémiologique, études bibliographiques et littéraires sur les ouvrages, fragments d’ouvrages et opuscules spécialement consacrés aux proverbes dans toutes les langues, par G. Duplessis ; Paris, 1847, in-8°. Depuis la publication du travail de M. Duplessis, il a paru un grand nombre de recherches sur les dictons populaires et les proverbes historiques.
(6) Les Hongrois, qui se livraient à d’incessantes invasions en Allemagne, en Italie et en France pendant la première partie du moyen âge et qui se vantaient d’être les successeurs d’Attila, se donnaient à eux-mêmes le titre de fléaux de Dieu. Voici à ce sujet une curieuse anecdote empruntée à l’histoire de la lutte d’Henri l’Oiseleur, duc de Saxe, élu empereur d’Allemagne, contre son compétiteur Arnoulf le Mauvais, duc de Bavière, qui se termina par la défaite et la mort de ce dernier. « Parmi les prisonniers étaient Leel et Bolchu, célèbres par leur naissance et leur courage. L’empereur voulut voir ces deux guerriers et leur demanda quel outrage ils avaient reçu des chrétiens pour venir ainsi dévaster leurs terres. « Nous sommes, dirent-ils, comme le fut Attila, les fléaux de Dieu ! » L’empereur irrité leur répondit qu’ils n’avaient plus qu’à mourir, mais que, cependant, il leur laissait le choix du supplice. Alors Leel demanda la trompette dont il se servait dans les combats pour exciter ses compagnons, et déclara qu’il dirait ce qu’il voulait en faire quand on la lui aurait donnée. Aussitôt qu’il l’eut entre les mains, il sauta sur l’empereur et le frappa à la tête. Le coup fut rude ; Henri tomba, et Leel s’écria : « Meurs donc, va annoncer aux enfers ma prochaine arrivée et prépare-toi à m’y servir. » On se jeta sur lui et sur Bolchu ; le peuple les entraîna à Ratisbonne où ils furent étranglés. » L. Dussieux, Essai historique sur les invasions des Hongrois en Europe et spécialement en France ; Paris, V. Lecoffre, 1879, in-8°, 2e édit., p. 35.
(7) Bibliothèque municipale de Rouen, ms. Y 20-92.
(8) Jacques de Charron, Histoire de toutes les nations ; Paris, 1621, in-8°, p. 832, D.
Le même verset se trouvait dans l’ancien paroissien du diocèse de Chartres, au milieu des Litanies de la sainte Vierge et n’en fut effacé qu’en 1773, par ordre du Chapitre. Il y existait depuis le temps où le pirate normand Hasting assiégea et saccagea la ville de Chartres, en 855.
(9) Wace, Le Roman de Rou, édit. Pluquet, t. II, p. 70, v.9899-9901.
(10) Les Recherches de la France, liv. I, chap. XII, dans les oeuvres d’Estienne Pasquier ; Amsterdam, 1723, in-f°, t. I, p. 36, D.
(11) Catéchisme des Normands, composé par un docteur de Paris. S. l. n. d. : in-12 de 12 pages. Ce livret a été réimprimé plusieurs fois, notamment dans la collection de la Bibliothèque bleue, imprimée à Caen, chez Chalopin.
A la fin, on trouve, en général, l’approbation suivante, qui manque dans l’édition de Chalopin :
APPROBATION DES DOCTEURS.
« Nous soussignés Docteurs du pays et Duché de Normandie, certifions avoir vu le présent Catéchisme des Normands, lequel est entièrement conforme à l’usage de Normandie : en foi de quoi avons permis et permettons la lecture par permission des Docteurs de Caën, d’Évreux, d’Avranches, Bayeux, Falaise et Pont-Croix. Signé : SOTTAYSE et TORAB. »
Il n’existe pas, croyons-nous, en Normandie, de localité appelée Pont-Croix ; mais il y a un chef-lieu de canton de ce nom dans l’arrondissement de Quimper (Finistère). D’un autre côté, la dernière signature des soi-disant docteurs est l’anagramme de Barot, nom d’homme assez répandu. Le Catéchisme des Normands serait-il l’oeuvre d’un Barot, originaire ou habitant de Pont-Croix ? Nous soumettons ce problème aux bibliographes normands et bretons. Quoi qu’il en soit, la première édition connue de ce pamphlet, citée dans le Manuel du Bibliographe normand, t. I, p. 197, a été, suivant Édouard Frère, imprimée, vers 1700, à Rouen, par Jacques Besongne. Frère cite les réimpressions suivantes de cet opuscule : Troyes, Oudot, vers 1730, petit in-12, suivi du Catéchisme des Maltôtiers ; - Rouen, Lecrêne-Labbey, s. d. (1817) ; in-18 de 12 pages (Bibliothèque bleue). A la fin, on a ajouté une note qui justifie le caractère normand, non moins estimable que celui des habitants des autres provinces. – Paris et Mirecourt, Humbert, 1837 ; in-18 de 10 pages ; - Tours, Charles Placé, 1837 ; in-18 de 10 pages. Nous avons parlé plus haut des réimpressions dues aux presses de Chalopin. Il existe encore une autre édition : Sillé, Deforge, s. d. (1818), in-12, de 12 p., que Frère semble n’avoir pas connue.
Le Catéchisme des Normands a été, en outre, inséré dans les Variétés historiques et littéraires, publiées par Édouard Fournier ; Paris, P. Jannet, 1856 ; t. VI, p. 173-180.
Dans son Histoire des livres populaires ou de la littérature du colportage ; Paris, Amyot, 1854 ; t. I, p. 379-383, M. Charles Nisard s’est occupé de ce pamphlet, l’a analysé et en a cité plusieurs passages. « C’est une satire sanglante, dit-il, contre les inclinations naturelles de la nation normannique, pour parler comme l’auteur, mais une satire où l’infamie du but qu’on s’y propose et la violence outrée des expressions n’ont pas permis qu’il se glissât un seul trait salé et non pas même un peu spirituel. L’auteur paraît avoir écrit sous l’impression de quelque vieille rancune pour un procès qu’il aura eu avec un Normand et qu’il aura perdu. C’est la seule justification possible de son libelle. Il serait encore plus coupable s’il l’avait fait de sang-froid et seulement pour payer tribut au préjugé qui s’attache à l’esprit processif des Normands ; car alors il serait démontré, non-seulement qu’il n’a pas voulu être spirituel, mais encore qu’il ne l’a pas pu..... Le livret dont il est question est divisé en sept chapitres. Le premier n’a pas de titre ; chacun des autres a le sien, et ces titres sont : Du signe du Normand ; De la fin du Normand ; Des moyens de parvenir à cette fin ; De l’espérance du Normand ; Des bonnes oeuvres du Normand ; Des oeuvres de miséricorde du Normand. »..... « J’aime à croire, ajoute en terminant M. Ch. Nisard, pour l’honneur de la Normandie, qu’on n’y a jamais souffert qu’on y colportât de pareilles horreurs, comme aussi que les colporteurs ont été assez prudents pour ne jamais l’oser. Mais n’est-ce pas une honte qu’on les réimprime et le comble de l’audace qu’on les présente à l’estampille ? » Hélas ! M. Nisard se trompe. On a toujours imprimé et colporté le Catéchisme des Normands dans notre province, et, malheureusement, on l’y imprimera et on l’y colportera longtemps encore. Après tout, si ce pamphlet manque de sel, il est moins dangereux à laisser entre les mains du peuple que les ignominies pleines d’excitations immorales, irréligieuses et antisociales que les porte-balles vendent deux sous dans les campagnes, quand ils ne les distribuent pas gratuitement.
Le savant Gabriel Peignot a défendu notre province de l’accusation d’avoir donné naissance à l’apôtre Judas.
« Quelques esprits saugrenus ou mauvais plaisants, dit-il, ne se sont-ils pas avisés de placer aussi dans notre belle France le berceau du perfide Judas ! Il y a tout au plus cent ans que l’on disait encore dans l’Anjou et le Maine, que Judas Iscariote était né à Sablé (Sarthe), et même on cite en preuve ce vers :

    Perfidus ille Judas Sabloliensis erat.

« Heureusement pour Sablé, cette preuve poétique n’est pas péremptoire, et n’équivaut point à un certificat de naissance bien légalisé.
« On dit encore que les Bretons, parfois en bisbille avec les Normands, ont prétendu que ledit Judas était né entre Caen et Rouen, et on cité à l’appui ce couplet d’une vieille chanson :

                Judas était normand,
                Tout le monde le dit ;
        Entre Caen et Rouen ce malheureux naquit,
        Il vendit son Seigneur pour trente marcs comptants ;
            Au diable soient sous les Normands !

« Cette pièce lyrico-populaire n’est pas plus probante que le vers précédent. En général, il serait difficile de remonter à la source de ces plaisanteries satiriques qui, au reste, n’ont jamais eu cours que dans les plus bas étages de la société, et qui sont tout à fait insignifiantes. » G.-P. Philomneste, Predicatoriana ; Dijon, 1841, in-8°, p. 377-378.
(12) Les Illustres Proverbes nouveaux et historiques ; expliquez par diverses questions curieuses et morales en forme de dialogue, qui peuvent servir à toutes sortes de personnes pour se divertir agréablement dans les compagnies ; Paris, N. Pépingué (ou René Guignard), 1656, 2 vol. in-12. D’après M. Duplessis, op. cit., p. 174-176 et 179-180, ce livre n’est qu’une reproduction textuelle de l’ouvrage estimé de Fleury de Bellingen, intitulé : L’Étymologie ou Explication des Proverbes françois, divisée en trois livres par chapitres en forme de dialogue. Avec une table de tous les proverbes contenus dans ce traicté ; La Haye, Adrien Vlacq, 1636, petit in-8°. Une première édition beaucoup moins complète avait paru sous le titre de Premiers essais de Proverbes, par Fleury de Bellingen ; La Haye, 1653.
(13) In-12, s. l. n. d. Il existe de cet opuscule un grand nombre de copies, mais les exemplaires imprimés en sont fort rares et, malgré toutes nos recherches, nous ne pouvons le citer que d’après Canel, qui devait lui-même à feu M. Georges Mancel, bibliothécaire de la ville de Caen, les extraits qu’il donne de ce pamphlet et que nous lui empruntons à notre tour.
(14) Un normand n’a plus qu’à mourir de faim quand son bras droit se paralyse, dit un autre proverbe.
(15) Blason populaire de la Normandie, comprenant les proverbes, sobriquets et dictons relatifs à cette ancienne province et à ses habitans, par A. Canel ; Rouen, A. Le Brument ; Caen, Le Gost-Clérisse, 1859, 2 vol. in-8°. Canel avait précédemment publié, en 1840, dans le Recueil de la Société d’Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres de l’Eure, un article de quelques pages sur la Chicane et les Normands.
(16) Origines de quelques coutumes anciennes et de plusieurs façons de parler triviales, par Moisant de Brieux....., avec une Introduction biographique et littéraire, par M. E. de Beaurepaire, un Commentaire et une Table analytique, par M. G. Garnier ; Caen, Le Gost-Clérisse, 1874, 2 vol. petit in-8°.
(17) « Les jureurs de Bayeux, c’est-à-dire que les bons Bas-Normands de cette ville ne se faisoient pas prier pour lever la main devant le juge, et promettre à Dieu, sur leur part de paradis, de dire la vérité ; et ils juroient plutôt trois fois qu’une. Ils avoient encore la réputation de faire abus des faux témoignages. Or, ce n’est que l’abus d’une chose qui en fait le mal ; et si les Bas-Normands s’étoient contentés d’un usage modéré des faux sermens, comme cela se pratique à Paris et autres villes de belle société, d’industrie et de commerce, foyers de civilisation et de lumières, ces Normands de Bayeux n’auroient pas mérité exclusivement la dénomination de jureurs. » G.-A. Crapelet, Proverbes et Dictons populaires, avec les Dits des merciers et des marchands et les crieries de Paris, aux XIIIe et XIVe siècles ; Paris, 1835, gr. in-8°, p. 50.
(18) Vouilly, arrondissement de Bayeux (Calvados). « Le sobriquet des habitants de Vouilly, dit Canel, op. cit., t. II, p. 168, n’est pas sans analogie avec celui de Jureurs, appliqué, dans le XIIIe siècle, aux habitants de Bayeux. »
(19) Montgaroult, arrondissement d’Argentan (Orne).
(20) Survie, arrondissement d’Argentan (Orne).
(21) Bretoncelles, arrondissement de Mortagne (Orne).
(22) St-Jean-des-Baisans, arrondissement de St-Lo (Manche). Canel n’a pas mentionné ce dicton que nous avons, pour notre part, entendu répéter maintes et maintes fois dans toute la Basse-Normandie.
(23) Tinchebray, arrondissement de Domfront, Orne).
(24) Orderic Vital, liv. XIII, apud Duchesne, Historiæ Normannorum Scriptores antiqui, p. 865.
(25) Il est facile de se convaincre de cette vérité en consultant le chef-d’oeuvre d’érudition d’un Normand, les Études sur la condition de la classe agricole et l’état de l’agriculture en Normandie au moyen âge, par M. Léopold Delisle, ainsi que les remarquables travaux de M. Charles de Beaurepaire, archiviste du département de la Seine-Inférieure.
(26) Le Procès, anecdote normande, par M. A. Floquet, dans le Précis des travaux de l’Académie de Rouen, année 1834, p. 126-135. Cette cause fut plaidée, en 1629, devant le Parlement de Rouen. D’après ce que Canel dit de ce grave débat, les petits piars firent défaut aux conclusions des parties et mirent celles-ci d’accord en prenant la clé des champs.
(27) Jacques de Camprond ou Camp-Ront, prêtre du diocèse d’Avranches, a composé un livre de jurisprudence des plus bizarres, intitulé : Jacobi de Camp-Ront, Presb. abrincencis. Psalterium juste litigantium. Quo ex libro consolatio peti ab iis potest, quibus res est sæpe et pugna gravis cum adversariis tum visibilibus tum invisibilibus, in hoc seculo. Ad amplissimos et ornatissimos viros in supremo Normanniæ senatu Rotomagi considentes. Parisiis, Jam. Mettayer, 1597, petit in-12 de 66 ff., avec 6 ff. prélim. et 2 gravures assez jolies. A la fin du volume se trouve un chapitre avec pagination spéciale et intitulé : Explicatio litis. M. Dupin aîné s’est occupé de ce livre aussi rare que singulier dans ses Règles de droit et de morale, Paris, 1857, p. VI, et dans sa Bibliothèque choisie des ouvrages de droit. V. aussi les Curiosités judiciaires, par C.-B. Warée. Paris, Delahays ; pet. in-8°, 1858, p. 345.
(28) « Le voisinage de la Normandie, dit Canel, op. cit., p. 46, n’était pas moins processif que la Normandie elle-même ; témoin, cet évêque de Chartres (1459-1493), Miles d’Illiers, lequel, dit Bonaventure des Périers, avoit des procès un million et disoit que c’estoit son exercice, et prenoit plaisir à les veoir multiplier, tout ainsi que les marchands sont aises de veoir croistre leurs denrées : et dit-on qu’un jour le roy les lui voulut apoincter : mais l’évesque ne prenoit point cela en gré, et n’y voulut point entendre, disant au roy que s’il lui ostoit ses procès, il lui ostoit la vie. Toutesfois, à force de remonstrances et de belles paroles, il consentit à ses appoinctements de mode qu’en moins de rien luy en feurent que vuydez que accordez, que amortiz deux ou trois cens. Quand l’évesque veid que ses procès s’en alloient ainsi à néant, il s’en vint au roy, le suppliant à jointes mains qu’il ne les luy ostast pas tous, et qu’il lui pleust au moins luy en laisser une douzaine des plus beaux et des meilleurs pour s’esbattre. »
Rabelais fait dire à Pantagruel : « ...... ie vous prirois voluntiers que de debtes me laissez quelque centurie : comme le roy Loys vnzieme iectant hors de procès Miles d’Illiers euesque de Chartres, feut importuné luy en laisser quelque vn pour se exercer. » Pantagruel, liv. III, ch. v, édit. Marty-Laveaux ; Paris, Lemerre, t. II, p. 37.
(29) Statuts synodaux pour le diocèse d’Avranches, lus et publiés dans le synode tenu à Avranches, le 23 novembre M.DC.XCIII. Caen, Jean Cavelier, 1693, petit in-8° de 4 ff., prélim. et 119 p.
(30) La traduction de la Coutume de Normandie en vers français est due soit à Guillaume Cauph, jurisconsulte du XIIIe siècle, soit à Richard d’Annebault que, quelques-uns appellent à tort Dourbault, poëte normand de la même époque. V. à ce sujet : Frère, Manuel du Bibliographe normand, t. I, p. 201 et 373 ; - De La Rue, Essais historiques sur les Bardes, etc., t. III, p. 180-187 ; - les Mémoires de l’Académie des Inscriptions, t. II, p. 734 ; - Houard, Dictionnaire de droit normand, t. IV, suppl., p. 49-158, etc.
Frère ajoute à la fin de l’article qu’il a consacré à Richard Dourbault, dont il fait un jurisconsulte, et que nous croyons être le poëte Richard d’Annebault : « Dans le XVIIIe siècle, un avocat au Parlement de Rouen, s’est amusé à mettre en vers une partie de la Coutume de Normandie. Les manuscrits qu’on en rencontre portent le titre suivant : Coutumes de Normandie en rimes françoises avec des notes sur l’étymologie et la propriété des termes, le tout pour faciliter l’intelligence et la mémoire de ceux qui désirent l’apprendre en peu de temps, par M. L. P. M. L’exemplaire de notre bibliothèque est divisé en 622 articles. »
(31) V. à ce sujet une note de M. Julien Travers intitulée : Que faut-il entendre par le côté droit et le côté gauche d’une église ? communiquée, le 10 avril 1874, à la réunion des Sociétés savantes à la Sorbonne, et insérée dans le Bulletin de la Société des Antiquaires de Normandie, t. VII, p. 121-129.
M. Gaston Le Hardy a bien voulu nous communiquer le Mémoire pour Messire Clément de La Rivière, Chevalier, Seigneur Haut Justicier et Patron de Mevaine, Anelle et Maronne, Mesnilsalles, les Isles et Romilly, Seigneur et Patron de Saint-Germain en partie, à cause du fief de Gouvi. Et pour Messire Philippe, Chevalier, Seigneur de La Rivière, son fils. Contre Dame Marie de Prépetit, veuve de Guillaume du Rosel, Écuyer, Seigneur et Patron de Saint-Germain en partie, de Vauldry, et Vissoüy, Tutrice de leurs Enfans mineurs. Et contre Charles du Rosel, Écuyer, l’un de ses fils devenu majeur ; s. l. n. d., in-f° de 15 p. Ce mémoire donne des détails fort curieux sur la lutte qui durait entre les La Rivière et les du Rosel depuis le XVIe siècle au sujet des droits honorifiques dans l’église de St-Germain-du-Crioult (arrondissement de Vire, Calvados). Il est très-malveillant pour la famille du Rosel et assez injuste sur ce point ; car la noblesse d’ancienne extraction des gentilshommes de cette maison avait été reconnue par Montfaut, en 1463, puis par Chamillart, en 1666. Divers pasteurs de la paroisse n’y sont pas non plus épargnés.
(32) Notice sur la commune de Saint-Maurice-du-Désert, par le comte G. de Contades. Paris, H. Champion, 1880 ; pet. in-8° carré, p. 105.
(33) Frédéric Galeron, Statistique de l’arrondissement de Falaise ; Falaise ; in-8°, t. II, p. 26, 43, 62 et 70 ; - Annuaire de l’Orne, de 1809 ; - Annuaire normand ; - Frédéric Pluquet, Essai historique sur la ville de Bayeux et son arrondissement ; Caen, Chalopin, 1829 ; in-8°, p. 337 et passim, et Contes populaires, traditions, proverbes et dictons de l’arrondissement de Bayeux ; Caen, 1825 ; in-8° ; et Rouen, 1834, passim.
(34) Émile de La Bédollière, Le Normand, dans Les Français peints par eux-mêmes. Province. Paris, Curmer, 1841 ; t. II, p. 134.
(35) Nous avons le regret de n’avoir pu retrouver en entier le texte de cette plaisante chanson qui avait été publiée, croyons-nous, dans un almanach.
(36) Caillebotte, Essai sur l’histoire de l’industrie du Bocage, p. 326. A propos de cette singulière sentence dont il est question dans La Coutume réformée, commentée par J. Bérault, J. Godefroy et d’Aviron, au titre de Juridiction, p. 39 de l’édit. de 1684. Canel, op. cit., t. II, p. 167, dit : « Nous ajouterons que l’on reconnut des circonstances atténuantes pour les juges de Vire ; car ils ne furent condamnés qu’à l’amende et à la suspension pour une année. »
(37) Pommainville, arrondissement d’Argentan (Orne).
(38) La Selle, arrondissement de Domfront (Orne).
(39) St-Germain-d’Aunay, arrondissement d’Argentan (Orne).
(40) St-André-de-Briouze, arrondissement d’Argentan (Orne).
(41) La Trinité-sur-Airon, arrondissement d’Avranches (Manche).
(42) Vrigny, arrondissement d’Argentan (Orne). M. Canel, op. cit., t. II, p. 169, fait remarquer que ce sobriquet pourrait bien être dérivé du proverbe que voici : Comme dans la famille de Vrigny, il y en a un bon et un mauvais.
(43) Allusion aux armes de la ville de Séez (Orne).
« Nous trouvons pour la ville de Séez trois descriptions d’armoiries qui n’ont entre elles aucun rapport.
« Pierre Delaplanche lui attribue : De gueules, aux figures des saints Gervais et Prothais, d’or, vestus de tuniques, tenant chacun une palme d’or ; au chef d’azur, à trois fleurs de lys d’or..... »
« Les armoiries que d’Hozier donne à la ville de Séez sont celles-ci : D’aur, à trois lys d’argent tigés et feuillés d’or.
« Mais ont-elles jamais été employées ? Le fait paraît douteux. Du moins, M. Maurey d’Orville, auteur de Recherches sur la ville et le diocèse de Séez, n’en fait aucune mention ; il affirme au contraire, que Séez porte : D’azur à la foi (ou bonne foi) en fasce, sur laquelle se repose un coeur enflammé : le tout surmonté d’une fleur de lis d’or, en chef.
« Les détails, qui, dans l’ouvrage cité, accompagnent cette description, semblent indiquer que l’auteur n’émet pas une opinion isolée : « L’origine de ces armoiries, dit-il, n’est guère connue. La devise : Nihil nobis tollit tempus, qui, dit-on, accompagnait l’écu, n’a rien d’authentique. » - Et, plus loin, il ajoute : « La réputation que s’étaient acquise les Sagiens lorsque César envoya P. Crassus avec sa treizième légion pour prendre ses quartiers d’hiver dans leur pays, comme in pacatissima et quietissima parte ; la douceur de leur caractère, remarquée par Robert Cenalis et Belleforest, chez un peuple qui ne respirait que la guerre, et ce qu’a depuis répété Bry de La Clergerie dans son histoire du Perche : Les Sagiens n’ont jamais trempé dans les rébellions civiles, mais ont toujours suivi fidèlement et courageusement la fortune de leurs rois ; tous ces motifs contribuèrent nécessairement par la suite à leur faire concéder les armoiries qu’on a retrouvées sur une ancienne lettre de jurande d’un habitant de Séez et dont on fit graver une empreinte. Ajoutons à cela cet antique et trivial dicton :

        Les francs et loyaux Sagiens
        Ont tous le coeur sur les mains.

« A l’égard de la devise : Nihil nobis tollit tempus, si elle n’est pas authentique, elle n’en est pas moins rendue vraisemblable par la conduite qu’ont tenue dans tous les temps les habitants du diocèse de Séez..... »
« L’auteur paraît trop certain de l’authenticité des armoiries qu’il attribue à la ville de Séez pour que nous n’adoptions pas nous-même sa description, de préférence à celles que nous avons empruntées à d’Hozier et à P. Delaplanche.
« Dans l’Armorial national,  la bonne foi, le coeur enflammé et la fleur de lys sont indiqués d’or.
« Pour en revenir à la devise de Séez, nous dirons que M. du Hays nous a signalé celle-ci : Grand coeur et bonne foi, indiquée dans un manuscrit du XVIe siècle ; mais c’est la suivante : Crescit honos, que le maire, M. Pichon de Prémeslé, a fait placer, il y a peu de temps, sur la façade de la mairie. » A. Canel, Armorial des villes et corporations de la Normandie ; Paris, 1863 ; in-8°, 2e édit., p. 243-245.
(44) Lengronne, arrondissement de Coutances (Manche).
(45) Diodore, C. VI, c. IX.
(46) De bello gallico, IV, c. v.
    

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