Jean-Jacques ROUSSEAU
(1712 - 1778)
Le Devin du Village
(1752)
Texte de l'édition Des Oeuvres complètes
de J.-J. Rousseau
par P. R. Auguis
à Paris
chez DALIBON, libraire
de S.A.R Monseigneur le duc de Nemours,
rue Saint-André-des-Arcs, no 41
MDCCCXXV
(Bibl. Institut et Musée Voltaire, Genève)
AVIS DE L'ÉDITEUR.
Rousseau, dès sa première jeunesse, eut pour la musique un goût qu'il conserva toute sa vie. Voulant connaître à fond cet art, en vaincre les difficultés, en rendre à ceux qui désireraient de le cultiver, l'étude facile et prompte, il s'en occupa d'abord presque exclusivement; et le résultat de son application et de ses recherches fut la proposition de substituer de nouveaux signes aux anciens. De la théorie il passa à la pratique, et composa le Devin du village. Le succès prodigieux et mérité de cette pastorale qu'on revoit encore avec plaisir, éveilla l'envie, et bientôt on contesta le talent de Jean-Jacques, et l'on prétendit que s'il était l'auteur des paroles, il ne l'était pas de la musique.
M. Musset-Pathay, dans son Histoire de la Vie et des Ouvrages de J.-J. Rousseau, a rendu compte des chicanes qu'on lui fit à ce sujet, et des circonstances dans lesquelles il composa ses divers ouvrages sur la musique.
Nous avons cru devoir classer dans l'ordre où ils furent composés, les Fragments d'Iphis et la Découverte du Nouveau Monde, qui n'ont jamais été représentés; les Muses galantes, qui parurent trois fois; le Devin du village, qui continue à jouir de la faveur des amateurs, à cause de la musique, et Pygmalion qu'on revoit encore quelquefois sur la scène.
Rameau, le baron d'Holbach, Grimm, et la société des dîneurs du baron ont inutilement tenté de faire croire que Rousseau avait pillé la musique du Devin du village; on n'a vu dans l'acharnement de ses détracteurs, qu'un sentiment de jalousie envers un homme dont la supériorité littéraire était universellement reconnue.
Il est étonnant que Jean-Jacques, seul, sans appui, ait triomphé de tant d'obstacles, et cela sans répondre un mot. Il croyait toujours que justice se ferait, mais non de son vivant, et justice s'est faite...PERSONNAGES.
COLIN.
COLETTE.
LE DEVIN.
Troupe de jeunes gens du village.N.B.- "On disait de J.-J. Rousseau, C'est un hibou. Oui, dit "quelqu'un, mais c'est celui de Minerve; et quand je sors du Devin du village, j'ajouterais, déniché par les Grâces."
CHAMFORT, Caractères et Anecdotes.On croira difficilement qu'on ait pu avoir l'idée de faire une parodie du Devin du village; c'est ce qui a été fait cependant. En septembre 1753 on représenta sous ce titre, à la Comédie-Italienne, les Amours de Bastien et Bastienne, imprimés dans le tome V du Théâtre de Favart (Paris, 1763), et annoncés être l'ouvrage de madame Favart et de M. Harny. Ce n'est autre chose qu'une suite de vaudevilles et airs populaires offrant toutes les scènes et situations de l'opéra-pastorale, sous le travestissement du patois grossier de nos paysans, substitué au langage régulier que Rousseau fait parler à ses personnages. Dans la première scène Bastienne chante, sur l'air, J'ai perdu mon âne,
J'ons perdu mon ami,
D'puis c'temps-là j'n'avons point dormi.Et deux auteurs ont réuni leurs forces pour cette belle oeuvre! et cela, dit-on, s'est représenté avec grand succès! Que penser d'un public qui pouvait alors accueillir de telles pauvretés? (Note de M. Petitain.)
Ajoutons que, sans faire tort au Devin, la parodie eut un succès mérité. Le public parisien peut être indulgent une fois, ou abusé; mais il ne persiste pas. Il est vrai que madame Favart contribua beaucoup au succès de la pièce. Mais cette circonstance suffirait pour justifier ce public (comme Valérie sous nos yeux ), s'il n'y avait pas eu d'autres motifs de succès. (Note de M. Musset-Pathay.)
LE DEVIN DU VILLAGE.
(Note 1)Le théâtre représente d'un côté la maison du Devin; de l'autre,
des arbres et des fontaines; et dans le fond, un hameau.SCENE I.
COLETTE, soupirant, et s'essuyant les yeux de son tablier.
J'ai perdu tout mon bonheur;
J'ai perdu mon serviteur;
Colin me délaisse.Hélas! il a pu changer!
Je voudrais n'y plus songer:
J'y songe sans cesse.J'ai perdu mon serviteur;
J'ai perdu tout mon bonheur;
Colin me délaisse.Il m'aimait autrefois, et ce fut mon malheur.
Mais quelle est donc celle qu'il me préfère?
Elle est donc bien charmante! Imprudente bergère!Ne crains-tu point les maux que j'éprouve en ce jour?
Colin m'a pu changer; tu peux avoir ton tour.Que me sert d'y rêver sans cesse?
Rien ne peut guérir mon amour,
Et tout augmente ma tristesse.J'ai perdu mon serviteur;
J'ai perdu tout mon bonheur;
Colin me délaisse.Je veux le haïr... je le dois...
Peut-être il m'aime encore... Pourquoi me fuir sans cesse?
Il me cherchait tant autrefois!Le Devin du canton fait ici sa demeure;
Il sait tout; il saura le sort de mon amour:
Je le vois, et je veux m'éclaircir en ce jour.SCENE II.
LE DEVIN, COLETTE.
(Tandis que le Devin s'avance gravement, Colette compte dans sa main de la monnaie, puis elle la plie dans un papier, et la présente au Devin, après avoir un peu hésité à l'aborder.)
COLETTE, d'un air timide.
Perdrai-je Colin sans retour?
Dites-moi s'il faut que je meure.LE DEVIN, gravement.
Je lis dans votre coeur, et j'ai lu dans le sien.
COLETTE.
O dieux!
LE DEVIN.
Modérez-vous.
COLETTE.
Eh bien?
Colin...LE DEVIN.
Vous est infidèle.
COLETTE.
Je me meurs.
LE DEVIN.
Et pourtant il vous aime toujours.
COLETTE, vivement.
Que dites-vous?
LE DEVIN.
Plus adroite et moins belle,
La dame de ces lieux...COLETTE.
Il me quitte pour elle!
LE DEVIN.
Je vous l'ai déjà dit, il vous aime toujours.
COLETTE, tristement.
Et toujours il me fuit!
LE DEVIN.
Comptez sur mon secours.
Je prétends à vos pieds ramener le volage.
Colin veut être brave, il aime à se parer:
Sa vanité vous a fait un outrage
Que son amour doit réparer.COLETTE.
Si des galants de la ville
J'eusse écouté les discours,
Ah! qu'il m'eût été facile
De former d'autres amours!Mise en riche demoiselle,
Je brillerais tous les jours;
De rubans et de dentelle
Je chargerais mes atours.Pour l'amour de l'infidèle
J'ai refusé mon bonheur;
J'aimais mieux être moins belle
Et lui conserver mon coeur.LE DEVIN.
Je vous rendrai le sien, ce sera mon ouvrage.
Vous, à le mieux garder appliquez tous vos soins;
Pour vous faire aimer davantage,
Feignez d'aimer un peu moins.L'amour croît, s'il s'inquiète;
Il s'endort, s'il est content:
La bergère un peu coquette
Rend le berger plus constant.COLETTE.
A vos sages leçons Colette s'abandonne.
LE DEVIN.
Avec Colin prenez un autre ton.
COLETTE.
Je feindrai d'imiter l'exemple qu'il me donne.
LE DEVIN.
Ne l'imitez pas tout de bon;
Mais qu'il ne puisse le connaître.
Mon art m'apprend qu'il va paraître;
Je vous appellerai quand il en sera temps.SCENE III.
LE DEVIN.
J'ai tout su de Colin, et ces pauvres enfants
Admirent tous les deux la science profonde
Qui me fait deviner tout ce qu'ils m'ont appris.
Leur amour à propos en ce jour me seconde;
En les rendant heureux, il faut que je confonde
De la dame du lieu les airs et les mépris.SCENE IV.
LE DEVIN, COLIN.
COLIN.
L'amour et vos leçons m'ont enfin rendu sage,
Je préfère Colette à des biens superflus:
Je sus lui plaire en habit de village,
Sous un habit doré qu'obtiendrais-je de plus?LE DEVIN.
Colin, il n'est plus temps, et Colette t'oublie.
COLIN.
Elle m'oublie, ô ciel! Colette a pu changer!
LE DEVIN.
Elle est femme, jeune et jolie;
Manquerait-elle à se venger?COLIN.
Non, Colette n'est point trompeuse,
Elle m'a promis sa foi:
Peut-elle être l'amoureuse
D'un autre berger que moi?LE DEVIN.
Ce n'est point un berger qu'elle préfère à toi,
C'est un beau monsieur de la ville.COLIN.
Qui vous l'a dit?
LE DEVIN, avec emphase.
Mon art.
COLIN.
Je n'en saurais douter.
Hélas qu'il va m'en coûter
Pour avoir été trop facile (Note 2)!
Aurais-je donc perdu Colette sans retour?LE DEVIN.
On sert mal à la fois la fortune et l'amour.
D'être si beau garçon quelquefois il en coûte.COLIN.
De grâce, apprenez-moi le moyen d'éviter
Le coup affreux que je redoute.LE DEVIN.
Laisse-moi seul un moment consulter.
(Le Devin tire de sa poche un livre de grimoire et un petit bâton de Jacob, avec lesquels il fait un charme. De jeunes paysannes, qui venaient le consulter, laissent tomber leurs présents, et se sauvent tout effrayées en voyant ses contorsions.)
Le charme est fait. Colette en ce lieu va se rendre.
Il faut ici l'attendre.COLIN.
A l'apaiser pourrai-je parvenir?
Hélas! voudra-t-elle m'entendre?LE DEVIN.
Avec un coeur fidèle et tendre
On a droit de tout obtenir.
(à part.)
Sur ce qu'elle doit dire allons la prévenir.SCENE V.
COLIN.
Je vais revoir ma charmante maîtresse.
Adieu, châteaux, grandeurs, richesse,
Votre éclat ne me tente plus.
Si mes pleurs, mes soins assidus,
Peuvent toucher ce que j'adore,
Je vous verrai renaître encore,
Doux moments que j'ai perdus.Quand on sait aimer et plaire,
A-t-on besoin d'autre bien?
Rends-moi ton coeur, ma bergère,
Colin t'a rendu le sien.
Mon chalumeau, ma houlette,
Soyez mes seules grandeurs;
Ma parure est ma Colette,
Mes trésors sont ses faveurs.Que de seigneurs d'importance
Voudraient bien avoir sa foi!
Malgré toute leur puissance,
Ils sont moins heureux que moi.SCENE VI.
COLIN; COLETTE, parée.
COLIN, à part.
Je l'aperçois... Je tremble en m'offrant à sa vue...
... Sauvons-nous... Je la perds si je fuis...COLETTE, à part.
Il me voit... Que je suis émue!
Le coeur me bat...COLIN.
Je ne sais où j'en suis.
COLETTE.
Trop près, sans y songer, je me suis approchée.
COLIN.
Je ne puis m'en dédire, il la faut aborder.
(à Colette d'un ton radouci, et d'un air moitié riant, moitié embarrassé.)
Ma Colette...êtes-vous fâchée?
Je suis Colin, daignez me regarder.COLETTE, osant à peine jeter les yeux sur lui.
Colin m'aimait, Colin m'était fidèle:
Je vous regarde, et ne vois plus Colin.COLIN.
Mon coeur n'a point changé; mon erreur trop cruelle
Venait d'un sort jeté par quelque esprit malin:
Le Devin l'a détruit; je suis, malgré l'envie,
Toujours Colin, toujours plus amoureux.COLETTE.
Par un sort à mon tour je me sens poursuivie.
Le Devin n'y peut rien.COLIN.
Que je suis malheureux!
COLETTE.
D'un amant plus constant...
COLIN.
Ah! de ma mort suivie
Votre infidélité...COLETTE.
Vos soins sont superflus;
Non, Colin, je ne t'aime plus.COLIN.
Ta foi ne m'est point ravie;
Non, consulte mieux ton coeur:
Toi-même en m'ôtant la vie,
Tu perdrais tout ton bonheur.COLETTE.
(à part.) (à Colin.)
Hélas! Non, vous m'avez trahie,
Vos soins sont superflus:
Non, Colin, je ne t'aime plus.COLIN.
C'en est donc fait; vous voulez que je meure;
Et je vais pour jamais m'éloigner du hameau.COLETTE, rappelant Colin qui s'éloigne lentement.
Colin!
COLIN.
Quoi?
COLETTE.
Tu me fuis?
COLIN.
Faut-il que je demeure
Pour vous voir un amant nouveau?DUO.
COLETTE.
Tant qu'à mon Colin j'ai su plaire,
Mon sort comblait mes désirs.COLIN.
Quand je plaisais à ma bergère,
Je vivais dans les plaisirs.COLETTE.
Depuis que son coeur me méprise,
Un autre a gagné le mien.COLIN.
Après le doux noeud qu'elle brise,
Serait-il un autre bien?
(d'un ton pénétré.)
Ma Colette se dégage!COLETTE.
Je crains un amant volage.
(Ensemble.)
Je me dégage à mon tour.
Mon coeur, devenu paisible,
Oubliera, s'il est possible,
{
cher
Que tu lui fus
un jour.
chère
COLIN.
Quelque bonheur qu'on me promette
Dans les noeuds qui me sont offerts,
J'eusse encor préféré Colette
A tous les biens de l'univers.COLETTE.
Quoiqu'un seigneur jeune, aimable,
Me parle aujourd'hui d'amour,
Colin m'eût semblé préférable
A tout l'éclat de la cour.COLIN, tendrement.
Ah! Colette!
COLETTE, avec un soupir.
Ah! berger volage,
Faut-il t'aimer malgré moi!(Colin se jette aux pieds de Colette; elle lui fait remarquer à son
chapeau un ruban fort riche qu'il a reçu de la dame. Colin le jette
avec dédain. Colette lui en donne un plus simple dont elle était
parée, et qu'il reçoit avec transport.)(Ensemble.)
{
je t'engage
A jamais Colin
t'engage
{
Mon
{
ma
coeur et
foi.
Son
sa
Qu'un doux mariage
M'unisse avec toi.
Aimons toujours sans partage;
Que l'amour soit notre loi.
A jamais, etc.SCENE VII.
LE DEVIN, COLIN, COLETTE.
LE DEVIN.
Je vous ai délivrés d'un cruel maléfice!
Vous vous aimez encor malgré les envieux.COLIN.
(Ils offrent chacun un présent au Devin.)
Quel don pourrait jamais payer un tel service!LE DEVIN, recevant des deux mains.
Je suis assez payé si vous êtes heureux.
Venez, jeunes garçons, venez, aimables filles,
Rassemblez-vous, venez les imiter;
Venez, galants bergers, venez, beautés gentilles,
En chantant leur bonheur apprendre à le goûter.SCENE VIII.
LE DEVIN, COLIN, COLETTE, garçons
ET FILLES DU VILLAGE.CHOEUR.
Colin revient à sa bergère;
Célébrons un retour si beau.
Que leur amitié sincère
Soit un charme toujours nouveau.
Du Devin de notre village
Chantons le pouvoir éclatant:
Il ramène un amant volage,
Et le rend heureux et constant.
(On danse.)ROMANCE.
COLIN.
Dans ma cabane obscure
Toujours soucis nouveaux;
Vent, soleil, ou froidure,
Toujours peine et travaux.
Colette, ma bergère,
Si tu viens l'habiter,
Colin dans sa chaumière
N'a rien à regretter.Des champs, de la prairie,
Retournant chaque soir,
Chaque soir plus chérie,
Je viendrai te revoir:
Du soleil dans nos plaines
Devançant le retour,
Je charmerai mes peines
En chantant notre amour.
(On danse une pantomime.)LE DEVIN.
Il faut tous à l'envi
Nous signaler ici:
Si je ne puis sauter ainsi,
Je dirai pour ma part une chanson nouvelle.
(Il tire une chanson de sa poche.)I.
L'art à l'Amour est favorable,
Et sans art l'Amour sait charmer;
A la ville on est plus aimable,
Au village on sait mieux aimer.
Ah! pour l'ordinaire,
L'Amour ne sait guère
Ce qu'il permet, ce qu'il défend;
C'est un enfant, c'est un enfant.COLIN, avec le choeur, répète le refrain.
Ah! pour l'ordinaire,
L'Amour ne sait guère
Ce qu'il permet, ce qu'il défend;
C'est un enfant, c'est un enfant.
(regardant la chanson.)
Elle a d'autres couplets! je la trouve assez belle.COLETTE, avec empressement.
Voyons, voyons; nous chanterons aussi.
(Elle prend la chanson.)II.
Ici de la simple nature
L'amour suit la naïveté;
En d'autres lieux, de la parure
Il cherche l'éclat emprunté.
Ah! Pour l'ordinaire,
L'amour ne sait guère
Ce qu'il permet, ce qu'il défend;
C'est un enfant, c'est un enfant.CHOEUR.
C'est un enfant, c'est un enfant.
COLIN.
III.
Souvent une flamme chérie
Est celle d'un coeur ingénu;
Souvent par la coquetterie
Un coeur volage est retenu.
Ah! pour l'ordinaire, etc.
(A la fin de chaque couplet le choeur répète ce vers:)
C'est un enfant, c'est un enfant.LE DEVIN.
IV.
L'amour, selon sa fantaisie,
Ordonne et dispose de nous;
Ce dieu permet la jalousie,
Et ce dieu punit les jaloux.
Ah! pour l'ordinaire, etc.COLIN.
V.
A voltiger de belle en belle,
On perd souvent l'heureux instant,
Souvent un berger trop fidèle
Est moins aimé qu'un inconstant.
Ah! pour l'ordinaire, etc.COLETTE.
VI.
A son caprice on est en butte,
Il veut les ris, il veut les pleurs;
Par les... par les...COLIN, lui aidant à lire.
Par les rigueurs on le rebute.
COLETTE.
On l'affaiblit par les faveurs.
(Ensemble.)
Ah! Pour l'ordinaire,
L'Amour ne sait guère
Ce qu'il permet, ce qu'il défend;
C'est un enfant, c'est un enfant.CHOEUR.
C'est un enfant, c'est un enfant.
(On danse.)COLETTE.
Avec l'objet de mes amours,
Rien ne m'afflige, tout m'enchante;
Sans cesse il rit, toujours je chante:
C'est une chaîne d'heureux jours.
Quand on sait bien aimer, que la vie est charmante!
Tel, au milieu des fleurs qui brillent sur son cours,
Un doux ruisseau coule et serpente.
Quand on sait bien aimer, que la vie est charmante!
(On danse.)COLETTE.
Allons danser sous les ormeaux,
Animez-vous, jeunes fillettes:
Allons danser sous les ormeaux,
Galants, prenez vos chalumeaux.
(Les villageois répètent ces quatre vers.)COLETTE.
Répétons mille chansonnettes;
Et, pour avoir le coeur joyeux,
Dansons avec nos amoureux;
Mais n'y restons jamais seulettes.
Allons danser sous les ormeaux, etc.LES VILLAGEOISES.
Allons danser sous les ormeaux, etc.
COLETTE.
A la ville on fait bien plus de fracas;
Mais sont-ils aussi gais dans leurs ébats?
Toujours contents,
Toujours chantants;
Beauté sans fard,
Plaisir sans art:
Tous leurs concerts valent-ils nos musettes?
Allons danser sous les ormeaux, etc.LES VILLAGEOISES.
Allons danser sous les ormeaux, etc.
FIN DU DEVIN DU VILLAGE
NOTES
Note 1: Voyez sur cette pastorale beaucoup de détails et d'anecdotes, Histoire de J.-J. Rousseau, tome II, page 441.
Note 2: On lit dans l'édition de Genève, et dans toutes celles qui ont été faites postérieurement sans exception,
Pour avoir été trop facile
A m'en laisser conter par les dames de cour!
mais ce dernier vers n'est dans aucune édition antérieure, à partir de l'édition originale de 1753; il n'est point dans la partition gravée en 1754; enfin, il n'est point dans le manuscrit autographe de cette partition déposé à la bibliothèque de la Chambre des Députés. Voilà bien assez de raisons pour décider la suppression de ce vers, quelle que soit la cause de son insertion dans l'édition de Genève qui fait autorité en tant d'autres points.
Avec nos remerciements à Monsieur Charles-Ferdinand Wirz, Conservateur de l'Institut et Musée Voltaire et Secrétaire de la Société Jean-Jacques Rousseau, pour son aide dans la recherche de documents.
Ce texte a été dactylographié et révisé grâce à l'aide de: Vania Ferreira, François Forest, Joelle Debecker, Robin Majeur, Angela Gonzalez, Karthik Naganathan, Daniel Muller, Dina Wahba, Christian Garcia, Hayan Kam Nakache, Krystel Ridoutt, Laetitia Sartorelli.