LETTRE IV.
ZEPHIS A USBEK.
A Erzeron.
Enfin ce monstre noir a résolu de me désespérer. Il veut à toute force m'ôter mon esclave Zélide, Zélide qui me sert avec tant d'affection, et dont les adroites mains portent partout les ornements et les grâces; il ne lui suffit pas que cette séparation soit douloureuse, il veut encore qu'elle soit déshonorante. Le traître veut regarder comme criminels les motifs de ma confiance; et parce qu'il s'ennuie derrière la porte, où je le renvoie toujours, il ose supposer qu'il a entendu ou vu des choses, que je ne sais même pas imaginer. Je suis bien malheureuse! Ma retraite, ni ma vertu, ne sauraient me mettre à l'abri de ses soupçons extravagants: un vil esclave vient m'attaquer jusque dans ton coeur, il faut que je m'y défende! Non, j'ai trop de respect pour moi-même pour descendre jusqu'à des justifications: je ne veux d'autre garant de ma conduite que toi-même, que ton amour, que le mien, et, s'il faut te le dire, cher Usbek, que mes larmes.
Du sérail de Fatmé, le 29 de la lune de Maharram, 1711.