LETTRE V.
RUSTAN A USBEK.
A Erzeron.
Tu es le sujet de toutes les conversations d'Ispahan; on ne parle que de ton départ: les uns l'attribuent à une légèreté d'esprit, les autres à quelque chagrin; tes amis seuls te défendent, et ils ne persuadent personne. On ne peut comprendre que tu puisses quitter tes femmes, tes parents, tes amis, ta patrie, pour aller dans des climats inconnus aux Persans. La mère de Rica est inconsolable; elle te demande son fils, que tu lui as, dit-elle, enlevé. Pour moi, mon cher Usbek, je me sens naturellement porté à approuver tout ce que tu fais: mais je ne saurais te pardonner ton absence; et, quelques raisons que tu m'en puisses donner, mon coeur ne les goûtera jamais. Adieu. Aime-moi toujours.
D'Ispahan, le 28 de la lune de Rebiab 1, 1711.