XII - Comment objets de dehors agissent contre les organes des sens.
Il reste encore ici à savoir les causes qui font que les esprits ne coulent pas toujours du cerveau dans les muscles en même façon, et qu'il en vient quelquefois plus vers les uns que vers les autres. Car, outre l'action de l'âme, qui véritablement est en nous l'une de ces causes, ainsi que je dirai ci-après, il y en a encore deux autres qui ne dépendent que du corps, lesquelles il est besoin de remarquer. La première consiste en la diversité des mouvements qui sont excités dans les organes des sens par leurs objets, laquelle j'ai déjà expliquée assez amplement en la Dioptrique; mais afin que ceux qui verront cet écrit n'aient pas besoin d'en avoir lu d'autres, je répéterai ici qu'il y a trois choses à considérer dans les nerfs, à savoir: leur moëlle ou substance intérieure, qui s'étend en forme de petits filets depuis le cerveau, d'où elle prend son origine, jusques aux extrémités des autres membres auxquelles ces filets sont attachés; puis les peaux qui les environnent, et qui, étant contiguës avec celles qui enveloppent le cerveau, composent de petits tuyaux dans lesquels ces petits filets sont enfermés; puis enfin les esprits animaux, qui, étant portés par ces mêmes tuyaux depuis le cerveau jusqu'aux muscles, sont cause que ces filets y demeurent entièrement libres et étendus, en telle sorte que la moindre chose qui meut la partie du corps où l'extrémité de quelqu'un d'eux est attachée fait mouvoir par même moyen la partie du cerveau d'où il vient, en même façon que lorsqu'on tire un des bouts d'une corde on fait mouvoir l'autre.